**** *creator_biancolleli *book_biancolleli_enfantstrouves *style_verse *genre_parodie *dist1_biancolleli_verse_parodie_enfantstrouves *dist2_biancolleli_verse_parodie *id_TEMIRE *date_1732 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_temire Le Sérail aujourd'hui fait ma félicité. Chez les Mahométans dès l'enfance enfermée, À leur façon d'agir ils m'ont accoutumée. Tout le monde en convient, le Roi de Tripoli Est, malgré sa moustache, un Seigneur très poli. Tu sais qu'il est gascon, Peut-être sa promesse a passé sa puissance. Des fils de la Garonne on connaît l'opulence : À tenir peu soigneux, à promettre hardis, Ils croient tout certain quand ils ont dit : Sandìs. Il n'y faut plus penser. Que serait un peu tard qu'il prouverait son zèle, Et j'ai trop réfléchi depuis que je l'attends... Fatime, il n'est plus temps : Je suis l'unique objet des voeux de Diaphane, Il m'adore... je vois que ton coeur me condamne ; Mais ce discret Sultan agit d'une façon À mettre mon honneur à l'abri du soupçon ; Garde-toi de penser qu'il offre à ma tendresse, L'honneur déshonorant du nom de sa maîtresse, Et que ma modestie accepte en rougissant La faveur d'un mouchoir que l'on jette en passant ; De ses intentions la pureté l'engage À ne me rechercher que pour le mariage : Tu verras sur son coeur, jusqu'où va mon pouvoir, Je n'ai qu'à dire un mot, il m'épouse ce soir. Ma foi, s'il m'en souvient, il ne m'en souvient guère, J'étais trop jeune alors pour m'en ressouvenir, Et tu perdais ton temps à m'en entretenir. Je n'ai devant les yeux que ce Sultan aimable, Je servais, il me place en un rang honorable ; Mon coeur est né sensible, et ne peut résister Aux discours d'un amant dont l'aspect sait flatter. Son bras s'est signalé par plus d'une conquête, Il a le front serein, les yeux à fleur de tête, Il a la voix sonore, et l'air majestueux, Il parcourt le sérail d'un pas tumultueux ; Après tant d'agréments qu'on voit en sa personne, Te parlerai-je aussi du sceptre qu'il me donne ? Non, l'éclat de se rang n'éblouit point mes yeux, Un coeur fait pour l'amour n'est point ambitieux : Oui, si le ciel aux fers eut condamné sa vie, Si l'Afrique à mes lois se voyait asservie, Ou mon amour me trompe, ou Temire aujourd'hui Pour l'élever à soi descendrait jusqu'à lui. Absent depuis deux jours, on l'attend aujourd'hui. Oui Seigneur, je ne veux rien de plus, Voilà de quoi fixer des voeux irrésolus ; Et si vous n'aspirez qu'à des ardeurs parfaites, Jamais Sultan ne fut plus heureux que vous l'êtes. Oh Ciel ! Pourquoi le retenir ? Seigneur, je fuis confuse, et ne sais que vous dire : Vous croyez de ces lieux partir avec Temire, Mais comme de l'amour mon coeur subit la loi, Vous voyez clairement qu'il faut partir sans moi ; Cependant, Carabin, comptez qu'en votre absence, J'aurai pour les Français beaucoup de déférence : Sur l'esprit du Sultan si j'ai quelque pouvoir, Pour soulager leurs maux, je le ferai valoir : Je deviendrai leur mère auprès de Diaphane. C'est à ce cavalier, dont l'entreprise heureuse Excite du Sultan la pitié généreuse ; Pour votre délivrance il offrait un grand prix ; Mais le Roi n'en veut point et vous partez gratis. Il est vrai ; je ne puis concevoir ce mystère, Suivant ce qu'on m'a dit, votre province entière Aurait peine à payer une telle rançon. Qu'entends je ? J'en ai dix-huit. Quoi,vous êtes mon père, et dans cet équipage... Je ne puis vous tromper, l'amoureux Diaphane Dans une heure au plus tard doit me faire Sultane. Oui