**** *creator_merle *book_merle_abasmoliere *style_prose *genre_piece *dist1_merle_prose_piece_abasmoliere *dist2_merle_prose_piece *id_MALINGRE *date_1809 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_malingre Ma foi, Monsieur de Lahausse, j'attends, pour le déplacer quelqu'un... Du premier au vint-neuf, vingt-neuf demi-tasses : quand me payerez-vous ? Je ne payerai pas mon médecin avec votre bonne volonté. Je ne suis pas malade ! Je ne suis pas malade ! Moi qui suis toute l'année entre les mains d'un médecin et de deux apothicaires : je ne suis pas malade ! Mêlez-vous de payer vos créanciers, Monsieur de Lariffardière : moi je paye mes médecins, et je ne les renvoie pas. Un homme qui se moque des médecins et des pauvres malades. Sur les docteurs, sifflez bien ses critiques. Ouf, je suis bien aise qu'on aille apprendre à vivre à cet impertinent Molière. Vous n'y allez pas, vous? Moi ? Je ne le connais pas ; mais tout mon café lui en veut. Enfin, monsieur Dramantour n'est pas de votre avis ; et il doit se connaître en comédies ; il fait de si jolis mélodrames. Il y a de l'étoffe dans ce jeune homme-là. J'espère que, son oncle Géronte arrivant aujourd'hui, il épousera ma fille ce soir. Comment ! Je vous supposais des intentions. Je croyais que vous aviez mis cette alliance dans votre tête. Est-ce que cela vous serait sorti de l'idée ? Prenez garde ; c'est que ce sera trop froid. Vous plaisantez, je crois ! Dans un état comme le mien, Où le régime est nécessaire , Bien loin de m'Ëtre salutaire, Pour moi cela ne vaudrait rien. En vain l'on me condamne ; A la fin voulant me Porter beaucoup mieux, je Vais prendre un verre de Ma ptisane. Ma ptisane. Je ne puis pas me plaindre de cette ptisane-là, elle m'a fait bien de l'effet... Mettons mes comples en ordre, et voyons celui de Monsieu Calmant, mon apothicaire... Racine de patience... Celle-là il y a longtemps que je m'en sers... Casse, pour médecine... Le séné ne m'avait rien fait ; mais le docteur me répond de la casse... Voyons le total : Cinq et cinq, dix; dix et dix, vingt; pose... Hum... hum... Quatre-vingt-quatre francs... Ah ! Mon Dieu ! Que d'argent, sans compter l'opium, qui ne me fait pas fermer l'oeil, et mon médecin veut que je ferme les yeux là-dessus. L'astre des jours me voit passer les nuits Dans les tourments d'une longue insomnie ; Et ce qui vient redoubler mes ennuis, C'est que l'on met ma bourse à l'agonie, Par les soins d'un docteur vanté : Puisque tout mon argent s'évade, Je n'aurai plus la faculté (bis.) La faculté d'être malade. Et encore on me laisse, on m'abandonne. Je reste sur mes jambes, moi qui devrais être dans mon lit...Quelle maison ! Adèle... Adèle... Personne ne vient... Adèle. Eh ! Messieurs, quel tapage faites-vous donc ? Vous ne songez pas à ma position. Ah ! Vous me comblez d'aise. Enfin, nous pourrons causer librement. Il y a longtems que vous n'êtes venu ? Et ce jeune homme, votre voisin, comment va-t-il ? Il va donc bien ? Vous aviez pourtant dit que vous le guéririez. Pas trop bien ; je dépéris visiblement sans que ça paraisse. C'est que vos\isites sont si rares. Comment ? Ce que c'est que la docilité. Nous attendons Géronte, l'oncle du jeune homme. Adèle n'aime pas beaucoup son futur ; mais Monsieur Dramantour achalande beaucoup mon café. Ce garçon là m'est fort utile ; Son esprit m'est d'un grand secours : Chez moi je vois toute la ville Venir écouter ses discours. Ses chutes sont loin de l'abattre ; Son talent n'est point étouffé ; Et s'il ne prend point au théâtre, Il prend beaucoup dans mon café. Comment c'est vous !... C'est un ami d'enfance ; il y a cinquante ans que nous ne nous sommes vus ! Oui, mon ami, ça déride, et ça ne laisse pas que de rajeunir. Vous vous portez