**** *creator_dancourt *book_dancourt_foiresaintgermain *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_foiresaintgermain *dist2_dancourt_prose_comedy *id_MADEMOISELLEMOUSSET *date_1697 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_mademoisellemousset De belles robes de chambres, Messieurs ? Des étoffes de la Chine ? Des bonnets à la bénéficière ? Des déshabillés à bonne fortune ? Voyez ici, Mesdames. C'est déjà vous, Monsieur le Chevalier ? On ne sera ici que dans une heure. On m'a bien promis de s'y rendre. Toutes choses sont bien disposées, et vous en aurez bonne issue. Ne voulez-vous pas entrer ? Cette Dame est de votre compagnie, apparemment ? Je suis votre très humble servante, Madame. Vous en allez faire un des plus beaux ornements, Madame. Vous avez des affaires en ces pays-ci ? Quel homme, Monsieur ? Ce vieillard si riche et si fou, qui en conte à toute la terre ? Il en fait accroire depuis six mois à plus de quatre de ma connaissance. Et vous appelez cela moins que rien ? La sœur Urbine est une trop aimable personne pour la Province, il faut trouver moyen de la fixer à Paris. Ah, ah ! Vous vous en avisez, monsieur l'Arménien ; depuis huit jours que la Foire est ouverte, à peine m'avez-vous fait l'honneur de me saluer. Quel heureux caprice vous porte à chercher à faire aujourd'hui connaissance ? À la renouveler ! Nous nous sommes donc connus, à votre compte ? Les fortunes du Marais ne sont pas solides, comme vous voyez. Ah, juste ciel ! Quelle surprise ! C'est le Chevalier de Gourdinvilliers, la Coqueluche de la rue Sainte Avoye. Hé ! Qu'as-tu donc fait de ta Chevalerie, mon pauvre Lorange. Tu as fait de grands voyages, à ce que l'on m'a dit, depuis que nous nous sommes vus ? Tu as pensé mourir ? Tu as raison : mais ne risques-tu rien ici ? Très volontiers, tu n'es qu'à dire. Mais toi, ne m'appelle point Marton, je te prie. Hé ! Qu'avez-vous aujourd'hui, Monsieur ? Vous voilà bien sombre ! Hé, Monsieur ! Lui, Monsieur ? Je suis contre vous aussi. Vous n'êtes point un valet zélé. Je parie d'y réussir en vingt-quatre heures. Il faut commencer par savoir les personnes à qui nous avons à faire. Cet article-là rend l'affaire épineuse. Voilà un agréable petit domestique. Monsieur l'Arménien ? Il faut plus de deux jours pour cette affaire-là. Mort de ma vie, nous sommes trois, il ne faut pas en avoir le démenti. Je ne puis le deviner, mais il n'est pas bête. À qui en ont-elles, donc ? Hé, bon Dieu, Madame, n'êtes-vous point blessée ? Vous ferez fort bien, assurément. Si vous voulez prendre un siège en attendant… Il ne tiendra qu'à vous d'être heureuse, j'ose vous en répondre. Lui, je le connais pour un voleur, Madame. Il prit encore hier au soir dans la poche d'une vieille Marquise de ma connaissance le portrait d'un jeune Abbé, qu'elle venait de retirer de chez la Frenaye. Hé ! Laissez-le emmener, on a quelque chose à vous dire qu'on ne veut pas qu'il sache. Ne le comprenez-vous pas ? Vous êtes toujours aimable, et l'on écarte les surveillants pour vous découvrir sans contrainte les sentiments que vous faîtes naître. Ne craignez rien. Cela est bien écrit, au moins, ne faites-vous point de réponse ? Mort de ma vie ; voilà un homme que vous poignardez, Mademoiselle. Doucement, s'il vous plaît, Monsieur, un peu moins de transport, et plus de réflexion ; nous ne sommes pas ici en place d'avoir de longues conversations : venons au fait. Qui est cet heureux vieillard qu'on veut vous donner, et que vous détestez tant ? Monsieur Farfadel ! Et très fort même : il vient ici presque tous les jours. Je sais de ses fredaines ; et votre affaire n'est pas encore si bien conclue, qu'on ne puisse la rompre. S'il ne s'agit que de détromper Madame votre mère, nous en viendrons aisément à bout : mais pour y parvenir, il est bon qu'on ne vous voie point ensemble, et que je ne paraisse pas me mêler de vos affaires même. Je vous pardonne d'être si fort amoureux, la petite personne en vaut bien la peine. Ne vous mettez point en peine, je connais la mère de votre maîtresse, c'est déjà quelque chose. C'est une de mes meilleures pratiques. Nous en aurons raison. Faites-moi chercher l'Arménien et votre Breton, qu'ils lâchent le filou prétendu, et qu'ils se dépêchent de venir ici. Oh ! Que les amants sont fous ! Je suis bienheureuse que l'expérience m'ait corrigée de ces faiblesses. Mais voici Monsieur Farfadel. C'est lui-même. Voilà des ordres qui sentent furieusement la bonne fortune. Vous êtes le mortel le plus coureur, et le plus couru que je connaisse. Vous avez raison. Chacun se distingue à sa manière. Assurément, cela est bien plus sûr, et bien plus commode. Et considéré même. Je gage qu'il n'y a point de mère, qui ne soit ravie de vous voir faire les doux yeux à sa