**** *creator_dancourt *book_dancourt_trahisonpunie *style_verse *genre_comedy *dist1_dancourt_verse_comedy_trahisonpunie *dist2_dancourt_verse_comedy *id_DONFELIX *date_1707 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_donfelix Plaise au ciel que pour vous ma visite en soit une. Je vous en instruirai, n'en soyez point en peine. Vous connaissez mon nom, ma naissance et mon bien ; Don André, là-dessus je ne vous dirai rien. Quel objet est le vôtre ? Ignorez-vous combien les personnes de cœur Tel que je suis, sont tous délicats sur l'honneur, Quand cet honneur surtout regarde ma famille ? Pour fruit de mon hymen j'eus une seule fille, Don André, vous avez pour elle des desseins, Vous ne m'en parlez point, et c'est dont je me plains. Sur ses pas en tous lieux vous cherchez à paraître, Vous passez fort souvent la nuit sous sa fenêtre, Près d'elle au cours, au temple, on vous voit tous les jours ; Cela donne sujet à de mauvais discours : Et quoique sa vertu n'en souffre aucune tache, Tout Valence en murmure, et c'est ce qui me fâche, Et m'engage à venir vous dire doucement, Qu'il me faut là-dessus un éclaircissement. Enfin à Léonor quand Don André s'adresse, Il ne se flatte pas d'en faire une maîtresse ; Et si c'est son dessein de lui donner sa foi, Je crois qu'il eût déjà dû s'adresser à moi. Dans cette incertitude il est de ma prudence De savoir là-dessus ce qu'il veut, ce qu'il pense. Arrêtez, Don André, votre discours m'irrite, Je connais Don Garcie, il n'est pas sans mérite ; Il aime Léonor, il l'a fait demander, J'en conviens. L'accorder à ses feux ! Quelle erreur est la vôtre ? Apprenez qu'elle n'est ni pour l'un ni pour l'autre, Et qu'il faut cesser vos assiduités. Écoutez, Don André, de chagrins n'outrez point ma vieillesse. J'aime, vous le savez, ma fille avec tendresse, Et quand je vous demande un éclaircissement, C'est que j'ai pris pour elle un autre engagement. Un de mes bons amis pour son fils la demande, Je l'attends de Madrid. Tout ce que j'appréhende, C'est que ce Cavalier arrivant aujourd'hui, Quelque bruit de vos feux ne vienne jusqu'à lui. Tout le passé n'est rien, mais de fâcheuses suites Naîtraient, si vous faisiez de nouvelles poursuites ; Comme votre dessein n'est pas de l'épouser, Avec tranquillité laissez m'en disposer. J'en prends votre parole, et me retire. Adieu. Je viens pour t'avertir, ma fille… Don Garcie ! Vous chez moi ! Qu'est-ce à dire… avez-vous dessein de m'offenser ? Don Garcie ? Oui, si vos feux n'avaient point éclaté ; Mais tout le monde en parle, et pour le faire taire, À ce que je me dois je saurai satisfaire. Il faut qu'incessamment Un bon hymen finisse un tel empressement. Hé bien il peut entrer. Mon gendre. Que ce m'est un plaisir sensible de vous voir : Don Juan ? Nous l'irons voir ensemble. Approchez, Léonor. Voilà l'époux que mon choix vous destine, Donne-lui votre main. Cela ne sera rien, qu'on ne la quitte pas. Ces diantres de vapeurs… Madame Léonor… Ô fille impertinente ! Ô contretemps fâcheux ! Ciel ! Qu'aperçois-je encor, et que ma peine est grande ! Chez moi Don André ! Quand vous m'avez promis… Qui vous amène ? Un de vos amis ? Vous êtes bon et sage ; Mais Don André. Sachez donc… C'est de vous seul je crois que vous en devez prendre. Et dans l'état où sont les affaires, mon gendre, Vous êtes maître ici, commandez, ordonnez, Tout vous obéira, mes ordres sont donnés. Mais vous me surprenez par cet éloignement. À qui dois-je imputer cette prompte retraite ? De ma fille, de moi, seriez-vous mécontent ? Expliquez-vous, parlez ; car enfin je prétends… Un départ si soudain… Je suis au lit depuis un mois ; Avec la fièvre continue ; Par vos lettres que je reçois, La violence en paraît suspendue ; Mais quoique le mal diminue, Je ne crois pas aller loin, toutefois. Hâtez-vous, mon cher fils, partez, venez vous-même Auprès d'un père qui vous aime, Recevoir ses derniers adieux, Et lui rendre la vie, ou lui fermer les yeux. Je croirais faire un crime De blâmer un devoir si saint, si légitime. Allez donc, et surtout hâtez votre retour. Léonor vous plaît donc? Vous laisserez ici votre équipage ? Il vous suit. Hé bien, il restera céans. Point de vaines défaites. C'est m'obliger ; ainsi lorsque vous reviendrez, De même sans façon ici vous descendrez, Nous vous regardons tous comme de la famille. Ah ! Vous voilà, ma fille. Je suis ravi que vous vous portiez mieux. Votre époux pour un temps s'éloigne de ces lieux. Adieu, si vous m'aimez vous ferez diligence, J'attends votre retour avec impatience. Ouvrez donc. Ah ! Don Juan, vous n'êtes point parti ? Ah, Ciel ! En revenant de Ville, Un de mes gens là-bas, fort effrayé, m'a dit Qu'en cet appartement il entendait du bruit, Qu'on s'y battait. Quoi, Don André partout accompagne vos pas. Et ma fille ? Chez elle entend-on quelque chose ? Volontiers. Rendez-vous de Dame ? Ah ! Dans l'âge où vous êtes, Il faut bien se prêter aux choses que vous faites. L'ai ouï du bruit, ce bruit tout-à-coup a cessé ; Qu'en juger ? Et chez moi qu'est-ce qui s'est passé ? Que j'ai d'inquiétude en l'âme ! Ou je suis fort trompé, Ou d'un chagrin fort vif, Don Juan occupé. Qu'est-ce ? Vous me semblez interdite, inquiète. Hé, pourquoi donc ? Mais, ma fille, en est-ce là la cause ? Car je crains très fort, moi, que ce soit autre chose. Si ce n'est que cela tranquillisez-vous donc. Don Juan ne part pas. Son père est mort. Écoute, mon enfant, j'entends la raillerie, Et m'accommode peu de ta plaisanterie. Çà, ma fille, parlons plus sérieusement, Quel bruit se passa hier dans votre appartement ? Don Juan, je ne sais pourquoi, m'en fait mystère ; Mais enfin les valets qui parlent d'ordinaire… Paix, tais-toi. Finis donc. Ah, ma fille ! Vous ne me dites rien ? Non, ce qui vous confond, C'est vous à qui je parle, et Jacinte répond. Paix! Je ne puis savoir ce secret-là de vous. Rentrez. Quelque mystère est caché là-dessous ? Je l'approfondirai pourtant, quoi qu'il en coûte, Et Don Juan qui vient m'en instruira, sans doute. Don Juan, de quel trouble est votre âme saisie ? Parlons avec sincérité, Des chagrins les plus vifs je vous crois agité. (Je ne vous parle point de ceux que d'ordinaire, Au cœur d'un fils bien né cause la mort d'un père) Vous en avez encore de plus piquant. Je vous l'ai déjà dit, parlons de bonne foi. Je ne voulus hier faire aucune instance, De m'éclaircir un fait que je crois d'importance. Je craignis, Don Juan, de vous embarrasser… J'eus mes raisons, enfin, pour ne vous pas presser, Mais aujourd'hui cessez de m'en faire mystère. Nous sommes seuls, je dois être votre beau-père, Et je suis votre ami… Comme ami, comme fils, ouvrez-moi votre cœur, Quand on a des chagrins, est-il rien qui soulage Tant que de rencontrer quelqu'un qui les partage. Hé bien, dites-les moi. Don Félix par avance S'associe avec vous pour en prendre vengeance. Que vous est-il céans arrivé cette nuit ? Je meurs d'en être instruit. Juste ciel ! Que me va-t-il apprendre ? Que je crains de l'entendre ! Comment ! Quoi, ma fille avec eux ? Qui les avait chez moi fait entrer ? Ô fille impertinente ! Et qui me déshonore ! Hé, qui l'est donc ? Hé, pourquoi souffrir que Don Garcie À vos justes transports ait dérobé sa vie ? Mais Don André mérite Qu'à la même intention vous lui rendiez visite Du moins le vraisemblable : Mais ma fille en cela serait-elle coupable ? Et Don André, Pour votre compte seul y serait entré ? Songez bien Don Juan, qu'en une telle affaire, Il n'est pas question d'agir à la légère. Pour moi je crois devoir vous parler net ici : Cet ami si fidèle est un rival aussi. Je n'en saurais douter. J'en parle savamment, je le sais par moi-même. Croyez, Don Juan, que Don André vous joue, Que pour la fourberie il a de grands talents, Et que bien mieux que vous je me connais en gens, Comptez enfin qu'il faut en pareille occurrence, Bien choisir l'offenseur pour bien punir l'offense. Les valets, qui toujours ou curieux ou traîtres, Épient avecque soin les actions des maîtres. Par l'espoir du salaire, ou la peur de la mort, Jacinte : interroger celle-ci la première, Tirez-en le secret qui vous est nécessaire. Don Juan veut s'éclaircir avec toi. Je vous quitte, et vous laisse avec elle : Comptez si Léonor se trouve criminelle, Qu'aux dépens de son sang, vous verrez de quel prix Est l'honneur d'une fille aux yeux de D. Félix. Je vous cherche partout avec empressement, Et voudrais en secret vous parler un moment, Demeure. Éloignons-nous. Il n'y paraîtra pas, je puis vous l'assurer. Hé ! Comment se peut-il que la nature cache, Sous un tel front une âme et si basse et si lâche, Pour mon gendre sans vous je l'aurais accepté. Je vous avouerai plus, que je l'ai souhaité : Des dehors apparents, ses biens et sa famille, Tout cela paraissait convenir à ma fille. Quoi donc ? Ma fille en ce quartier ! Qu'est-ce qu'elle y vient faire ? Ah, quel monstre ! Admirez quel époux, Et quel cœur généreux j'avais choisi pour vous. Sans prendre mes avis vous faites choix d'un autre, Je suis bon, et veux bien que mon choix cède au vôtre. **** *creator_dancourt *book_dancourt_trahisonpunie *style_verse *genre_comedy *dist1_dancourt_verse_comedy_trahisonpunie *dist2_dancourt_verse_comedy *id_DONANDRE *date_1707 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_donandre Que veut-on ? Qu'elle approche. Je ne manquerai pas d'aller au rendez-vous, Et tiendrais à bonheur de n'y trouver que vous. Si bien faite et si belle, Celle que vous servez présume beaucoup d'elle ; Et lorsqu'on vous a vue, il est bien malaisé Qu'à d'autres feux un cœur se trouve disposé, Oui, quiconque se sert de telle messagère, Quelques charmes qu'elle ait, hasarde de moins plaire. Dites-lui que vous m'avez manqué, Et trouvez-vous vous-même au lieu qui est marqué, J'irai plus volontiers. J'irai pour vous uniquement, Et si je suis réduit à feindre… Comment, bélître, fat. Belle comparaison ? Oh, tais-toi. Sur le ton que ce coquin le prend, Il me croit ou bien sot, ou beaucoup endurant. Pour t'en donner encor qui te convainquent mieux, Si tu ne veux cesser tes discours ennuyeux, Insolemment encor si ta langue s'exerce, Sors. Sors d'avec moi, te dis-je. Absolument. Tu manques de respect, tu ne saurais te taire, Je suis las de t'entendre. Encor ! Sortiras-tu ? Tu deviens familier, je t'ai pris pour valet ; Tu l'es. Comme tel, je te chasse. Oui, sans contredit. Que je te paie ? Va, parle, tu peux dire Tout ce que tu voudras, je ne fais plus qu'en rire. Qu'est-ce ? Non, qu'on le fasse entrer. Ne crains rien. Il vient, demeure ici. Vous le