mon père, je sens ma vertu revenir, Vous parlez si longtemps qu'on ne peut y tenir. Non, vous devez compter sur mon obéissance, Et je veux suivre en tout les coutumes de France ; Daignez-m'en éclaircir , car je prétends savoir Pourquoi je m'écartais ainsi de mon devoir, Et pourquoi cet hymen est au nombre des crimes ? Expliquez-les moi-donc... Ah ! Cruel poursuivez, vous ne connaissez pas Mon secret, mes tourments, mes voeux, mes attentats. Voici le fait : je suis retenue en ces lieux, Le Sultan est frappé de l'éclat de mes yeux , Il est, vous le savez, maître de ma personne, Et l'on doit l'épouser aussitôt qu'il ordonne ; Mais, me voyant forcée à suivre son désir, Si mon coeur y cédait avec quelque plaisir ? Frappe-donc,car je l'aime. Arrête, mon cher frère, arrête, et connais moi, Peut-être que Temire est digne encor de toi? Du pouvoir de l'amour la vertu me délivre : Fais-moi sortir d'ici ; je suis prête à te suivre. Ah ! mon cher Diaphane il faut donc te quitter ! Que de pleurs ce départ à mes yeux va coûter ; Pardonne, ton courroux, mon père, ma tendresse, Mes serments, mon devoir, mes remords,ma faiblesse, Mon trouble, ma douleur, mes chagrins, mon ennui... Oui, je te le promets, Mon frère rends-moi libre, à tout je me soumets. Mais tu devrais du moins aller voir notre père ; Nous le laissons mourir d'une étrange manière. Me voila seule, hélas ! Que vais-je devenir ? II faut avec moi-même ici m'entretenir : Examinons-nous bien, voyons de quelle espèce Doit me rendre aujourd'hui l'honneur ou la faiblesse. Suis-je Turque, ou Française ? Hélas ! Je n'en sais rien, Et mon état présent ne se conçoit pas bien, Suivrai-je mon devoir, ou m'en écarterai-je ? N'épouserai-je pas, ou bien épouserai-je ? Que dis-je ? Ai-je oublié les serments que j'ai faits ?I Mon père, mon pays, vous serez satisfaits. Plus je veux l'étouffer, plus mon feu se rallume ; J'aime toujours, malgré la France et sa coutume. Ah ! Puisque tu devais m'épouser dès ce soir, Pourquoi m'apprenait-on aujourd'hui mon devoir ! Frère trop rigoureux, du moins pour me rapprendre Jusqu'à demain matin tu devais bien attendre ? À ces apprêts flatteurs pourrais-je résister ? II le faut bien pourtant. Où me cacher. Je n'ose. Non Seigneur. Pour cause. Non, ce n'est point cela, vous vous trompez, Seigneur. Ciel ! Cet hyménée Par son éclat pompeux ne n'a point étonnée ; Je n'ai point recherché les biens et les grandeurs, Un plus noble intérêt fit naître mes ardeurs : Mon coeur tendre et sincère aux trônes de l'Afrique, Eût préféré l'abri du toit le plus rustique : Seule, et dans ces déserts auprès de mon époux... D'accord, mais Carabin.... Alcidor va mourir... Cet hymen dont l'idée à mon coeur est si chère, Cet hymen si charmant, souffrez qu'on le diffère. Je frémis de son emportement. Il m'est affreux, Seigneur, de vous déplaire, Laissez-moi vous quitter, je ne saurais mieux faire. Je les dirai tantôt. Ma vertu ne saurait tenir contre mes larmes, Et l'amour sur l'honneur prend toujours le dessus ; Est-il bien assuré que vous ne m'aimiez plus, Seigneur ? Seigneur qui ne rirait de tout ce badinage ? De mon incertitude et de voue langage ? Moi coquette, Seigneur ! Et vous m'en soupçonnez ? Non, non, au simple amour tous mes voeux sont bornés. J'en aurais grande envie ; Mais... Ah ! Seigneur... Souffrez qu'à vos genoux Je demande en tremblant une grâce de vous ? Permettez que je sorte. Demain tous mes secrets vous seront révélés. J'exige ce délai de votre