**** *creator_carmontelle *book_carmontelle_voyageurs *style_prose *genre_proverbe *dist1_carmontelle_prose_proverbe_voyageurs *dist2_carmontelle_prose_proverbe *id_MADAMEDEMORTILIERE *date_(inc *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_madamedemortiliere Vous voyez, Madame, comme il est nécessaire d'avoir des hommes quand on voyage pour parler à tous ces gens-là. Mais, fi donc ! Et moi aussi : je voudrais voir l'Abbé d'Orlot en dragon. Je ne crois pas cela, car j'ai vu un évêque qui avait peur des vaches : s'il eût été colonel, sûrement il ne les aurait pas craintes. Il faut en avoir bien soin. Cela est très bien pensé. Oui, car il ne pourrait peut-être plus chanter. Ah ! Voilà la maîtresse. Dites donc, Madame, qu'est-ce qu'il y a dans la forêt ? Allons, Madame, dites-nous donc... Ah ! Ah ! Madame, nous allons savoir... Mais ce n'est pas là ce que nous vous demandons : nous voudrions savoir si nous ferons bien de traverser la forêt la nuit. Monsieur l'Abbé, je ne passerai jamais la forêt. Oui, mais nous ne voulons pas le faire tuer. Allons, voyons, Monsieur l'Abbé. Ah ! Monsieur, nous n'en doutons pas. En vérité, Monsieur l'Abbé, aussi vous ne songez à rien. Moi, je ne saurais souffrir les gens trop braves. Ah ! Monsieur, dites donc promptement. Ah ! Monsieur, ne perdez pas un instant. Monsieur l'Abbé, prenez garde. Prenez donc garde, encore une fois. Non, Monsieur l'Abbé, c'est notre affaire. Je vous dis que non. Allons, Monsieur l'Abbé, ne parlez plus de cela. Allez plutôt voir si notre souper sera bon, vous vous y connaissez. Ah ! Monsieur, nous vous en prions ; nous vous avons trop d'obligations pour que... Nous serons fort aises de faire connaissance avec Monsieur Pinçon. J'en suis fort aise, parce que vous pourrez nous accompagner. Monsieur, où allez-vous donc ? Ah ! Monsieur, c'est le plus honnête homme du monde, et à qui nous avons la plus grande obligation. Oui, vraiment : est-ce que vous ne le saviez pas ? Mais il faudrait le faire arrêter. C'est fort heureux pour nous, Madame, nous voyagerons sûrement. Ah ! Oui, l'abbé, c'est bien fin à cette heure que vous le connaissez. **** *creator_carmontelle *book_carmontelle_voyageurs *style_prose *genre_proverbe *dist1_carmontelle_prose_proverbe_voyageurs *dist2_carmontelle_prose_proverbe *id_MADAMEDESOUSAY *date_(inc *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_madamedesousay Oui, mais l'abbé m'a fait peur : il jure, que c'est affreux ! Je le crois, au moins, Madame. Je ne m'étonne pas s'il est brave, l'abbé : il est charmant ! Il n'a peur de rien en voyage, il est tout à fait rassurant. Enfin nous sommes fort heureuses d'avoir l'abbé avec nous. Sans doute, et je pense qu'il s'est enroué en criant : si nous lui faisions faire un lait de poule ? Non, non, Monsieur l'abbé, je le veux absolument, et je vais appeler quelqu'un. Nous voulons le savoir absolument. Madame, l'abbé pâlit. Oui, Monsieur l'Abbé. Oui, Monsieur, nous serions bien aises de causer avec vous. Comment ? Brave ! Madame... Ni moi non plus, sûrement. Mais, Monsieur, on vous a déjà dit que nous n'en avions point. Ah ! Il est charmant. Les hommes sont comme cela. Il faut du moins craindre pour les autres et ne pas croire que tout le monde vous ressemble. Ne nous faites pas languir. Monsier l'Abbé, n'êtes-vous pas blessé ? C'est une misère. Eh bien ! Nous vous en faisons présent. Voulez-vous bien finir cet enfantillage-là, l'abbé ? Il faut que Monsieur soupe avec nous. Et allez-vous à Sedan, Monsieur ? Êtes-vous armé ? Ah ! L'Abbé, je parie qu'il ne veut pas souper avec nous. Retenez-le donc. Il nous a fait le plaisir de nous céder ces pistolets pour ce qu'ils lui ont coûté. Voilà monsieur qui l'a vu. Il faut qu'une route comme celle-ci soit sûre. Quoi ! il serait possible que nous eussions été sa dupe ! **** *creator_carmontelle *book_carmontelle_voyageurs *style_prose *genre_proverbe *dist1_carmontelle_prose_proverbe_voyageurs *dist2_carmontelle_prose_proverbe *id_MADAMEROUGEAU *date_(inc *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_madamerougeau Me voilà ! Me voilà ! Ah ! C'est vous Monsieur Du Hable ? Non, non, vous pouvez parler. En poste ? Sans doute, mais