fille. Quoi, vous voulez vous marier sérieusement. Vous n'en sortez pas trop, à ce qu'il me semble. Et quel rendez-vous vous attire à la Foire, s'il vous plaît ? Je n'ai encore vu personne. Jusqu'au revoir, Monsieur. L'agréable chose qu'un petit libertin sexagénaire : Il trouvera compagnie chez Laigu ; mais ce ne sera pas celle qu'il cherche. Consultons maintenant avec nos deux associés ce que nous pourrons faire pour… Est-ce que vous n'avez point vu Clitandre ? Il vous cherche. Pour vous dire de venir ici, et de laisser aller ce pauvre diable. Le mieux du monde. Angélique est presque aussi amoureuse de ton maître, que ton maître est amoureux d'elle. Oui, te dis-je, il n'y a qu'une petite difficulté. Son mariage est conclu avec un autre. Tu as raison, voilà un accommodement : mais il est bien aise d'épouser en premier. Laissons-là la plaisanterie, et parlons sérieusement, il faut rompre cette affaire, et assurer la nôtre. Le rival de ton maître est à la Foire. Il est allé chez Laigu où il trouvera Angélique. Un soupirant banal, un petit maître de soixante ans. Selon le goût de ses maîtresses ; il n'est rien, et il est tout ; c'est un petit caméléon d'amour, un animal amphibie en qui la finance domine. Où cela pourrait-il nous mener ? À ridiculiser le personnage tout au plus. Qu'est-ce que cela fait ? Que prétends-tu faire ? Que diantre va-t-il faire ? Et de quoi nous peut-il servir, son petit Opéra ? Et toi, qui es plus essentiel et plus habile, dis-moi un peu de quelle manière… Hé ! C'est Mademoiselle de Kermonin, la petite bretonne de Monsieur Farfadel, apparemment. Cela n'est pas naturel ! Hé, à qui en avez-vous, Mademoiselle ? Voilà des vapeurs extraordinaires. Hé ! La, la, remettez-vous. Que vous est-il arrivé qui puisse vous causer un tel déplaisir ? Ce sont des vapeurs, assurément. Je ne sais qu'en croire. Je le crois bien. Vous êtes à la Foire, Mademoiselle. Vous n'étiez pas seule pour lui chez Laigu, il y avait un autre rendez-vous que le vôtre. Mademoiselle de Kermonin est une personne fort prudente. C'est une fille qu'il va épouser, je vous en avertis Ne me quittez pas, Monsieur l'Arménien, il faut bien finir notre affaire. Est-ce que vous avez ensemble quelques engagements qui l'en empêchent. De tour mon cœur ; que pourrions-nous faire ? Votre servante, Mademoiselle Marotte. C'est encore quelqu'une de vos rivales, sur ma parole. Ce ne sera pas bien difficile. Vous avez d'étroites liaisons avec lui, apparemment ? Il vous rend de fréquentes visites, sans doute ! Qui peut l'en empêcher ? Il fait tant de bien à la famille. Et qui est cette personne qu'il vous sacrifie ! C'est elle-même : vous ne songez point à ce que vous dites. Hé, paix. Ne prenez pas garde à ce qu'elle dit. Hé, Mademoiselle de grâce. Comment donc, qu'est-ce que cela signifie ? Sa sœur Nicole ? Oh, point d'invectives, Mademoiselle Marotte, vous deviendrez aussi fille de qualité, quelque jour : l'amour donne des lettres de noblesse. Non, s'il vous plaît, que les querelles finissent. Elles sont rivales, c'est ce qui les brouille : mais on les trahit l'une et l'autre, il faut que la ressemblance de leur destinée les réconcilie. Il en trompe bien d'autres. C'est notre animal amphibie. La compagnie est bien votre servante, Monsieur. Ce ne sont pas encore là toutes vos rivales, j'en connais bien d'autres. De quelle manière nous y prendrons-nous ? Vous êtes en bonne main, laissez-vous conduire. Oui, l'esprit et le savoir-faire sont l'apanage des Gascons : vous avez raison. Elle ne saurait tarder beaucoup encore. Il faut se voir, et convenir de ses faits avant toutes choses. Vous vous expliquerez ensemble, elle vous aime ; et la précaution qu'elle prend de marier sa fille, fait assez voir qu'elle a dessein... Et à Monsieur Farfadel, même ; c'est elle dont votre ami Clitandre est amoureux. Voici la Dame. Votre servante, Madame. Monsieur le Chevalier a raison, Madame ; vous hasardez moins à la Foire, qu'en lieu du monde. Cela est fort prudent ; et supposez même qu'on vous vît ici, ne pourriez-vous pas y être venue faire provision de confitures pour les malades ? Il n'y a point de régularité qui puisse tenir là contre, n'est-il pas vrai ? Voilà un gentilhomme qui se connaît, Madame. Hé, à quoi songez-vous donc, Monsieur du Prologue, de commencer ainsi sans avertir vos camarades ? Hé, le moyen ? Mademoiselle Madelon est enfermée dans sa loge avec ce trésorier de la Douane, la servante a emporté la clef ; je m'en vais chercher un Serrurier pour leur faire ouvrir. Et agissantes même. Voilà un beau Cercle ! Et moi, qui ne me marie point, je dresserai les articles. **** *creator_dancourt *book_dancourt_foiresaintgermain *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_foiresaintgermain *dist2_dancourt_prose_comedy *id_LORANGE *date_1697 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_lorange Café, thé, chocolat ? Vin de saint Laurent ? Vin de la Ciotat ? Vin de Canarie ? Je donne le bonjour à mon agréable voisine. Parbleu, je ne cherche point à la faire, je cherche à la renouveler, ma voisine. Quelquefois un peu par-ci, par-là ; mais cependant, je vous l'avoue, j'ai eu toutes les peines du monde à vous remettre, parce que je ne pouvais me figurer que Madame la Marquise de la Papelardière du Marais, fût devenue Marchande de robes de chambre à la Foire. J'en fais l'expérience par moi-même. Je n'ai pas toujours vendu du Café, et je n'ai d'Arménien que la barbe. C'est lui-même, ma chère Marquise, toujours fidèle, toujours amoureux de vis charmes. Elle est allée tenir compagnie à ton Marquisat, ma chère Marton. Comment, morbleu, de grands voyages ? J'ai pensé faire celui de l'autre monde. Oui, vraiment, il y a eu des ordres exprès pour cela, et ils ont été affichés, même ; mais je n'ai pas voulu les suivre ; j'aime à vivre, moi, comme tu sais. La chose est problématique ; comme enfant de Paris, Écuyer sieur de Lorange, et Chevalier de Gourdinvilliers, les ordres sont précis : mais comme Arménien, naturalisé depuis trois semaines, il n'y a rien à craindre. C'est pourquoi, mon enfant, supprime, s'il te plaît, le nom de Lorange, et ne me nomme que l'Arménien. J'entends bien, il y a aussi quelques ordres expédiés sous ce nom-là, n'est-ce pas ? C'est la même qui nous domine ; nous finirons ensemble de manière ou d'autre. Si vous vouliez, Monsieur, rafraîchir votre impatience de quelque petit verre de liqueurs, j'en ai des meilleures de la Foire. Hé, point d'emportement. Comment donc ? Oh, vous avez tort, Monsieur le Breton, il faut passer condamnation, cela n'est pas bien. Je gage en deux jours d'emporter l'affaire, quelque difficile qu'elle puisse être. Cela est de conséquence. Cela promet quelque chose. Cet animal-là sera difficile à apprivoiser. Mademoiselle Mousset ? Vous n'en sortirez pas en vingt-quatre heures. Non, assurément. Éloignez-vous, et me laissez faire, je vous débarrasserai des incommodes. Éloignez-vous, vous dis-je. Elle vient par ici, n'est-ce pas ? Vous avez de l'esprit, secondez-moi bien, seulement. Gare l'eau. Je viens vous demander mille pardons, Madame, du petit incident de la chocolatière. Je suis bien fâché, Madame… Nous sommes bien mal adroits tous tant que nous sommes. Je ne vous le conseille pas, il n'y a pas d'apparence. Bon, voilà déjà un de nos espions de parti. À qui en avez-vous ? Que vous fait-on, Monsieur ? Hé ! C'est mon fripon de l'autre jour, je le reconnais. Il a coupé, il n'y a que trois jours, à une fort honnête Procureuse de la rue Galande, une Croix de diamants de près de dix pistoles, que deux jeunes Académistes lui avaient donnée. Oh ! Tu as beau crier, tu iras en galère. Nous leur avons donné tout le temps et toute la commodité de le faire. On a prévenu ses ordres ; l'espion pris en a été quitte pour quelques soufflets, quelques coups de pied dans le ventre, quelques croquignoles ; le tout pour lui apprendre à écouter aux portes. Est-il possible ? Hé quelle ? Quoi, ce n'est que cela ! Voilà une belle bagatelle ! Il a tort, les mariages en second sont les moins embarrassants, et les moins dangereux pour les suites. Oui. De robe, d'épée, ou de finance ? Oui, cela doit bien rendre. Le garçon qui montre le Cercle est de mes intimes. Mais il faudrait… Ce garçon-là donne furieusement dans la bagatelle, il ne s'attache point au solide ; je ne m'étonne point qu'il ait été si longtemps à entamer l'intrigue de son maître. Ce sont des vapeurs : mais je ne les hais pas, les vapeurs, cela a ses commodités. Allons, Mademoiselle, allons, revenez à vous. Diantre soit des vapeurs, elle m'étrangle. Je me donne au diable si ce sont des vapeurs. C'est une fille qui va devenir mère, ne vous y trompez pas. Tâchez de reporter cela jusques chez vous, Mademoiselle ; allons, courage. Écoutez, il est fâcheux que cela arrive en pleine Foire, la chose ne sera pas secrète ; vous avez raison : mais au bout du compte… Oui, elle est folle, sans contredit, elle a les yeux hagards. Maugrebleu de la masque, avec sa folie. Et vous m'avez donné un soufflet. Il fallait lui donner le soufflet que j'ai eu, cela eût été dans l'ordre. Et fort vaporeuse, de par tous les diables. Il ne fait pas bon ici. Un portrait en cire ? Ce ne sont pas là des bagatelles. Parbleu, la Foire sera bonne, les marchandes s'amassent. C'est un terrible épouseur que cet homme-là. Il en a de toutes les façons. Prenez garde d'étouffer, vous-même. Gare les vapeurs. Hé ! Mademoiselle. Hé, la, la, la, en pleine Foire ? Doucement. Des carognes dans la maison de Kermonin ! Vous n'y