toujours bien ; ce n'est pas comme moi, je ne sais pas ce qui m'arrive, mais je m'en vas, je décline, décline, décline... Que dites-vous donc ? Un jeune homme qui à ce qu on dit, est très connu au Pinde. Ce soir... Un instant ; si je suis malade, je ne serai pas à la noce. Monsieur Géronte.... Monsieur le docteur. Monsieur le docteur... Monsieur Géronte... Daignez m'épargner le reste. Ô mon Dieu ! Mon Dieu ! Quel malheur ! Faut-il que j'en sois la victime !... Maudite amitié, à quoi m'exposes-tu ? Mon ancien ami, Monsieur Géronte, se permet de dire devant mon docteur, que Molière a bien fait de s'égayer sur le compte de la médecine. Que lui ont-ils donc fait ? Ô mon Dieu ! Ô Ciel ! Miséricorde ! Ce qui m'arrive est aussi fâcheux. Monsieur Tantmieux a menacé Géronte et ses amis de toutes les maladies ; or , il est.... il était mon ami, et, d'après cela, je suis en danger. Monsieur Lariffardière, allez, je vous prie, trouver Monsieur Tantmieux, dites-lui que sans un dédit de trois mille francs qui me lie avec Monsieur Géronte, je ne le verrais plus. C'est un bon homme assez bizarre ; Économe ; Crédule ; Il ne sera pas à son aise ; mais ceci m'a tout troublé , et je me sens... Allez trouver Monsieur Tantmieux ; c'est une affaire très pressante, très pressante. Approchez, approchez, Adèle ; vous avez toujours fait ce que je vous ai dit, et je vais vous dire ce qu'il faut faire. Ce sera très bien fait. Cela voit toujours du même oeil que moi. Comment, vous ne savez pas ce que signifie le discours de monsieur ! Qu'est-ce que cela signifie, mademoiselle ? Il s'agit de l'épouser. Le dédit, je ne le payerai pas. Je ne... Si mon médecin ne m'avait pas défendu de me mettre en colère.... Ah ! Ah ! De grâce, Monsieur le docteur. Faut-il mourir ?.... Je me recommande à vous. Mais Monsieur le docteur , c'est que ce dédit. Vrai ? Depuis que vous êtes sorti, il vous est donc survenu des rentrées. Qu'appelez-vous malade imaginaire ? J'aime mieux être malade imaginaire , que... **** *creator_merle *book_merle_abasmoliere *style_prose *genre_piece *dist1_merle_prose_piece_abasmoliere *dist2_merle_prose_piece *id_LARIFFARDIERE *date_1809 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_lariffardiere Alain , une demi-tasse. Quelqu'un qui vaille mieux que lui ? Vous attendrez longtemps. Des sots il brave le courroux ; Malgré leur insolente audace, Sur le Pinde, mieux que chez vous, Longtemps il gardera sa place. Que de portraits dans ses tableaux ! Il sut, courtisan de Thalie, Copier les originaux, Et rester toujours sans copie. Vous pouvez compter... sur ma bonne volonté. Laissez donc votre médecin : vous n'êtes pas plus malade que moi. Hé, renvoyez-les. Nous différons en cela, monsieur ; moi je renvoie mes créanciers, et je ne les paye pas. Monsieur, nous crions donc toujours. Ah ! Je conçois votre fureur : Sitôt qu'on dit une bêtise, D'abord vous criez au voleur. Sans doute, cela n'a rien de commun. Pour écrire un bon mélodrame, Le bon comique est superflu : Il faut un tyran, une femme, Un poignard, un enfant perdu. De grands combats, une tempête, Et. surtout un rôle de bête : Ce rôle est toujours plein d'effet ; Maint auteur y met son cachet. Qui a peint tout le monde. Vous lui en voulez donc beaucoup ? Par son ignorance poussée, Chez nous on vit, dans tous les temps, Des sots la cohorte insensée S'armer contre les vrais talents : Envers Molière leur audace De ses tableaux prouve l'effet ; C'est le rustre brisant la glace Qui lui présente son portrait. Malpeste ! On s'en aperçoit à sa conversation ; il y mêle des petits passages tirés de ses sombres compositions ; il ne parle que par échantillon de ses pièces. Ma foi, je vous le conseille. Je saurai bien l'empêcher. Que voulez-vous ? Vous m'avez refusé ; cependant cela nous arrangeait tous les deux. Je vous devais déjà deux cent quinze francs ; j'espérais aussi vous devoir mon bonheur. Nous aurions été quittes. Vous me réfutez ; et, comme a dit Molière, il faut vouloir ce qu'on ne peut empêcher. C'est égal, c'est égal. J'en ai un, moi, et je m'en charge. Voulez-vous en prendre votre part ? Me voilà seul... Songeons un peu à nos affaires. Géronte, vieil avare, oncle de Dramantour, arrive ce soir... Diable ! C'est embarrassant... Heureusement Dramantour, mon rival, n'est point aimé... Si je pouvais tirer parti de tous ces caractères... Pourquoi pas ? Oui, je n'aurai point joué pendant dix ans les valets de comédie pour être arrêté par des originaux, Molière a joué tous les ridicules ; il me fournira mes moyens d'attaque... Malingre, malade imaginaire ; un médecin m'en fera raison. Il m'a refusé sa fille à cause de mes dettes ; monsieur de Lahausse, vous qui ne vous doutez pas que nous soyons parents, ceci vous regarde. Géronte, nouvel Harpagon... À moi, Scapin, avec tes fourberies. De Duguesclin, l'arme invincible, Rappelant ses nombreux hauts faits, Après sa mort, toujours terrible, Effrayait encor les Anglais. Molière, ainsi malgré leur nombre, Malgré leur cabale et leurs cris, Avec ta férule et ton ombre, J'écraserai tes ennemis. Elle est excellente. Je ne vous aime pas !... Je ne vous aime pas! Eh ! Quelles preuves voulez-vous de mon amour ? Depuis six mois que je vous connais, ai-je manqué de venir un seul jour ici, prendre le matin ma tasse de chocolat ; à deux heures, d'y venir dîner ; et le soir, ne m'y revoyez-vous pas encore prendre le dernier repas de la journée ? Cruelle ! C'est pour vous, et je ne vous aime pas !... Soyez tranquille ; on a toujours assez de temps pour se désoler. J'ai pour notre mariage certain projet. Je n'ai pas beaucoup de temps ; mais je suis trop heureux de vous le consacrer. Mais, vous qui parlez, avez-vous seulement pensé à achever mon portrait ? Je vais vous donner un bon moyen. De l'artiste judicieux Voulez-vous éviter le blâme, Peignez mon amour dans mes yeux. Et dans mes yeux peignez mon âme : De mon portrait facilement Vous ferez un autre moi-même. Si vous voulez qu'il soit parlant, Faites-lui dire : je vous aime. Mais voici votre père ; il ne faut pas qu'il nous trouve ensemble ; nous nous reverrons. Plus de Molière, Je le répète comme vous ; Il ouvre et ferme la carrière : Messieurs, on ne verra chez nous Plus de Molière. Voilà de vos arrêts, messieurs les gens de goût. Sa franchise vous indispose ; D'un rien vous êtes alarmés : Le terme qui sied à la chose, Il l'adopte, et vous l'en blâmez : Vous exigez un mot qui flatte ; Mais moi je vous le dis tout bas : L'oreille n'est si délicate, Que lorsque le coeur ne l'est pas. Laissons les croire à leur nouvelle, Car d'honneur je crois qu'ils sont fous ; Mais bientôt, grâces à mon zèle, Ici je veux les jouer tous. On se dispute, écoutons. Allez donc. Courage. Qu'avez-vous, Monsieur Malingre ? Vous paraissez fortement ému ; vous est-il arrivé qu'elqu'accident fâcheux ? Il a osé !... Ciel ! Que m'apprenez-vous ! Il ne tremble pas du sort de Molière ? Savez-vous comment les médècins se sont vengés de lui ? Ce qu'ils lui ont fait ? Rien. Il n'a pas pu en obtenir la plus petite saignée. Pas le moindre petit grain d'émétique. Et, enfin, abandonné par eux, je ne conçois pas comment il ne s'en est pas tiré. Ma foi, par l'intérêt que je vous porte, je vous plains. Un dédit, j'en fais mon affaire. Quel homme est-ce que ce Géronte ? C'est-là ce qu'on appelle un sot ; C'est un avare ; C'est ce qu'il nous faut ; Je me charge de votre affaire, Et, prouvant aujourd'hui mon tact, Je traite l'oncle à la Molière, Et le Géronte est