pouvez, cet homme est fidèle et discret, Et depuis très longtemps il a ma confidence. Hé bien, qu'il sorte donc. Vous êtes Don Garcie. Je ne l'ignore pas. Mais où tend ce discours ? Il est peu nécessaire Pour moi, qui vous estime autant qu'on puisse faire. Moi ? Je ne vous entends point. C'est être bienheureux qu'un objet plein de charmes… Cela se pourrait bien. Beaucoup. C'est donc là le secret que vous vouliez m'apprendre ? Ah ! Je vous promets fort de n'en jamais parler. Arrêtez, Don Garcie. Moi ? Je dis que je sens Pour cette Léonor une plus vive flamme, Que lorsque j'ignorais celle qu'elle a dans l'âme. Don Garcie… Je m'en trouve entre nous quitte à très grand marché. Oh ! Non ; mais j'avais peur… Qu'il ne vint à me parler de sa sœur. Don Garcie est frère d'Isabelle, Et sans l'aimer, ru sais que je suis aimé d'elle. Rien moins ; c'est de ma part amusement, sottise. Non, elle et prise Tout de bon. J'en reçois des billets chaque jour, Dont à d'autres beautés je sais faire ma cour. Rien ne plaît, mon enfant, tout amuse. Tout le cours de la vie est un amusement, Et rien n'amuse enfin tant que le changement. Pour se désennuyer d'une stupide belle, On en trouve une alors laide et spirituelle ; Qu'une vieille fatigue avec sa gravité, On prend un jeune objet plein de vivacité ; Si je suis las de voir une taille géante, Je rabaisse mon vol, et la naine me tente ; Et lorsqu'on est outré de l'excès d'embonpoint, Qu'il s'en offre une maigre, on ne la chasse point. Je n'ai jamais le goût délicat ni malade, Et la brune me plaît, quand la blonde est trop fade. On se battrait ? Jamais ne me suis-je battu. Je cesserais de vivre ; et puisqu'on est mortel, Ne faut-il pas mourir une fois ? Le hasard n'est pas grand. Parbleu, j'écouterais ta proposition, S'il ne m'avait voulu fortement fait entendre, Que mes feux près des siens n'ont plus rien à prétendre. Cette fierté me pique, et je traverserai Son amour, son bonheur, autant que je pourrai : Les traits de Léonor ne me touchaient plus guère, Et je ne lui trouvais que des charmes vulgaires ; J'allais les oublier, on prétend m'y forcer, Un rival se déclare, il faut le traverser. Lui céder, ce serait… Oh, oui, je t'en réponds… Que me veut-on encor ? Vois donc. Laisse-nous. Vous, chez moi ! Quelle heureuse fortune ! Ce m'est, je vous assure, un sensible bonheur, Qui me fait grand plaisir ensemble et grand honneur. Quel sujet me l'attire, et quel soin vous amène ? Je vous ai, Don Félix, grande obligation, De me choisir ainsi par prédilection. Je rends à Léonor des soins, je l'ai servie, Qu'ai-je fait en cela que n'ait fait Don Garcie ? Et peut-être les siens sont mes moins mal reçus… Ne me faites point trop expliquer là-dessus… À ses feux vous pouvez l'accorder. Oui, mon rival cessant les siennes. À de telles raisons, Seigneur, il faut souscrire. Vous-même prescrivez comme il faut me conduire. : Je ferai mon devoir après un tel aveu. Tu nous écoutais donc ? Me vouloir marier, moi ? La plaisante idée ? Pour Léonor pourtant ma passion s'irrite ; Et plus on met d'obstacles à ce que je médite… D'accord, je l'aime assez… pour ne pas l'épouser. Les promesses de bouche N'engagent point le cœur quand l'affaire le touche. Je n'avais point encor aimé jusqu'à ce jour ; Mais les difficultés me donnent de l'amour : Il faut tromper un père, et deux rivaux ensemble. C'est de quoi m'amuser. Suis-moi, viens… Que pourrait-ce être ? Que vois-je, quel bonheur ? Don Juan d'Alvarade ? Celui que j'ai en ce moment, Est encor au-dessus du vôtre assurément. Saurai-je quel dessein vous amène en ces lieux ? Est-ce affaire ou plaisir ? Car je suis curieux, Et j'attendais si peu de vous voir à Valence… Vous vous moquez, je pense. Je vous plains, cher ami, cet aveu diminue Le plaisir que d'abord m'a donné votre vue. Il va se marier. Peut-on changer ainsi d'humeur, de caractère ? Vous qu'à l'hymen toujours j'ai connu si contraire, Qui juriez tant en Flandre, où je vous ai laissé, Que jamais… Votre étoile ! Morbleu, dites votre comète : C'est un astre malin qui vous conduit ici. J'en suis fâché. La Dame apparemment est belle ? Cette même amitié Me fait craindre pour vous de vous voir marié ; Mais cependant partout je suis prêt à vous suivre, Heureux, d'un mauvais pas si mon soin vous délivre. Volontiers. De ce détail nous n'avons pas besoin. Il sera trop heureux de vous rendre service. N'allez-vous que là ? Je vous y suivrai. Je vous cherchais. Je dis qu'on ne peut guère Quoiqu'on prenne de soins, mieux choisir qu'ils ont fait. Près de l'original votre tendresse augmente, Sans doute ? Déjà ! C'est être prompt à prendre de l'ombrage, Ai-je tort de crier contre le mariage ? Non ! Comment L'êtes-vous ? Don Garcie. Mais ce n'est qu'un soupçon. Soyez sûr que j'y prends intérêt. Hé bien? Quoi ? J'entre dans la douleur que votre cœur ressent, Mais ne pouvant, ami, détourner cet orage Il le faut essuyer du moins avec courage. À tout prendre Vous eussiez fort bien fait. Et cet éloignement vous cause de la peine? Qui, moi, je ne vois pas ce qui vous embarrasse ; Sur les soins d'un ami je me reposerais, Et partirais tranquille autant que je pourrais. Vous croyez Léonor à d'autres feux sensible ? Donnez-moi cet emploi, Je saurai m'y conduire avec le même zèle, Mêmes soins, comme si j'étais amoureux d'elle ; Enfin. Fabrice nous peut même être utile en ce point. Avant votre départ, vous instruirez, je pense, Don Félix des raisons d'une si prompte absence. Hé bien, en le quittant il lui faut expliquer, Que laissant ce valet avec votre équipage… Lui-même là-dessus vous préviendra, je gage, Et Fabrice introduit ainsi dans la maison… De tout il nous rendra raison, Et moi j'observerai Léonor, Don Garcie. De si près, avec tant de soins, que je parie, S'ils ont pris l'un pour l'autre un mutuel amour, D'en savoir le détail avant votre retour. Pour servir un ami… Vous-même, Don Juan, vous n'en feriez pas plus. Croyez-en l'amitié, ma parole, mon zèle, Mon cœur. Adieu donc. Va, suis ton nouveau maître. Il faut pour son valet qu'il te fasse connaître. Sur ce pied-là de toi je puis avoir besoin. Comment donc ? Hé bien ! À ces projets, est-ce que tu t'opposes ? Suis Don Juan, fais ce que je te dis, Et viens me retrouver quand il sera parti. Laisse la porte ouverte. Parler à Léonor, et de force, ou de gré, Tâcher à mes rivaux que je sois préféré. Tout ici m'est égal, Don Juan, Don Garcie. Dans l'état violent où mon amour m'a mis, Tous deux sont mes rivaux, tous deux mes ennemis. Hé bien, caprice, amour, quoi que ce soit enfin, J'ai cette affaire en tête, et j'en veux voir la fin. Dans tout ceci, dis-moi, qu'est-ce que je hasarde ? Paix, tais-toi. Oh ! Fini, tout est tranquille. Sais-tu si Don Félix… Léonor ? Attendons qu'au sommeil elle se soit livrée. Au fond de cette salle est son appartement, Et j'ai de quoi forcer la serrure aisément. Misérable ! Te tairas-tu ? Finis donc ? Où cas-tu ? Demeure ici. Sur les yeux de ta tête, Reste. Quelqu'un parle, entends-tu dis ? On ouvre quelque porte. Approchons-nous, et nous plaçons de sorte… Viens donc. Je viens sans qu'on me mande, un autre est attendu. Est-ce vous, Don Garcie ? Défends plutôt la tienne, infâme suborneur. Oui, c'est moi. Et je suis venu, moi, sûr d'avoir en effet, À venger Don Juan de l'affront qu'on lui fait. Que je perdrai la vie Ou que je l'ôterai, Madame, à Don Garcie. De tour déjà ! Qu'imaginer ? Il faut du mieux qu'on peut sortir d'un mauvais pas. Mon silence Ne vous apprend-il pas tout ce qu'il faut que l'on pense. En pouvez-vous douter ? Vous souvient-il des soins dont vous m'avez chargé ? Pour m'en acquitter je n'ai rien négligé. Vous trouvez en ce lieu Léonor éperdue, Don Garcie interdit, votre ami l'âme émue… On vous trahissait… Trouvez bon qu'ensemble je vous laisse. Une certaine affaire… Je n'en fais point mystère, un rendez-vous que j'ai, Que jusqu'à ce moment pour vous j'ai négligé… Oui. Pas tout à fait encor, mais beaucoup avancée. Rien en cela ne doit me répugner, D'un ami tel que vous plus sûr que de tout autre. Vous en doutez ? Venez, ce que vous allez voir Détruira les soupçons que vous pourriez avoir. Tu le vois, mon billet n'a point été rendu ; Et par moi vainement Don Garcie attendu, Au lieu que j'ai marqué n'a garde de se rendre. En l'état où je suis, rien ne me paraît beau. Je ne sais quel transport, quelle rage m'agite ! Tout me nuit, tout m'irrite, Tout me déplaît, me fâche, excepté Léonor. Si j'y songe ! Hem ! Je crois que tu penses Être en droit de me faire à moi des remontrances. Je crois Que ce faquin plaisante et se moque de moi. Je m'embarrasse peu qu'on applaudisse ou non : Suffit que selon moi je crois avoir raison. Ne ris point, je m'en flatte. Mon amour est le premier en date ; Et malgré mes rivaux, et malgré D. Félix, Léonor de mes vœux sera bientôt le prix. Je ne souffrirai point qu'on la donne à d'autres ; Je soutiendrai mes droits. Va, va, je les ferai valoir. J'en sais de sûrs moyens, et je n'ai qu'à vouloir. J'ai voulu : mes mesures sont prises, Et je n'aurai pas fait de vaines entreprises. Que Don Garcie arrive au rendez-vous donné ; J'en suis défait, Fabrice, il est assassiné. Plaît-il ? Tu peux compter qu'après l'autre ne tiendra guère. Je craindrais peu vraiment le succès d'un combat. Sans doute. Bon ! Que craindre des suites ? C'est ce qui ne doit pas m'embarrasser beaucoup, Je ne suis point connu ; ceux qui feront le coup Ont tous été gagnés par un seul émissaire, Dont je me déferai moi-même après l'affaire. Toi-même, à qui j'en parle imprudemment ; Songe à me bien garder le secret… Autre ment… Qu'à propos je vous retrouve ici ? La Dame d'ici près? Vous ne blâmez donc point l'ardeur que j'ai pour elle ? Ce discours a de quoi m'étonner. Moi, je vous ai trahi ! Don Juan ! D'un semblable mépris je sais comme on se venge ; Et mon cœur croyez-moi, vous rend fort bien le change ; Mais de quel droit encor me parlez-vous ainsi ? À juger mal de moi votre âme est un peu prompte ; Restez dans votre erreur. ? Adieu, quand un peu moins nous nous mépriserons, Si le cœur vous en dit, nous nous éclaircirons. Suis-moi, Fabrice, viens. **** *creator_dancourt *book_dancourt_trahisonpunie *style_verse *genre_comedy *dist1_dancourt_verse_comedy_trahisonpunie *dist2_dancourt_verse_comedy *id_DONGARCIE *date_1707 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_dongarcie Je voudrais, Don André, vous parler en secret. Ce valet a raison. Le secret me regarde. Savez-vous qui je suis ? C'est mon nom, et je suis du sang des Torellas, Noble autant qu'il en