**** *creator_moliere *book_moliere_georgedandin *style_prose *genre_comedy *dist1_moliere_prose_comedy_georgedandin *dist2_moliere_prose_comedy *id_george-dandin *date_1668 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_georgedandin Ah ! qu'une femme Demoiselle est une étrange affaire, et que mon mariage est une leçon bien parlante à tous les Paysans qui veulent s'élever au-dessus de leur condition, et s'allier comme j'ai fait à la maison d'un Gentilhomme. La noblesse de soi est bonne : c'est une chose considérable assurément, mais elle est accompagnée de tant de mauvaises circonstances, qu'il est très bon de ne s'y point frotter. Je suis devenu là-dessus savant à mes dépens, et connais le style des Nobles lorsqu'ils nous font nous autres entrer dans leur famille. L'alliance qu'ils font est petite avec nos personnes. C'est notre bien seul qu'ils épousent, et j'aurais bien mieux fait, tout riche que je suis, de m'allier en bonne et franche paysannerie, que de prendre une femme qui se tient au-dessus de moi, s'offense de porter mon nom, et pense qu'avec tout mon bien je n'ai pas assez acheté la qualité de son mari. George Dandin, George Dandin, vous avez fait une sottise la plus grande du monde. Ma maison m'est effroyable maintenant, et je n'y rentre point sans y trouver quelque chagrin. Que diantre ce drôle-là vient-il faire chez moi ? Il ne me connaît pas. Ouais ! il a grand-peine à saluer. Bonjour. Vous n'êtes pas d'ici que je crois ? Hé dites-moi un peu, s'il vous plaît, vous venez de là-dedans. Comment ? Quoi donc ? Pourquoi ? Mais encore ? Point, point. Oui. Je n'ai garde. C'est bien fait. Fort bien. Sans doute. Le mieux du monde. Assurément. Hé comment nommez-vous celui qui vous a envoyé là-dedans ? Est-ce ce jeune Courtisan qui demeure... C'est pour cela que depuis peu ce Damoiseau poli s'est venu loger contre moi, j'avais bon nez sans doute, et son voisinage déjà m'avait donné quelque soupçon. Hé bienavez-vous fait votre message. Ah coquine de servante ! Mais quelle réponse a fait la Maîtresse à ce Monsieur le Courtisan ? Ah ! pendarde de femme. Cela est vrai. Oui, oui. Hé bien, George Dandin, vous voyez de quel air votre femme vous traite. Voilà ce que c'est d'avoir voulu épouser une Demoiselle, l'on vous accommode de toutes pièces, sans que vous puissiez vous venger, et la Gentilhommerie vous tient les bras liés. L'égalité de condition laisse du moins à l'honneur d'un mari liberté de ressentiment, et si c'était une Paysanne, vous auriez maintenant toutes vos coudées franches à vous en faire la justice à bons coups de bâton. Mais vous avez voulu tâter de la Noblesse, et il vous ennuyait d'être maître chez vous. Ah ! j'enrage de tout mon cœur, et je me donnerais volontiers des soufflets. Quoi écouter impudemment l'amour d'un Damoiseau, et y promettre en même temps de la correspondance ! Morbleu je ne veux point laisser passer une occasion de la sorte. Il me faut de ce pas aller faire mes plaintes au père et à la mère, et les rendre témoins à telle fin que de raison, des sujets de chagrin et de ressentiment que leur fille me donne. Mais les voici l'un et l'autre fort à propos. Aussi en ai-je du sujet, et... Ma foi, ma belle-mère, c'est que j'ai d'autres choses en tête, et... Comment ? Parbleu, si vous m'appelez votre gendre, il me semble que je puis vous appeler ma belle-mère. Puisqu'il faut donc parler catégoriquement, je vous dirai, Monsieur de Sotenville, que j'ai lieu de... Hé bien, Monsieur tout court, et non plus Monsieur de Sotenville, j'ai à vous dire que ma femme me donne... J'enrage. Comment, ma femme n'est pas ma femme ? Ah ! George Dandin, où t'es-tu fourré ? Et de grâce, mettez pour un moment votre gentilhommerie à côté, et souffrez que je vous parle maintenant comme je pourrai. Au diantre soit la tyrannie de toutes ces histoires-là. Je vous dis donc que je suis mal satisfait de mon mariage. Et quels avantages, Madame, puisque Madame y a ? L'aventure n'a pas été mauvaise pour vous, car sans moi vos affaires, avec votre permission, étaient fort délabrées, et mon argent a servi à reboucher d'assez bons trous ; mais moi de quoi y ai-je profité, je vous prie, que d'un allongement de nom, et au lieu de George Dandin, d'avoir reçu par vous le titre de Monsieur de la Dandinière ? Oui, voilà qui est bien, mes enfants seront Gentilshommes, mais je serai cocu moi, si l'on n'y met ordre. Cela veut dire que votre fille ne vit pas comme il faut qu'une femme vive, et qu'elle fait des choses qui sont contre l'honneur. Ho bien votre fille n'est pas si difficile que cela, et elle s'est apprivoisée depuis qu'elle est chez moi. Tout ce que je vous puis dire, c'est qu'il y a ici un certain Courtisan que vous avez vu, qui est amoureux d'elle à ma barbe, et qui lui a fait faire des protestations d'amour, qu'elle a très humainement écoutées. Je vous ai dit ce qui se passe pour vous faire mes plaintes, et je vous demande raison de cette affaire-là. Très sûr. Je ne vous ai rien dit, vous dis-je, qui ne soit véritable. Le voici qui vient vers nous. Quoi ? Répondez vous-même. Elle est toute soutenue, cela est vrai. Je dis que ce sont là des contes à dormir debout. Que je sais bien ce que je sais, et que tantôt, puisqu'il faut parler, elle a reçu une ambassade de sa part. Taisez-vous, carogne que vous êtes. Je sais de vos nouvelles, et c'est vous qui tantôt avez introduit le Courrier. Oui vous. Ne faites point tant la sucrée. Taisez-vous, bonne pièce. Vous faites la sournoise. Mais je vous connais il y a longtemps, et vous êtes une dessalée. Taisez-vous, vous dis-je, vous pourriez bien porter la folle enchère de tous les autres. Et vous n'avez point de père Gentilhomme. J'enrage de bon cœur d'avoir tort, lorsque j'ai raison. Comment satisfaction ? C'est une chose moi dont je ne demeure pas d'accord de l'avoir à tort accusé, et je sais bien ce que j'en pense. Si bien donc que si je le trouvais couché avec ma femme, il en serait quitte pour se dédire ? Moi, je lui ferai encore des excuses après... Je ne saurais... Ah George Dandin ! J'enrage. Monsieur. Des mauvaises pensées que j'ai eues de vous. C'est que je n'avais pas l'honneur de vous connaître. Et je vous prie de croire. Voulez-vous que je sois serviteur d'un homme qui me veut faire cocu ? Que je suis votre serviteur. Ah que je... Vous l'avez voulu, vous l'avez voulu, George Dandin, vous l'avez voulu, cela vous sied fort bien, et vous voilà ajusté comme il faut,vous avez justement ce que vous méritez. Allons il s'agit seulement de désabuser le père et la mère et je pourrai trouver peut-être quelque moyen d y réussir. Non non, on ne m'abuse pas avec tant de facilité, et je ne suis que trop certain que le rapport que l'on m'a fait est véritable. J'ai de meilleurs yeux qu'on ne pense, et votre galimatias ne m'a point tantôt ébloui. Au travers de toutes vos grimaces, j'ai vu la vérité de ce que l'on m'a dit, et le peu de respect que vous avez pour le nœud qui nous joint. Mon Dieu laissez