complaisance. En me parlant ainsi vous me percez le coeur. Oui Seigneur. Est-ce ici le chemin ? Est-ce vous Carabin ? Que vois-je ? Le Sultan... C'est que je vous aimais, et voulais me sauver. La coutume de France Me l'ordonnait, Seigneur. **** *creator_biancolleli *book_biancolleli_enfantstrouves *style_verse *genre_parodie *dist1_biancolleli_verse_parodie_enfantstrouves *dist2_biancolleli_verse_parodie *id_FATIME *date_1732 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_fatime Je ne m'attendis pas, jeune et belle Thémire, Vous qui pleuriez toujours, à vous voir jamais rire ! Quoi ! Vous ne tournez plus les yeux vers ces climats, Où ce vaillant Français devait guider nos pas ? Vous ne me parlez plus des plaisirs que la France Permet a notre sexe avec tant de licence ? Vous ne l'ignorez point, c'est là que les maris, Vivent d'intelligence avec les favoris, Que la femme, y bravant la contrainte fatale, Est prude avec renom, coquette sans scandale. Ne soupirez-vous plus pour cette liberté ? Mais ce jeune officier va donc perdre sa peine ? Lui qu'on a vu partir pour briser notre chaîne, Qui reviendra bientôt payer notre rançon, Qui nous l'a tant promis. Mais s'il était fidèle ? Quel est-donc ce discours ? Que vos félicités, s'il se peut, soient parfaites. Je voudrais bien me voir à la place où vous êtes... Mais ce coeur qui se livre à de si doux transports, En épousant un Turc nVt-il point de remords ? Carabin vous a dit cent fois par la fenêtre Que le sang d'un Français, vous avait donné l'être ; Que vous et vos parents, dans un combat fatal Aviez subi le joug d'un corsaire brutal ; Ne vous souvient-il plus que dans une galère... Il le faut avouer, cette pensée est belle, Mais convenez aussi qu'elle n'est pas nouvelle. La grande porte s'ouvre, et sans doute c'est lui. Oui, Madame, courage ; Carabin va venir. **** *creator_biancolleli *book_biancolleli_enfantstrouves *style_verse *genre_parodie *dist1_biancolleli_verse_parodie_enfantstrouves *dist2_biancolleli_verse_parodie *id_DIAPHANE *date_1732 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_diaphane Madame, un long discours me serait nécessaire, Pour dire comment j'aime, et comment je veux plaire : Je vous pourrais ici nommer tous mes aïeux, Vous conter leurs exploits, mais ne parlons point d'eux, Et ne retraçons point les illustres misères Qu'éprouvèrent jadis les Sultans mes confrères. Je suis peu leur exemple, et loin de me gêner À mes seuls sentiments je me laisse entraîner. Au sein des voluptés bien loin que je m'endorme, Si je tiens un Sérail ce n'est que pour la forme ; Les lois que dès longtemps suivent les Mahomets, Nous défendent le vin, moi je me le permet ; Tout usage ancien cède à ma politique, Et je suis un Sultan de nouvelle fabrique. Mais parlons de l'amour dont je brûle pour vous ; Je serai votre ami, votre amant, votre époux. J'atteste vos beaux yeux, et l'amour qui m'enflamme De ne prendre que vous pour maîtresse et pour femme, Est-ce assez ? Si vous me dites vrai... que me veux-tu ; Jasmin ? Il peut monter, pourquoi ne vient-il pas ? Oui, c'était autrefois la règle accoutumée, Mais il faut que d'entrer on ait permission Si tu veux qu'au sérail se passe l'action, D'ailleurs à tous venants ma présence est offerte, Chacun me rend visite, et je tiens table ouverte. N'en rachète que neuf, et mets toi du voyage ; Mais ne crois pas me vaincre en générosité, Remporte ton argent, reprends ta liberté, Je puis même au besoin te prêter une