dans le sac. Allez, allez, et laissez-moi faire. Les circonstances me favorisent ; il faut en profiter. Je suis fort tranquille. Nous serons deux, monsieur mon rival. On peut s'en tirer avec de l'esprit. Enfin, mon parti est pris. Surtout ne disons rien à Adèle... Ah ! Vous voilà. Mais j'ai cru, ma chère amie. D'accord ; mais... Je sens tout cela comme vous... Mais voici justement Monsieur de Lahausse ; j'ai besoin d'être seul avec lui. Adieu, mon Adèle. Tu ne demanderais pas mieux. Oui. Je vois que Monsieur Jourdain vous tient au coeur. Je t'y ferai bien venir. Mais Monsieur de Lahausse, il n'y a rien de commun entre vous et ce bourgeois. Votre famille est connue, et... Il y a toujours quelque chose qui distingue les gens de votre sorte. On n'a pas l'air distingué comme vous. Ah ! Monsieur, je n'oserai pas avec un homme de votre rang. En vérité, vous me comblez ; je n'ai jamais vu de seigneur... Je sais les apprécier, et leur rendre la justice qu'ils méritent. D'ailleurs, monsieur, je n'oublirai jamais que j'ai connu monsieur votre père. C'était un homme fort estimable, un coeur si pur ; qui faisait valoir lui-même les terres des autres. Il y passait sa vie au milieu des troupeaux, qu'il gardait lui-même, comme dans l'âge d'or... Vous aviez un oncle aussi, ce me semble ? Il se consacrait à l'instruction de la jeunesse. On l'appelait le Magister du village... C'était mon père, monsieur. Eustache Desvignes, ton cousin ; la nature ne te le disait pas ? Écoute, Grégoire ; tu as fait fortune, tu as oublié tes parents ; c'est l'usage. Je suis toujours resté gueux ; je me souviens des miens ; c'est tout naturel. Tu as besoin d'un nom, j'ai besoin d'argent ; je puis t'ôter l'un, tu peux me donner l'autre. Arrangeons-nous. Je vais me marier ; il me faut cent louis ; tu me le donneras, et, par reconnaissance, j'aurai l'air de ne t'avoir jamais connu. Ah ! Fi donc ! Fi donc, l'honneur de t'appartenir ; non, non. Je ne puis en conscience ; Crois-moi, perds toute espérance Qu'ici de ton alliance Je me désiste à ce prix. J'en veux cent, je le redis : Songe que dans la province, Tu tiens un état de prince ; Que connu pour ton parent, J'aurai un crédit important. Non, car je suis jaloux Du grand honneur d'être à vous ; Et quand pour moi l'espoir brille De retrouver ma famille, Pour si peu doit-on penser Que mon coeur puisse y renoncer ! Non, je n'en veux rien rabattre, Et dut-on me mettre en quatre : Cessons donc de nous débattre ; C'est trop longtemps balancer. Et d'une ; ah ! Molière, Molière ! Que je te remercie. Voici Monsieur Géronte, l'oncle de mon rival ; comme il vient à propos. À toi, et tu paieras ton dédit. Monsieur ? Oui, monsieur ; pardon de mon importunilé ; mais vous me paraissez un homme respectable, serviable, équitable, et vous me serez favorable. Il s'agit d'un malheureux. Donnez-moi... Et de l'argent ? Il ne s'agit pas d'argent ; mais d'un conseil. Eh bien ! Sachez que j'ai un ami... Ah ! Un jeune homme qui a un oncle, qu'il aime... Ah ! Qu'il aime, qu'il aime... Ah, ah , ah ! Un joli garçon , aimant à rire ; mais sage, rangé, qui aime les plaisirs, les fêtes, le bal, la comédie, pourvu qu'il ne lui en coûte rien. Et ce jeune homme s'endette par économie, et ne paie pas par arrangement. Sans doute , il place son argent à gros intérêts, et il fait attendre ses créanciers : il a beaucoup d'ordre. On l'appelle Dramantour ; homme d'esprit, de talent. Ah, ah , ah ! Ah ! Monsieur ; ah ! Monsieur. Eh bien ! Il est en prison. Parce que ses créanciers n'ont pas voulu entrer dans ses arrangements ; ayant su qu'il était au spectacle, car il y va... Non, monsieur ; c'est pour cela qu'il l'a choisie. Il s'agit de le tirer de leurs mains ; et vous seul pouvez... Ah ! Le cher oncle !... Le cher oncle ! Ami malheureux, le ciel m'est témoin que si j'étais en fonds, cher Pylade, tu serais délivré par Oreste. Une misère, mille écus. Eh ! Monsieur, pour une si petite somme, vous, son oncle, voulez-vous lui faire manquer un mariage qui doit placer sur sa tête... Quarante mille francs au moins. Il vous les rendra. Avec les intérêts. Avarice et bienfaisance Luttaient dans cette occurrence ; Mais grâce à mon éloquence, La bourse va me rester. J'étais, je vous le confesse, En invoquant la tendresse, Bien certain de l'emporter. J'ai mis vos affaires en bon train. Convenez de tout. J'ai menti à votre oncle : ne me démentez pas, et comptez sur moi. Allons, courage, Monsieur le docteur. Allons, voyons, Monsieur Tantmieux, composons. Ne vous inquiétez pas. J'aime votre fille; je lui plais. Et je paye le droit. Monsieur Géronte, donnez-moi l'écrit, et je vais vous satisfaire. C'est bon. Voilà les mille écus bien comptés dans cette bourse. La même, Monsieur Géronte, la même. Vous les payerez avec cet argent là. Je vous remercie bien, mon cher cousin. Oui, je l'étais ; mais il ne s'en souviens plus. Son nouvel éclat se change ; Le destin brise nos noeuds ; Et de cette mode étrange, Les exemples sont nombreux. Notre mémoire s'envole Quand le sort nous a souri ; Et le fleuve du Pactole Devient le fleuve d'oubli. Et vous qui parlez, n'est-ce pas avec votre argent que vous vous êtes payé le dédit ? Non, non, Monsieur Dandinville ; il y en a beaucoup comme vous. Ils ont sifflé Molière, et Molière s'est vengé. Du coeur humain peintre fidèle, Il en a trahi le secret ; Il a fait rire le modèle En lui présentant son portrait. Drapant la cour, Il mit au jour, Près d'un flatteur, Un vertueux frondeur. Dans ses tableaux Les faux dévots Sont dévoilés ; Les Cotins signalés. Sans la chercher, trouvant la gloire, D'un naturel toujours exquis, Il fit de ses moindres croquis Des tableaux pour l'histoire. **** *creator_merle *book_merle_abasmoliere *style_prose *genre_piece *dist1_merle_prose_piece_abasmoliere *dist2_merle_prose_piece *id_ADELE *date_1809 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_adele Ah ! Monieur de Lariffardière, vous voilà. Quoi ! Dans le moment où l'on va me forcer à épouser Monsieur Dramantour, vous n'avez pas l'air de me voir. Je vois bien que vous ne m'aimez pas. Voilà bien votre caractère ; toujours prêt à plaisanter dans les choses les plus sérieuses. Exécutez-le donc au plus tôt ; car vous êtes, en tout, d'une inconstance... Par exemple, depuis huit jours, avez-vous pensé un seul moment à me faire répéter un rôle. Ce doux travail fait mon bonheur ; Mais l'art parfois est inutile : Vos traits sont comme votre coeur ; Les fixer n'est pas très facile. Ce portrait m'offre à chaque instant Une difficulté nouvelle ; Car, pour qu'il soit bien ressemblant. Il ne faut pas qu'il soit fidèle. Mon père a l'air bien ému. D'abord, s'il me fait épouser M. Dramantour... Il serait si aisé avec du caractère. Mais mon père n'en a pas. J'y suis décidée. Je sais bien qui est-ce qui m'instruira.. . Ah ! C'est vous. Ah ! Monsieur, je vous y prends, c'est bien joli, de vouloir me cacher vos secrets. Comme s'ils n'étaient pas à moi comme à vous. Lorsque l'on s'aime, peine et plaisir doivent ctr-e en commun. Dans le plaisir, dans la tristesse, la confiance est un bonheur ; C'est le charme de la tendresse ; C'est le premier besoin du coeur ; Tendre amour c'est, grâce à ta flamme, Qu'on devient doublement heureux : Les indifférents n'ont qu'une âme ; Mais lorsqu'on aime, on en a deux. Adieu , puisque vous ne voulez pas que je sache... Je me soumets... Mais j'écouterai. Mon père, je ferai ce que vous me direz. Ce langage amphibologique Présente deux sens an lieu d'un ; C'est