songez pas, Monsieur le Breton. Elles n'en étaient encore qu'aux injures, elles s'allaient mettre aux soufflets quand tu es arrivé. Oh, parbleu, le hasard y a plus de part que le reste. Et voilà Mademoiselle Nicole, qui est la sœur de Monsieur le Breton, par exemple. Un vieux Seigneur du quartier saint Roch, qu'on appelle Monsieur Farfadel dans le monde. Veut-t on me donner la conduite de l'affaire ? Je réglerai vos rôles, ne vous mettez pas en peine, vous nous aiderez d'un petit opéra de votre façon, Monsieur le Breton ? Cela sera le mieux du monde ; et j'y joindrai, moi, de mon côté, une espèce de cercle de mon imagination… Oui… Justement… Il n'est rien tel que de mêler les divertissements de la Foire. J'aurai bientôt fait, dépêchez. Vous ne demeurez pas loin d'ici, Mademoiselle Nicole ? Dans la rue de Tournon ? Voilà qui est à merveilles. Allons chez vous nous concerter, seulement. Allons, vous dis-je, et me laissez faire, je ne gâterai rien, sur ma parole. Voyez ici, Messieurs le Cercle nouveau, des Figures parlantes, aussi hautes que le naturel ; voyez, ici, Messieurs. Si ces Messieurs veulent, en attendant, pour ne point perdre de temps, on montrera le cercle. Vous serez surpris de celui-ci, je vous en réponds. Je ne suis que le garçon, Monsieur, c'est une petite Bretonne qui est l'Entrepreneuse. Oui, Mademoiselle de Kermonin : vous connaissez cela ? Ce sont des figures parlantes que celles-là. **** *creator_dancourt *book_dancourt_foiresaintgermain *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_foiresaintgermain *dist2_dancourt_prose_comedy *id_URBINE *date_1697 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_urbine Venir tant de bonne heure à la Foire Saint-Germain ! Vous n'y portez pas attention, Chevalier ? Hé donc, en venez-vous toucher quelqu'une aujourd'hui ? Vous seriez amoureux, mon frère ? Cette Marchande paraît bien de vos amies, mon frère, je lui suis tant et plus acquise. Tant nouvelle je suis à la ville, que je n'en connais pas encore les merveilles. Hélas, Madame ! J'ai confusion d'être sortie de la Province ; mais je m'y recache dans le moment que j'aurai mis quelque fin à mes affaires. Je reviens vous trouver, Madame, vous me paraissez une personne tant gracieuse. Le scélérat ! Il est sans distinction comme sans bonne foi. Il ne sera rien que je ne fasse pour être vengée de ce misérable. Je lui donne la carte blanche, qu'il fasse. Mais il serait besoin… Tu ne t'échapperas pas de moi, scélérat. **** *creator_dancourt *book_dancourt_foiresaintgermain *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_foiresaintgermain *dist2_dancourt_prose_comedy *id_CLITANDRE *date_1697 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_clitandre Les valets sont bien nés pour nous impatienter ! À quoi diantre ce maraud-là s'amuse-t-il ? Mon coquin de Breton se moque de moi, ma chère Mademoiselle Mousset : je lui ai dit de me venir rendre réponse, il y a deux heures que je l'attends : je suis sur des épines. Non, mon enfant, je vous remercie. Ah ! Te voilà, bourreau ? Comment, misérable ? Hé, quelles nouvelles m'apportes-tu encore ? Çà, voyons. Quoi, pendart ! Je te ferai mourir sous le bâton. Ah ! Je n'en puis plus. Oui, je perds l'esprit, je l'avoue ; mais c'est ce malheureux, qui me fait tourner la cervelle. Je vous en fais juges vous-mêmes. Depuis un mois, je suis amoureux de la plus aimable personne du monde. Monsieur le Breton, ce charmant Monsieur le Breton que vous voyez, connaît tout l'excès de mon amour ; il est témoin de tous les tourments que me fait souffrir l'impossibilité d'avoir accès chez cette Belle. Et le bélître a la constance et la malice de ne pas imaginer aucune chose pour me rendre le moindre service. Tu vois, infâme. Ah ! Mes amis, de grâce, unissez-vous tous trois pour me rendre service. Si vous pouvez y réussir, vous pouvez aussi compter sur une parfaite reconnaissance. Toute charmante, toute adorable. Hé ! Mes chers enfants, ne m'abandonnez pas, je vous en conjure. Ah ! Mon cher Breton : je n'en puis plus, tous mes sens sont interdits. Par où commencer ? Comment l'aborder ? Que lui dirai-je ? Ah, juste Ciel ? Serait-il possible ? Pardonnez, charmante personne, à la violence de mon amour les artifices innocents dont on se sert pour me faciliter les moyens de vous entretenir : depuis longtemps je vous adore, je n'ai pu vous parler que des yeux, et je n'ai rien lu dans les vôtres qui m'ait flatté du moindre espoir. Enfin, j'ose, en tremblant, vous consulter ici moi-même sur ma destinée : mon cœur est tout à vous, avez-vous disposé du vôtre ? Que faut-il faire pour l'obtenir ? Si vous le destinez au plus tendre, au plus fidèle, au plus passionné de tous les amants, aucun autre que moi n'a droit d'y prétendre. Vous