**** *creator_carmontelle *book_carmontelle_abonchatbonrat *style_prose *genre_proverbe *dist1_carmontelle_prose_proverbe_abonchatbonrat *dist2_carmontelle_prose_proverbe *id_MADAMESAVON *date_1768 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_madamesavon Allons donc, Suzette, tiens-toi donc : t'as un air gauche. Est-ce qu'on se laisse aller somme ça un jour de noce, donc ? T'as l'air d'un lendenain. Ben obligée, monsieur. Dame ! Suzette, v'là qu'est tourné : on voit ben que monsieur za la plume en main. Tredame, ma fille, v'là qui nous surpasse. Ah ! Monsieur, de tout mon coeur... Gilles, portez ces oranges-là dans l'aute chambre : vous les mettrez dessus la cheminée. Monsieur de La Plume, je ne savons comment vous remercier de vot' politesse ; mais t'nez, c'est aujourd'hui le mariage de Suzette : j'allons faire la noce ici, faites-nous l'amiquié d'y rester. Vous êtes entendu, vous serez le garçon d'honneur ; pas vrai, Suzette ? Ah ! V'là la commère, et Monsieur Thériaque, l'apothicaire de feu mon homme. Vous êtes ben bonne, commère... Prends tout ça, Gilles : ça servira pour le repas. Comme il est agréable, le compère ! Il a toujours le mot pour rire. Vous êtes donc venus ten carrosse? Vantez-vous-en : j'espère ben que je danserons ensemble, compère. Avec des devises, da ! C'est du galant ! Feu mon homme m'en donnait comme ça de couleur de rose, avec les fontanges pareilles : ça m'allait, dame ! Fallait voir ! Aussi le garçon d'honneur quand il prit la jarretière de la mariée... À propos, je t'avertis de ça, Suzette : faut te laisser faire. Eh ben ! Mais monsieur de La Plume, vous ne dites rien : vous êtes là comme une silence ! Pardine ! C'est Monsieur de La Plume, qui a son bureau sous les Charniers, à trois pas de la boutique où c'qu'est ma fille. Eh ben ! Dites donc un peu, monsieur de La Plume, queu qu' ça veut dire c'te devise-là ? Je le voyons ben ; mais l'énigme de ça ? Ah ! Dame, oui, v'là ce que c'est que l'esprit : c'est zune sentence. Ah ! C'est le valet de mon gendre. Entrez, mon ami. C'est fort ben, mon enfant ; dites à vot' maître que je l'attendons tretous avec impatience... Gilles, emmène-le avec toi au cabaret du coin, où ce qu'on fait le repas, et fais-l'i boire un coup à not' santé. Gilles, ne t'éloigne pas, j'allons tavoir besoin de loi. Que que t'as donc, mon enfant ? Te v'là toute comme une surprise ! Queu qu'ça dit donc, ce chiffon-là ? Voyons un peu, monsieur de Ls Plume, débrouillez-nous ça. Eh ben ! Qui donc qui se passe ? Ah ! Le scélérat ! Queu noirceur ! Ah ! Vantez-vous-en que le chien n'ei sera pas quitte pour se dédire... Allez, monsieur de La Plume, continuez. Ah ! Qu'elles t'égranglent, tes chiennes d'oranges, ailes mettraient la peste dans la maison. Lisez toujours, monsieur de La Plume. Le fils d'un chapelier ! Tredame ! V'là-t-il pas zune famille ben relevée donc ! Parce que son père étale des chapeaux retournés sous le petit Châtelet. Apparemment, c'est que t'en as trop pour lui. Jour de Dieu ! Qu'il ne se montre pas devant moi, car je l'étranglerais mort ou vif. Pardine ! Oui, que jeté voie pleurer pour un gueux comme ça ! As-tu peur d'en manquer ? Tiens, v'là-t-il zune proposition qu'on e propose déjà ! Ah ! Va, va, pour un de perdu cent de •Retrouvés. Eh ! Mon Dieu ! Ne vous blessez donc pas. Vous êtes ben complimenteux dans la famille ! Au fait ben. All' sent qu'ail' n'est pas faite pour le fils d'un chapelier. Demandez-le à votre fils. En attendant, portez-l'i