là votre révérence, ce n'est pas de ces sortes de respect dont je vous parle, et vous n'avez que faire de vous moquer. Je sais votre pensée, et connais... Encore ? ah ne raillons pas davantage ! Je n'ignore pas qu'à cause de votre noblesse vous me tenez fort au-dessous de vous, et le respect que je vous veux dire ne regarde point ma personne. J'entends parler de celui que vous devez à des nœuds aussi vénérables que le sont ceux du mariage. Il ne faut point lever les épaules, et je ne dis point de sottises. Mon Dieu nous voyons clair. Je vous dis encore une fois que le mariage est une chaîne à laquelle on doit porter toute sorte de respect, et que c'est fort mal fait à vous d'en user comme vous faites. Oui oui mal fait à vous, et vous n'avez que faire de hocher la tête, et de me faire la grimace. Je le sais fort bien moi, et vos mépris me sont connus. Si je ne suis pas né noble, au moins suis-je d'une race où il n'y a point de reproche, et la famille des Dandins... Eh ? Le voilà qui vient rôder autour de vous. Je veux que vous y fassiez ce que fait une femme qui ne veut plaire qu'à son mari. Quoi qu'on en puisse dire, les Galants n'obsèdent jamais que quand on le veut bien, il y a un certain air doucereux qui les attire ainsi que le miel fait les mouches, et les honnêtes femmes ont des manières qui les savent chasser d'abord. Oui. Mais quel personnage voulez-vous que joue un mari pendant cette galanterie ? Je suis votre valet. Ce n'est pas là mon compte, et les Dandins ne sont point accoutumés à cette mode-là. C'est ainsi que vous satisfaites aux engagements de la foi que vous m'avez donnée publiquement. Oui !c'est ainsi que vous le prenez. Je suis votre mari, et je vous dis que je n'entends pas cela. Il me prend des tentations d'accommoder tout son visage à la compote, et le mettre en état de ne plaire de sa vie aux diseurs de fleurettes. Ah ! allons, George Dandin, je ne pourrais me retenir, et il vaut mieux quitter la place. Voici mon homme de tantôt. Plût au Ciel qu'il pût se résoudre à vouloir rendre témoignage au père et à la mère de ce qu'ils ne veulent point croire. Moi ? Écoute, mon ami. Comment. qu'est-ce qui se passe ? Arrête un peu. Je ne te veux dire qu'un mot. Non, ce n'est pas cela. C'est autre chose. Écoute. De grâce. Je te donnerai... Je n'ai pu me servir avec cet innocent de la pensée que j'avais. Mais le nouvel avis qui lui est échappé ferait la même chose, et si le Galant est chez moi, ce serait pour avoir raison aux yeux du père et de la mère, et les convaincre pleinement de l'effronterie de leur fille. Le mal de tout ceci c'est que je ne sais comment faire pour profiter d'un tel avis. Si je rentre chez moi, je ferai évader le drôle, et quelque chose que je puisse voir moi-même de mon déshonneur, je n'en serai point cru à mon serment, et l'on me dira que je rêve. Si d'autre part je vais querir beau-père et belle-mère sans être sûr de trouver chez moi le Galant, ce sera la même chose, et je retomberai dans l'inconvénient de tantôt. Pourrais-je point m'éclaircir doucement s'il y est encore ? Ah Ciel ! il n'en faut plus douter et je viens de l'apercevoir par le trou de la porte. Le sort me donne ici de quoi confondre ma partie, et pour achever l'aventure il fait venir à point nommé les juges dont j'avais besoin. Enfin vous ne m'avez pas voulu croire tantôt, et votre fille l'a emporté sur moi. Mais j'ai en main de quoi vous faire voir comme elle m'accommode, et Dieu mercimon déshonneur est si clair maintenant, que vous n'en pourrez plus douter. Oui j'y suis, et jamais je n'eus tant de sujet d'y être. Oui, Madame, et l'on fait bien pis à la mienne. Non. Mais je me lasse fort d'être pris pour dupe. Non, Madame, mais je voudrais bien me défaire d'une femme qui me déshonore. Marchand qui perd ne peut rire. Je m'en souviens assez, et ne m'en souviendrai que trop. Mais que ne songe-t-elle plutôt à me traiter plus honnêtement ? Quoi parce qu'elle est Demoiselle, il faut qu'elle ait la liberté de me faire ce qui lui plaît, sans que j'ose souffler ? Oui. Mais vous, que pourrez-vous dire, si je vous fais voir maintenant que le galant est avec elle ? Oui avec elle, et dans ma maison ? Oui. Dans ma propre maison. Vous n'avez qu'à me suivre. Mon Dieu, vous allez voir. Tenez. Ai-je menti ? Approchons doucement par derrière, et tâchons de n'être point vus. Euh traîtresse ! Scélérate. Je ne dis mot. Car je ne gagnerais rien à parler, et jamais il ne s'est rien vu d'égal à ma disgrâce. Oui, j'admire mon malheur, et la subtile adresse de ma carogne de femme pour se donner toujours raison, et me faire avoir tort. Est-il possible que toujours j'aurai du dessous avec elle ; que les apparences toujours tourneront contre moi, et que je ne parviendrai point à convaincre mon effrontée ? Ô Ciel ! seconde mes desseins, et m'accorde la grâce de faire voir aux gens que l'on me déshonore. entendu descendre ma femme, et je me suis vite habillé pour descendre après elle. Où peut-elle être allée ? Serait-elle sortie ? Qui va là ? Il fuit, et me laisse informé de la nouvelle perfidie de ma coquine. Allons, il faut que sans tarder, j'envoie appeler son père et sa mère, et que cette aventure me serve à me faire séparer d'elle. Holà, Colin, Colin. Allons, vite, ici-bas. Tu es là ? Doucement. Parle bas. Écoute. Va-t'en chez mon beau-père, et ma belle-mère, et dis que je les prie très instamment de venir tout a l'heure ici. Entends-tu ? Eh ? Colin, Colin. Où diable es-tu ? Peste soit du maroufle qui s'éloigne de moi. Je te dis que tu ailles de ce pas trouver mon beau-père, et ma belle-mère, et leur dire que je les conjure de se rendre ici tout à l'heure. M'entends-tu bien ? Réponds. Colin, Colin. Voilà un pendard qui me fera enrager, viens-t'en à moi. Ah le traître ! il m'a estropié. Où est-ce que tu es ? Approche, que je te donne mille coups. Je pense qu'il me fuit. Veux-tu venir ? Viens, te dis-je. Hé bien non. Je ne te ferai rien. Oui. Approche. Bon. Tu es bien heureux de ce que j'ai besoin de toi. Va-t'en vite de ma part prier mon beau-père et ma belle-mère de se rendre ici le plus tôt qu'ils pourront, et leur dis que c'est pour une affaire de la dernière conséquence. Et s'ils faisaient quelque difficulté à cause de l'heure, ne manque pas de les presser, et de leur bien faire entendre qu'il est très important qu'ils viennent, en quelque état qu'ils soient. Tu m'entends bien maintenant ? Va vite, et reviens de même. Et moi je vais rentrer dans ma maison, attendant que. … Mais j'entends quelqu'un. Ne serait-ce point ma femme ? Il faut que j'écoute, et me serve de l'obscurité qu'il fait. Voilà nos carognes de femmes. Pauvres maris ! voilà comme on vous traite. Plût au Ciel ! Fût-elle la tienne, tu changerais bien de langage. Rentrons. C'en est assez. Colin, Colin ? Ah je vous y prends donc, Madame ma femme, et vous faites des escampativos pendant que je dors. Je suis bien aise de cela, et de vous voir dehors à l'heure qu'il est. Oui, oui. L'heure est bonne