une énigme amphigourique, Dont le mot n'est pas sens commun. Ce style a droit de me confondre ; Mais quoiqu'il ait bien du succès. Moi je ne puis pas y répondre ; Car je ne sais que le français. Cela signifie, mon père, que s'il s'agit d'aimer monsieur... Oui, mon père. Mon ami, vous n'avez pas voulu faire des jaloux vous les avez joués tous. **** *creator_merle *book_merle_abasmoliere *style_prose *genre_piece *dist1_merle_prose_piece_abasmoliere *dist2_merle_prose_piece *id_GERONTE *date_1809 *sexe_masculin *age_veteran *statut_exterieur *fonction_autres *role_geronte Eh ! Bonjour , mon vieil ami. Aussi, quel plaisir de se revoir ! Comme cela déride !... Monsieur, je vous salue. Parlons de mon neveu. On m'a dit qu'il faisait des vers ; je trouve que ça ne rime à rien. Ah ! Ah ! Oh ! Oh ! Son procureur est donc bien content de lui ? Eh bien ! Alors cela revient au même. Allons, que ce mariage se fasse ce soir. C'est votre faute aussi, et si vous n'étiez pas toujours entouré de médecins, qui vous ruinent le corps et la bourse. Que j'ai vu dans une comédie de Molière, ou peut-être de Rabelais, je ne sais, qu'ils étaient fort tournés en ridicule. Entre nous, nous les connaissons. Je dis ce que je pense, et je pense comme Molière. D'accord ; mais... Cela est fort bien ; mais... Sans doute ; mais... Je ne dis pas cela ; mais... Je n'ai point prétendu... Moi je me moque du reste. Mon neveu, Dramantour, n'était pas chez lui ; la notaire était sorti ; où diable peuvent-ils être. Cet homme me regarde bien. J'espérais les rencontrer l'un ou l'autre ; mais à qui en veut donc cet homme ? Est-ce à moi que cela s'adresse ? Voudrait-il me demander de l'argent. Impossible. Je donne parfois le bonjour ; Je donne parfois audience ; Je donne aux voisins, tour à tour, De l'eau, du feu sans conséquence ; Je donne encore quelquefois, Plus d'une recette assez bonne. Je le reçois, Et jamais je n'en donne. Je suis à vous. J'en donne aussi très volontiers. Ne pleurez pas tant ; voyons. C'est bien ; après, après. Comment, par arrangement ? J'aime les jeunes gens comme ça. Quel est le nom de votre ami ? C'est mon neveu. Vous ne sauriez croire combien cela m'intéresse. Eh bien ! Comment, ah , ah ! Lui serait-il arrivé quelque malheur. Eh bien ! En prison ! Et pourquoi ? De grâce, achevez.... Et apprenez que je suis son oncle. Ciel ! Vous, son oncle... Ô destin ! Ô nature ! Voilà de tes coups... Sachez donc, qu'ayant appris qu'on l'attendait tous les soirs, il sortait par une petite porte de derrière, pour éviter la cohue, et c'est là qu'on s'est saisi de lui. Pourquoi diable sortir par cette porte. Est-ce qu'il n'y en a pas une autre ? Maudits créanciers ! Voici ce qu'il faut faire... Dites-lui que je l'aime beaucoup... Dites-lui qu'il trouve un répondant, et qu'il vienne se jeter dans mes bras. Cet homme-là lui est bien attaché. Eh bien ! Monsieur Preste, combien faudrait-il ? Mille écus ! Ah ! Mon Dieu ! Quoi donc ? Cela est fort bien... Mais mille écus. Ah ! Bath. Vous croyez... Je les ai là en or. Mais m'en séparer sitôt. Je ne me doutais en rien Que j'aurais cette faiblesse ; Mais enfin votre promesse.... Les mille écus y sont bien. Mon cher neveu, que je suis aise de t'embrasser ! On t'a donc laissé sortir de prison sur parole ? Oreste, il m'a tout conté ; mais une autre fois, ne sors plus par cette maudite porte. Cela parait te faire de la peine : parlons de ton mariage ; cela te plaira mieux. Ah ! Elle est donc jolie, ta future ? Et c'est fort bien dit. Je lui en fais mon compliment. Hum , si le reste n'est pas intelligible, ceci me parait assez clair. Mon neveu, on ne vous aime pas ; il faut prendre votre parti, et que Monsieur Malingre paye le dédit. Vous le payerez, ou vous nous