ses oranges, et recommandez-l'i ben de ne pas regarder ma porte en face, ou sinon je vous le repasserai, moi, votre fils de chapelier. Eh ben ! Quoi que c'est ? Tu te trompes, mon ami. Quiens porte-les cheux ce beau monsieur-là. Vois-tu sous le petit Châtelet, à gauche, à l'enseigne du Ben-Rotapé. C'est la noce de Monsieur son fils. Allez donc, monsieur, trop d'honneur ; vous avez oublié queuque chose chez vous. Vot' fils vous dira l'mot du guet. Mais, vraiment, je ne vous y trouvons déjà pas ben. Allez, vous serez mieux dehors. Eh ! va-t'en au diable avec tes plats, cuisinier de malheur. Attends,attends-moi ; je te vas conduire. Eh ben ! Vous autres, est-ce que vous plantez là l'piquet ? Allez, allez tourner vos vieux chapeaux. Bon voyage. Écoutez donc, si vous rentrez les violons, faites-vous jouer la conduite de Grê⁎⁎⁎le, ça vous égayera sur le chemin. Dame ! Vantez-vous-en. Que c'ti-là qui se marie le mange. C'est pourtant du clair : quand z'i gn'y a pas d' noce, i'gn'y a pas de festin, p't.-êt'. Ah ! ça ne sera pas du vrai. Eh ben ! Mais, voyons ; queu qu'i' faudrait pour ça ? Monsieur de La Plume, v'là qui demande réflexion. Qu'en pensez-vous, monsieur Thériaque ? Eh bien ! monsieur de La Plume, v'là c'est conclu : je vous prends pour mon gendre. Vous, commère, allez un peu disposer Suzette à c'te petite vengeance-là. Allez, monsieur de La Plume, pendant c' temps-là j'allons couler ça à Suzette, et quand vous reviendrez, all' sera prête. Venez-vous-en, monsieur Thériaque. N'ai-je- pas entendu la voix de c't indigne renégat ? Ôte-toi de devant mes yeux, affronteur, enragé, suborneur ! Retenez-moi, compère ; car, tenez, pour un rien, je déferais un scélérat comme ça. Queu qu'tu diras, langue de serpent ? Qu'eu qu' tu diras ? N'en as-tu pas tassez t'écrit ?... Et, Suzette, faut que t'aies ben peu de coeur, après sa lettre. Ah ! Queu scélérat que ce La Plume l' me le payera, ou je ne serons pas Mme Savon ; voyez-vous le serment que je fais... Monsieur, puisque vous aimez toujours ma fille, i' gn'y a rien de gâté. Gilles ! Va-t'en ben vite chercher Monsieur et Madame Foulon, ramène-les dans un fiacre, et dis-leux ben que c'est un malentendu ; mais que dans tout çà i' gn'y a pas de quoi fouetter zun chat. Il a raison, ça ne mérite pas de vivre. Oui, cachez-vous, mon gendre, et laissez-nous mener tout ça. Peste ! C'est affaire à vous, monsieur de La Plume. Prends, prends, ma fille... Monsieur est trop honnête, on ne peut rien l'i refuser. Avec plaisir : venez ici, monsieur... Ma commère, faites compagnie à Monsieur de La Plume en attendant. Allons, mes enfants, voilà qui est fait : il n'y a plus qu'à signer. À vous, Monsieur de La Plume. C'est ben pensé : de la joie, mes amis. Allons, Suzette, faut commencer le bal avec mon gendre. Ça signifie que vous avez signé pour témoin, vous, mais qu'v'là l'épouseux. Allons, mes enfants, divertissons-nous, et que Monsieur de La Plume nous apprenne que la tricherie et revient toujours à son maître. **** *creator_carmontelle *book_carmontelle_abonchatbonrat *style_prose *genre_proverbe *dist1_carmontelle_prose_proverbe_abonchatbonrat *dist2_carmontelle_prose_proverbe *id_SUZETTE *date_1768 *sexe_masculin *age_jeune *statut_exterieur *fonction_autres *role_suzette Vraiment, ma mère, c'est que monsieur est versé dans l'écriture. Comment donc, monsieur de La Plume, vous vous êtes mis en dépense ! Tiens, Gilles. Oh ! Monsieur, l'honneur sera pour nous. Bonjour, ma tante ; bonjour, monsieur. Queu qu'c'est donc, ma tante ? Ben obligée, ma tante... Ah ! Ma mère, c'est des rubans à l'anglaise. Ah ! Dame ! Oui, monsieur est un savant. Écoutez donc, faut-il zune réponse ? Ah ! Ciel ! Ma mère !... Ah ! L'indigne ! Est-il possible ! Ah ! Ma mère ! Ah ! Ma tante ! Me faire un affront comme ça ! À une fille d'honneur ! Laissez-moi, Madame. Non, c'est énutile ; je veux pus entendre parler de mariage. Comment, monsieur, vous avez la hardiesse d'avoir l'impudence... Tenez, monsieur, la v'là vot' belle lettre. Lisez-la: vous y avez peut-être oublié queuque chose. Zhélas ! Puis-je croire ce que vous me dites ? Arrêtez, cher zamant !... Ne vous emportez pas tà des violences qui ne serviraient zà rien. Venez-voùs-en plutôt faire entendre raison à ma ch' mère et toute ma famille qui est dans une colère de chien contre vous. Ah ! Ma tante. Ah ! Ma mère, c'est zune trahison. Ah ! Ma mère, vous voyez, ça n'est pas sa faute. Ah ! Ciel, mon cher zamant, ne vous exposez pas à la trahison d'un traître. Monsieur... **** *creator_carmontelle *book_carmontelle_abonchatbonrat *style_prose *genre_proverbe *dist1_carmontelle_prose_proverbe_abonchatbonrat *dist2_carmontelle_prose_proverbe *id_MADAMELAIGUILLE *date_1768 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_madamelaiguille Eh ! Bonjour donc, ma commère ; bonjour, mon enfant. Tenez, commère, v'là des dragées que je vous apporte. Ah ! Mon Dieu ! Mon pauvre Gilles, cours donc bien vite... Eh ! Mon enfant, nous causons là, et le fiacre qui est zà la porte ! Hélas ! Oui, commère. Y a si loin de c'te porte Saint-Antoine ! I'semble qu'all'recule tous les jours. À propos de ça, tiens, Suzette, v'là zun petit présent de noce que je t'apporte. Je crois me remettre d'avoir vu monsieur queuque part. Pardi ! C'est un coeur qui s'envole, et un chien qui court après. De de quoi que c'est donc. Tredame ! On peut ben l'y forcer. Ah ! Ciel ! Queu blasphème ! Eh pardine ! Si son père fait des chapeaux, ma nièce est coiffeuse, ça va de pair. Console-toi, va, ma nièce, si tu ne coiffes pas c'ti-là, t'en coifferas queuque autre. Faut être ben traître pour venir encore embrasser les gens. La commère a raison : j'en aurais ben fait autant. Expliquez-vous donc, monsieur La Plume. Ma foi, commère, si j'étais que de vous, je ne barguignerais pas : je prendrais Monsieur de La Plume au mot ; ça vengerait vot' fille, et ce gueux de Toulonet en crèverait de dépit. Oui, oui, laissez-moi faire : je vais sonder sur c't article-là. Fi ! C'est indigne. Vous devriez rougir. — Allons, commère, faut l'i pardonner : pi, ça m'attendrit, que j'en avons la larme à l'oeil. C'est ben dit : écoulez, mon cher enfant, c'est un vilain ladre : il vaut mieux le prendre par son avarice, ça l'i sera plus sensuel. Cachez-vous j'allons l'i faire payer tous les frais de la noce, et quand si sera temps, vous vous montrerez. Monsienr a l'air d'un vivant qui ne s'endort pas sur le rôti. Oui, oui, commère, faites toujours... La vérité, Suzette, faut convenir que t'es née coiffée, zavoir trouvé comme ça zun épouseux à point nommé. À merveille, monsieur de La Plume. V'là qu'est pis qu'un compliment... À toi, Suzette.. Vous, compère, et pis moi.... Allons, morguenne ! Y a pus à s'en dédire. Êtes-vous payé, monsieur Bonnefoi ? Eh ben ! Emportez tout ça. Oui-da, vous v'là tout porté. Si vous voulez t'être de la noce, vous aurez toujours la jartière de la mariée, c'est toujours ça. Pas vrai donc, Monsieur