à prendre le frais. C'est bien plutôt le chaud, Madame la Coquine ; et nous savons toute l'intrigue du rendez-vous, et du Damoiseau. Nous avons entendu votre galant entretien, et les beaux vers à ma louange que vous avez dits l'un et l'autre. Mais ma consolation c'est que je vais être vengé, et que votre père et votre mère seront convaincus maintenant de la justice de mes plaintes, et du dérèglement de votre conduite. Je les ai envoyé querir, et ils vont être ici dans un moment. Voilà un coup sans doute où vous ne vous attendiez pas. C'est maintenant que je triomphe, et j'ai de quoi mettre à bas votre orgueil, et détruire vos artifices. Jusques ici vous avez joué mes accusations, ébloui vos parents, et plâtré vos malversations. J'ai eu beau voir, et beau dire, et votre adresse toujours l'a emporté sur mon bon droit, et toujours vous avez trouvé moyen d'avoir raison. Mais à cette fois, Dieu merci, les choses vont être éclaircies, et votre effronterie sera pleinement confondue. Non, non il faut attendre la venue de ceux que j'ai mandés, et je veux qu'ils vous trouvent dehors à la belle heure qu'il est. En attendant qu'ils viennent, songez, si vous voulez à chercher dans votre tête quelque nouveau détour pour vous tirer de cette affaire. À inventer quelque moyen de rhabiller votre escapade. À trouver quelque belle ruse pour éluder ici les gens et paraître innocente. Quelque prétexte spécieux de pèlerinage nocturne, ou d'amie en travail d'enfant que vous veniez de secourir. C'est que vous voyez bien que tous les moyens vous en sont fermés, et que dans cette affaire vous ne sauriez inventer d'excuse qu'il ne me soit facile de convaincre de fausseté. Je vous baise les mains. Ah mon pauvre petit mari ? Je suis votre petit mari maintenant, parce que vous vous sentez prise. Je suis bien aise de cela, et vous ne vous étiez jamais avisée de me dire de ces douceurs. Tout cela n'est rien. Je ne veux point perdre cette aventure, et il m'importe qu'on soit une fois éclairci à fond de vos déportements. Hé bien quoi ? Oui : vous le dites, et ce sont de ces choses qui ont besoin qu'on les croie pieusement. Ah ! Crocodile qui flatte les gens pour les étrangler. Point d'affaires. Je suis inexorable. Non. Point. Non, non, non. Je veux qu'on soit détrompé de vous, et que votre confusion éclate. Et que ferez-vous, s'il vous plaît ? Ah ! ah ! à la bonne heure. Je suis votre valet. On ne s'avise plus de se tuer soi-même, et la mode en est passée il y a longtemps. Bagatelles, bagatelles. C'est pour me faire peur. Ouais ! serait-elle bien si malicieuse que de s'être tuée pour me faire pendre ? Prenons un bout de chandelle pour aller voir. La méchanceté d'une femme irait-elle bien jusques là ? (Il sort avec un bout de chandelle sans les apercevoir, elles entrent, aussitôt elles ferment la porte. ) Il n'y a personne. Eh je m'en étais bien douté, et la pendarde s'est retirée, voyant qu'elle ne gagnait rien après moi, ni par prières ni par menaces. Tant mieuxcela rendra ses affaires encore plus mauvaises, et le père et la mère qui vont venir en verront mieux son crime. Ahah la porte s'est fermée. Holà ho quelqu'un. Qu'on m'ouvre promptement. Comment vous avez... Quoi c'est ainsi que vous osez... Voilà une méchante carogne. Jamais... Peut-on... Laissez-moi vous dire deux mots. Je désespère. Monsieur mon beau-père, je vous conjure... Madame, je vous prie... Souffrez que je vous... Permettez de grâce que... Hé bien oui, je parle de loin. Je vous jure que je n'ai bougé de chez moi, et que c'est elle qui est sortie. J'atteste le Ciel, que j'étais dans la maison, et que... Que la foudre m'écrase tout à l'heure, si... Moi demander pardon ? Quoi je... Ah George Dandin ! À genoux ? Ô Ciel ! Que faut-il dire ? Madame, je vous prie de me pardonner. L'extravagance que j'ai faite (à part) De vous épouser. Et je vous promets de mieux vivre à l'avenir. Ah ! je le quitte maintenant, et je n'y vois plus de remède, lorsqu'on a comme moi épousé une méchante femme, le meilleur parti qu'on puisse prendre, c'est de s'aller jeter dans l'eau la tête la première. **** *creator_moliere *book_moliere_georgedandin *style_prose *genre_comedy *dist1_moliere_prose_comedy_georgedandin *dist2_moliere_prose_comedy *id_angelique *date_1668 *sexe_feminin *age_jeune *statut_maitre *fonction_fille *role_angelique Moi, et comment lui aurais-je dit ? Est-ce que cela est ? Je voudrais bien le voir vraiment que vous fussiez amoureux de moi. Jouez-vous-y, je vous en prie, vous trouverez à qui parler. C'est une chose que je vous conseille de faire. Ayez recours pour voir à tous les détours des Amants. Essayez un peu par plaisir à m'envoyer des ambassades, à m'écrire secrètement de petits billets doux, à épier les moments que mon mari n'y sera pas, ou le temps que je sortirai pour me parler de votre amour. Vous n'avez qu'à y venir, je vous promets que vous serez reçu comme il faut. Que sais-je moi ce qu'on me vient conter ici ? Vous n'aviez qu'à le faire, vous auriez été bien venu. Moi, j'ai reçu une ambassade. Claudine. C'est une imposture si grande, et qui me touche si fort au cœur, que je ne puis pas même avoir la force d'y répondre ; cela est bien horrible d'être accusée par un mari lorsqu'on ne lui fait rien qui ne soit à faire. Hélas ! si je suis blâmable de quelque chose, c'est d'en user trop bien avec lui. Tout mon malheur est de le trop considérer, et plût au Ciel que je fusse capable de souffrir, comme il dit, les galanteries de quelqu'un, je ne serais pas tant à plaindre. Adieu, je me retire, et je ne puis plus endurer qu'on m'outrage de cette sorte. Moi, me moquer ! En aucune façon. Qui songe à lever les épaules ? Moi ! je ne sais ce que vous voulez dire. Quoi ? je ne dis mot. Hé bien est-ce ma faute ? Que voulez-vous que j'y fasse ? Moi les chasser ? et par quelle raison, je ne me scandalise point qu'on me trouve bien faite, et cela me fait du plaisir. Le personnage d'un honnête homme qui est bien aise de voir sa femme considérée. Oh les Dandins s'y accoutumeront s'ils veulent. Car pour moi je vous déclare que mon dessein n'est pas de renoncer au monde, et de m'enterrer toute vive dans un mari. Comment, parce qu'un homme s'avise de nous épouser, il faut d'abord que toutes choses soient finies pour nous, et que nous rompions tout commerce avec les vivants ?C'est une chose merveilleuse que cette tyrannie de Messieurs les maris, et je les trouve bons de vouloir qu'on soit morte à tous les divertissements, et qu'on ne vive que pour eux. Je me moque de cela, et ne veux point mourir si jeune. Moi ? je ne vous l'ai point donnée de bon cœur, et vous me l'avez arrachée. M'avez-vous avant le mariage demandé mon consentement, et si je voulais bien de vous ? Vous n'avez consulté pour cela que mon père, et ma mère, ce sont eux proprement qui vous ont épousé, et c'est pourquoi vous ferez bien de vous plaindre toujours à eux des torts que l'on pourra vous faire. Pour moi qui ne vous ai point dit de vous marier