refusez de vous déclarer ? Que je suis à plaindre ! Vous avez un engagement, Madame ! Ah, je suis mort ! Divine Angélique ! À quel excès de joie… Sais-tu des moyens pour cela ? Je n'ose vous accompagner, Madame ; mais mon cœur et mon esprit ne vous quittent pas un seul moment, je vous jure. Puisque tu approuves mon amour, songe donc à me rendre heureux, je te prie. Quoi, prude comme elle est, tu as des liaisons avec elle. Je vais te les renvoyer, et revenir ensuite chez Laigu, pour y regarder du moins Angélique, s'il ne m'est pas permis de lui parler. Ah ! Ma chère Mademoiselle Mousset ; je me meurs d'amour, de rage, et de jalousie. Un indigne rival… Ah ! Mon pauvre Chevalier, tu auras bien de la peine. La mère d'Angélique à la Foire ! Par quelle aventure… Si j'osais espérer, Madame… Ah, juste Ciel ! Que deviendra tout ceci ? C'est Breton, c'est lui-même. Où tout cela nous mènera-t-il ? La figure de Monsieur Farfadel ! Ah ! Madame. **** *creator_dancourt *book_dancourt_foiresaintgermain *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_foiresaintgermain *dist2_dancourt_prose_comedy *id_LEBRETON *date_1697 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_lebreton Oui, Monsieur, c'est moi-même, qui ne veux plus me mêler de vos affaires, et qui viens vous demander mon congé. Je ne vous en apporte aucune ; il n'y a rien à faire, il faut nous séparer, et vous n'avez qu'à chercher fortune. Ne le lâchez pas, au moins, il devient fou, je vous en avertis. Il ne s'en aperçoit pas, lui : mais cela ne laisse pas d'être. Il ne sait ce qu'il dit, comme vous voyez. Vous voyez bien que ce n'est pas moi qui lui gâte l'esprit, que diable ! Oui, je vois de belles choses, assurément. Monsieur l'Arménien ? Mademoiselle Mousset ? Je me donne au diable ; vous y seriez bien empêchés, vous autres ; et pourtant les Marchands Forains ne sont pas les moins habiles pour ces affaires-là. Je ne suis point jaloux, Monsieur ; je cède l'entreprise, et je leur servirai de croupier même, en cas de besoin. Je vais vous en informer. Premièrement, la fille est une jeune personne. Oui, toute adorable, d'une physionomie très vive et très coquette. La mère est une veuve entre deux âges, un exemple de régularité ; femme très prude, et très rébarbative se son métier. La suivante est un monstre de laideur, et un dragon de vertu, plus affreuse que le diable, et par conséquent plus méchante. Avec cela il y a dans la maison une espèce d'Abbé qui sert d'Intendant, un valet de chambre qui a les gouttes, un cuisinier manchot, un cocher borgne, et trois vieux laquais qui n'ont jamais bu de vin. Le moyen de faire connaissance avec ces gens-là ? Ils sont tous zélés pour la mère, et gardent tous la fille à vue. Les entrepreneurs n'ont qu'à tabler là-dessus, et faire leurs diligences. Bon, il y a près d'un mois que j'y travaille, et je n'ai pu l'entamer encore. Ah ! Monsieur, voilà Mademoiselle Angélique, je pense, elle vient de ce côté-ci, même. Vous ne lui direz rien, s'il vous plaît. Ce sera assez de la regarder ; la maudite suivante, et le maître Laquais sont avec elle. Elle va passer, la voilà presque au milieu de la rue. Il nous quitte et rentre chez lui ; que diantre va-t-il faire ? Angélique et sa suite approchent, nous les manquerons. À qui ? Monsieur l'Arménien vient de vider une chocolatière sur le corps de la surveillante. La fortune m'est bien favorable, Madame, de m'offrir l'occasion d'un petit service. Vraiment, voilà une vieille Demoiselle qui est bien délicate ? On vous prendrait pour quelque bonne fortune de la rue de la Lingerie. Je m'en vais bientôt faire décamper l'autre. Comment, coquin, tu fouilles dans ma poche ? Oui, toi-même. C'est un coupeur de bourses, Madame, je l'ai pris sur le fait. On vole, on pille auprès de votre boutique, et vous souffrez cela, Monsieur l'Arménien ? Voilà des preuves convaincantes, allons, marchons chez le Commissaire. Hé bien, nos amants sont-ils contents l'un de l'autre ? Se sont-ils abouchés ? À quelle intention ? Comment s'est passée l'entrevue ? Cela n'est rien, mon enfant, mon maître n'est pas scrupuleux, il l'épousera en sec ondes noces avant qu'elle soit veuve. Comment s'y prendre ? Quel homme est-ce ? Voilà un bon sujet, Monsieur l'Arménien. Il va donner apparemment à son épouse prétendue quelques-uns des divertissements de la Foire, le Cercle, le petit Opéra, les Danseurs de corde ? Ne pourrions-nous point nous servir de cette occasion ? Il n'importe : commençons par-là ; c'est toujours quelque chose. L'Entrepreneur du petit Opéra est le bâtard d'une de mes tantes, et la petite Danseuse de corde, est la maîtresse de mon neveu. Nous sommes en pays de connaissance. Ne vous mettez pas en peine, je vais toujours en me divertissant préparer un petit