Thériaque ? **** *creator_carmontelle *book_carmontelle_abonchatbonrat *style_prose *genre_proverbe *dist1_carmontelle_prose_proverbe_abonchatbonrat *dist2_carmontelle_prose_proverbe *id_MONSIEURFOULON *date_1768 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_monsieurfoulon Eh ! Bonjour, madame Savon. Mais qu'avez-vous donc, madame Savon ? Mais, madame Savon, perdez-vous la tête ? Ah ! Madame Savon, voilà qui est trop ! Vous vous souviendrez de celle-là. Allons-nous-en, femme, allons-nous-en. **** *creator_carmontelle *book_carmontelle_abonchatbonrat *style_prose *genre_proverbe *dist1_carmontelle_prose_proverbe_abonchatbonrat *dist2_carmontelle_prose_proverbe *id_MADAMEFOULON *date_1768 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_madamefoulon Bonjour, mon enfant. Où va donc la petite ? Comment ! Mais que voulez-vous donc dire ? Ah ! Mon ami, vous ne voyez pas qu'on nous insulte. Allons-nous-en ou je vas me trouver mal ici. **** *creator_carmontelle *book_carmontelle_abonchatbonrat *style_prose *genre_proverbe *dist1_carmontelle_prose_proverbe_abonchatbonrat *dist2_carmontelle_prose_proverbe *id_FOULONET *date_1768 *sexe_masculin *age_jeune *statut_exterieur *fonction_autres *role_foulonet Ah ! Mon ami Gilles, que je te trouve à pr•opos sous ma main. Dis-moi, queu qu' Mme Savon veut donc dire ? Elle a chanté pouille à mon père, elle a dit des sottises à ma mère, et elle veut m'étrangler. Moi. Réponds-moi, mon ami, et tire-moi de l'embarras, de l'inquiétude où le silence de ton obstination est capable de me plonger. Ah ! Mon cher Gilles, achève. Tiens, prends ma bourse, prends ma fortune ; prends, mon ami. V'là le profit de ma dernière semaine. Prends-les, et donne-moi queuque consolation dans la douleur de mon affliction. Ah ! Ma chère Suzette ! —Oui-da, Gilles ; mais comme il m'est survenu zun mal d'aventure au pouce, j'ai prié M. de La Plume de me les écrire. Oh ! Ciel ! Est-il possible que ça se puisse. Ah ! Queue trahison ! Il a changé l'adresse. C'te lettre n'était pas pour vous : c'est z'un congé que je donnais tà une autre personne pour ne conserver tout entier tà ma chère Suzette. Que la foudre !... Que les éclairs !... Qu'un tremblement !... Que cinq cent mille diables !... Quen scélérat ? Sa vie ne tient plus qi un fil ! Vous avez raison, ma chère Suzette, j'aurai toujours le temps de lui couper le nez et les oreilles ; mais, comme dit le proverbe, charité bien ordonnée commence par soi-même. Ah ! Madame, je viens taux pieds dé vot' compassion... Ah ! Madame, écoutez-moi seulement une parole. Hélas ! Oui, madame : rien n'est pus faux. Pas vrai, Gilles, tu sais la vérité de ça. Oui, madame : ce matin je l'ai prié d'écrire une lettre pour ma chère Suzette, et une: aut' pour une fille qui voulait m'épouser, mais que je ni tant seulement pas regardée depis que je connais ma chère Suzette. Je lui déclarais qu'elle ne devait pas songer zà moi, et ce coquin de La Plume a mis texprès, l'adresse de l'une sur l'aut', et voilà ce qui a fait vot'colère, mais dont je suis tinnocent, et dont je vous en demande mille pardons, à la tendresse de l'amour que j'ai pour vot' chère fille, pour vous, madame ; et pour toute vot' chère et aimable famille. Ah ! Madame, vous mettez le comble au bonheur de ma satisfaction. Ah ! L'indigne ! Je vas le mettre à feu et à sang. Ne craignez rien, ma chère Suzette : je vous jure, par l'épée que je porte, que je vas l'y enfoncer la garde au travers du corps. Eh bien ! Mesdames, je remets entre vos mains mon amour et ma vengeance. Zun instant, mon cher monsieur de La Plume. Chacun à son tour : vous avez fait le mariage pour moi et maintenant je vas danser pour vous. De la modération, monsieur de La Plume : avalez ça en douceur, ou sinon... **** *creator_carmontelle *book_carmontelle_abonchatbonrat *style_prose *genre_proverbe *dist1_carmontelle_prose_proverbe_abonchatbonrat *dist2_carmontelle_prose_proverbe *id_MONSIEURLAPLUME *date_1768 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_monsieurlaplume « Mademoiselle, je profite de l'occasion de la nouvelle année, pour vous la souhaiter bonne et heureuse ; mais je suis trop honnête-homme pour vous laisser ignorer ce qui se passe...» « Je vous avertis que j'ai une inclination ailleurs...» « Je vous ai promis mariage, je ne suis plus en pouvoir de vous tenir parole...» « Pour vous dédommager de la perte de mon coeur, je vous prie d'accepter cette douzaine d'oranges que je vous envoie... » « Au reste, quoique vous soyez ben aimable, vous n'étiez pas de compétence faite pour épouser le fils d'un chapelier. Votre serviteur, FOULONET. » Assurément, et si mam'selle voulait, y a ici des personnes qui aimeraient ben mieux payer les violons pour leux compte que de voir danser les autres. **** *creator_carmontelle *book_carmontelle_abonchatbonrat *style_prose *genre_proverbe *dist1_carmontelle_prose_proverbe_abonchatbonrat *dist2_carmontelle_prose_proverbe *id_MADAMEROGNON *date_1768 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_madamerognon Parlez donc, m'ame Savon, c'est-i' du vrai qu'ous ne voulez pus du festin ? Répétez-nous donc ça : je n'entendons pas de c't'oreille-là. Tout ça m'est égal, à moi. Mon festin zest commandé : qu'on le mange ou non, faut qu'on l'paye. Non-da. Écoute un peu François, je n'ons pas le temps de disputer : va-t'en me chercher un commissaire. Quiens ! Monsieur Jocrisse ! Eh ! Que bénéfice voulez-vous que j'y fasse ? Est-ce que ça aura de la vente ça ? Tenez v'ià-t-il pas un gigot qui a bonne mine! Ah ! Dame, oui, v'là qu'est ben comode. Bon, réflexion ! Et le repas qui est tout chaud. Tenez, à cause de l'occasion, je vous ferai bon marché. Écoutez, parce que c'est vous, donnez-moi dix écus, et j'allons vous repasser ce gigot-là dans la sauce. Je suis t'a vos ordres : vot' servante, messieurs et dames. **** *creator_carmontelle *book_carmontelle_abonchatbonrat *style_prose *genre_proverbe *dist1_carmontelle_prose_proverbe_abonchatbonrat *dist2_carmontelle_prose_proverbe *id_GILLES *date_1768 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_gilles Voyons t'un peu si je n'oublions rien : v'là ici la place le m'ame Savon, là au beau mitan, entre le marié et la nariée : ici, c'est Monsieur Thériaque, le compère, et pis en face, vis-à-vis de lui, la commère m'ame Laiguille ; à l'autre bout, le père et la mère du futur, et pis moi... Oh ! Moi, j'irons et je viendrons... Oui-da, v'là qu'est ben symétrique comme ça. I'ne manque que le fricot. Ah ! Gilles, mon ami, comme tu vas t'en donner ! Je crains tant seulement d'attraper zune indigestion : quand zon n'est pas stylé à manger tout son soûl, y a du risque. Ah ! Morguenne ! Aussi pourquoi qu'un jour de noce ne revient pas trois fois par semaine ? Et vous, morgue ! Vous v'là ben arrivé ! Jarniguoi ! Qu'ous avez le nez fin ! Ah ! Sainte Opportune, queue défaite ! Et au festin de la noce, est-ce que vous ne l'i souhaiterez rien ? Ah ! Dame oui, i'n'y