soit. Cadet, je suis peu riche, et je me dédommage De ce manque de bien par un autre avantage. J'ai pour moi la vertu, la noblesse de cœur, Qui me font estimer de tous les gens d'honneur. Vous me le prouvez mal, D. André. Oui, vous. Et puisqu'à vous parler, enfin je me résous, Croyez que j'ai gardé toute la patience… Dès ma plus tendre enfance, J'adore Léonor : m'entendez-vous, enfin ? De son cœur j'ai trouvé le chemin. Ce bonheur m'a coûté des soucis, des alarmes, Des soins, du temps, des pleurs ; et peut-être, après tout, De mes peines encor je ne suis pas à bout. Je ne crains que son père, Tout autre qui voudra hasarder de m'en faire, Soit caprice, ou raison, dessein prémédité, Passion véritable, ou simple vanité… Avez-vous donc encor quelque peine à m'entendre ? Ceci sera plus facile à comprendre. Enfin de Léonor, autant aimé qu'amant, J'entre sans lui déplaire en son appartement : Et c'est une faveur où je puis seul prétendre. Oui, je vous le confie, et j'ose défier Quiconque le saura de l'oser publier ; Et quoique mon amour soit su de tout Valence, Sur mon bonheur de vous j'exige le silence. Ce n'est pas tout, songez à ne le point troubler : Non que de votre amour j'appréhende les suites ; Car près de Léonor vos efforts, vos poursuites, Les soins qu'on vous a vu jusqu'ici vous donner, N'ont produit d'autre effet que de la chagriner ; Je sens des mouvements bien plus violents qu'elle. Mais après le secret qu'ici je vous révèle… Vous êtes galant homme, et j'ose me flatter Que vous m'empêcherez de les faire éclater. Vous avez peu d'amour, la faveur n'est pas grande, Lèonor vous en prie, et je vous le demande. Vous rêvez ? Se peut-il qu'un noble cœur hésite, À prendre un parti juste, à changer de conduite ? Je m'en vais sans réponse ; elle sera, je crois, Telle qu'en pareil cas je vous la ferais, moi. Adieu, songez de grâce, Que c'est une prière, et point une menace. Hé bien quel sera mon destin ? D'un autre époux, Madame, acceptez-vous la main ? Me sacrifiez-vous au caprice d'un père ? Ah ! De quel doux transport je me sens pénétrer ! Et contre mon bonheur quoi qu'on puisse entreprendre, Que puis-je craindre après ce que je viens d'entendre ? Nous devrions penser à prendre des mesures. Ah ! Jacinte, il en est. À vous les proposer, Madame, votre aveu semble m'autoriser. Une affaire d'éclat, un Couvent, une fuite. Mais après les refus que m'a faits votre père, Sans un pareil éclat que faut-il que j'espère ? Me le promettez-vous ? D'où lui naît cette crainte ? Mais… Hé, Seigneur, pouvez-vous le penser ? Une affaire qui presse, et qui m'est importante, M'a fait chercher ma sœur ; et j'ai su par sa suivante, Qu'elle l'avait laissée auprès de Léonor, Et j'ai cru sans déplaire et sans faire aucun tort, Qu'entrer dans cette salle, à tout moment ouverte, Est une liberté qui peut m'être soufferte ; Que loin de me blâmer cette liberté, Seigneur… Vous, Seigneur, comment donc ? Don Félix rend justice à ma persévérance. Serait-ce mon rival, et que viens-je d'entendre ? Quel est ce Don Juan d'Alvarade ? Juste Ciel ! Ah ! Ma sœur, quelle épreuve ! Suis-je ici pour cela ? Je n'en puis plus, sortons, ma sœur, ô sort funeste ! Quel parti dois-je prendre, et quel espoir me reste ? Je suis épié, Ciel ! Jacinte, arrête : Tu te méprends. De quel trouble soudain je me sens confondu ! Est-ce vous, Don Juan ? Oui, c'est votre rival, défendez votre vie. Ta mort, ta seule mort peut faire mon bonheur. Don André ! Ah ! Ce nom odieux Ajoute à mes transports, me rend plus furieux ; Malgré l'obscurité, la rage qui me guide, Doit conduire mes coups dans le cœur du perfide. Instruits des noirs projets qu'un perfide a pu faire, Je viens jusques chez vous punir le téméraire. Quoi, traître… Don Juan ! Que dire ? Ménageons Léonor, ne la trahissons pas. Je vous attends… Mon rival ! Ah, Seigneur ! **** *creator_dancourt *book_dancourt_trahisonpunie *style_verse *genre_comedy *dist1_dancourt_verse_comedy_trahisonpunie *dist2_dancourt_verse_comedy *id_DONJUAN *date_1707 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_donjuan Quel plaisir je ressens d'une telle embrassade ! Mon cher ami. Bonjour, mon cher Fabrice. Je viens m'y marier. Je ne me moque point, cet hymen résolu Par mon père, en mon cœur est encor mieux conclu. Pour l'hymen ce dégoût m'a passé, Mon étoile le veut, mon père le souhaite. Astre malin, comète, étoile, m'y voici. Si vous voulez tantôt m'accompagner chez elle, Vous pourrez en juger. Arrivé d'hier au soir, J'ai jusqu'à ce moment différé de la voir : C'est à vous que je rends ma première visite, Les devoirs d'amitié sont ceux dont je m'acquitte Par préférence à tout. Nous verrons. Comme ici je n'ai nul de mes gens, Voudrez-vous me prêter Fabrice pour un temps. Un valet qui ne me quitte guère, Est parti ce matin pour aller chez son père. Je n'avais que lui seul, comme je viens de loin, Ainsi… Jusques à son retour puis-je garder Fabrice ? J'en use librement. Va donc m'attendre à l'Ours, Sachez si l'on a point de lettres à me rendre. Je vais chez un Banquier, et je repasserai Quand… Non. Prévenu du plus flatteur espoir, Et pressé par l'amour de me rendre à Valence, Seigneur, je n'ai pu faire une autre diligence, Et n'ai pas eu le temps de voir mon père encor. Ne regardez point ici comme un époux Un amant qui prétend ne vous devoir qu'à vous. Madame, je le sais, l'autorité d'un père Ne donne point de droit sur un cœur ; mais j'espère Que par mille respects, par le plus tendre amour, Je pourrai mériter vos bontés quelque jour. Heureux dans ce moment, si l'ardeur qui m'anime, Dans votre cœur pour moi fait naître quelque estime, Et que le temps ensuite y produise l'effet, Que sur le mien d'abord fit votre seul portrait ! Qu'est-ce que tout ceci ? Ce Cavalier, je pense, a des vapeurs aussi. Léonor aime ailleurs ; et si j'ai de bons yeux, Ce trouble faux ou vrai, ces vapeurs de commande… Moi ? C'est un de mes amis… Oui. N'est pas fort pour le mariage. Ses conseils… Tenez-vous assuré Que ce ne seront pas les siens que je prendrai. Du choix qu'ont fait pour moi les amis de mon père, Que dites-vous, ami ? J'ai pensé comme vous en voyant son portrait ; Dès le premier coup d'œil je la trouvai charmante. Oui, je veux bien l'avouer entre nous; J'en suis bien amoureux, puisque j'en suis jaloux. Je ne suis point jaloux en mari. Cent fois plus : je le suis en amant : Et c'est une fureur que cette jalousie. Quel Cavalier était en ce lieu ? Hé bien, ce Don Garcie est un amant aimé, Léonor, lui, leurs yeux, tout me l'a confirmé. Qu'il faut que j'éclaircisse. J'ai besoin pour cela de vos soins, s'il vous plaît. Don André. Après, d'un mauvais pas je sais comme on se tire : En se vengeant, s'entend. Hé, laissez-moi respire un moment, De grâce. Qu'est-ce? Cette lettre est de mon père, je pense. Que de chagrins m'accablent à la fois ! Mon père est malade au lit depuis un mois, Et dans ce triste état il me demande en grâce, Qu'avant de mourir il me voie et m'embrasse. Je suis de ce coup-là sensiblement touché. Je le suis d'autant plus, que j'aurais dû me rendre Auprès de lui plutôt qu'à Valence. Pour réparer ce tort, Je pars dans le moment et quitte Léonor. Un noir pressentiment, je l'avouerai, me gêne. Mon cœur ne fut jamais dans un état pareil… Ami, dans cet état, j'ai besoin de conseil… Que ferait Don André s'il était en ma place ? Oh ! Pour tranquille, non, la chose est impossible. Ce funeste soupçon m'alarme malgré moi, Je voudrais l'éclaircir. Ami, que ne vous dois-je point. À de pareils devoirs je ne sais point manquer. Ah ! Ce n'est point assez que cette connaissance, Et quand vous serez sûr de cette intelligence, Puisque vous voulez bien prendre cet emploi, Il faut être jaloux, furieux comme moi, Pour perdre mon rival mettre tout en usage. Je compte là-dessus. Je n'en veux point de garant plus fidèle. Des raisons qui causent mon départ, Je vais à Don Félix à l'instant faire-part. Une importante affaire M'oblige de partir dans ce même moment. Jusques ici du moins, je n'ai rien vu paraître Qui me puisse donner aucun sujet de l'être ; Et je ne prévois pas… De mon père, Seigneur, vous connaissez la main. Lisez, et vous verrez l'affaire d'importance Qui m'arrache au plaisir de rester à Valence. Hé bien, dois-je partir ? J'en suis assez pressé, Seigneur, par mon amour. Rien ne me plaît tant qu'elle. Permettez en partant que je vous renouvelle Le tendre engagement que l'on a pris pour moi, De venir lui donner et mon cœur et ma foi. Pour équipage ici je n'ai qu'un de mes gens. Non. Mais c'est un embarras… J'accepte sans façon l'offre que vous me faites. Cet ordre du retour ne me peut sembler doux, Si je n'en reçois pas un semblable de vous. Madame, Je pars, et je crois voir dans le fond de votre âme… Ces sentiments pour moi sont fâcheux à connaître. Vos troubles, vos chagrins peuvent-ils m'abuser. Mon éloignement ! Non. Mes feux en vain s'en flattent. Ces troubles, ces chagrins depuis tantôt éclatent, Et le plus sûr moyen de les faire finir, Serait de m'éloigner pour ne plus revenir. Hé, Ce n'est point aussi l'honneur qui s'en alarme ? C'est le cœur qui gémit, plus la beauté le charme. Hé, me croirais-je heureux d'obtenir votre foi, Si l'amour vous engage à quelque autre qu'à moi. Adieu, Madame. À mes yeux quel spectacle est offert? Fermons d'abord la porte. Don André ! Léonor ! Mon rival ? Tout se tait. Quel est mon triste sort ? J'apprends la mort d'un père en sortant de Valence, Et lorsque j'y reviens flatté de l'espérance, D'y trouver du remède à mes vives douleurs, Je trouve en arrivant le comble des malheurs. Ah, que mon cœur pâtit ! Don André ! Don Garcie ! De l'ami, du rival, de tout je me défie, Tout m'est suspect. La nuit ! À quel dessein ! Comment Vous trouvez-vous tous deux dans cet appartement ? Tous deux également vous semblez vous confondre. Vous tairez-vous toujours, Don André ? Ce silence me fait connaître mon malheur ; Mais ce n'est point assez, si je n'en sais l'auteur. L'un de vous deux doit l'être, Et vous l'êtes tous deux également peut-être. Oui. Ciel ! Mais qu'en juger encor, L'un est mon ami, l'autre amant de Léonor : Qui des deux me trahit ? C'est celui qu'en secret votre cœur justifie ; Et quand à cet excès on ose m'outrager, C'est celui qui vous plaît dont je me dois venger. Sauvons-lui les chagrins que ceci peut lui faire. Sortez d'ici tandis que je l'entretiendrai, Don Garcie, et chez vous demain je vous verrai. Restez avec moi… Vous, Madame, Rentrez, et suspendez les troubles de votre âme. Qu'on ouvre. En montant à cheval, je viens