avec moi, et que vous avez prise sans consulter mes sentiments, je prétends n'être point obligée à me soumettre en esclave à vos volontés, et je veux jouir, s'il vous plaît, de quelque nombre de beaux jours que m'offre la jeunesse ; prendre les douces libertés, que l'âge me permet, voir un peu le beau monde, et goûter le plaisir de m'ouïr dire des douceurs. Préparez-vous-y pour votre punition, et rendez grâces au Ciel de ce que je ne suis pas capable de quelque chose de pis. Moi je suis votre femme, et je vous dis que je l'entends. Voyons. Ah Claudine que ce billet s'explique d'une façon galante ! que dans tous leurs discours, et dans toutes leurs actions les gens de Cour ont un air agréable, et qu'est-ce que c'est auprès d'eux que nos gens de Province ? Demeure ici, je m'en vais faire la réponse. Adieu. J'ai peur qu'on vous surprenne ici, et j'ai quelques mesures à garder. J'y ferai mes efforts. S'il vous demeure quelque chose sur le cœur, je suis pour vous répondre. Ah mon père vous êtes là ! Non non, mon père, il n'est pas nécessaire. Il ne m'a aucune obligation de ce qu'il vient de voir, et tout ce que j'en fais n'est que pour l'amour de moi-même. Je me retire, mon père, pour ne me voir point obligée à recevoir ses compliments. Claudine. Laisse la porte entr'ouverte. St. Quoi ? Tout beau, Lubin. Oui. Est-ce pas vous, Clitandre ? Mon mari ronfle comme il faut, et j'ai pris ce temps pour nous entretenir ici. Adieu. Il est temps de se retirer. Nous nous sommes assez entretenus. Nous en écouterons une autre fois davantage. Nous trouverons moyen de nous revoir. Serez-vous assez fort pour avoir cette inquiétude, et pensez-vous qu'on soit capable d'aimer de certains maris qu'il y a. On les prend, parce qu'on ne s'en peut défendre, et que l'on dépend de parents qui n'ont des yeux que pour le bien, mais on sait leur rendre justice, et l'on se moque fort de les considérer au delà de ce qu'ils méritent. Elle a raison. Séparons-nous. Adieu. Rentrons sans faire de bruit. J'ai le passe-partout. On a fermé en dedans, et je ne sais comment nous ferons. Colin, Colin, Colin. Hé bien, quel grand mal est-ce qu'il y a à prendre le frais de la nuit ? Ah Ciel ! Hé je vous prie, faites-moi ouvrir la porte. Non, mon intention n'est pas de vous rien déguiser. Je ne prétends point me défendre, ni vous nier les choses, puisque vous les savez. Oui. Je confesse que j'ai tort, et que vous avez sujet de vous plaindre. Mais je vous demande par grâce de ne m'exposer point maintenant à la mauvaise humeur de mes parents, et de me faire promptement ouvrir. Ehmon pauvre petit mari. Je vous en conjure. Tenez. Je vous promets de ne vous plus donner aucun sujet de déplaisir, et de me... De grâce, laissez-moi vous dire. Je vous demande un moment d'audience. Il est vrai que j'ai failli, je vous l'avoue encore une fois, et que votre ressentiment est juste. Que j'ai pris le temps de sortir pendant que vous dormiez, et que cette sortie est un rendez-vous que j'avais donné à la personne que vous dites. Mais enfin ce sont des actions que vous devez pardonner à mon âge ; des emportements de jeune personne qui n'a encore rien vu, et ne fait que d'entrer au monde. Des libertés où l'on s'abandonne sans y penser de mal, et qui sans doute dans le fond n'ont rien de… Je ne veux point m'excuser par là d'être coupable envers vous, et je vous prie seulement d'oublier une offense, dont je vous demande pardon de tout mon cœur ; et de m'épargner en cette rencontre le déplaisir que me pourraient causer les reproches fâcheux de mon père et de ma mère. Si vous m'accordez généreusement la grâce que je vous demande ; ce procédé obligeant, cette bonté que vous me ferez voir, me gagnera entièrement. Elle touchera tout à fait mon cœur, et y fera naître pour vous ce que tout le pouvoir de mes parents et les liens du mariage n'avaient pu y jeter. En un mot, elle sera cause que je renoncerai à toutes les galanteries, et n'aurai de l'attachement que pour vous. Oui, je vous donne ma parole que vous m'allez voir désormais la meilleure femme du monde, et que je vous témoignerai tant d'amitié, tant d'amitié que vous en serez satisfait. Accordez-moi cette faveur. Montrez-vous généreux. De grâce. Je vous en conjure de tout mon cœur. Hé bien si vous me réduisez au désespoir, je vous avertis qu'une femme en cet état est capable de tout, et que je ferai quelque chose ici dont vous vous repentirez. Mon cœur se portera jusqu'aux extrêmes résolutions, et de ce couteau que voici je me tuerai sur la place. Pas tant à la bonne heure pour vous, que vous vous imaginez. On sait de tous côtés nos différends, et les chagrins perpétuels que vous concevez contre moi. Lorsqu'on me trouvera morte, il n'y aura personne qui mette en doute que ce ne soit vous qui m'aurez tuée ; et mes parents ne sont pas gens assurément à laisser cette mort impunie, et ils en feront sur votre personne toute la punition que leur pourront offrir, et les poursuites de la justice, et la chaleur de leur ressentiment. C'est par là que je trouverai moyen de me venger de vous, et je ne suis pas la première qui ait su recourir à de pareilles vengeances, qui n'ait pas fait difficulté de se donner la mort, pour perdre ceux qui ont la cruauté de nous pousser à la dernière extrémité. C'est une chose dont vous pouvez vous tenir sûr, et si vous persistez dans votre refus, si vous ne me faites ouvrir, je vous jure que tout à l'heure je vais vous faire voir jusques où peut aller la résolution d'une personne qu'on met au désespoir. Hé bien puisqu'il le faut, voici qui nous contentera tous deux, et montrera si je me moque. Ah c'en est fait. Fasse le Ciel que ma mort soit vengée comme je le souhaite, et que celui qui en est cause, reçoive un juste châtiment de la dureté qu'il a eue pour moi. St. Paix. Rangeons-nous chacune immédiatement contre un des côtés de la porte. Comment c'est toi !D'où viens-tu, bon pendard ? Est-il l'heure de revenir chez soi, quand le jour est près de paraître, et cette manière de vie est-elle celle que doit suivre un honnête mari ? Va, va, traître, je suis lasse de tes déportements, et je m'en veux plaindre sans plus tarder à mon père et à ma mère. Approchez de grâce, et venez me faire raison de l'insolence la plus grande du monde, d'un mari à qui le vin et la jalousie ont troublé de telle sorte la cervelle, qu'il ne sait plus ni ce qu'il dit, ni ce qu'il fait, et vous a lui-même envoyé querir pour vous faire témoins de l'extravagance la plus étrange dont on ait jamais ouï parler. Le voilà qui revient comme vous voyez, après s'être fait attendre toute la nuit, et si vous voulez l'écouter, il vous dira qu'il a les plus grandes plaintes du monde à vous faire de moi ; que durant qu'il dormait, je me suis dérobée d'auprès de lui pour m'en aller courir, et cent autres contes de même nature qu'il est allé rêver. Non, mon père, je ne puis plus souffrir un mari de la sorte. Ma patience est poussée à bout, et il vient de me dire cent paroles