somme. Embarque cent captifs que je te rends encor, Mais je veux de ce nombre excepter Alcidor. Sa funeste valeur à nous nuire obstinée N'a que trop parcouru la Méditerranée ; Si je l'affranchissais de mon juste courroux, Il armerait bientôt en course contre nous. Pour Temire, crois-moi, garde-toi de prétendre Que l'or fuisse jamais m'engager à la rendre. Quand l'Univers entier épuisant ses trésors, De ses peuples armés y joindrait les efforts, Ce serait vainement qu'il combattrait pour elle, Rien ne peut m'arracher une esclave si belle. Lorsque je te promis d'accorder ta demande, Ce n'était qu'un enfant, à présent elle est grande : Tu peux partir. Je consens à remplir tes voeux pourvu qu'il meure. Je vous quitte, Temire, adieu pour un moment, Nous nous verrons bientôt dans mon appartement. Je n'y puis plus tenir, Madame paraissez, Venez, venez répondre à mes voeux empressés ; La Mosquée est ornée, et les flambeaux s'allument Le Mufti vous attend, déjà les parfums fument... C'est trop vous arrêter, Venez. Que dites vous ? Vous n'osez ? Et pourquoi donc ? Ah ! Je vois ce que c'est, sans doute la pudeur... Expliquez-vous donc mieux. Quoi ? Hé bien, nous serons seuls, de quoi vous plaignez-vous ? Que dites-vous, Madame ? Qu'auraient-donc de commun Carabin, et ma flamme ? Que m'importe sa mort ? Et quel vif intérêt prenez-vous à son sorts ? Je ne m'attendais pas à pareil compliment, Temire. Temire... Je n'y comprends plus rien, pourquoi partir sitôt ? Dites-moi vos raisons.... Je demeure immobile et ma langue glacée Autant que mon esprit se trouve embarrassée ; La situation pour le coup m'interdit : Que faut-il que je dise, et que m'a-t-elle dit ? Cher Jasmin, quel est-donc ce changement extrême ? Je ne la connais plus, je m'ignore moi-même, Je la laisse échapper ! Pourquoi se dérober à des moments si doux ? Si ce petit Gascon m'avait ravi son coeur... Elle m'en a parlé : quel soupçon ! Quelle horreur! Il n'en faut point douter, le perfide l'adore, Il voulait l'emmener et le désire encore. Quelle honte pour moi, qu'un jeune audacieux. Sur l'objet de ma flamme ose lever les yeux ! Je ne le ferai plus. Elle revient ; mon coeur fais bonne contenance ; Vizir, sois le témoin de mon indifférence. Madame, il fut un temps, mais ce temps-là n'est plus, Et de m'en souvenir je suis même confus ; Il fut un temps, vous dis-je, où mon âme insensée, S'applaudissait du trait dont vous l'aviez blessée. Je croyais être aimé, je devais l'être aussi ; Mais de ne l'être pas je ne prends nul souci, Et je puis en perdant un coeur comme le vôtre, Sans soupirer longtemps, en retrouver un autre : Je m'en flatte du moins ; une autre aura des yeux Qui de ce que je vaux jugeront beaucoup mieux. II pourra m'en coûter, je l'avoue à ma honte, Mais à me consoler cette autre sera prompte ; Et j'aime cent fois mieux briser des noeuds si doux, Que de passer pour sot en soupirant pour vous ; Allez, mes yeux jamais ne rêveront vos charmes. Il est trop vrai que l'honneur me l'ordonne, Que je vous aimai trop, que je vous abandonne : Que mes voeux, que mon coeur, que mes yeux éclairés... Que j'aimai, que je hais... Temire vous riez ? Ne crois pas que mon coeur soit d'accord avec moi, Quand je parle d'aimer un autre objet que toi ; Cesse de t'affliger, adorable Temire, Va, tout ce que j'ai dit ce n'était que pour rire. Mais toi qui refusais la main de ton amant, Était-ce par caprice, ou par raffinement ? L'amour ne veut point d'art quand la fille est jolie, Et je