d'être averti Que j'allais entreprendre un voyage inutile. Mon père est mort. Ici, comment ? Quelle apparence ? Vous nous trouvez tous deux en bonne intelligence. Nous nous aimons assez pour ne nous quitter pas. Rien du tout. Léonor apparemment repose Et pour ne pas troubler cette tranquillité, Ou sortons, ou passons de quelque autre côté. Est-ce affaire qui presse ? L'heure est-elle passée ? Vous ferait-on chagrin de vous accompagner ? Dites. Si vous êtes le mien comme je suis le vôtre… Permettez, Don Félix… Mon rival est un lâche, à m'attendre chez lui. Il sait quelles raisons l'engageaient aujourd'hui. Il ne s'y trouve point : ah, traître Don Garcie ! D'aucun, Seigneur. Qui, moi ? Vous me faites honneur. L'espoir de me venger, Seigneur, peut seulement, Donner à mes chagrins quelque soulagement. Vous le voulez savoir ? Sachez donc… Je tremble en lui parlant. Arrivant hier ici, tout plein de la douleur Que la mort de mon père avait mise en mon cœur, L'objet, qui le premier se présente à ma vue, C'est votre fille en pleurs, interdite, éperdue, Don Garcie auprès d'elle, et Don André, tous deux L'épée à la main. Je l'ignore. Elle n'est point coupable. C'est moi, Qui fis sauver moi-même un rival sur sa foi. ⁎⁎⁎⁎⁎⁎⁎⁎⁎⁎⁎⁎⁎⁎⁎ VERIFIER LE BOUT DE VERS Don Garcie. Pour éviter l'éclat ; dans l'espoir qu'aujourd'hui, Comme il me l'a promis, il m'attendrait chez lui ? J'en viens, il est sorti. Non. La première fois que je parus chez vous, J'y vis ce Don Garcie, et j'en devins jaloux. Je priai Don André que pendant mon absence Il observât ses pas avecque diligence : Il l'a fait, il vit hier qu'aussitôt qu'il fut nuit, Mon perfide rival ici fut introduit. Il entra, le suivit, plein d'ardeur et de zèle ; Il le joignit enfin, et cet ami fidèle, De Léonor qu'un traître allait perdre d'honneur, Heureusement pour moi fut le libérateur. Voilà la vérité. Je n'ose le penser, Seigneur. Votre erreur est extrême. Non, non, une autre dame est l'objet de ses soins, Et mes yeux, cette nuit en ont été témoins. J'avais avant cela des soupçons, je l'avoue, Mais… Mais s'ils vous sont suspects tous deux également, Qui pourra nous donner quelque éclaircissement ? Comment les obliger à faire leur rapport ? Que de cet entretien j'appréhende la suite ! Jacinte? Pourquoi te troubles-tu ? Oui, je le crois, Jacinte, une fille d'honneur. Tu trembles ? Le trouble où je la vois, augmente encore le mien. Je veux savoir de toi… Tu ne sais rien ? Jacinte, en conscience, Si tu ne savais rien, répondrais-tu d'avance ? Un secret ? Non, non, parlons sans feinte ; Léonor n'eût jamais de secret pour Jacinte. Je le crois, mais Jacinte est pénétrante et fine, Et dans de certains cas quelquefois on devine, N'es-tu rien pénétré qui me regardât ? Il te faut, je le vois, parler d'un autre ton. Prends cette bourse, prends. Prends-là, te dis-je. Il faudrait seulement Que Jacinte avec moi parlât confidemment. Pour te le faire rompre, Et te réduire au point de me parler sans fard, Si l'argent ne peut rien, compte que ce poignard… Tais-toi. Non, parle, ou je te tue. Parle, il n'est pas ici raison de plaisanter. Et ma juste fureur, lasse de se contraindre… Non, mais je veux savoir tout ce qui s'est passé. Elle est à toi. La vérité, c'est tout ce que j'exigerai. Je démêlerai bien ce que j'en devrai croire. Hélas ! Ce n'est pas celle-là que je crains. Passons. Comment répondit-elle à l'ardeur qui l'enflamme ? Ah ! Que me dis-tu là ? Se sont-ils vus souvent ? Et se sont-ils parlé ? Mais hier au soir ici, dis, que venait-il faire ? Non, non. Va, je sais me servir de toute ma raison. Poursuis donc. À tes conseils ainsi Léonor complaisante… Malheureuse ! Don Garcie… Tu n'ouvris pas pour lui la porte de la rue ? Non ? De quelle trahison te voilà convaincu, Perfide ami ! C'est là que tu dis l'avoir vu ! Ah ! Tais-toi, mon malheur vient de plus d'une source. Ah, que je souffre ! Hélas ! Et dans quel désespoir… Ôte-toi… Arrêtez, Madame, et souffrez qu'un moment Comme ami je vous parle, et non plus comme amant. De votre cœur vous n'êtes plus maîtresse, Et sans le cœur la foi n'a rien qui m'intéresse. Vous me voyez outré du plus ardent courroux. N'en craignez rien, ce n'est pas contre vous. Je me plains de mon sort, sans vous blâmer, Madame. L'amour selon nos vœux n'entre point dans une âme. Je crois, si votre cœur était moins prévenu, Que par mes tendres soins je l'aurais obtenu ; Sans même interposer l'autorité d'un père. Le Ciel ne permet pas qu'à présent je l'espère, Plus que je ne voudrais de mon malheur instruit… Au point que je suis outragé, Pourriez-vous m'estimer si je n'étais vengé ? D'un rival, d'un perfide. Quoi ? Pourquoi te maltraiter ainsi ? Vous puis-je être utile en quelque affaire ? Don Garcie ! Don André est votre amant, Madame ? Ce Don André, Madame, est un grand malheureux. Poursuivez, je vous prie. Ah, que pour me venger l'occasion est belle ! Allons… Apprenez-moi le lieu qu'il a marqué, Et l'heure. J'y cours. Vous satisfaire, Et sauver un duel, Madame, à votre frère. Fabrice, écoute un mot. Pour joindre Don André, je cours toute la ville, Et c'est ici le lieu marqué dans son billet. Ne l'attendrais-tu point ? Comment ? Sans raison ? Il faut bien qu'il en ait eu quelqu'une. Par Don André, mon amitié trahie, M'engage à le punir de cette perfidie. Je le cherche, et je tremble en ce moment, De m'abandonner trop au premier mouvement. Je ne veux point avoir de reproche à me faire. Ce valet doit être informé de l'affaire. Il faut à fonds par lui que j'en sois éclairci. Tirons la vérité par menace et par feinte, Et fixons les soupçons dont mon âme est atteinte. Attends, pendard. Don André t'a donné quelques coups de bâton. C'est bien fait. Malheureux, sous ses coups tu devais expirer ! Mais ce qu'il a manqué je vais le réparer. Un coquin comme toi mérite-t-il de vivre ? Comment ! Chez Léonor, qu'à ta garde on confie, Traître, tu vas ouvrir la porte à Don Garcie ? Oui, pendard ; C'est une vérité qui vient de bonne part. En vain tu t'en défends. Je te saurais bon gré, Pour moi, si tu l'avais ouverte à Don André. C'est mon meilleur ami. Sans doute. Exprès pour lui ? C'est lui qui m'a dit le contraire. Tu me feras plaisir ; car je n'aime pas, moi, Qu'il cherche à me donner des soupçons contre toi. Oui. Quels contes ! Je vois peu d'apparence à ce que tu me dis ? Et d'une autre beauté je sais qu'il est épris, Nous l'avons vu. Il nous a cette nuit menés chez une Dame. J'y donne ? Pourquoi non ? Mais quoi ? La sœur de Don Garcie aussi compte qu'il aime. Tais-toi, je ne veux pas en savoir davantage. Que me faut-il encor après ce témoignage ? Allons, à nous venger employons tous nos soins. Va, ne crains rien. Volontiers, Seigneur. Qu'aura-t-il à me dire ? Demeurez. De nous y rencontrer je suis bien aise aussi. Elle m'a paru belle. Ce n'est pas ce qu'en toi je trouve à condamner, Perfide ! À me trahir quand ton cœur s'abandonne, C'est le remords, et non le discours qui t'étonne. De ton indigne cœur Je connais la bassesse, et toute la noirceur. Quand de ta perfidie J'étais moins assuré, j'en voulais à ta vie. Je te sais à présent sans honneur et sans foi, Et te méprise trop pour me venger de toi. Va, de tes procédés je suis trop éclairci. Demeure dans ta honte. Est-il un cœur plus lâche ? Vaut-il qu'un galant homme et s'emporte et se fâche ? Je dois ma retenue à vos sages avis, Et je me tiens heureux de les avoir suivis, Son sang versé n'eût point apaisé ma colère, Tant que le traitement que je viens de lui faire. Si jamais à mes yeux il ose se montrer… Non, Léonor mérite un destin plus heureux ; Et pour le rendre tel, accordons-nous tous deux. Qu'est-ce, où cours-tu, Fabrice ? Explique-toi ; Parle. Don Garcie et sa sœur sont avec elle aussi. Par quel sort nous trouver tous ici ? Son sort, en vérité, Me touche, Don Félix, quoi qu'il l'ait mérité ; Allons le rappeler s'il se peut à la vie, Et cédons Léonor aux veux de Don Garcie. De l'effort que je fais, vos yeux sont les témoins ; Vous n'avez pu m'aimer, estimez-moi du moins. **** *creator_dancourt *book_dancourt_trahisonpunie *style_verse *genre_comedy *dist1_dancourt_verse_comedy_trahisonpunie *dist2_dancourt_verse_comedy *id_LEONOR *date_1707 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_leonor Je suis dans un chagrin qu'aucun autre n'égale ; Sortons de cette chambre, et restons dans la salle : L'air me semble plus frais et plus tranquille ici. Hélas ! Quand je soupire Isabelle entre nous, c'est assez vous en dire. Ose-t-il en douter ? Il a su m'en flatter. Tout, quand un père injuste à leur bonheur s'oppose ? Sans consulter mon cœur il me donne un époux. Que deviendrai-je, hélas! Moi-même ? Je ne l'ai jamais vu, Et de mon père même il n'est pas fort connu. Le sien par ses amis a proposé la chose, Et sans me consulter le mien de moi dispose. Il n'est rien plus certain, Et lui-même il me l'a déclaré ce matin, Après un long discours, fatigant, inutile… Je prétends m'a-t-il dit, prendre un gendre à mon gré. Rien du tout : j'ai pleuré. Des mouvements du mien il s'est bien aperçu. Pour me désespérer à la fois tout conspire. Mon père, apparemment pénétré de mes pleurs, Mon cœur est, m'a-t-il dit, sensible à vos douleurs, Je sais que D. André vous rend des soins, ma fille. Attendez… Je connais sa famille, A-t-il continué ; si son feu vous est doux, Je le préfère à l'autre, et j'en fais votre époux. Qui, moi? Je le déteste. Amour malheureux et funeste ! Les importunités qu'il me fait chaque jour : Elles ont éclaté jusqu'aux yeux de mon père. Quelle erreur ! Croyez-moi, l'on vous trompe, Isabelle. En quelque endroit que j'aille, il suit partout mes pas. Il vous cherche ? Où vous n'êtes pas. Mais il passe les jours, les nuits sous ma fenêtre. Il n'est rien de plus vrai, Ses regards sont toujours fixés… Ses démarches, ses mines… Plût au Ciel ! Mais enfin de ses feux il m'a fait un aveu. Il le cache fort bien, car rien ne le rebute, Et plus j'ai de froideur, plus il me persécute. Je vous devrai beaucoup, si par vous j'en suis quitte ; Et je regarderai comme un parfait bonheur, Que ce qui m'a paru se trouve être une erreur. Voici Jacinte. As-tu vu Don Garcie ? Sait-il que je veux lui parler? Viendra-t-il ? Mais quand il entrera, prends garde que mon père… Oui, tout nous applaudit, nous sert, ou nous excuse. Mon père seul, hélas ! À nos veux se refuse. Mais Don Garcie enfin, sait-il quelle est ma crainte ? Les desseins de mon père… Don André est l'amant d'Isabelle, Elle seule est l'objet de ses pas, de ses soins. Il a perdu l'esprit. Vous-même