injurieuses. Vous n'avez qu'à l'écouter, il va vous en conter de belles. Ne voilà pas ce que je vous ai dit ? Moi ? lui pardonner tout ce qu'il m'a dit ? Non, non, mon père, il m'est impossible de m'y résoudre, et je vous prie de me séparer d'un mari avec lequel je ne saurais plus vivre. Comment patienter après de telles indignités ? non, mon père, c'est une chose où je ne puis consentir. Ce mot me ferme la bouche, et vous avez sur moi une puissance absolue. Il est fâcheux d'être contrainte d'oublier de telles injures, mais quelle violence que je me fasse, c'est à moi de vous obéir. Tout ce que vous me faites faire ne servira de rien, et vous verrez que ce sera dès demain à recommencer. **** *creator_moliere *book_moliere_georgedandin *style_prose *genre_comedy *dist1_moliere_prose_comedy_georgedandin *dist2_moliere_prose_comedy *id_monsieur-de-sotenville *date_1668 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_monsieurdesotenville Qu'est-ce, mon gendre ? vous me paraissez tout troublé. C'en est assez mamour, laissons cela. Corbleu, pardonnez-moi, on ne peut point me faire de leçons là-dessus, et j'ai su montrer en ma vie par vingt actions de vigueur, que je ne suis point homme à démordre jamais d'une partie de mes prétentions. Mais il suffit de lui avoir donné un petit avertissement. Sachons un peu, mon gendre, ce que vous avez dans l'esprit. Doucement, mon gendre. Apprenez qu'il n'est pas respectueux d'appeler les gens par leur nom, et qu'à ceux qui sont au-dessus de nous il faut dire Monsieur tout court. Tout beau. Apprenez aussi que vous ne devez pas dire ma femme, quand vous parlez de notre fille. Et la raison, mon gendre. Ne comptez-vous rien, mon gendre, l'avantage d'être allié à la maison de Sotenville ? Que veut dire cela, mon gendre ? Corbleu, dans la maison de Sotenville on n'a jamais vu de coquette, et la bravoure n'y est pas plus héréditaire aux mâles, que la chasteté aux femelles. Il y a eu une Mathurine de Sotenville qui refusa vingt mille écus d'un Favori du Roi, qui ne lui demandait seulement que la faveur de lui parler. Expliquez-vous, mon gendre, nous ne sommes point gens à la supporter dans de mauvaises actions, et nous serons les premiers, sa mère et moi, à vous en faire la justice. Corbleu, je lui passerais mon épée au travers du corps, à elle et au galant, si elle avait forfait à son honneur. Ne vous tourmentez point, je vous la ferai de tous deux, et je suis homme pour serrer le bouton à qui que ce puisse être. Mais êtes-vous bien sûr aussi de ce que vous nous dites ? Prenez bien garde au moins, car entre Gentilshommes, ce sont des choses chatouilleuses, et il n'est pas question d'aller faire ici un pas de Clerc. Mamour, allez-vous-en parler à votre fille, tandis qu'avec mon gendre j'irai parler à l'homme. Nous allons éclaircir l'affaire. Suivez-moi, mon gendre, et ne vous mettez pas en peine, vous verrez de quel bois nous nous chauffons lorsqu'on s'attaque à ceux qui nous peuvent appartenir. Monsieur, suis-je connu de vous ? Je m'appelle le baron de Sotenville. Monsieur, mon père Jean-Gilles de Sotenville eut la gloire d'assister en personne au grand siège de Montauban. Et j'ai eu un aïeul Bertrand de Sotenville, qui fut si considéré en son temps, que d'avoir permission de vendre tout son bien pour le voyage d'outre-mer. Il m'a été rapporté, Monsieur, que vous aimez et poursuivez une jeune personne, qui est ma fille pour laquelle je m'intéresse, et pour l'homme que vous voyez, qui a l'honneur d'être mon gendre. Oui. Et je suis bien aise de vous parler, pour tirer de vous, s'il vous plaît, un éclaircissement de cette affaire. Quelqu'un qui croit le bien savoir. Allons, mon gendre. Répondez. Soutenez donc la chose. Oui, c'est lui-même qui s'en est plaint à moi. Vous voilà satisfait, mon gendre, que dites-vous à cela ? Vous méritez, mon gendre, qu'on vous dise ces choses-là, et votre procédé met tout le monde contre vous. Cela est juste, et c'est l'ordre des procédés. Allons, mon gendre, faites satisfaction à Monsieur. Oui. Cela se doit dans les règles pour l'avoir à tort accusé. Il n'importe. Quelque pensée qui vous puisse rester, il a nié, c'est satisfaire les personnes, et l'on n'a nul droit de se plaindre de tout homme qui se dédit. Point de raisonnement. Faites-lui les excuses que je vous dis. Allons vous dis-je. Il n'y a rien à balancer, et vous n'avez que faire d'avoir peur d'en trop faire, puisque c'est moi qui vous conduis. Corbleu, mon gendre, ne m'échauffez pas la bile, je me mettrais avec lui contre vous. Allons. Laissez-vous gouverner par moi. Votre bonnet à la main le premier, Monsieur est Gentilhomme, et vous ne l'êtes pas. Répétez après moi. Monsieur. Des mauvaises pensées que j'ai eues de vous. C'est que je n'avais pas l'honneur de vous connaître. Et je vous prie de croire. Que je suis votre serviteur. Ah ! Non, je veux qu'il achève, et que tout aille dans les formes. Que je suis votre serviteur. Je vous baise les mains, et quand il vous plaira je vous donnerai le divertissement de courre un lièvre. Voilà, mon gendre, comme il faut pousser les choses. Adieu. Sachez que vous êtes entré dans une famille qui vous donnera de l'appui, et ne souffrira point que l'on vous fasse aucun affront. Comment, mon Gendre, vous en êtes encore là-dessus ? Ne vous lassez-vous point de vous rendre importun ? Corbleu cherchez des termes moins offensants que ceux-là. Si vous vous en souvenez, songez donc à parler d'elle avec plus de respect. Qu'avez-vous donc, et que pouvez-vous dire ?N'avez-vous pas vu ce matin qu'elle s'est défendue de connaître celui dont vous m'étiez venu parler ? Dans votre maison ? Oui. L'honneur de notre famille nous est plus cher que toute chose, et si vous dites vrai, nous la renoncerons pour notre sang, et l'abandonnerons à votre colère. N'allez pas faire comme tantôt. Oui, ma fille, et je vois qu'en sagesse, et en courage tu te montres un digne rejeton de la maison de Sotenville. Viens çà, approche-toi que je t'embrasse. Qu'est-ce, mon gendre ? que ne remerciez-vous un peu votre femme, de l'amitié que vous voyez qu'elle montre pour vous ? Où allez-vous, ma fille ? C'est un petit ressentiment de l'affaire de tantôt, et cela se passera avec un peu de caresse que vous lui ferez. Adieu, mon gendre, vous voilà en état de ne vous plus inquiéter. Allez-vous-en faire la paix ensemble, et tâchez de l'apaiser par des excuses de votre emportement. Comment, qu'est-ce à dire cela ? Corbleu vous êtes un malhonnête homme. Retirez-vous. Vous puez le vin à pleine bouche. Retirez-vous, vous dis-je. On ne peut vous souffrir. Allez. Vous vous moquez des gens. Descendez, ma fille, et venez ici. Ne nous rompez pas davantage la tête et songez à demander pardon à votre femme. Oui pardon, et sur-le-champ. Corbleu si vous me répliquez. Je vous apprendrai ce que c'est que de vous jouer à nous. Allons, venez, ma fille, que votre mari vous demande pardon. Ma fille, de semblables séparations ne se font point sans grand