c'est que je crains toujours. Que, si à la fin cela tournait mal... Cela est vrai. Sans doute, mais... J'en conviens, mais... N'as-tu pas dit qu'il n'y en avait pas ? Ah ! Je ne le crains pas : fais sortir ceux qui sont dans l'écurie dans le verger, et ferme bien la porte du jardin. Monsieur l'Abbé, il n'y en a pas : il est mort il y a trois ans, le pauvre homme ! Oui, Monsieur, à vous obéir. Mais, Monsieur l'Abbé, je n'en ai pas pour le présent. Et c'est justement lui-même qui les a tous pris. Monseigneur l'intendant ; mais avant une heure il y en aura sûrement de retour. Il fait sa tournée, et il a bien du monde : je vous réponds que les chevaux ne tarderont pas. De quel côté ces dames vont-elles, Monsieur l'Abbé ? À Sedan, Monsieur l'Abbé ? Allons, puisque vous voulez partir absolument. Je vais envoyer. Monsieur l'abbé, je viens vous dire une bonne nouvelle. Vous aurez des chevaux avant un quart d'heure. Oui ; mais, Monsieur l'abbé, je ne sais pas si vous ferez bien de vous en servir. C'est qu'il est déjà tard, et la nuit... Si vous ne craignez rien, cela est différent. Ce n'est pas cela : le chemin est bon, mais la forêt... Oh ! Rien, je ne veux pas faire peur à ces dames. Je ferai mettre les chevaux aussitôt qu'ils seront arrivés : on ne leur fera pas manger l'avoine pour ne pas vous retarder. Oh ! Rien, rien. Eh bien ! Madame, je m'en vais le dire à Monsieur l'Abbé. Est-ce que vous n'avez pas entendu parler de Bras-de-fer ? C'est un solitaire qui arrête toutes les voitures pour les voler. Oui, Monsieur l'Abbé. Me voilà ! Me voilà ! Monsieur l'Abbé, vos chevaux vont être mis dans l'instant. Oh ! Monsieur, ils sont bons, ils vous mèneront bien. Je vous donnerai deux postillons qui n'ont pas peur. Ils iront ventre à terre, si on vous attaque... Vous partirez quand vous voudrez, je vous réponds qu'avec ces deux hommes-là vous n'avez rien à craindre. En ce cas, je m'en vais faire leurs lits. Vous aurez des draps très propres et de bons lits, cela va être fait dans le moment. Je sais tout ce qu'il faut à des dames comme celles-là, ne vous inquiétez pas, Monsieur l'Abbé, vous serez aussi très bien couché. Allons, Marianne ! Geneviève ! Quoi donc ? Il faut donc le dire. Allons, je vais faire tuer des poulets. Oh ! Que non, on leur fait avaler du vinaigre : je vais vous faire faire une bonne fricassée. Ne vous embarrassez pas, vous serez contents. Allons, Marianne ! Geneviève ! Mon Dieu ! Laissez-moi faire, laissez-moi faire. Ici, Monsieur. Je ne le connais pas. Et le souper que l'on fait pour elles ? Monsieur Du Hable, je vous l'avais bien dit. **** *creator_carmontelle *book_carmontelle_voyageurs *style_prose *genre_proverbe *dist1_carmontelle_prose_proverbe_voyageurs *dist2_carmontelle_prose_proverbe *id_MONSIEURDUHABLE *date_(inc *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_monsieurduhable Où est-elle ? Madame Rougeau ? Oui, c'est moi-même : n'y a-t-il personne ici qui nous entende ? Il va vous arriver une voiture où il y a un abbé et deux dames. Oui : ainsi vous savez bien ce que vous avez à faire. Quoi ? Que voulez-vous dire ? Quel mal trouvez-vous d'attraper des nigauds ? D'ailleurs, vous leur faites bonne chère, et ils ne souperaient pas si bien et ne seraient pas si bien couchés à d'autres postes. Ne seront-ils pas trop heureux d'être ici ? N'avons-nous pas toujours réussi ? N'y gagnez-vous pas de l'argent ? Quelle idée avez-vous donc aujourd'hui ? Tenez, voilà la voiture arrivée ; songez à vous dans un moment je ferai le reste. Allons donc, Madame Rougeau, des chevaux, des chevaux ; mais où est-elle donc ? Ah ! Ah ! Ici ? Mesdames, je vous demande bien pardon. C'est que je crains d'être indiscret. Oui, Monsieur. Oui, Monsieur, c'est un fort bon chemin. Non : pour peu que votre voiture soit bonne, vous arriverez aisément à Sedan. C'est selon qu'on est brave. Ma foi, Monsieur, il me semble pourtant qu'on doit avoir peur la nuit : pour le jour, on voit venir et l'on se tient sur ses gardes. Oui. Par exemple, j'ai vu Bras-de-fer venir à gauche, j'ai tenu mon pistolet sur la portière, il s'est éloigné. Je me suis bien douté qu'il reparaîtrait à droite. En effet, il s'est présenté, et