pensez-vous que je le puisse faire ? Quoique l'engagement qui m'attache à vous, N'ait rien qui dut chagriner cet époux, Comptez qu'après la foi que je vous ai donnée, Je suis à votre sort tellement enchaînée, Que je mourrais plutôt que de m'en séparer. Le remède est étrange ! Et si j'y suis réduite, Je ne vous réponds pas de prendre assez sur moi, Pour vous prouver ainsi ma tendresse et ma foi. Je promets, D. Garcie, Que je n'aurai jamais d'autre époux de ma vie. Quoi? Comment faire ? Si mon père le voit. Je suis dans une inquiétude… S'il pouvait sans monter ressortir. Jacinte ? Ciel ! Est-ce à cet hymen qu'il me faut préparer ? Je meurs, Hélas ! Ô coup qui m'assassine, Ciel ! Pardonnez mon silence au trouble de mon âme… L'époux, l'amant… l'hymen dont je me sens presser… Seigneur, en ce moment j'ai peine à m'énoncer… Le trouble de mes sens… voudrez-vous bien permettre ? J'ai besoin d'être seule afin de me remettre. Ah ! Que je souffre, hélas. Oui, tes conseils sont bons, et je m'y soumettrai, Mais pour les suivre, hélas ! Quels efforts je ferai ! Je porte un cœur incapable de feindre. Hé bien, va, je ferai tout ce que tu m'as dit. Ah, Ciel ! Hélas ! Seigneur, je n'ai point d'ordre à vous donner. On pénètre aisément les sentiments d'un cœur, Qui n'a jamais appris l'art de feindre, Seigneur. Avec prévention vous en jugez peut-être ? Votre éloignement seul ne peut-il les causer ? Seigneur, finissons-là, de grâce, Ce reproche est fâcheux, il m'aigrit, m'embarrasse ; Mais des troubles d'un cœur on doit peu s'alarmer, Quand l'honneur nous conduit et sait les réprimer. Comptez si jusques-là l'amour m'avait séduite, Que toujours la vertu réglerait ma conduite ; Et songez… Hélas ! Il n'est pas sans mérite ; et je trouve, Jacinte, Que son sort et le mien sont bien dignes de plainte. Que résoudre, que faire ? Nullement. Oui, vraiment. De la haine : au contraire, il me fait de la peine, Je le plains. Ne crains pas qu'à ce point je pousse la faiblesse. Quoi donc ! À ce retour que veux-tu qui soit fait ? Explique-toi, Jacinte. Oh ! C'est ce que sur moi je ne puis jamais prendre. Tu n'es vraiment pas sage. Dans mon appartement, voir la nuit D. Garcie. Ah ! Jacinte. Il est vrai, mais… Je n'y saurais souscrire. Il fallait… Le faire et ne le pas dire. Si tu prends tout sur toi… Tu sais qu'il faut garder certaine bienséance. Mais dans la nuit, comment le faire entrer ici ? Mais je crains si tu vas mal prendre tes mesures. Mais encor… Hé bien? Ne va pas faire au moins d'entreprise inutile. Je suis tremblante, et je ne sais pourquoi. Je n'entre en tout ceci pour rien. De mon amant, Jacinte, on attaque les jours, Courons sauver sa vie aux dépens de la mienne : Que vois-je ? Don André ! Je meurs. Qu'on me soutienne. Que dis-tu, malheureux ! Songez-vous, que cet éclat me perd, Don Garcie ? Ô nuit vraiment funeste ! Ce n'est point Don Garcie. C'est mon père ! Non, je ne conçois pas de supplice plus rude Que l'état où je suis : de mon inquiétude Jacinte est avertie, et me sait seule ici. Qu'elle tarde ! À la fin, grâce au Ciel, la voici. Hé bien, Jacinte. As-tu vu Don Garcie ? Ah… Jacinte, c'est ce qui me désespère… Le Ciel en soit loué. Hé, c'est ce que je crains, et qu'il faut empêcher. Jacinte, que je t'ai grande obligation. J'en ai pour cela, tu n'as qu'à me prescrire, Dis. Elvire est mon intime. Jacinte, que je crains qu'il ne s'impatiente ! Mais n'étant point chez lui, si Don Juan, Jacinte, Va penser qu'il y soit. Si vous saviez l'ennui que mon âme ressent, Mon père ! Quoi, Don Juan ! Mon père ? Qu'ai-je de mieux à faire ? Jacinte dit vrai. Que fais-tu ? Que te voulait mon père ? Dis, Jacinte. Ciel ! Seigneur… Seigneur… Quoi ? Comment ? Quel discours, Jacinte ! Ainsi mon cœur ennemi de la feinte, Se peut donc à présent expliquer sans contrainte ? J'aime, vous le savez, ce cœur a fait un choix, Et ne se peut, Seigneur, engager qu'une fois. Je vous offre amitié sincère, égards, estime ; Vous promettre le cœur, ce serait faire un crime. Quoi donc vengé ! De qui ? Ne vous livrez point trop au transport qui vous guide ; Songez qu'à Don Garcie un tel nom n'est point dû. Quelque accident fâcheux vous est-il arrive? Isabelle ? Par vos réflexions, n'augmentez point ma peine, La vôtre finira, sans doute, où l'on vous mène. J'aurais laissé durer vos troubles moins longtemps, Et Jacinte à mon gré vous tient trop en suspens. Don Juan et mon père ! Quel malheur ! Ah, mon père ! **** *creator_dancourt *book_dancourt_trahisonpunie *style_verse *genre_comedy *dist1_dancourt_verse_comedy_trahisonpunie *dist2_dancourt_verse_comedy *id_ISABELLE *date_1707 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_isabelle Ma chère Léonor, qui vous agite ainsi ? Vous soupirez ? Parlez. Mais vous aimez mon frère ? Mon frère vous adore. À deux cœurs bien unis manque-t-il quelque chose ? Le vôtre se sert-il de ses droits contre vous ? Ah, Ciel ! S'il est ainsi, que deviendra mon frère? Comment faire? Et quel est cet époux? Cela parait bizarre. Le style d'un vieillard est un ennuyeux style. Qu'avez-vous répondu ? Mais il fallait du moins lui donner à connaître, Des sentiments du cœur qu'on n'est souvent pas maître, Et que quelque projet que le sien eût conçu… Ah ! Vous deviez saisir ce moment pour lui dire… Don André ! Vous aimez Don André? Et lui vous aime ? Mais enfin, qui vous fait soupçonner cet amour ? Il ne voit pas bien clair, vous vous trompez, ma chère : Depuis plus de trois mois, Don André sous ma loi, N'écrit, ne parle, enfin ne rend des soins qu'à moi. L'erreur n'est que pour vous, Don André m'est fidèle. Il me cherche. Oui. Hé, ne suffit-il pas pour lui que j'y puisse être ? Oh ! Pour celui-là, bon ! Oui, je le sais, Toujours fixés ici. Ma chère Léonor, nos maisons sont voisines, Nos fenêtres aussi ; cela fait, mon enfant, Que vous prenez pour vous tous les soins qu'il me rend. Il lui plaît, et malgré l'apparence, Je sais sur tout cela ce qu'il faut que je pense. Ah ! Le tour est plaisant ! Pour mieux cacher son jeu. Hé, de ces froideurs-là, vous pouvez bien juger Que l'on est engagée à le dédommager. Le joli Cavalier ! Il a tant de mérite… Vous serez par la suite encor mieux éclaircie. Et quand… Elle est de fort bon sens, et dit fort vrai, Jacinte. Ah ! Fort bien ; de quel droit prétend-il l'empêcher ? Mon frère pense-t-il me tenir en tutelle ? Oui. Que je reconnais bien l'esprit de la famille ! Voilà comme ils sont tous : moi-même, quoique fille, Je ressens même feu, même vivacité ; Je n'ai qu'un seul amant : s'il m'était disputé… Je crois qu'en pareil cas la fureur qui possède… Voici mon frère. Un aveu de la sorte est bien satisfaisant. Tu n'es vraiment pas sage, La maxime est fort bonne? Paix, mon frère. J'avouerai qu'elle est neuve. Vous ici, Don André, qu'y venez-vous donc faire ? Fort bien. Mais paix, voilà mon frère. Ah ! Léonor, de grâce, Détournez, s'il se peut, le coup qui me menace. C'est un bonheur pour moi de vous avoir trouvé, Don Juan. Je m'en flatte, Seigneur, Don Garcie est mon frère. Oui, Seigneur, j'ignore quand, comment, Il peut avoir eu prise avec que mon amant, Don André. Depuis longtemps, Seigneur, même ardeur nous enflamme, Et celle qu'il ressent est égale à mes deux. Ah, Seigneur ! Il propose un duel, Seigneur, à Don Garcie, Je l'ai su par hasard en ouvrant ce billet, Qu'inconsidérément m'a laissé son valet. En ce billet tout est bien expliqué. Vous verrez… Où, Seigneur ? Léonor ? Ah, que je suis à plaindre ! D'un frère ou d'un amant la fuite ou le trépas. Partout où vous allez, je me laisse conduire: Enfin nous allons… où, dites ? En quoi mes sens par-là seront-ils rassurés ? Quoi, Don André chez elle aurait-il habitude. Tire-moi de cette incertitude, Jacinte, elle commence à m'impatienter, Suis-je dans un état à pouvoir plaisanter ? Quoi, mon frère ? C'est cela… Ma crainte se dissipe, et mon cœur se rassure, Et c'est un grand plaisir pour moi, je vous le jure, Quand mon frère a querellé avec mon amant, D'en voir un à couvert du premier mouvement. Oui, j'aperçois quelqu'un qui s'approche en effet. Quel désordre ? Quel bruit ? Juste Ciel! **** *creator_dancourt *book_dancourt_trahisonpunie *style_verse *genre_comedy *dist1_dancourt_verse_comedy_trahisonpunie *dist2_dancourt_verse_comedy *id_FABRICE *date_1707 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_fabrice C'est bien du temps qu'une heure, et nous n'en avons guères, Tant nous sommes chargés de ces sortes d'affaires. Par l'amour peu, beaucoup par le dérèglement. Non, il prend sans façon tout ce qui se présente. Sans goût, sans choix, sans règle, il se livre au plaisir ; Mais il s'épargne au moins l'embarras de choisir : Ainsi de quelque part, mon enfant que l'on vienne, De prude, de coquette, et fut-ce de la tienne, Je puis t'en assurer par ce que j'en ai vu, Nul message galant ne sera mal reçu. Bon, c'est bien prendre l'affaire : Si par hasard aussi l'on a de quoi te plaire ? Si tu sens pour moi quelque tentation, Parle, et l'on y fera considération. Et si tu me fais part jamais d'un tel secret, Je le dirai partout, moi, tant je suis discret. On ne saurait mieux l'être : Touche là. Le hasard le conduit ici tout à propos. Une jeune et gentille Suivante, Qu'on députe vers vous pour affaire importante, Demande avec instance à vous rendre un billet ; Et je me suis chargé, comme premier valet, De ces vétilles-là l'unique secrétaire, Et de vos faits galants intendant ordinaire, De vous la présenter. Allons, viens, Mon compliment est fait, ma chère, fais le tien. Fort bien. Doucement. Depuis que je vous sers dans vos bonnes fortunes ; Au diable, si jamais j'ai profité d'aucunes ; Et ce n'a pas été faute d'occasion. Si j'eusse eu comme vous mauvaise intention, Je suis assez bien fait, et plus d'une Marquise… Il n'a tenu qu'à moi d'en faire la sottise… Cela vous regardait, et je n'en ai dit mot, Mais quand un bon hasard se trouve dans mon lot… Puisqu'en tel cas pour vous j'ai de la conscience, Ayez-en, et vivons en bonne intelligence. Je suis votre valet, et vous avez raison ; Mais lorsque le valet est fidèle à son maître, Le maître à son valet a tort de ne pas l'être. Oh, pour endurant, non, tous les jours d'ordinaire, Vous me donnez, Monsieur, des preuves du contraire. Il a des moments où le Diable le berce. Monsieur… Quoi ! Comment, Vous me mettez dehors, Monsieur ? Et moi de vous voir faire. Mais, que vous ai-je fait ! D'accord, Monsieur. Vous êtes le maître. De grâce, Du droit de maître ici, puisque vous vous servez, Comme tel payez-moi ce que vous me