scandale, et vous devez vous montrer plus sage que lui, et patienter encore cette fois. Il le faut, ma fille, et c'est moi qui vous le commande. Approchez. Nous y donnerons ordre. Allons, mettez-vous à genoux. Oui à genoux, et sans tarder. Madame, je vous prie de me pardonner. L'extravagance que j'ai faite. Et je vous promets de mieux vivre à l'avenir. Prenez-y garde, et sachez que c'est ici la dernière de vos impertinences que nous souffrirons. Voilà le jour qui va paraître. Adieu. Rentrez chez vous, et songez bien à être sage. Et nous, mamour, allons nous mettre au lit. **** *creator_moliere *book_moliere_georgedandin *style_prose *genre_comedy *dist1_moliere_prose_comedy_georgedandin *dist2_moliere_prose_comedy *id_madame-de-sotenville *date_1668 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_madamedesotenville Mon Dieu, notre gendre, que vous avez peu de civilité de ne pas saluer les gens quand vous les approchez. Encor !Est-il possible, notre gendre, que vous sachiez si peu votre monde, et qu'il n'y ait pas moyen de vous instruire de la manière qu'il faut vivre parmi les personnes de qualité ? Ne vous déferez-vous jamais avec moi de la familiarité de ce mot de ma belle-mère, et ne sauriez-vous vous accoutumer à me dire Madame. Il y a fort à dire, et les choses ne sont pas égales. Apprenez, s'il vous plaît, que ce n'est pas à vous à vous servir de ce mot-là avec une personne de ma condition ; Que tout notre gendre que vous soyez, il y a grande différence de vous à nous, et que vous devez vous connaître. Mon Dieu, Monsieur de Sotenville, vous avez des indulgences qui n'appartiennent qu'à vous, et vous ne savez pas vous faire rendre par les gens ce qui vous est dû. Oui, notre gendre, elle est votre femme, mais il ne vous est pas permis de l'appeler ainsi, et c'est tout ce que vous pourriez faire, si vous aviez épousé une de vos pareilles. Quoi parler ainsi d'une chose dont vous avez tiré de si grands avantages ? Et à celle de la Prudoterie, dont j'ai l'honneur d'être issue. Maison où le ventre anoblit : et qui par ce beau privilège rendra vos enfants Gentilshommes. Tout beau. Prenez garde à ce que vous dites. Ma fille est d'une race trop pleine de vertu pour se porter jamais à faire aucune chose dont l'honnêteté soit blessée, et de la maison de la Prudoterie, il y a plus de trois cents ans qu'on n'a point remarqué qu'il y ait eu une femme, Dieu merci, qui ait fait parler d'elle. Nous avons eu une Jacqueline de la Prudoterie qui ne voulut jamais être la Maîtresse d'un Duc et Pair, Gouverneur de notre Province. Nous n'entendons point raillerie sur les matières de l'honneur, et nous l'avons élevée dans toute la sévérité possible. Jour de Dieu, je l'étranglerais de mes propres mains, s'il fallait qu'elle forlignât de l'honnêteté de sa mère. Se pourrait-il, mon fils, qu'elle s'oubliât de la sorte, après le sage exemple que vous savez vous-même que je lui ai donné ? Pour ce qui est de cela, la jalousie est une étrange chose !J'amène ici ma fille pour éclaircir l'affaire en présence de tout le monde. Hé bien vous le voyez. Allez, vous ne méritez pas l'honnête femme qu'on vous a donnée. Allez, songez à mieux traiter une Demoiselle bien née, et prenez garde désormais à ne plus faire de pareilles bévues. Vous nous venez encore étourdir la tête ? Ne voulez-vous point vous défaire de vos pensées extravagantes ? Jour de Dieu, notre gendre, apprenez à parler. Souvenez-vous que vous avez épousé une Demoiselle. Avec elle ? Si cela est, nous serons pour vous contre elle. Gardez de vous tromper. Embrasse-moi aussi, ma fille. Las ! je pleure de joie, et reconnais mon sang aux choses que tu viens de faire. Sans doute, notre gendre, et vous devez maintenant être le plus content des hommes. Vous devez considérer que c'est une jeune fille élevée à la vertu, et qui n'est point accoutumée à se voir soupçonner d'aucune vilaine action. Adieu. Je suis ravie de voir vos désordres finis et des transports de joie que vous doit donner sa conduite. Voilà une furieuse impudence que de nous envoyer querir. Allez, vous devriez mourir de honte. Fi ne m'approchez pas. Votre haleine est empestée. Poua, vous m'engloutissez le cœur. Parlez de loin, si vous voulez. Taisez-vous, c'est une extravagance qui n'est pas supportable. Jour de Dieu, si vous y retournez, on vous apprendra le respect que vous devez à votre femme ; et à ceux de qui elle sort. **** *creator_moliere *book_moliere_georgedandin *style_prose *genre_comedy *dist1_moliere_prose_comedy_georgedandin *dist2_moliere_prose_comedy *id_clitandre *date_1668 *sexe_masculin *age_jeune *statut_maitre *fonction_fils *role_clitandre Non pas que je sache, Monsieur. Je m'en réjouis fort. À la bonne heure. J'en suis ravi. Je le veux croire. Qui moi. Voilà une étrange médisance. Qui vous a dit cela, Monsieur ? Ce quelqu'un-là en a menti. Je suis honnête homme. Me croyez-vous capable, Monsieur, d'une action aussi lâche que celle-là ? Moi, aimer une jeune et belle personne, qui a l'honneur d'être la fille de Monsieur le baron de Sotenville. Je vous révère trop pour cela, et suis trop votre serviteur. Quiconque vous l'a dit est un sot. C'est un coquin et un maraud. Si je savais qui ce peut être, je lui donnerais en votre présence de l'épée dans le ventre. Est-ce votre gendre, Monsieur, qui... Certes, il peut remercier l'avantage qu'il a de vous appartenir, et sans cela je lui apprendrais bien à tenir de pareils discours d'une personne comme moi. Est-ce donc vous, Madame, qui avez dit à votre mari que je suis amoureux de vous ? Hé là là, Madame, tout doucement. Il n'est pas nécessaire de me faire tant de leçons, et de vous tant scandaliser. Qui vous dit que je songe à vous aimer ? On dira ce que l'on voudra. Mais vous savez si je vous ai parlé d'amour lorsque je vous ai rencontrée. Je vous assure qu'avec moi vous n'avez rien à craindre. Que je ne suis point homme à donner du chagrin aux Belles, et que je vous respecte trop, et vous et Messieurs vos parents, pour avoir la pensée d'être amoureux de vous. J'ai envoyé une ambassade ? Est-il vrai ? Monsieur, vous voyez comme j'ai été faussement accusé. Vous êtes homme qui savez les maximes du point d'honneur, et je vous demande raison de l'affront qui m'a été fait. Il suffit, Monsieur. Monsieur, je suis le vôtre de tout mon cœur, et je ne songe plus à ce qui s'est passé. Pour vous, Monsieur, je vous donne le bonjour, et suis fâché du petit chagrin que vous avez eu. C'est trop de grâces que vous me faites. Ah la voilà. Mais le mari est avec elle. Un moment d'entretien. Je n'ai pas osé envoyer de mes gens, mais, ma pauvre Claudine, il faut que je te récompense des bons offices que je sais que tu m'as rendus. Je te suis obligé. Dis-moi, as-tu rendu mon billet à ta belle maîtresse ? Mais, Claudine, n'y a-t-il pas moyen que je la puisse entretenir ? Mais le trouvera-t-elle bon, et n'y a-t-il rien à risquer ? Promettez-moi donc, Madame, que je pourrai vous parler cette nuit. Ah Ciel ! La nuit est avancée, et j'ai peur qu'il ne soit trop tard. Je ne vois point à me conduire. Lubin ! Est-ce par ici ? Elle a tort assurément. Mais si d'un côté elle nous empêche de voir, elle empêche de l'autre que nous ne soyons vus. C'est une grande question, et qui est difficile. Tu es curieux, Lubin. Je le crois. Tu as la mine d'avoir l'esprit subtil et pénétrant. Cela est admirable ! Tu sais donc lire, Lubin ? Nous voici contre la maison. C'est le signal que m'a donné Claudine. Aussi t'ai-je amené avec moi pour l'entretenir. Chut. J'entends quelque bruit. Ce sont elles. St. Madame. Ah ! Madame, que j'ai de joie ! Est-ce toi, Claudine ? Oui, Madame. Cherchons quelque lieu pour nous asseoir. Quoi si tôt ? Ah ! Madame, puis-je assez vous entretenir, et trouver en si peu de temps toutes les paroles dont j'ai besoin ? Il me faudrait des journées entières pour me bien expliquer à vous de tout ce que je sens ; et je ne vous ai pas dit encore la moindre partie de ce que j'ai à vous dire. Hélas ! de quel coup me percez-vous l'âme, lorsque vous parlez de vous retirer, et avec combien de chagrins m'allez-vous laisser maintenant ? Oui. Mais je songe qu'en me quittant, vous allez trouver un mari. Cette pensée m'assassine, et les privilèges qu'ont les maris sont des choses cruelles pour un Amant qui aime bien. Ah ! qu'il faut avouer que celui qu'on vous a donné était peu digne de l'honneur qu'il a reçu, et que c'est une étrange chose que l'assemblage qu'on a fait d'une personne comme vous avec un homme comme lui. Vous méritez sans doute une toute autre destinée, et le Ciel ne vous a point faite pour être la femme d'un paysan. Ah, Claudine, que tu es cruelle. Il faut donc s'y résoudre puisque vous le voulez. Mais au moins je vous conjure de me plaindre un peu, des méchants moments que je vais passer. **** *creator_moliere *book_moliere_georgedandin *style_prose *genre_comedy *dist1_moliere_prose_comedy_georgedandin *dist2_moliere_prose_comedy *id_claudine *date_1668 *sexe_feminin *age_sans-age *statut_serviteur *fonction_servante *role_claudine Par ma foi voilà une étrange fausseté. Qui moi ? Hélas ! que le monde aujourd'hui est rempli de méchanceté, de m'aller soupçonner ainsi, moi qui suis l'innocence même. Madame, est-ce que... Assurément. Par ma foi, il mériterait qu'elle lui fît dire vrai, et si j'étais en sa place je n'y marchanderais pas. Oui, Monsieur, vous devez pour le punir, faire l'amour à ma Maîtresse. Poussez, c'est moi qui vous le dis, ce sera fort bien employé, et je m'offre à vous y servir, puisqu'il m'en a déjà taxée. Oui, j'ai bien deviné qu'il fallait que cela vînt de toi, et que tu l'eusses dit à quelqu'un qui l'ait rapporté à notre Maître. Vraiment ce Monsieur le Vicomte a bien choisi son monde que de te prendre pour son Ambassadeur, et il s'est allé servir là d'un homme bien chanceux. Oui, oui, il sera temps. Que veux-tu que j'écoute ? Hé bien qu'est-ce ? Quoi ? Non. Tout de bon ? À la bonne heure. Je m'en réjouis. Je fais comme font les autres. Tu serais peut-être jaloux comme notre Maître. Pour moi, je hais les maris soupçonneux, et j'en veux un qui ne s'épouvante de rien, un si plein de confiance, et si sûr de ma chasteté, qu'il me vît sans inquiétude au milieu de trente hommes. C'est la plus sotte chose du monde que de se défier d'une femme, et de la tourmenter. La vérité de l'affaire est qu'on n'y gagne rien de bon. Cela nous fait songer à mal, et ce sont souvent les maris qui avec leurs vacarmes se font eux-mêmes ce qu'ils sont. Voilà comme il faut faire pour n'être point trompé. Lorsqu'un mari se met à notre discrétion, nous ne prenons de liberté que ce qu'il nous en faut, et il en est comme avec ceux qui nous ouvrent leur bourse et nous disent, prenez. Nous en usons honnêtement, et nous nous contentons de la raison. Mais ceux qui nous chicanent, nous nous efforçons de les tondre, et nous ne les épargnons point. Hé bien bien nous verrons. Que veux-tu ? Ah ! doucement. Je n'aime pas les patineurs. Laisse-moi là, te dis-je, je n'entends pas raillerie. Ahy ! Je te donnerai sur le nez. Tu t'émancipes trop. Il faut que tu te donnes patience. Je suis votre Servante. Le mot est amoureux. Je vais remettre aux mains de ma Maîtresse... Mais la voici avec son Mari, éloignons-nous, et attendons qu'elle soit seule. J'avais, Madame, impatience qu'il s'en allât pour vous rendre ce mot de la part que vous savez. À ce que je puis remarquer, ce qu'on lui dit ne lui déplaît pas trop. Je crois qu'après les avoir vus, les Dandins ne vous plaisent guères. Je n'ai pas besoin, que je pense, de lui recommander de la faire agréable. Mais voici... Vraiment, Monsieur, vous avez pris là un habile messager. Eh ! Monsieur il n'est pas nécessaire. Non, Monsieur, vous n'avez que faire de vous donner cette peine-là, et je vous rends service, parce que vous le méritez, et que je me sens au cœur de l'inclination pour vous. Je te le garde aussi bien que le baiser. Oui, elle est allée y répondre. Oui, venez avec moi, je vous ferai parler à elle. Ah ! Madame, tout est perdu. Voilà votre père et votre mère accompagnés de votre mari. Fort, Madame, frappez comme il faut. Apprenez à qui vous vous jouez. Assurément. Voilà une femme, celle-là, vous êtes trop heureux de l'avoir, et vous devriez baiser les pas où elle passe. Elle a raison d'être en colère. C'est une femme qui mérite d'être adorée, et vous ne la traitez pas comme vous devriez. Hé bien ? Voilà qui est fait. St. Qu'est-ce ? Doucement, Monsieur. Oui. Vous avez pris l'une pour l'autre. C'est fort bien avisé. Madame, si vous avez à dire du mal de votre mari, dépêchez vite, car il est tard. Va, va, je le reçois de loin, et je t'en renvoie autant. La porte s'est fermée. Ouvrez donc doucement. Appelez le garçon qui couche là. Madame. Cela est-il beau d'aller ivrogner toute la nuit ? et de laisser ainsi toute seule une pauvre jeune femme dans la maison ? Oui, il nous a voulu faire accroire qu'il était dans la maison, et que nous en étions dehors, et c'est une folie qu'il n'y a pas moyen de lui ôter de la tête. C'est une conscience de voir une pauvre jeune femme traitée de la façon, et cela crie vengeance au Ciel. Il a tant bu, que je ne pense pas qu'on puisse durer contre lui, et l'odeur du vin qu'il souffle est montée jusqu'à nous. Vous voyez quelle apparence il y a. Le moyen d'y résister ? Quelle douceur ! Pauvre mouton ! **** *creator_moliere *book_moliere_georgedandin *style_prose *genre_comedy *dist1_moliere_prose_comedy_georgedandin *dist2_moliere_prose_comedy *id_lubin *date_1668 *sexe_masculin *age_sans-age *statut_serviteur *fonction_valet *role_lubin Voilà un homme qui me regarde. Il se doute de quelque chose. J'ai peur qu'il n'aille dire qu'il m'a vu sortir de làdedans. Serviteur. Non, je n'y suis venu que pour voir la Fête de demain. Chut. Paix. Motus, il ne faut pas dire que vous m'ayez vu sortir de là. Mon Dieu parce. Doucement. J'ai peur qu'on ne nous écoute. C'est que je viens de parler à