moi, mes deux pistolets à droite et à gauche, j'ai passé la forêt tranquillement : ainsi, en faisant comme moi, mais de jour, vous n'avez rien à craindre. Il y a des moments où vous pourriez passer. Oui, où Bras-de-fer serait occupé ailleurs, par exemple... Mesdames, songez donc que vous avez Monsieur l'abbé qui doit vous rassurer. Il n'y a rien à craindre avec des pistolets, je vous en réponds. Cela devient différent. Je ne demande pas mieux, assurément. Oui, Monsieur ; mais je n'y vais pas, moi : à trois lieues d'ici je quitte la grande route..., et, ma foi, on ne sait pour lors qui on peut rencontrer ; je suis au désespoir de vous refuser ainsi que ces dames. Je voudrais de tout mon cœur... Attendez, Mesdames, je crois que je pourrai vous tirer d'embarras. Oui, sûrement, je dois les avoir. Je m'en vais vous le dire. Un de mes cousins, qui raffole de belles armes, m'a prié de lui rapporter de Sedan une paire de pistolets, et je crois que je les ai dans ma malle. Je n'en suis pas bien sûr, mais je vais y voir. Je me rappelle à présent qu'ils doivent y être : je reviens dans le moment. La voici, Monsieur l'Abbé. Tenez, Monsieur l'abbé, voilà les pistolets dont je vous ai parlé. Ils ne sont pas chargés, Madame. Il n'y a rien à craindre, Madame. Ils sont bien conditionnés. Dix louis, Monsieur l'Abbé. Ces dames m'ont payé, Monsieur. Madame, je ne puis pas avoir cet honneur-là. Puisqu'elles le veulent absolument... Quel est donc cet homme-là ? J'ai envie de m'enfuir. Je reviens, Monsieur l'Abbé. Monsieur, est-ce que j'ai l'honneur d'être connu de vous ? Oui, Monsieur. Je les ai cédés. Pour ce qu'ils m'ont coûté. Ah ! Ciel ! Puisqu'elles n'en ont pas besoin, j'en suis fort aise. Mais, Monsieur, j'ai affaire. Monsieur, en vérité... Mais, Messieurs, Mesdames, Monsieur l'Abbé, priez donc pour moi. **** *creator_carmontelle *book_carmontelle_voyageurs *style_prose *genre_proverbe *dist1_carmontelle_prose_proverbe_voyageurs *dist2_carmontelle_prose_proverbe *id_MONSIEURPINCON *date_(inc *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_monsieurpincon Où est-il donc, Monsieur l'Abbé d'Orlot ? Moi-même, Monsieur l'Abbé ; j'ai reconnu là-bas Flamand, qui m'a dit que vous étiez ici. Que dites-vous donc là, Monsieur l'Abbé ? De trois lieues d'ici, Monsieur l'Abbé. Oui, Madame. De tout mon cœur, Madame. Oui, Madame, et assez bien : d'ailleurs j'ai encore quatre personnes avec moi qui le sont aussi. Sûrement : Monsieur, restez, restez. Non, Monsieur, pas encore. Comment donc ? Ils sont fort beaux, mais qu'en voulez-vous faire ? Qui est dans la forêt ? On m'en avait dit quelque chose, mais je ne le croyais pas. Vous l'avez vu, Monsieur ? Et vous avez vendu ces pistolets à ces dames ? Pour dix louis ? C'est fort bien à vous. Monsieur l'Abbé, on parle beaucoup à Sedan de ce voleur. On a trouvé des moyens pour cela, et M. l'intendant fait faire des perquisitions... Elle le sera aussi. Monsieur l'Abbé, j'ai quitté les dragons. Il savait que je n'avais point de fortune : il m'avait faire un arrangement pour céder mon emploi, et il m'a fait avoir une lieutenance de la maréchaussée de cette province. Monsieur, je vous ai déjà dit de rester. Actuellement, commencez par rendre à ces dames les dix louis qu'elles vous ont donnés pour vos pistolets. Un moment, s'il vous plaît, Monsieur. Je sais votre affaire. Savez-vous quel était le commerce de ce monsieur-là, Mesdames ? Celui d'épouvanter les voyageurs pour leur vendre dix louis des pistolets d'un louis. Sûrement, Mesdames. Allons, Monsieur, suivez-moi. Cela est inutile. Pour vous, Madame Rougeau, nous nous reverrons : faites donner des chevaux à ces dames. Ces dames ne souperont ni ne coucheront ici. Allons, Mesdames, j'aurai l'honneur de vous escorter. **** *creator_carmontelle *book_carmontelle_voyageurs *style_prose *genre_proverbe *dist1_carmontelle_prose_proverbe_voyageurs *dist2_carmontelle_prose_proverbe *id_ANDRE *date_(inc *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_andre Madame Rougeau, v'là qu'on demande quatre chevaux. Oui vraiment, mais il y a un abbé qui jure comme un possédé et qui dit qu'il nous en fera bien trouver. Ah ! Oui, oui, j'entends : j'y vais.