devez. Oui. N'oubliez pas au moins ce que vous permettez, Je lâcherai parfois d'étranges vérités. Si vous vous fâchez… Hé, dis-lui qu'il attende. Mais y songez-vous bien ? Si c'est quelque ennemi qui vienne… Quelque mari jaloux, quelque amant, quelque frère… Le drôle a l'air colère. Monsieur n'a pas pour moi la même confiance. Ce serait le gêner. Volontiers. D'écouter, j'ai pourtant grande envie. Hoime. Mais il a raison, et j'en suis fort content. Plût au Ciel que mon maître en pût avoir autant. Le Seigneur Torellas parle d'assez bon sens. Qu'en dites-vous, Monsieur ? En entrant il m'a paru fâché. Comment ! A-t-il sujet d'être plus en colère ? Et seriez-vous en droit par hasard de lui faire Pareille confidence ? De quoi donc ? De sa sœur ? Oui, tout l'Été dernier je sais que vous fassiez À peu près comme si tous deux vous vous aimiez. Peut-être de la sienne aussi. Que vous êtes, Monsieur, d'un joli caractère ! Mais quel est le plaisir que vous pouvez vous faire, De voltiger sans cesse et sans réflexion, Sans plaisir à coup sûr, si c'est sans passion ; De poursuivre à la fois la belle, et la plus laide, Qui du plus fort amour serait un sûr remède ; Ou jeune, ou vieille, ou grande, ou petite, ou dondon, Ou maigre, ou blonde, ou brune, enfin tout vous est bon ; Les yeux grands, les petits, le long nez, la camuse, Tout vous plaît. Que c'est bien fait à vous ! L'heureux tempérament ! Mais si par cas fortuit, (car tout événement Peut arriver), si donc sur quelque jalousie Père, amant, frère, époux, voulait par fantaisie Se venger d'un affront, ou fait ou prétendu… Mais vous n'avez jamais été tué… je pense : Si vous l'étiez, Monsieur, quelque jour… patience… Plût au Ciel, Que pour être bien mort, il fallût mourir quatre ! C'est alors qu'on pourrait hasarder de se battre. Non, mais pour l'éviter, Don Garcie est brave homme, il faut le contenter. Défions-nous de lui, Monsieur, il est alaigre, Sa maîtresse est dondon, prenez-en quelque maigre, Pour vous en consoler par opposition. Une action fort sage. Vous vous garderez bien de la faire, je gage. C'est Don Félix, père de Léonor. Ce début me paraît très fort semblable à l'autre : Un peu moins vif pourtant. Pour la première fois vous voilà raisonnable, J'en suis ravi, Monsieur, ou je me donne au diable. Il croyait vous tenir et vous prendre au filet. Ne suis-je pas valet ? De bien plus doux objets votre âme est possédée ; Le mariage, fi ! C'est un engagement, Et vous ne voulez, vous, que de l'amusement. Hé, si vous l'aimez tant, pourquoi ne pas oser… Mais vous avez promis. Mais, Monsieur, il me semble. Quelqu'un monte en cet appartement. Encor quelque éclaircissement. Je suis fort aise aussi que le sort réunisse Deux aussi bons amis. Fi, faites comme nous, Ne vous engagez point, Monsieur, amusez-vous. Et de changer de maître, au moins pour quelques jours. Ne faut-il, Monsieur, que vous attendre ? Seigneur, votre valet… J'accourais pour vous dire, Seigneur… Pardonnez à mon empressement: Mais la nouvelle enfin que je viens vous apprendre, Me paraît importante, et permet peu d'attendre. Votre valet et sa mule, tous deux À cent pas de la Ville, au fond d'un chemin creux, Sont tombés lourdement : la pauvre mule expire. Avec un pied rompu, le valet qui s'en tire, Et qui ne peut courir, faute de ce pied-là, Vient d'envoyer à l'Ours la lettre que voilà. Et moi, je vous l'apporte en grande diligence : Lisez. Vous voyez bien, Monsieur, que le fait est pressant. Oui, oui, faites, Monsieur, comme mon maître a fait, Quand son père mourut, sa douleur en effet, De toutes les douleurs eut été la plus forte, Si quelques jours après sa mère ne fut morte ; Mais cette douleur-là, dès qu'il fut orphelin, Étant au période, elle finit soudain, Ainsi par leur excès les douleurs désarmées… Les plus grandes, monsieur, sont les plutôt calmées. Vous avez bien raison d'en être bien fâché. Le traître ! Me voilà bien. Il ferait pis encor, s'il le pouvait, je gage. Il me paraît, Monsieur… Vous formez des projets qui vous mèneront loin. Je devine, et vois le train des choses. Mon, mais… On va m'embarquer là dans une étrange affaire ; Car je connais mon homme, et sais ce qu'il peut faire. Si j'en disais deux mots à Don Juan ? Mais, non, Je sûr en parlant de cent coups de bâton ; Et d'un autre côté ne disant rien, la peine Qui put m'en arriver du moins n'est pas certaine. Don Juan est parti, moi dans cette maison, Comme à lui, je deviens par son ordre espion. (Métier scabreux) qu'il faut cependant que je fasse, Allons, baste, à peu près je sais ce qui s'y passe. Et ce qui doit le plus m'embarrasser, C'est ce qui par mes soins doit bientôt s'y passer, Hoime. C'est la suivante. Tout doux, ma mie. Doucement, n'en sois point en souci, Suffit, que m'y voilà. Tu vois. Par la porte. De Don André, fi donc, Que le Ciel m'en préserve. Don André désormais peut chercher qui le serve : Nous sommes séparés pour longtemps, que je crois. Je suis à Don Juan à présent. Oui, moi. C'est sur ce titre-là que j'ose ici paraître, Et j'y suis de l'aveu, de l'ordre de ton maître. Compte qu'en ce logis dussé-je t'en fâcher, Quand j'aurai bien soupé, je puis m'aller coucher. Comment ? Plaît-il ? Je crois tout bas t'entendre murmurer ; Me trompais-je dis ? Je me propose aussi comme toi quelque chose. L'occasion… Sait le larron souvent… La proposition… Comme on n'a point encor céans réglé mon gîte, Si tu veux cette nuit recevoir ma visite, Pour causer seulement ; car… Je te défierais bien d'en trouver un meilleur. La conversation, je crois, sera gaillarde. Plus qu'on ne peut penser. Songe à ne point m'agacer. Où me rendre ? Dis. Ta chambre est ? Bon. Ne t'embarrasse point, si tôt que j'y serai, Motus. Quoi ? Ne me fais point languir, au moins, ma chère. J'y vais de ce pas même. La rencontre est plaisante, et la friponne m'aime : Il est de certaines gens qui vont au cœur d'abord. Si Don André plaisait de même à Léonor, Il serait peu besoin qu'à présent dans la rue, Pour tâche de la voir, il fit le pied de grue. Pour se cacher ici, je dois le faire entrer, Quand cela sera fait, où diantre le fourrer ? Il m'attend là-dehors cependant : qu'il s'y tienne, Si sa bonne fortune allait troubler la mienne. Il vient voir Léonor sans ordre, sans aveu. Ou dedans, ou dehors, aura-t-il plus beau jeu ? Et peu doit m'importer qu'il lui plaise, ou déplaise, Si j'ai bonne nuit, moi, qu'il la passe mauvaise. S'il reste-là pourtant, j'aurai, j'en suis certain, Pour une bonne nuit un fâcheux lendemain. Qu'il entre, tout coup vaille, allons ouvrir la porte. Sans bruit et sans hasard, Dieu veuille qu'il ressorte ! Entrez sans faire bruit. Elle n'est que poussée; et vous soyez alerte À décamper bientôt au moindre petit bruit ; Car si l'on vous trouvait ici caché de nuit, Comptez que ce serait une cruelle affaire. De bonne foi, Monsieur, ça qu'y venez-vous faire ? Mais quoi ? Lorsqu'à vos soins Don Juan se confie… Il entre moins d'amour ici que de caprice. Examinez-vous bien, là rendez-vous justice. La fin n'en vaudra rien, Monsieur, prenez-y garde. De nous faire assommer seulement. Écoutez, je n'y prends intérêt que pour moi, Car pour vous… Il est encore en ville. Et je sais en tout cas quand il serait ici, Que son appartement est loin de celui-ci. Dans le sien Léonor est rentrée. Forcer une serrure ! Ah, Monsieur ! Songez que c'est un cas pendable. Je gagne l'escalier, Et vais tourner à gauche au deuxième palier. Monsieur. Il me fait manquer une belle conquête. Nous sommes perdus. Chut, taisons-nous, Monsieur, de peur d'être entendus. Tant pis. Oui, viens. Tout seul vous pouvez approcher, Je n'ai pas seulement la force de marcher. Don Garcie, attendez, quelle erreur est la vôtre ? Vous allez égorger Don André pour un autre. Alphonse, Ignez, quelqu'un, Fernandez, au secours. La male-peste Nous allons voir beau jeu. Aucun n'ose répondre. Et rudement. Ah, Madame ! Ah, Seigneur ! Tout est perdu. Vous avez quitté Don André fort tranquille. Il lui vient au cerveau de monter une bile… Je n'ai pas cru d'abord que ce fut tout de bon, Mais j'en suis convaincu par vingt coups de bâton, Coups de pieds ou soufflets qu'en sa fureur extrême, Il vient de me donner en parlant à moi-même. Fort bien. Je n'en sais rien. Chez Don Garcie il m'a fait porter une lettre, Que ne le trouvant point, j'ai cru pouvoir remettre À Madame Isabelle, et quand de son billet Je lui suis revenu dire ce que j'ai fait, Enragé, furieux, faisant le diable à quatre, Il a pris une canne, et s'est mis à me battre. Moi qui ne comprend point ni comment, ni par où J'ai mérité cela, je conclus qu'il est fou. Il est vrai. Et voilà le sujet qui brouille sa cervelle. Moi ! Non, il est trop fâché. Je me sais où je vais promener mon chagrin, Mon enragé de maître… Parle ; mais ne dis rien surtout qui me déplaise : Car je n'ai pas l'humeur endurante aujourd'hui. Maraud… Il me paraît que vous n'en avez guère, Et vous pourriez pourtant, soit dit sans vous déplaire, Être un peu moins brutale, à moins que d'oublier Le rendez-vous d'hier au deuxième palier. Et tu vis bien aussi comme j'allai t'attendre. Et de qui, s'il te plaît, me moquais-je donc, moi ? Et la mienne eût été fort en défaut, ma mie. La drôle de guenon ? Et sur quel ton, dis-moi, le prends-tu donc toi-même ? Parbleu, crois-tu de moi que je pense autrement ? Va, va, Monsieur vaut bien Madame, assurément. Si pourtant tu veux être aujourd'hui sans rancune, Je te regarderai comme bonne fortune. Bon, bon, je menais l'un, et toi tu menais l'autre, Hé bien, nous avions fait entrer chacun le nôtre. Nous n'avons là-dessus rien à nous reprocher, Est-ce nous, après tout, qui devons nous fâcher ? Que nos maîtres entre eux songent à la vengeance, Mais nous, vivons gaillards en bonne intelligence. Vivent les gens d'esprit, N'est-ce pas ? Touche donc, sans rancune. Par quelque bon office Pourrais-je mériter ce pardon ? Oh ! Tu n'as qu'à parler, Jacinte. Oui, par ma foi, tu peux m'en croire à mon serment. De ma vie ! Oh ! Parbleu le serment est trop gros. Mais je te le promets au péril de mon dos. Oh ! Oui, par préférence, Déjà pour le trahir il m'a payé d'avance. Oui, c'est moi, ma pouponne, Oui, mignonne. Oh ! Point d'emportement. Les éclaircissements ne valent jamais rien. Laissons cela. Hé bien ? Savoir quoi ? Cette nuit ! Tu sais bien que c'est toi que j'ai vue. Hé bien, oui. C'était Un rendez-vous, Qu'avait dès le matin retenu sa maîtresse ; À tout cela, vois-tu, je n'entends point finesse. Oui, mais beaucoup meilleur que chez vous ; point de bruit, Point de rival jaloux, d'amant