régal de Foire, qui finira peut-être agréablement notre intrigue. Songez au dénouement, vous autres. Mais, mais : je vous laisse le soin de l'utile et du nécessaire, et je ne me charge que de l'agréable ; je fais bien les choses comme vous voyez. Notre petit opéra est disposé à faire merveilles. Je viens maintenant savoir… Je ne me trompe point, c'est elle-même. Ah ! Carogne, comme te voilà brave ! Que diable voulez-vous dire avec votre Kermonin : c'est ma sœur Nicole, qu'il y a quatre ans que je n'ai vue. Bon, je te perds, je te retrouve, au contraire, et en bon état, même : j'en suis bien aise. Hé, comment diable es-tu fait fortune ? Ces Dames ont quelque dispute ensemble ? Que je ne trouble point votre conversation, Mesdames, je ne prétends point vous déranger en aucune manière. Qu'est-ce que c'est que ce Monsieur Farfadel ? Je viens de le rencontrer en venant ici, il se promène dans l'autre allée avec Angélique, mon maître les suit pas à pas, et ne les perds pas de vue. Oui, Monsieur, je l'ai rencontrée par hasard ; elle a fait fortune par aventure, il se trouve, par accident, que ces deux Princesses ont le même adorateur de leurs charmes. Ce galant homme, par cas fortuit, est d'autre part rival de mon maître, nous voudrions bien le berner de dessein formé, et comme le hasard vous conduit ici, vous serez, si vous voulez, de la partie. Vous connaissez ce Gentilhomme-là, Monsieur ? Tout est disposé pour cela, Monsieur l'Arménien. Assurément. Je vais achever de préparer le mien. Quand vous serez prêt, vous aurez soin… Messieurs, le grand Opéra de la foire Saint-Germain ? C'est ici, Messieurs, entrez vite, Mesdames. Le Triomphe de Vulcain ! Messieurs ? Le voilà qui va commencer ; entrez vite. C'est moi qui chante le Prologue. Allons Messieurs de l'Orchestre, un petit prélude. Ô que la Foire Saint-Germain Grossit la Cour de Vulcain. Qu'est-ce qu'il y a pour faire tant de bruit ? À qui tient-il qu'on ne continue ? Maugrébleu de ces Trésoriers, Ils font toujours faire quelque impertinence à nos filles d'Opéra. Nous vous demandons bien pardon, Messieurs. Oui, mais sans conséquence, au moins. Ô que la Foire Saint-Germain Grossit la Cour de Vulcain ! L'Amour y met en étalage Ce que son art a de plus fin. Les présents y sont en usage : Et telle femme y vient fort sage, Qui l'est bien moins le lendemain. Ô que la Foire Saint-Germain Grossit la Cour de Vulcain ! Le soir aux chandelles Tout brille en ces lieux. Souvent les moins belles Y charment les yeux. Un cœur prompt à se rendre Peut s'y laisser prendre : Mais sitôt qu'il est jour, Adieu le charme de l'amour. L'amour est un Dieu commode, Qui s'est fait Marchand Forain. La marchandise à la mode, Se prend dans son magasin ; Et si l'on ne s'en accommode, On peut le changer le lendemain. Quand l'Amour donne en partage Des attraits, des grâces à foison, On en fait un doux usage Par plaisir et par raison : Mais, qui vend au Printemps de l'âge, Achète dans l'arrière saison. Que l'emplette est bonne et belle D'une aimable fille de quinze ans ; Mais si l'on la veut fidèle, Il faut la chercher longtemps ; Marchandise de ce modèle, Ne se trouve pas chez nos Marchands. Boutique la mieux garnie, N'est pas celle où vont plus de gens ; Pour attirer compagnie, Il faut de certains talents. Marchande coquette et jolie, N'a jamais eu faute de chalands. Au seul bonheur de vous plaire, Nous bornons nos vœux et nos talents ; À cette importante affaire, Nous donnons tous nos moments. Si nous pouvions encore mieux faire, Nous serions heureux, et vous contents. **** *creator_dancourt *book_dancourt_foiresaintgermain *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_foiresaintgermain *dist2_dancourt_prose_comedy *id_ANGELIQUE *date_1697 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_angelique Ah, juste Ciel ! Qu'est-ce que cela ? Voilà des choses qui ne sont pas permises. Moi ! Je ne me plains point, je n'ai rien eu. Mais vous qui êtes une personne si sage, et si raisonnable, Madame Isaac, qu'est-ce que le Ciel punit en vous, je vous prie ? Ce n'est pas moi, Monsieur l'Arménien, à qui vous devez… Que je m'en retourne, moi, Madame ? Vous êtes la maîtresse, Madame : pour moi qui n'ai point à changer de hardes, et qui ai des emplettes à faire, vous trouverez bon que j'y demeure. Je vous suis obligée, Madame. Ah ! Que vous êtes ridicule avec vos manières ! Allez, Madame, il suffit de moi pour me garder, et d'un laquais pour vous rendre compte de mes actions et de mes paroles. Vous me ferez plaisir, je n'en sais pas de plus désagréable que la vôtre. Ah, que je suis fatiguée de l'esclavage où l'on me fait vivre ! N'en sortirai-je que pour passer dans un autre encore plus rude ? Quoi, Madame ! C'est mon laquais, Monsieur. Doucement, Messieurs, c'est