a pus à barguigner : c'est aujourd'hui qu'il faut en découdre. Plus sûr que de mon père, voyez-vous. Eh ! Jarni ! Regardez donc c'te table. Crayez-vous que m'ame Savon se mette en dépense pour rien ? I' gn'y a, morgue ! Pas de saint dans l'année qui la mette en ribote comme ça, n'était c'ti-là du mariage. Ah ! Jarniguoi ! Vous me feriez tourner la tête, avec vos croyances du oui ou du non : je vous disons encore un coup que mam'selle, pisque m'ainselle y a, sera madame ce soir, à moins que le diable ne s'en mêle. Comment ! Y s'en mêlera ! Ah ! çà, ne badinez pas, monsieur de La Plume ; est-ce que vous auriez queuque tripotage ensemble, queuque ?... Ah ! Me v'là ben savant avec vos risées ! Eh ! Morgue ! Contez-moi donc ça : j'aimerions autant qu'on ne nous disît rien que de nous rien apprendre. Dites toujours : je vous promets de garder le silence à bouche que veux-tu. Eh ben ! I' se fera donc, comme ça ? Ah ! Voyons, voyons. Ah ! Ventregué ! Queue manigance ! Contez-moi donc ça de fil en aiguille. Pardine ! Oui, c'est le proverbe : dis-moi qui tu hantes, je te dirai qui tu fréquentes. Fouillez-vous donc, monsieur de La Plume : est-ce qu'il n'y en a pas pour moi aussi ? Eh ! Morgue ! Y aura pus d'honneur dans tout ça que de profit. Eh ! Jarniguoi ! Quoi que vous avez donc ? De la part de Monsieur Foulonet, madame. Eh ! Morgue ! Je n'ons garde : je ne sortirons pas du cabaret. Eh ! Jarniguoi ! Si t'attends la réponse, n'y aura pus de quoi boire, viens toujours. Quoi que ça signifie donc tout ça ? J'avons vu les garçons remporter le festin. Ah ! Morgue ! Queu crève-coeur ! Je nous verrions passer devant le nez un gueuleton comme c'ti-là, et je n'en aurions que la fumée !... Non jarniguoi ! ça ne se passera pas comme ça... C'est c'te chienne de lettre, tenez. Au diable soit M. de La Plume avec son invention, qui fait jeûner les gens. Je l'i avons promis le secret ; mais, morgue ! Je n'en savions pas la conséquence. Encore s'il donnait pourboire, là, queuque dédommagement; mais il ne sonne mot et l'on remporte les plats... Ah ! Jarnonbille ! J'allons tout découvrir à Madame Savon. Je l'avions ben dit : c'est la lettre Monsieur de La Plume. Écoutez, i' ne tient qu'à moi de vous tirer tout ça zau clair. Ah ! Monsieur Foulonet, cet argent a les manières trop nobles : on n'y peut pas tenir, vous n'êtes pas fait pour être susplanté par un vilain chiffonneur de papier... Mais v'là mam'selle Suzette: je vais vous expliquer tout ça devant elle. Doucement, mem'selle doucement... Zun peu de sang-froid. Y a ici du quiproquo, et je venais pour vous débrouiller tout ça... Vous, monsieur, n'avez-vous pas t'écrit ce matin des lettres ? Eh ben ! Monsieur, il vous a joué un tour pour faire rompre votre mariage. Eh ! Ne jurez pas, je réponds de tout... Ce La Plume m'est venu conter ça tout chaud... Mais, mais ! Queulle invention diabolique ! I' faut, morgue ! Qui ait l'esprit pus noir que sa bouteille à l'encre. Eh ! Ventreguenne ! Oui, not' maîtressé, c'est zun startagème de Monsieur de La Plume, donc que vous avez donné dedans comme une bête. Eh ben ! Not' maîtresse, irons-je-ti chercher les violons ? Ah ! Monsieur de La Plume, vous arrivez trop tard : vous êtes le plus habile à mettre les adresses, mais pour les contrats, vous n'y entendez rien. Hélas ! Oui. J'ons découvert le pot au noir. Eh ben ! Not' maître, payez-nous pendant que vous êtes en train. Eh ! Je ne sommes pas intéressé. Prenez ne je vous ayons servi gratis.