pris pour un autre : Oh ! Cette maison-là vaut bien mieux que la vôtre ! On est bien plus tranquille. Pas préférence ! Non. Sans courroux. Je suis facile et de trop bonne pâte. Mon maître est un maroufle, et m'exemple me gâte. Ma foi, du contretemps, je suis pourtant fâché ; De ces deux guenons-là j'aurais eu bon marché. Je leur avais parbleu donné dans la visière ; Foin ; je m'en devais bien tenir à la première ? Je ferais bien de fuir tout commerce avec lui. .......................................... Puis-je vous être utile ? Moi, je suis son valet; Mais du ton qu'il l'a pris, il; ne doit pas prétendre Que je sois de ma vie assez sot pour l'attendre. Quoi donc, l'avez-vous oublié ? Le bourreau sans raison m'a presque estropié. Point d'autre assurément, que le cours de la lune, C'est elle qui lui met la cervelle à l'envers. Je l'ai tant éprouvé depuis que je le sers, Monsieur. Hem… Plaît-il… Il parle seul, gare la lune aussi. Je vous suis inutile en cette occasion, Monsieur, pour soutenir la conversation. Les gens d'esprit jamais ne sont seuls d'ordinaire… Pendard. Fort bien, la lune opère. Il fallait qu'il eût quelque raison, Dans le fonds… En effet, Monsieur, comme vous dites… Ceci commence mal, défions-nous des suites. Je serai bienheureux si le Ciel m'en délivre. Oui, je suis un coquin, et dans votre courroux, Je ne vaux pas l'honneur d'être tué par vous. La porte à Don Garcie ? Hé, Monsieur ? Il n'en est rien, Monsieur, ou je me donne au diable, C'est une vérité qui n'est pas véritable. Lui, votre ami ? Ah ! J'en prends à témoin le Ciel qui nous écoute, Je veux être pendu, Monsieur, dès aujourd'hui, Si je n'ouvris hier la porte exprès pour lui. Le bourreau ! Je vous vais compter toute l'affaire… Et vous l'en croiriez, lui, c'est bien le plus grand traître, Le plus grand chien qui soit dans Valence, peut-être. Il paraît votre ami ? C'est votre rival. Je le sais, Monsieur, d'original. Il a depuis un temps, pour vexer Don Garcie, Moins peut-être par goût, que par bizarrerie, À Léonor rendu des assiduités ; Mais depuis hier ses feux paraissent augmentés. Et s'il faut franchement dire ce qu'il m'en semble, Tout cela pour vous faire enrager deux ensemble. Monsieur, c'est une méchante âme. Vous donnez là-dedans ? À peine seulement en savons-nous le nom, Ce n'est que d'hier matin qu'il promit l'entrevue, Et jamais lui ni moi nous ne l'avons connue. C'est Léonor à qui seule il en veut. Il cherche à vous donner le change autant qu'il peut. De vingt autres comme elle il se moque de même. Mais vous serez, je crois, (soit dit sans vous choquer) Celui dont il aura le plus à se moquer… N'allez pas là-dedans m'embarrasser, au moins, Ce que je vous dis là n'est qu'un avis sincère. Voici le prétendu beau-père. Je me retire. Quoique simple valet, et pas content, je vois Qu'il est encor des gens bien moins contents que moi. Don Juan, Don Félix, Don Garcie et mon maître, Léonor… Tout cela n'a pas sujet de l'être. Je ne sais pas comment l'intrigue finira. Tout coup vaille, et maudit qui s'en chagrinera ; Vive la joie, allons, le Ciel me soit en aide ; J'aperçois mon brutal que la fureur possède. Hé bien, j'aurai, Monsieur, la peine de l'attendre. Entrez chez Donna Elvire, et moi qui resterai, Dès qu'il sera venu je vous avertirai. Allez, c'est ici près que la belle demeure ; Vous la devez revoir, et voici quasi l'heure. Qu'elle est belle ! Ah ! Monsieur, c'est un friand morceau. ! Ma foi, ni moi non plus. Léonor… Quoi, Monsieur, vous y songez encor ? Ah, Monsieur ! Moi ! Fi donc, pouvez-vous rien faire qui soit mal, Si ce n'est avec moi d'être un peu trop brutal, Parfois. Au demeurant, Monsieur, on a beau dire. Moi qui vous vois de près, en tout je vous admire. Un esprit doux… accort… plein de docilité… La droiture de cœur… l'exacte probité… Des mœurs… une conduite… enfin de la sagesse… Comme n'en avaient point les sept sages de la Grèce. Maître de vous, surtout… C'est là le beau. Ah, le beau naturel ! De l'humeur dont vous êtes, On ne peut qu'applaudir à tout ce que vous faites. Vous l'avez en effet. Il est vrai. Les meilleurs sont les vôtres, Sans contredit. Vous voudrez ? Ah, Monsieur ! Rien, C'est la bonne manière : Je le crois bien vraiment… Ah, le grand scélérat ! Fi donc. Courir hasard de mort ou de blessure ? Comme vous la prenez, la chose est bien plus sûre. Oui, vous avez bon esprit en effet. Le lâche… Il n'est hardi que pour battre un valet. Mais les suites, Monsieur… Il est par tout pays certaines lois prescrites… Fort bien ! Je vous le garderai… mais point de défiance. Qu'avais-je affaire, moi, de cette confidence ? Haie, haie. Qu'il est sot ! Le Ciel à Don André vient de rendre justice ; Il n'en reviendra pas. Je ne saurais, je suis tout hors de moi. Pour être tous témoins, comme je viens de l'être, Du juste châtiment qui tombe sur mon maître. Il se meurt, et je puis dire ses vérités Cinq ou six grands coquins par son ordre apostés, Pour tuer Don Garcie, et Don Juan ensuite… Tous gens de courage et d'élite, Qui ne le connaissaient point du tout, ou fort peu, Selon que tout à l'heure, il m'en a fait l'aveu, Ardents à le servir, poussés d'un zèle extrême, L'ont pour l'un de vous deux assassiné lui-même. **** *creator_dancourt *book_dancourt_trahisonpunie *style_verse *genre_comedy *dist1_dancourt_verse_comedy_trahisonpunie *dist2_dancourt_verse_comedy *id_JACINTE *date_1707 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_jacinte Oui. Oui, vraiment. S'il viendra ? N'en doutez nullement ; À de tels rendez-vous manque-t-il d'ordinaire ? Ne vous embarrassez en aucune façon, Don Garcie est aimé de toute la maison. De discours obligeants, d'honnêtetés peu chiche, Généreux, libéral, quoiqu'il ne soit pas riche… Céans en sa faveur tout semble être séduit, Et pour lui nos verrous s'ouvrent sans faire bruit. Ce sont ses droits à lui que de s'y refuser. Vous en avez aussi, vous, dont il faut user. Il veut vous marier à son gré, comme père ; Et comme fille, vous, vous n'en voulez rien faire. C'est n'être pas d'accord ; mais je crois qu'aujourd'hui L'affaire dépendra de vous plus que de lui. Oui, Madame, il sait tout ; Mais on l'aime, est-il rien dont il ne vienne à bout ? Pour Don André déjà la chose est résolue ; Autant de mort, en cas qu'il passe dans la rue, Si de plus de cent pas il ose en approcher… Quoi ! Comment… Sérieusement ? Bon ! C'est un mort de moins, Car pour celui qui vient ici dans l'espérance Qu'il sera votre époux, plus il fait diligence, Plus il court à sa perte ; et c'est un fait certain. Lui ce soir arrivé, tué demain matin. Après quoi Don Garcie a des amis à Rome, Vous l'y suivrez, alors votre père bonhomme, Qu'un excès de douleur ou de pitié prendra, Mourra peut-être, et puis tout s'accommodera. Voilà, dans les transports dont son âme est saisie, Les tranquilles projets que forme Don Garcie. Non, mais il le perdra ; C'est un coup sûr, Madame, ou vous épousera. N'entrez point en fureur, Madame, on vous le cède. Vous n'avez plus personne à tuer à présent. Il n'est pas bien aisé d'en trouver qui soient sûres. Tout, si vous vous savez conduire prudemment ; Un refus, quoique dur, essuyé sagement, Une plainte modeste, une bonne conduite, Sont des titres souvent pour obtenir ensuite. Cet époux prétendu qui vous met en souci, Ne nous fait pas grand mal tant qu'il n'est point ici. Ne nous chagrinons point d'avance ; s'il arrive, Alors bon pied, don œil, nous irons au qui-vive. Vous êtes bien d'accord de vos faits ; on fera Suivant l'occasion tout ce qui se conviendra. Vous voilà mariés. Hé combien en voit-on Qui sans autant d'amour y font moins de façon. Mais qui fait accourir Ignez ainsi ? Qu'est-ce ? S'il le voit, c'est un premier orage Que nous essuierons. Hé bien ! il vous verra : Et peut-être à vous voir il s'accoutumera. C'est une belle chose au moins que l'habitude. Courage, allons… Ne vous ébranlez point, pour ne pas avoir tort: Rien n'est tel que de prendre un bon parti d'abord. Il va jurer, pester, une fois, deux, trois, quatre, Il blâmera vos feux ; puis las de les combattre, Et de voir chaque jour ses ordres mal suivis, Il approuvera tout dans la crainte de pis. Pour faire ce qu'on veut, la maxime infaillible ; Madame, croyez-moi, c'est d'être incorrigible. Est fort d'usage aussi. Le voici. Vous voyez, nous avons compagnie. Le Ciel en soit loué. Patience. La pilule est fâcheuse à digérer. Bonne mine, et renfermez vos pleurs. Votre époux prétendu n'est point un fat, Madame. Oui da. Mais pour un temps du moins tâchez de vous contraindre ; Le devoir, la raison, l'honneur vous le prescrit Le Ciel en soit loué. Mais voici votre père. Don Juan l'accompagne. Il part, Madame. Vous en voilà défaite… Il part pour revenir ; peste soit du voyage. Pas tout à fait encor. Il est au fait. Ah ! Changez de conversation. Vous vous perdrez tous deux dans la réflexion, La morale, Seigneur, est peu divertissante. Et par l'ennui, le trouble et le chagrin s'augmente. Partez donc ; au retour, si c'est votre plaisir, Vous moraliserez tour à tour à loisir : Et je vous promets, moi, d'appuyer la morale. Adieu. Le beau régale ! Qu'un amant qui déplaît, et qui par argument, Prétend prouver qu'il faut qu'on l'aime absolument. Vous êtes, j'en conviens, dans un grand embarras, Ce que le père veut, vous ne le voulez pas ; Ce que vous voulez, vous, n'est pas au gré du père ; L'un des deux doit céder. Comment, vous balancez, je pense ? Mais vous aimez toujours Don Garcie. Et pour cet autre amant vous avez de la haine ? En cela nous sommes de moitié : Plaignons-le, d'accord, mais n'en ayons pas pitié. Il faut faire une fin pourtant, tout vous en presse, Le temps de cette absence est autant de gagné ; Mais des deux prétendants quand l'un est éloigné, De cet éloignement si l'autre ne profite, Et si rien au retour n'est fait, gare la suite. Un bon hymen secret ; Faute de quoi, Madame, il ne faut pas s'attendre… Oh bien ! Moi, qui suis moins scrupuleuse que vous, Je me charge de tout, à tout je me résous ; Laissez-moi faire, allez. Tout le risque est pour moi, pour vous tout l'avantage, Et je ne me plains pas. Il faut que cette nuit Dans votre appartement, D. Garcie introduit… Vous ne le verrez pas, j'éteindrai la bougie. Hé bien, quoi ? Quand on a de l'amour, Qu'importe, s'il vous plaît, de la nuit ou du jour ? Hé bien ? Quoi ? C'est avoir de l'esprit. Tâchez donc d'oublier tout ce que j'en ai dit. Oui, vous avez raison, c'est la grande science. C'est ce qu'il ne faut pas que vous sachiez aussi. Non, n'appréhendez rien, comptez qu'elles