mon laquais je vous assure. Vous n'y songez pas. Jasmin ? Mais vraiment, ces violences-là ne se font point. Qu'on prenne garde à ce qu'on fait, c'est mon laquais, encore une fois. Expliquez-moi ce mystère, Madame. Comment, Madame ? C'est lui, c'est Clitandre : je suis perdue. Quand je vous aurai dit l'état où je suis, vous vous trouverez bien plus malheureux encore. Dans quatre jours on me marie. Écoutez-moi, Monsieur. Vous me dites que vous m'aimez, vos regards m'en ont assurée, et leur langage s'est fait entendre dès le moment qu'ils m'ont parlé. La liberté de mon procédé va vous étonner, peut-être : mais la situation où je me trouve suffit de reste pour le justifier. On prétend me faire épouser un vieux mari que je déteste. Ma mère est riche, je suis jeune, tout le monde me trouve belle, consultez bien encore votre cœur et vos yeux. Je vous aime, ne me trompez point, si vous m'aimez véritablement, n'épargnez rien pour faire changer les sentiments de ma mère, et trouver les moyens d'assurer ensemble votre bonheur et mon repos. Monsieur Farfadel. Lui-même ; le connaissez-vous ? Serait-il possible ? Elle a raison, séparons-nous. Je vais dans la boutique de Laigu, envoyez-y mon laquais et ma vieille surveillante, en cas qu'elle vienne. Non, Monsieur, ni présents, ni régal, je ne recevrai rien de vous, s'il vous plaît. Ah, juste Ciel ! Ma mère ! Vous deviez aller aux prisonniers, Madame ; par quelle aventure… Nous avons changé de sentiments l'une et l'autre, Madame, il n'y a rien de plus naturel ; et vous ne devez point blâmer en moi ce que vous avez fait vous-même. **** *creator_dancourt *book_dancourt_foiresaintgermain *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_foiresaintgermain *dist2_dancourt_prose_comedy *id_MADAMEISAAC *date_1697 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_madameisaac Comment donc ? Quels insolents ! Quelles canailles ! En pleine Foire, jeter des immondices par les fenêtres ! Un procès-verbal ? Des témoins ? Un honnête Commissaire ? Hé, la, la, c'est bien employé, Mademoiselle ; si vous aviez été au Palais, comme Madame votre mère vous l'avait dit, et non pas à la Foire… Hom, hom, voilà comme le Ciel punit vos extravagances. L'impertinence que j'ai eue d'adhérer à vis sottises : mais cela ne m'arrive pas souvent. Oh, vous me paierez mes hardes, si elles sont gâtées. Mais voyez-vous ce brutal avec ses excuses ? Hé, miséricorde, vous me cassez les jambes, vous marchez dessus. Ah, juste Ciel ! Vous me déboîtez l'épaule, Madame. Allons, Mademoiselle, retournons au logis, s'il vous plaît. Assurément. Voulez-vous que je demeure dans cet équipage-là ? Oh, je n'y resterai pas, je vous en réponds. Je vous laisserais ici toute seule ? Ah, ah ! Vous le prenez sur ce ton-là ? Oh bien, bien, je ne reviendrai pas, moi, mais je vais vous envoyer compagnie. Je te la recommande, ne la quitte pas de vue. **** *creator_dancourt *book_dancourt_foiresaintgermain *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_foiresaintgermain *dist2_dancourt_prose_comedy *id_JASMIN *date_1697 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_jasmin J'ai de bons yeux, ne vous mettez pas en peine. Moi, Monsieur ? Messieurs… Je suis honnête garçon, ne me frappez pas. En vérité, Mademoiselle… Cela n'est pas vrai, je vous assure. Au secours, à la force. **** *creator_dancourt *book_dancourt_foiresaintgermain *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_foiresaintgermain *dist2_dancourt_prose_comedy *id_MONSIEURFARFADEL *date_1697 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_monsieurfarfadel Hé, laquais, qu'on ne me suive point. Et que mon carrosse aille m'attendre à la petite porte de la rue des Cannettes Bon jour, mon enfant, je ne suis jamais sans cela, comme tu sais. Et avec tout cela je n'aime point les femmes, elles sont toutes folles de moi. Je suis un peu coquet de mon naturel ; je les laisse se flatter ; je dis que je veux épouser l'une, je promets de faire la fortune de l'autre ; je donne des régals, des cadeaux, des promenades ; somme totale, je les amuse, et je ne conclus rien. Oh ! Cela me donne un grand relief dans le monde. Quand quelque petite fortune me donne dans la vue, je donne d'abord de l'emploi à ses frères, ou à ses cousins. Quand j'ai soupé trois ou quatre fois avec elle, crac, je les révoque. J'ai choisi la bonne, moi. La manière de se distinguer à la guerre est dangereuse ; celle de la robe est trop sérieuse, et trop pénible ; il n'est rien tel que de briller dans la Finance. Je n'ai que du plaisir, je ne cours point dans le risque, et je suis pourtant un homme considérable, au moins. Oh, pour cela oui, je t'en réponds. Je suis à la veille d'en épouser une toute des plus jolies. Oui, mon enfant, j'ai