la Maîtresse du logis de la part d'un certain Monsieur qui lui fait les doux yeux, et il ne faut pas qu'on sache cela. Entendez-vous ? Voilà la raison. On m'a enchargé de prendre garde que personne ne me vît, et je vous prie au moins de ne pas dire que vous m'ayez vu. Je suis bien aise de faire les choses secrètement comme on m'a recommandé. Le mari, à ce qu'ils disent, est un jaloux qui ne veut pas qu'on fasse l'amour à sa femme, et il ferait le diable à quatre si cela venait à ses oreilles. Vous comprenez bien. Il ne faut pas qu'il sache rien de tout ceci. On le veut tromper tout doucement. Vous entendez bien ? Si vous alliez dire que vous m'avez vu sortir de chez lui, vous gâteriez toute l'affaire. Vous comprenez bien ? C'est le Seigneur de notre pays, Monsieur le Vicomte de chose… foin je ne me souviens jamais comment diantre ils baragouinent ce nom-là, monsieur Cli... Clitande. Oui. Auprès de ces arbres. Testigué, c'est le plus honnête homme que vous ayez jamais vu. Il m'a donné trois pièces d'or pour aller dire seulement à la femme qu'il est amoureux d'elle, et qu'il souhaite fort l'honneur de pouvoir lui parler. Voyez s'il y a là une grande fatigue pour me payer si bien, et ce qu'est au prix de cela une journée de travail où je ne gagne que dix sols. Oui, j'ai trouvé là-dedans une certaine Claudine, qui tout du premier coup a compris ce que je voulais, et qui m'a fait parler à sa Maîtresse. Morguène cette Claudine-là est tout à fait jolie, elle a gagné mon amitié, et il ne tiendra qu'à elle que nous ne soyons mariés ensemble. Elle m'a dit de lui dire… attendez, je ne sais si je me souviendrai bien de tout cela. Qu'elle lui est tout à fait obligée de l'affection qu'il a pour elle, et qu'à cause de son mari qui est fantasque, il garde d'en rien faire paraître, et qu'il faudra songer à chercher quelque invention pour se pouvoir entretenir tous deux. Testiguiène, cela sera drôle, car le mari ne se doutera point de la manigance, voilà ce qui est de bon. Et il aura un pied de nez avec sa jalousie. Est-ce pas ? Adieu. Bouche cousue au moins. Gardez bien le secret, afin que le mari ne le sache pas. Pour moi je vais faire semblant de rien, je suis un fin matois, et l'on ne dirait pas que j'y touche. Par ma foi je n'en ai touché qu'un petit mot en passant à un homme, afin qu'il ne dît point qu'il m'avait vu sortir, et il faut que les gens en ce pays-ci soient de grands babillards. Va, une autre fois je serai plus fin, et je prendrai mieux garde à moi. Ne parlons plus de cela, écoute. Tourne un peu ton visage devers moi. Claudine. Hé là, ne sais-tu pas bien ce que je veux dire ? Morgué je t'aime. Oui le diable m'emporte, tu me peux croire, puisque j'en jure. Je me sens tout tribouiller le cœur quand je te regarde. Comment est-ce que tu fais pour être si jolie ? Vois-tu, il ne faut point tant de beurre pour faire un quarteron. Si tu veux tu seras ma femme, je serai ton mari, et nous serons tous deux mari et femme. Point. Hé bien, je serai tout comme cela. Hé bien, je te donnerai la liberté de faire tout ce qu'il te plaira. Va, je serai de ceux qui ouvrent leur bourse, et tu n'as qu'à te marier avec moi. Viens donc ici, Claudine. Viens, te dis-je. Eh un petit brin d'amitié. Claudine. Ah ! que tu es rude à pauvres gens. Fi, que cela est malhonnête de refuser les personnes. N'as-tu point de honte d'être belle, et de ne vouloir pas qu'on te caresse ? Eh là. Oh la farouche. La sauvage. Fi poua la vilaine, qui est cruelle. Qu'est-ce que cela te coûterait de me laisser un peu faire ? Un petit baiser seulement en rabattant sur notre mariage. Adieu beauté rude ânière. Adieu rocher, caillou, pierre de taille, et tout ce qu'il y a de plus dur au monde. Puisque nous serons mariés, donne-moi cela que je le mette avec le mien. Testiguenne que j'aurai là une habile femme, elle a de l'esprit comme quatre. Ah vous voilà, Monsieur le babillard, à qui j'avais tant recommandé de ne point parler, et qui me l'aviez tant promis. Vous êtes donc un causeur, et vous allez redire ce que l'on vous dit en secret. Oui. Vous avez été tout rapporter au mari. Et vous êtes cause qu'il a fait du vacarme. Je suis bien aise de savoir que vous avez de la langue, et cela m'apprendra à ne vous plus rien dire. Si vous n'aviez point babillé, je vous aurais conté ce qui se passe à cette heure, mais pour votre punition vous ne saurez rien du tout. Rien, rien. Voilà ce que c'est d'avoir causé, vous n'en tâterez plus, et je vous laisse sur la bonne bouche. Point. Nennin, nennin, vous avez envie de me tirer les vers du nez. Eh quelque sot. Je vous vois venir. Point d'affaire. Vous voudriez que je vous disse que Monsieur le Vicomte vient de donner de l'argent à Claudine, et qu'elle l'a mené chez sa Maîtresse. Mais je ne suis pas si bête. Non. Tarare ! Monsieur ? Je pense que oui. Morgué voilà une sotte nuit, d'être si noire que cela. Vous avez raison. Elle n'a pas tant de tort. Je voudrais bien savoir, Monsieur, vous qui êtes savant, pourquoi il ne fait point jour la nuit ? Oui. Si j'avais étudié, j'aurais été songer à des choses où on n'a jamais songé. Cela est vrai. Tenez. J'explique du Latin, quoique jamais je ne l'aie appris, et voyant l'autre jour écrit sur une grande porte Collegium, je devinai que cela voulait dire Collège. Oui. Je sais lire la lettre moulée, mais je n'ai jamais su apprendre à lire l'écriture. Par ma foi c'est une fille qui vaut de l'argent, et je l'aime de tout mon cœur. Monsieur, je vous suis… St. Claudine. Claudine, ma pauvre Claudine. Est-ce vous, Madame ? Ma foi la nuit on n'y voit goutte. Claudine, où est-ce que tu es ? Où es-tu donc, Claudine ? Ah te voilà. Par ma foi ton Maître est plaisamment attrapé, et je trouve ceci aussi drôle que les coups de bâton de tantôt dont on m'a fait récit. Ta Maîtresse dit qu'il ronfle à cette heure, comme tous les diantres, et il ne sait pas que Monsieur le Vicomte et elle sont ensemble pendant qu'il dort. Je voudrais bien savoir quel songe il fait maintenant. Cela est tout à fait risible ! De quoi s'avise-t-il aussi d'être jaloux de sa femme, et de vouloir qu'elle soit à lui tout seul ?C'est un impertinent, et Monsieur le Vicomte lui fait trop d'honneur. Tu ne dis mot, Claudine. Allons, suivons-les, et me donne ta petite menotte que je la baise. Ah que cela est doux ! Il me semble que je mange des confitures. (Comme il baise la main de Dandin, Dandin la lui pousse rudement au visage.) Tubleu, comme vous y allez. Voilà une petite menotte qui est un peu bien rude. Personne. Où es-tu, Claudine que je te donne le bonsoir. **** *creator_moliere *book_moliere_georgedandin *style_prose *genre_comedy *dist1_moliere_prose_comedy_georgedandin *dist2_moliere_prose_comedy *id_colin *date_1668 *sexe_masculin *age_sans-age *statut_serviteur *fonction_valet *role_colin Monsieur. M'y voilà. On ne peut pas plus vite. Oui, Monsieur. Monsieur. Ici. Monsieur. Assurément. Nenni ma foi. Point, vous me voulez battre. Assurément ? Oui, Monsieur.