sont sûres. Le logis du jardin touche au sien… Vous voulez tout savoir sans savoir rien. Entrez dans votre chambre et soyez-y tranquille. Hé, non ? Allez, rassurez-vous, et vous fiez à moi. Vous n'avez garde. Rentrez. Puisque c'est moi que l'affaire regarde, Afin de la conduire à sa perfection, Il faut se ménager avec discrétion, Quoique de son rival il ignore l'absence, Le pauvre Don Garcie outré d'impatience, M'a déjà par trois fois fait dire qu'au jardin, Il attend de son sort quelle sera la fin : Mais pour l'en informer, quelque ennui qu'il endure, Attendons que la nuit devienne plus obscure. Que vois-je? C'est le valet de Don André, je pense. Ah, ah ! Quelle est votre insolence, Maraud ? Oser venir ici ? Que faire ? Comment, faquin, bélitre, Nous y voilà ? De quel droit ! À quel titre ? Quand, comment, et par où le traître est-il entré ? Es-tu pas valet de D. André ? Toi ? Le fusses-tu déjà. Je suis perdue ? Ceci de nos amants peut troubler l'entrevue. De ce maroufle, il faudrait m'assurer, Après… Non, c'est que je me propose… Que te proposes-tu ? Parle. Es-tu grand causeur ? Tant mieux, de mon côté, moi qui suis babillarde. Tu seras sage, au moins ? Ne m'en conte pas… Non, non, je t'en réponds, ne crains rien. Dans ma chambre même il faut m'aller attendre. Toute ouverte au deuxième palier, Tu tourneras à gauche en quittant l'escalier. Prends bien garde au bruit, pour peu qu'on en entende, Dans ce logis, surtout, la rumeur devient grande. Qu'avec plaisir je t'y enfermerai ? Rien. En m'attendant, tu peux sur quelque chaise, Si le sommeil te prend, dormir fort à mon aise. Non. Je ne ferai qu'un tour ou deux dans la maison, Et puis je te rejoins. St, st. Il est parti ! Ce benêt va penser Qu'avec moi pour en prendre on n'a qu'à se baisser. L'affection que j'ai pour Léonor m'engage À jouer, je l'avoue, un joli personnage, Le drôle dans ma chambre est déjà. Jusqu'au jour Allons fermer sur lui la porte à double tour. On ne peut souhaiter une plus sombre nuit, Attendez un moment ici sans faire de bruit, Je vais voir si quelqu'un, valet ou demoiselle, Ou même Don Félix, ne sont point avec elle. St, st, st, on vous attend. Allons. Pour nous quel orage s'apprête ? Ce maraud que je crois enfermé, le voilà. C'est lui de qui nous vient tout ce désordre-là. On frappe. Hé bien… un moment, je vous prie. Je suis toute essoufflée. Je viens de le quitter chagrin, fou, préparé À se couper la gorge avecque Don André. J'ai dit de votre part qu'il n'en fallait rien faire, Que de quelque façon que la chose tournât, Cela serait pour vous un très fâcheux éclat. Enfin, à mes raisons il a paru se rendre. Mais il m'a fait entendre Que si Don Juan vient le trouver aujourd'hui, Il ne peut éviter de se battre avec lui. Mais, quoi qu'il arrive, entre nous, il me semble Qu'à coup sûr deux des trois auront du bruir ensemble. Il en est un moyen, qu'à force de chercher J'ai trouvé dans ma tête en cette conjoncture, Et pour lequel déjà j'ai pris quelque mesure. Il faut avoir un peu de résolution. J'ai de votre part été chez Donne Elvire. Oui, je sais bien cela, Et je l'ai choisie exprès pour cette raison-là. À votre amant je viens en ce moment de dire Que sans perdre un instant, il fût chez Donne Elvire ? Que c'est le seul endroit où vous pourrez le voir, Qu'il vous attendît là du matin jusqu'au soir, Et jusqu'à demain même, attendu que sans peine Vous n'y pouvez aller, et n'êtes pas certaine De l'instant qui sera commode pour cela. Il est au rendez-vous dès à présent. Voilà, Comme en gagnant du temps à tout on remédie, Ce que pour en avoir m'a fourni mon génie C'est à vous maintenant, si vous le trouvez bon, De voir, d'examiner si vous irez, ou non, Pour mieux le retenir par une longue attente... Non, non, rassurez-vous, j'ai pris soin d'avertir, Qu'on le reçût en lieu dont il ne pût sortir. Le beau sujet de crainte ! Ma foi que Don Juan pense ce qu'il voudra, Pourvu qu'il aille au diable, on s'en consolera. Mais, voici Don Félix ; qu'il est sombre, Madame ! Tenons-nous bien. Pas plus que nous, je gage. Elle n'a pas sujet d'être satisfaite. Pourquoi, nous le demandez-vous ? Vous lui faites, Monsieur, espérer un époux, L'époux vient, et d'abord à la première vue, On tombe en pâmoison, tant on a l'âme émue, Pour vous mieux obéir, on se livre à l'amour, Et l'on en prend, Dieu sait… Puis dès le même jour Cet époux trop aimé, que la grêle accompagne, Presque sans dire mot, part, se met en campagne ; Croyez-vous que cela soit fort divertissant ? Autre chose, Monsieur ? En conscience, non. Hé, le moyen, de grâce ? Il est bien difficile, Quand on attend surtout, Monsieur, d'être tranquille. Ne nous condamnez point. Comment son père est mort, Hélas ? Ayez égard, Monsieur, à ce fatal présage ; Quel temps, quel triste temps pour faire un mariage ! Rompez. Que Don Juan, madame, désormais Aille pleurer son père, et qu'il nous laisse en paix. Céans, est-ce qu'il est venu ? Hier au soir ! Vous ne l'avez point vu, Madame, assurément c'est une médisance… Toutes deux dans un profond silence, Sans avoir entendu le moindre petit bruit, Nous avons en repos passé toute la nuit. Ai-je menti, Madame ? Si je me mêle, moi, d'être son interprète, C'est que comme aux vapeurs elle est parfois sujette… Voulez-vous quelque chose de moi, Monsieur ? La peste ! Si pour quelques soufflets j'en pouvais être quitte ? Quoi ? Monsieur ? Je crains que l'on ne tende un piège à ma vertu. Dès qu'un homme me parle, ou me regarde en face, Il me monte au visage un feu que rien n'efface. (Car voyez-vous, Monsieur, j'ai beaucoup de pudeur). En ce temps il me prend d'ordinaire Certain léger frisson qui ne me quitte guère. De moi ? Je ne sais rien, Monsieur. Mais je sais seulement, Monsieur, qu'en bonne foi, Ce que vous demandez est un secret pour moi. Oui, Monsieur. Léonor ! C'est l'esprit le plus dissimulé ; Jamais d'aucune chose elle ne m'a parlé. Non. Monsieur… Oh! Monsieur, je sais trop ce qu'un présent exige, Et si je l'acceptais… Je ne parlerai point, rien ne peut me corrompre. J'en ai fait bon serment. Miséricorde, Héla ! Monsieur, je suis perdue. Je me tairai. Tais-toi, parle : Monsieur, comment vous contenter ? Mais si je parle aussi, n'aurai-je rien à craindre ? Puisqu'il faut vous le dire, et sauter le fossé, Donnez-moi donc la bourse. Que dire ? Car en payant si bien, vous n'avez qu'à prescrire. La croirez-vous de moi, quand je vous la dirai ? Soyez dons attentif, voici toute l'histoire. Don Garcie est épris de Léonor. De cette vérité, Monsieur, ne doutez pas. Patience. Depuis plus de six mois qu'il l'adore, je pense, Ils se sont vus au cours, aux spectacles, au bal. Oui, tout cela ne fait ni bien ni mal. Comme elle répondit, Monsieur ? En brave Dame, Très mal d'abord, moins mal dans la suite, encor moins Après : au bout du compte, elle agréa ses soins. Si l'aveu vous fait peine, Vous pouvez en douter ; mais moi, j'en suis certaine. Moins qu'ils ne l'ont voulu. Tout autant qu'ils ont pu. Oh ! Cet article-là va vous mettre en colère, Et contre moi, Monsieur, terriblement. C'est bien fait. Comptant sur votre absence, Et par-là voyant luire un rayon d'espérance, C'est moi qui leur avais fait prendre un rendez-vous, Pour chercher les moyens d'être défaits de vous. Hé, Monsieur, voulez-vous que je mente? Il allait s'en retourner soudain Comme il était venu, par le mur du jardin. Non. Si je l'ouvris je veux être pendue. Ah ! C'est de Don André que vous parlez peut-être ! Ne vous y trompez point, Monsieur, c'est un grand traître. Le malheureux, hélas ! Sans lui nous étions bien, Et s'il ne fût venu, tout cela n'était rien. Voilà le curieux bien payé de sa bourse. N'est-il plus rien, Monsieur, que vous vouliez savoir ? Hé ! Que diantre en avez-vous affaire. J'ai tout dit, Madame. C'est parler net. Qu'est-ce ? Je ne vois pas grand mal à tout cela. Belle conclusion ! Quel transport ! Sur quelle herbe est-ce qu'il a marché ? Suis-le, Fabrice. Trêve aux douleurs, que diantre avez-vous donc à craindre ? Tout ira bien, allez, ne nous chagrinons pas. Chez Donna Elvire. Que sait-on ? Par quelqu'un que vous y trouverez. Don André ! Puisque vous répugnez à la plaisanterie, Sachez que nous venons voir ici Don Garcie. C'est peu qu'un frère, assurément, Il vaudrait mieux, sans doute, y trouver un amant : Mais c'est le nôtre à nous, et pour la bienséance, Il est bon que la sœur soit de la confidence. Justement, qui fait qu'au rendez-vous Nous vous avons, Madame, amenée avec nous. C'est une invention que mon petit génie, Pour prévenir l'éclat ce matin m'a fournie Mais quelqu'un vient à nous, je pense, non, si fait. C'est Fabrice, c'est lui, le hasard me l'envoie, Entrez vite, il n'est pas à propos qu'il vous voie. Ah! Te voilà, faquin, Je n'ai pu depuis hier te parler à mon aise… Ce maraud croit qu'on a de grands égards pour lui. Tu fus témoin des soins que je pris pour m'y rendre. Va, va, mon pauvre ami, je me moquais de toi. Ma raison eût été vraiment bien endormie. Oh, le plaisant magot ! Tu le prends-là vraiment sur un fort joli ton. Mais moi, je crois assez mériter que l'on m'aime. Sans rancune avec toi ! Cela ne se peut pas, Tu nous causas hier un trop grand embarras. C'est assez bien penser. Il suffit. Je te pardonne, va. Oui, Fabrice. Assurément. Hé bien, promets-moi donc au péril de ta vie, En toute occasion de servir Don Garcie. Contre Don André même. Hé, c'est toi, Béatrix. Comment, tu connais donc Béatrix ? Le beau doute ! Oui, vraiment. Non, non, je veux savoir… Cette nuit tu l'as entretenue ? Ton maître avait ici rendez-vous cette nuit ? Hé, voilà donc pourquoi Tu choisis Béatrix par préférence à moi ? Je suis sans jalousie, Va. Mais lorsqu'à t'écouter on veut bien s'abaisser, Il ne faut pas qu'ailleurs tu t'ailles adresser. Nous étions tous deux, ma chère, en bonne main. **** *creator_dancourt *book_dancourt_trahisonpunie *style_verse *genre_comedy *dist1_dancourt_verse_comedy_trahisonpunie *dist2_dancourt_verse_comedy *id_IGNEZ *date_1707 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_ignez Jacinte ? Madame ! Cette crainte, Seigneur, n'est pas sans fondement. Votre père là-bas vient d'entrer brusquement, Agité, l'œil ardent de joie ou de colère ; C'est de l'une ou de l'autre, à coup sûr. Don Juan d'Alvarade. **** *creator_dancourt *book_dancourt_trahisonpunie *style_verse *genre_comedy *dist1_dancourt_verse_comedy_trahisonpunie *dist2_dancourt_verse_comedy *id_UNLAQUAIS *date_1707 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_unlaquais Un Cavalier demande À parler à Monsieur.