mes raisons. Cette fille est riche, et ce qui fait que je viens ici incognito aujourd'hui, c'est que la mère est une prude qu'il faut ménager ; je ne veux pas manquer cette affaire, elle est sérieuse : mais quand la dupe sera une fois embarquée, je ne suis pas d'humeur à me contraindre, et je me rejetterai dans la bagatelle. J'y en ai deux, Mademoiselle Mousset : un chez toi avec une petite grisette. On viendra, les petites grisettes sont exactes, elles n'ont pas tant d'affaires que les femmes de qualité : en attendant je m'en vais chez Laigu, où se doit trouver une petite bretonne de ta connaissance. Je ne te dis pas adieu, Mademoiselle Mousset. Quoi, dans les termes où nous en sommes, vous pouvez vous défendre… Vous nous surprenez dans une espèce de tête à tête, que votre aveu rend permis, Madame. Je ne demande pas mieux que de faire les honneurs de la Foire. Hé, je suis tout prêt à l'épouser, tirez-moi d'affaires. Ils s'entendaient tous comme larrons en Foire. **** *creator_dancourt *book_dancourt_foiresaintgermain *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_foiresaintgermain *dist2_dancourt_prose_comedy *id_MAROTTE *date_1697 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_marotte Bonjour, Mademoiselle Mousset. N'avez-vous point vu Monsieur Farfadel aujourd'hui ? Il avait gagé une discrétion contre moi, qu'il serait ici le premier, il a perdu, comme vous voyez. Il perd exprès, pour me donner ma Foire, il fait les choses de bonne grâce. Oh, tant ! Il y a près d'un mois que nous nous connaissons. Il donne une pension à ma tante, une commission à mon oncle ; il a mis mon frère au Collège, et nous espérons qu'il m'épousera. Pas si fréquentes qu'il voudrait. Il garde des mesures à cause d'une certaine femme qu'il ne veut pas tout à fait désespérer, et qu'il quitte pour moi. Oh, Monsieur Farfadel a beaucoup de conduite, au moins, c'est un fort honnête homme. Une petite folle, une petite Bretonne, qui a des vapeurs à chaque bout de champ. Il dit qu'elle est si ridicule, si ridicule ; il ne peut plus la souffrir depuis qu'il m'a vue. Hélas ! C'est peut-être de vous, Madame. Je ne connais pas la petite bretonne : mais vous prenez feu d'une manière… Je vous le disais bien, qu'elle était folle. Et moi, je vous montrerai à vous taire. Une petite grisette de Bretagne. Les petites Bourgeoises de Paris valent bien certaines personnes de qualité, Mademoiselle Nicole. Monsieur Farfadel me tromperait aussi ? Ah ! Le vieux coquin. Ma tante n'aura plus de pension, elle sera bien fâchée ; mais il n'importe. Il n'a qu'à dire, je ferai ce qu'il voudra. Oh, je te dévisagerai, moi ; je suis aussi méchante que les autres. **** *creator_dancourt *book_dancourt_foiresaintgermain *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_foiresaintgermain *dist2_dancourt_prose_comedy *id_MADAMEBARDOUX *date_1697 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_madamebardoux Bonjour, Mademoiselle Mousset. Je vous ai fait attendre, Monsieur le Chevalier : mais j'ai mes heures marquées, et je me suis fais une règle de vie, que la raison et la bienséance ne me permettent pas de déranger. Je tâche de me conserver la réputation que les premières années de mon veuvage m'ont acquise. La démarche que je ais aujourd'hui pourtant de vous donner un rendez-vous à la Foire… J'ai dit chez moi que j'allais visiter les prisonniers de l'Abbaye. Et avec toutes ces précautions, Monsieur le Chevalier, si l'on me voit avec vous, je hasarde étrangement ma réputation. Qu'il a d'esprit, Mademoiselle Mousset, qu'il a d'esprit, et qu'il s'énonce bien ! Ah, le joli homme ! La vertu la plus austère, Monsieur le Chevalier, n'est point à l'épreuve de certains mérites triomphants ; et je veux bien vous avouer que le vôtre a fait sur mon cœur… Et trop, peut-être. Je ne crois pas, Monsieur, que vous pensiez que je puisse avoir d'autres vues que celles… Une personne comme moi ne devrait pas être exposée à entendre des discours si peu respectueux… Si vous avez pour moi les sentiments que je souhaite, vous pouvez compter, Monsieur… Tout se terminera bien, je vais avertir nos gens, donnez-vous patience. Quel est ce Gentilhomme, Monsieur le Chevalier ? Mon gendre, Monsieur ! Cela ne se peut pas. Je suis engagée de parole avec un autre, et le contrat doit être signé demain. Mon gendre et ma fille sont ici ! Je vous croyais au Palais, ma fille ; par quel hasard… Oui, mais j'ai eu mes raisons pour… Il y a ici quelque chose que je n'entends pas bien. Je ne suis pas femme de spectacle : mais la Foire, et la compagnie… Que veut dire ceci ? Cela passe la raillerie, Monsieur le Chevalier. Comment ? Expliquez-moi donc ce mystère ? Et moi, Monsieur le Chevalier, je ferai tout ce que vous me conseillerez de faire.