épouserez. Bath, bath, nous n'avons jamais eu de médecins dans notre famille, et nous n'en sommes pas moin» morts bien portants. C'est la bourse de tantôt. Et les dettes de mon neveu ? Je commence à m'apercevoir... Il m'attrape... Mais je rattrape mon argent. Ah ! Bath, avec tes phrases. Comme ce monsieur s'est laissé jouer ! Ah ! Ah ! Voilà bien un autre Monsieur de Jourdain ! **** *creator_merle *book_merle_abasmoliere *style_prose *genre_piece *dist1_merle_prose_piece_abasmoliere *dist2_merle_prose_piece *id_DRAMANTOUR *date_1809 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_dramantour Toujours Molière ; on n'entend que ce nom, comme si mes pièces n'avaient pas un autre mérite que les siennes. Ma princesse paraît sur le donjon... L'aspect de la nature, de l'eau, du pain sec... Garçon. Une glace. La dame est à côté de la tour ; le chevalier défend la dame, de peur d'un échec... Eh ! Peut-on s'occuper de votre jeu lorsqu'on est en proie aux sublimes conceptions du théâtre ? Des comédies, Monsieur ! Dites donc des mélodrames. Vous verrez le mien. Molière ! Il est passé de mode. Qui plaisante les poètes célèbres : Vadius et Trissotin. Six heures, messieurs. Au théâtre, au théâtre. Deux pièces de lui ! Il faut qu'il succombe : l'heure de la vengeance a sonné. Allons, messieurs, ceux qui nous attendent Sont, comme nous, soutiens des bonnes moeurs : Point de pitié, lorsqu'elles commandent. Du vrai talent montrons-nous les vengeurs. Sur les auteurs, sifflons tous ses écrits. Sur les Jourdains, sifflons ses traits caustiques; Que n'étiez-vous là ; deux pièces de Molière qu'on n'a pas laissé achever. Plus de Molière, Criait en choeur notre parti ; Sa gaité nous paraît grossière, Et le bon ton le veut ainsi : Plus de Molière. Messieurs, n'oublions pas ce que l'amitié nous commande. Portons cette grande nouvelle, Et chez nos amis allons tous : Ils ont secondé notre zèle; Ils vont en jouir avec nous. Le jour de notre mariage Doit être un grand jour d'apparat ; Et ce soir, moi je vous engage... À venir signer le contrat. Portons cette grande, etc. Diable m'emporte si je sais ce qu'il veut dire ; mais c'est égal. Voici mon oncle. Ici, la tirade de la reconnaissance. Ô mon oncle inattendu ! C'est vous que le destin prospère précipite dans mon sein ! Oui, mon oncle... Mais au reste.... Oui, mon oncle. Sans doute. Ma phrase de la confidence. C'est sur Adèle ; c'est sur cet objet de mes plus tendres affections que repose la base de tout mon avenir, embelli par le prisme de l'espérance. Tenez, la voici, suivie du respectable vieillard de qui elle tient le jour. Ici ma tirade sentimentale. Adèle, non, le ciel peut sur moi exercer sa colère ; je brave les traits du destin, quelle que soit sa rigueur ; le bonheur qui m'attend près de vous sera l'égide de mon âme. Ange tutélaire, je connais l'héroïsme des femmes ; comptes sur ma franchise : je ne suis pas l'homme à trois visages ; et j'ose espérer que vous ne serez, jamais la femme à deux maris... Elle me refuse ! Ici mon couplet du tyran. Eh quoi ! Ni mes prières ni mon désespoir ne peuvent attendrir votre coeur formé par l'insensibilité... Eh bien ! Cruelle, craignez tout de ma juste fureur. Holà, gardes... Ce n'est pas ça ; j'ai été trop loin. Ici mon... imprécation... barbare ! Non, tes menaces ne peuvent rien sur moi. Soutenu par ma vertu, je te braverai dans les fers : qui méprise la mort, ne craint point.... un médecin. Nous sommes les jouets d'une conspiration ténébreuse. Et c'est vous, Monsieur Purgon, qu'il a fait agir auprès du malade imaginaire ; et s'il en était permis de rire. Ah ! Ah ! Ah ! **** *creator_merle *book_merle_abasmoliere *style_prose *genre_piece *dist1_merle_prose_piece_abasmoliere *dist2_merle_prose_piece *id_TANTMIEUX *date_1809 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_tantmieux Je ne devais pas ménager un auteur de mauvais ton. J'ai tant d'affaires ; tant de gens à voir. C'est une affaire finie. Eh ! Non ; il est mort. Aussi ai-je fait ; il est mort guéri. Mais parlons de vous ; comment cela va-t-il,depuis que je ne vous ai vu ? Tant mieux ; car vous sentez votre mal. À présent j'aurai plus de temps à moi. Trois colons avaient des accès D'humeur noire et mélancolique : Chaque jour je leur conseillais De retourner en Amérique. Longtemps ils furent indécis, Malgré ma science profonde ; Enfin ils ont cru mes avis, Et sont partis pour l'autre monde. Mais à propos, où en est le mariage de votre fille ? Tant mieux, tant mieux. Mais voici quelqu'un. Un jeune homme qui monte Pégase. Un jeune homme qui brille dans les citations ! Son procureur ! Laissez donc. Méprisant d'indignes liens, Fatigué de la servitude, Mettant en oeuvre ses moyens, Avec des goûts comme les siens, Il peut bien se passer d'étude : Epris d'une plus noble ardeur, Parcourant des routes nouvelles, Il a quitté son procureur. Pour voler (bis) de ses propres ailes. Que voulez-vous dire, monsieur. En ridicule, monsieur, en ridicule ! Pensez-vous bien à ce que vous dites ? Molière est un sot, et vous un imperlinent, Monsieur Géronte. Apprenez qu'un homme dont le savoir est attesté sur un diplôme en parchemin... Qui a pris ses grades dans l'Université d'Orange. Qui du bachalauréat a passé au doctorat. Ne doit pas être traité comme un ignorant. Et que celui qui pense ainsi se rend coupable du crime de lèze-faculté. Et mérite d'être livré à la vengeance hippocratique. Contre vous et tous vos amis, Je vois se former un orage : Vous méritez d'être punis ; Je saurai venger mon outrage. Vous avez partagé son tort : Craignez maint accident funeste ; Craignez la fièvre et le transport, L'asthme, la gravelle, la mort. Eh quoi ! votre audace Jamais ne se lasse ! De ce qui se passe Ne tremblez-vous pas ? Sans mon ordonnance, Faire une alliance, Dont la conséquence Est votre trépas. Contre Hippocrate Votre âme ingrate, Ici constate Un grief certain : Quoi ! Téméraire, Vous osez faire De sa colère Un fatal dédain ! Mais l'apoplexie, Et l'hydropisie, Et l'épilepsie, Servant mon courroux, Avec la colique, Et la sciatique, Vous rendront étique : C'en est fait de vous. Je suis inflexible... Allez, vous n'êtes pas digne d'être malade. S'allier avec une famille qui a encouru la haine de la médecine ! Monsieur Malingre, vous me résistez ! Et vous Monsieur Dramantour, petit Trissotin, comme il vous a attrapé ! Ah ! Ah ! Ah ! Oui, oui ; il faut convenir qu'à certains égards il a du bon. **** *creator_merle *book_merle_abasmoliere *style_prose *genre_piece *dist1_merle_prose_piece_abasmoliere *dist2_merle_prose_piece *id_DANDINVILLE *date_1809 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_dandinville C'est un fou. Oh ! Que diable, Monsieur, ne parlez donc pas sur le jeu ! Qui n'a rien de sacré ; qui ne respecte pas même les maris. Sifflons surtout ses traits sur les maris. Dont les pièces fourmillent d'expressions triviales et indécentes. N'appelle-t-il pas les maris... C'est bon, c'est bon, Monsieur de Lariffardière. Après vous, monsieur. C'est bon, c'est bon ; mais il a respecté les maris, et je suis le seul qui ne suis pas... **** *creator_merle *book_merle_abasmoliere *style_prose *genre_piece *dist1_merle_prose_piece_abasmoliere *dist2_merle_prose_piece *id_ALAIN *date_1809 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_alain Voilà, monsieur, voilà. Versez à Molière. Voilà votre demi-tasse. Monsieur. Eh bien ! Où est donc Monsieur Dramantour ? Il demande quelque chose, et il s'en va ; il n'a donc pas de mémoire ?