ne hais rien tant que la coquetterie. Hé bien, épousons-nous. Hé bien... Que de cérémonie ! Vous m'impatientez. Et de quoi s'agit-il ? Quoi toujours me quitter, et de la même forte ? Pourquoi pas aujourd'hui ? Qui vous retient ? Parlez. Je saurai la raison qui vous force au silence ; Et l'examinerai. J'attends jusqu'à demain ; Pour un Turc, avouez que je suis trop humain, Tout autre en vous aimant voudrait de votre bouche Apprendre ce secret, qui sans doute me touche. C'est dommage ; adieu donc : vous partez ? Je défie au plus fin d'y pouvoir rien comprendre ; Et voilà de ces coups qui sont faits pour surprendre. Je fuis bien indigné ; mais elle a ses raisons : Je devrais les savoir... faisons trêve aux soupçons. On m'aime, c'est assez, on le dit, on le jure, Une femme n'est pas capable d'imposture ; Un grand coeur à la croire est toujours engagé. Que veux-tu ? Donne, qui le portait ? Lisons... la main me tremble et j'aurai peine à lire. Je vous attends, chère Temire ; Il est vers la Mosquée un sentier très obscur Qui vers le port peut vous conduire ; Si vous vous y rendez note départ est sûr. Qu'en dis-tu, cher Jasmin. Tu vois comme on me traite. Cours chez elle à l'instant, montre-lui ce billet Et perce-la soudain de cent coups de stylet ; Marche-donc, obéis, non, arrête, demeure... Quoi tu n'es pas parti, malheureux ?... Attends ; Ciel ! Que résoudre en un tel embarras ? Je n'en sais rien. La perfide ! Je prétends lui parler ; qu'on la fasse venir. C'est pour finir. Ah ! Ne négligeons pas cet avis important ; Va chercher un esclave intelligent, alerte Qui ne lui dise pas que nous savons ouverte. Oui, Jasmin a raison ; et de cette manière La conduite sera beaucoup plus régulière, Car si je la voyais, il faudrait lui prouver Qu'elle n'est infidèle, et cherche à se sauver, Mais je n'en ferais rien, et n'osant lui répondre, J'oublierais les moyens que j'ai de la confondre, Je connais ma faiblesse, et sans les employer, On me verrait sans fruit encor la renvoyer. Nous les verrons venir, et déjà la nuit sombre Aux furtives amours semble prêter son ombre. Écoute, cher Jasmin, n'entends-tu pas des cris ? Le scélérat, le traître ! Hélas lorsque tout dort, le crime est éveillé. Un Héros peut pleurer une fois en sa vie. Ah ! pour le coup on vient, je ne me trompe pas. Je frissonne, j'enrage, Mais je vais dans son sang éteindre son sortait. L'infidèle ! J'entends encor du bruit, et j'aperçois le traître, La lanterne qu'il tient me le fait reconnaître ; Je vais les immoler à ma juste fureur. Sa soeur ! Ah ! J'allais faire une belle sottise ! Cet éclaircissement m'épargne une méprise. Est-elle bien ta soeur ? Et pourquoi souffrais-tu qu'il osât t'enlever ? Mais par quelles raisons ? Oh quelle extravagance ! Puisqu'un pareil motif avait su te guider, Je suis trop délicat pour vouloir te garder. Moi, dont tu connaissais les vertus, les bontés, Qui n'ai jamais agi que par tes volontés... Ah ! Si dans ton pays tu désirais de vivre, Je t'adorais assez, cruelle, pour t'y suivre, Et changeant tout-à-coup le turban en plumet, J'aurais en petit-maître habillé Mahomet ; Mais je fuis trop piqué. Jasmin, je veux qu'ils partent, Et que de ce rivage à jamais ils s'écartent. Pour que le spectateur se sente remuer, II faut que quelqu'un meure, et je vais me tuer. Hé bien, je me tuerai quand vous serez partis. **** *creator_biancolleli *book_biancolleli_enfantstrouves *style_verse *genre_parodie *dist1_biancolleli_verse_parodie_enfantstrouves *dist2_biancolleli_verse_parodie *id_ALCIDOR *date_1732 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_alcidor J'entends parler Français : Où suis-je, mes amis ? Ma vue est si troublée , Et de tant de malheurs mon âme est accablée,⁎⁎⁎⁎ Que je ne puis, hélas ! Parler, marcher, ni voir. Suis-je libre en effet ? À qui dois-je un bonheur que je n'espérais plus ? Des Chevaliers gascons je reconnais l'ardeur, S'ils n'ont pas de grands biens ils ont tous de l'honneur. Oh sort ! Dont la faveur me rend à la lumière, Que ne peux-tu la rendre à ma famille entière ? Deux enfants me sent morts, il m'en reste encore deux : Ne me direz-vous point quelque nouvelle d'eux ? J'avais un beau garçon, une plus belle fille, Qui devait faire un jour l'honneur de ma famille ; Mais qui dans le Sérail, recueil de la pudeur, Peut-être en ce moment en fait le déshonneur. Mon fils fut fait esclave, et sa soeur plus petite Au sérail avec lui par les Turcs fut conduite. Ce minois, cet air vif et coquet, De ma défunte femme est le vivant portrait : Même, à ce que je crois, ce garçon me ressemble. Dans quel temps, s'il vous plaît, fûtes-vous pris ensemble ? Je ne prétends ici rien décider en l'air ; Surtout en fait d'enfants on ne peut voir trop clair. Époque trop heureuse, et qui me comble d'aise ; Et quel âge avez-vous à présent ? Et vous ? Baisez-moi, mes enfants. Et pourquoi ? N'as-tu pas dans le sein la blessure fâcheuse Que te fit à mes yeux une main furieuse ? Ah je n'en puis douter, Vous êtes mes enfants, j'ose vous l'attester. Mon fils, cher héritier... J'en ai beaucoup en France. Je vous revois enfin, famille si chérie, Que je vais ramener au sein de ma patrie ! Mais d'un soupçon fatal mes sens sont agités, Je crains de dévoiler d'affreuses vérités ; Quand je songe en quels lieux je la vois retenue> Je n'ose sur ma fille encor jeter la vue. Oh ! Jour qui me la rends, comment me la rends-tu ? Tu pleures ? Je t'entends, tu n'as plus de vertu. Que la foudre en éclats ne tombe point sur moi, Car je ne vois ici de coupables que toi. Vivre dans un Sérail ! Ah fille déloyale, Ne comptes-tu pour rien le mépris, le scandale ? Ose-tu sens rougir t'applaudir de ce choix, Et former un hymen que condamnent nos loix ? MaisJe te vois pleurer, ma fille, c'est bon signe, Ce vertueux retour de ton sang te rend digne. Ouï je m'en aperçois, déjà je perds haleine, Je vais m'évanouir, vite qu'on me ramène. Ah ! Malgré nos efforts, qu'en ce siècle malin Fille mal aisément reprend le bon chemin ! **** *creator_biancolleli *book_biancolleli_enfantstrouves *style_verse *genre_parodie *dist1_biancolleli_verse_parodie_enfantstrouves *dist2_biancolleli_verse_parodie *id_JASMIN *date_1732 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_jasmin Dans la première cour, un nommé Carabin, Qui sur sa foi gasconne a passé dans la France, Attend pour vous parler, et demande audience. Au bas de l'escalier on arrête ses pas, Vous savez que toujours votre porte est fermée. Que ne l'arrêtiez-vous ? Ayez-vous oublié les grimaces des filles ? Elles se font valoir quand elles sont gentilles. Preniez-vous ce Gascon, Seigneur, pour une bête ? Vous les avez laissés ensemble tête à tête. Vous aurez bien raison ; Ah ! Que la prévoyance est ici de saison : Mais il doit revenir. Qu'il revienne, le traître... Qu'on l'assomme à l'instant s'il ose reparaître. Excuse les transports de ce coeur offensé : Je suis un étourdi, j'ai le cerveau blessé ; Mais je sais quelques fois agir avec prudence, Et ne puis accuser Temire d'inconstance. Non, son coeur n'est point fait pour une trahison, Ni le mien pour sentir l'atteinte d'un soupçon. Ne crois pas cependant qu'un Sultan s'avilisse, À se voir le jouet d'un amoureux caprice ; À souffrir des rebuts, dérober des faveurs, Combattre des mépris, respecter des rigueurs : Je veux même oublier qu'une fois en ma vie, J'eus d'aimer constamment la ridicule envie. Que désormais à tous le Sérail soit fermé Et que tout rentre ici dans l'ordre accoutumé. Par ma foi le Sultan n'a guère voyagé. Je n'en dis rien de bon ; On se moque de vous d'une étrange façon. Ô trahison horrible ! Tromper un si bonhomme, hélas est-il possible ! Tout à l'heure. Hé bien, Seigneur, irai-je, ou bien n'irai-je pas ? Ni moi. L'ingrate ! D'être aimé constamment, en vain l'homme se flatte. Encor un entretien, Seigneur ? Finissez sans cela ; vous savez que la belle Ne conviendra jamais qu'elle soit infidèle ; Épargnez-vous l'ennui d'un éclaircissement ; L'Amant y fait le sot, la fille y pleure, et ment. Attendez... il me vient une belle pensée : II faut que cette lettre à Temire adressée En ces perfides mains soit remise à l'instant. Bagatelle, je vais la lui faire porter Et je prendrai le sein de la recacheter. Seigneur, l'affaire est faite, et ma course est heureuse, Le billet est rendu par certaine coiffeuse ; Temire a fait réponse, et d'un air aigre-doux Au Gascon, dans ces lieux a donné rendez-vous. Ils iront doucement de peur d'être surpris ; Fille que l'on enlève, et qui consent à l'être, N'a garde de crier. Tout dort, et votre esprit de soupçons travaillé... Quoi, Seigneur, de pleurer vous faites la folie ? Oui, vous avez raison, on marche à petits pas. Pour moi, je me cache... est-ce fait ? C'est fort bien fait, Seigneur ; renvoyez la matoise, Qu'elle fasse à Paris l'amour à la Française. **** *creator_biancolleli *book_biancolleli_enfantstrouves *style_verse *genre_parodie *dist1_biancolleli_verse_parodie_enfantstrouves *dist2_biancolleli_verse_parodie *id_CARABIN *date_1732 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_carabin Respectable ennemi, que j'estime beaucoup, Hé donc, je viens tenir parole. Pour le coup J'ai de l'argent comptant, que j'apporte de France ; Allons sans différer qu'on me fasse quittance. À ne te pas mentir pour trouver cet argent, II fallait être heureux autant que diligent : Grâce au Ciel, c'en est fait, et la somme est complète. Commence par lâcher la fille et la soubrette, Nous choisirons après dix autres prisonniers : Quant à moi je demeure, étant court de deniers, Qu'ils partent sur le champ, je resterai pour gage. Cadedis, pour un Turc vous êtes honnête homme ! Qu'entends-je ! Est-ce la mode en ce maudit pays De manquer de parole après avoir promis ? D'accord ; mais avant mon départ Ne me refusez pas ce malheureux vieillard. II ne vivra qu'une heure. Que vous auriez d'honneur si vous n'étiez Sultane ! Mais quel est ce vieillard qui paraît aux abois ? N'est-ce point Alcidor ? S'il est ainsi, bonhomme, il faut donc vous asseoir. N'en faites aucun doute ; Nous allons de Toulon bientôt prendre la route, Vous vous y remettrez de vos membres perclus. Entre gens du métier c'est ainsi qu'on en use, On s'oblige l'un l'autre, et l'argent se refuse. Je n'avais pas le sol, lorsque j'étais garçon : Mais je vais en deux mots vous conter mon histoire. Échappé de mes fers, chose assez dure à croire Arrivant au pays je me fis Grenadier ; Oh ne s'enrichit point dans ce noble métier. Je me remis sur mer, et l'ingrate fortune Ne me traita pas mieux sur le sein de Neptune ; Je fus repris, Madame, et par un grand bonheur Je vous vis au Sérail malgré le grand Seigneur. Eunuques, blancs et noirs , Bostangis, Janissaires, Ne m'empêchèrent point de vous parler d'affaires ; Ce trait est surprenant, mais passons là-dessus. Or comme en mon pays on craint peu les refus, J'allai voir le Sultan, lequel sur ma parole, Me laissa repartir pour un projet frivole ; Avec lui cependant je m'étais engagé De revenir bientôt payer votre congé. De retour dans la France, une veuve fringante Me prit en mariage aux bords de la Charente. Elle mourut bientôt, une autre succéda ; Et cette autre en trois mois à son tour décéda ; Je convolai bientôt avec une troisième, Qui mourut en avril, je ne sais le quantième. Héritier de leurs biens, et plus content qu'un Roi, J'ai vendu trois châteaux, qui n'étaient point à moi. Comment ! Il m'arriva même chose jadis ; A 1'âge de quatre ans par les Turcs je fus pris, Mené dans le Sérail avec cette personne, Et d'être tant soit peu ma saur, je la soupçonne. Je fus, il m'en souvient pris en mil sept cens seize. J'ai vingt ans. Cela ne se peut pas. Non, vous dis-je ! De tels événements tiennent trop du prodige. Je fus pris à quatre ans, à cet âge un garçon De son père du moins devrait savoir le nom. J'en ai trente, Sandis. Mais vous en croirons, nous sans autre témoignage ? Avez-vous de gros biens ? Allons, je m'en souviens. Le papa touche presque à son heure dernière, Et va dans le soupçon achever sa carrière ; Et n'est pas encor sûr du retour de ton coeur Et je ne sais qu'en croire aussi, ma chère soeur. Cadedis, c'est qu'il est contraire à nos maximes. Je m'en tirerais mal ; Ma lecture se borne au parfait Maréchal, Et je sais seulement qu'un pareil mariage Vous m'entendez, je n'ose en dire d'avantage. Non vraiment ; et qui diable y pourrait rien connaître ? Parlez-moi sans énigme, et j'entendrai peut-être. Qu'entends-je ? Ce serait une impudence extrême, Digne de vingt soufflets. Opprobre malheureux du sang de Carabin, Il ne te manque plus que d'aimer un Rabbin. Oui, si je n'écoutais que mon bouillant courage, Dans ton maudit Sérail j'irais faire tapage ; Je mettrais le château tout sans dessus dessous, Ferais un abatis de tous les Marabouts, À ce fat de Sultan arrachant la moustache... Mais non, à mon honneur ce serait une tâche. Elle ne finira je pense d'aujourd'hui. De mots sans liaison quelle ample kyrielle ! Conclusion, ton âme enfin se résout-elle t Promets-tu de venir ? Je le compte pour mort, et j'y perdrais mes pas : Au moins, dans vos projets ne vous démentez pas. À tout événement, ma soeur, tenez vous prête, Vous allez voir bientôt quelque coup de ma tête. Êtes vous là, ma soeur ? Nous sommes découverts. Ah sandis, nous allons retomber dans les fers. Alcidor est son père, Je suis fils d'Alcidor, ergo, je suis son frère. Ah ! Ne vous tuez pas avant notre voyage ; Car si vous expirez, on nous remet en cage : Que de la mort au moins nous soyons garantis. **** *creator_biancolleli *book_biancolleli_enfantstrouves *style_verse *genre_parodie *dist1_biancolleli_verse_parodie_enfantstrouves *dist2_biancolleli_verse_parodie *id_MATADOR *date_1732 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_matador Ce billet à Temire s'adresse ; Vos Gardes surveillants l'ont surpris par adresse. Un des Galériens Dont vos bontés, Seigneur, ont brisé les liens.