**** *creator_nivelle *book_nivelle_ecolemeres *style_verse *genre_comedy *dist1_nivelle_verse_comedy_ecolemeres *dist2_nivelle_verse_comedy *id_MARIANNE *date_1744 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_marianne J'ai fait ce que j'ai pu. Présumez un peu moins de mon faible talent. Il est vrai qu'en cherchant à remplir votre attente, Qu'en tâchant de gagner l'amitié de ma tante, Je ne me faisais point un effort violent. Que dis-je ? Un sentiment que je ne puis comprendre, À mon obéissance a servi de soutien ; Et mon coeur, étonné de se trouver si tendre, N'a, je crois, rien omis pour mériter le sien ; Mais... Quelle erreur est la vôtre ! Il faut donc renoncer à ses moindres bienfaits. Étouffez une douce espérance, Qui n'a servi qu'à vous tromper. De tout ce que j'ai fait, rien n'a pu dissiper, Ni vaincre son indifférence. C'est un projet flatteur qui ne peut s'accomplir. Je connais trop son coeur ; il m'est inaccessible : Ce n'est que pour son fils qu'il peut être sensible : Il l'occupe, et n'y laisse aucun vide à remplir. Loin d'entrer avec lui dans le moindre partage, Je ne sais si mes soins ne m'ont pas fait haïr. Ne me forcez donc pas d'insister davantage. Que vous me laissiez fuir, Et rentrer au couvent d'où vous m'avez tirée. Accordez cette grâce à mes pleurs. En vous la demandant mon âme est déchirée. Vous m'aimez : je prévois avec quelles douleurs Vous supporterez ma retraite. Ah ! N'appréhendez pas qu'un jour le repentir Vienne dans mon désert empoisonner ma vie. Je trouverai de quoi fixer tous mes désirs Dans sa tranquillité profonde. C'est lorsqu'on a du moins un peu connu le monde Qu'on peut, dans la retraite, avoir de vrais plaisirs. Que je m'en vais l'aimer ! Qu'elle me sera chère ! Je n'y sentirai plus le poids de ma misère. Hélas ! Je l'ignorais dans mon obscurité : J'y vivais sans me voir sans cesse humiliée Par le défaut de bien, de rang, de qualité : Permettez qu'à jamais j'y puisse être oubliée. Que vous plaît-il ? Oui. C'est le maître d'hôtel. Madame Argant m'envoie... Ah ! Mon oncle, le diriez-vous ? Pour la première fois, elle m'a caressée, M'a donné les noms les plus doux. Elle en espère tout. Vous me portez, dit-elle, une amitié si tendre Qu'il n'est rien, près de vous, dont je ne vienne à bout ; Et si je réussis, elle m'a fait entendre Qu'elle aurait soin de mon destin. C'est au sujet de mon cousin... Et pour sa fortune, Que je viens, au hasard de vous être importune... C'est l'hymen de son fils, tel qu'il est projeté. À qui donc ? Pour tous deux, j'implore vos bontés. C'est l'établissement le plus considérable... Vous la désespérez, si vous n'y consentez ; C'est faire à votre fils un tort irréparable. Est-il vrai que vous en ayez une ? Moi, je ne lui veux point de mal ; et si mon zele... Je me serais déjà prononcé mon arrêt. Pourrais-je assurer mieux le repos de ses jours, Qu'en cédant au malheur de déplaire à ma mère ? À quoi me servirait de m'obstiner toujours À braver mon destin ? Quelle en serait l'issue ? D'aliéner vos coeurs, d'en écarter l'amour, De déchirer toujours le sein qui m'a conçue, De me faire encor plus haïr de jour en jour. Pourquoi me consulter dans cette conjoncture ? Toute autre, et votre fille aussi, Vous en dirait autant ; et je ne sers ici Que d'interprète à la nature. Mais ma tante a raison ; elle se justifie. C'est votre faute à vous. Sans doute. Ah ! Ciel ! Dieux ! Que viens-je d'entendre ! Ah ! Quelle trahison ! Madame, il est sorti. Il doit avoir pris son parti. Bon ; le voici qui vient. Qui n'eût cru qu'il m'aimait ? Hélas ! C'en est donc fait. Ah ! Monsieur, vous devez préférer ma cousine. D'où viennent tout-à-coup de si cruels dédains ? D'abord, en me voyant, comme elle s'est aigrie ! Il faut absolument quitter cette maison. Il est vrai. Pourriez-vous m'éclaircir ? ... Quoi ! Tout le monde ici se trouve réuni Pour me désespérer ! Mais qu'a-t-il voulu dire ? Quelqu'un adresse ici ses pas. Rosette, si tu peux, tire-moi d'embarras. Ma tante est contre moi d'une colère extrême. Qu'ai-je dit ? Qu'ai-je fait ? Que m'est-il arrivé ? J'ai beau m'examiner moi-même ; Dans le fond de mon coeur, hélas ! Je n'ai trouvé Que zèle, que respect, que tendresse pour elle. Qu'on me ramène où l'on m'a prise. Hélas ! Mon oncle, au nom de la tendre amitié Dont par vous seul ici je me trouve honorée, De grâce, dites-moi, par bonté, par pitié, Qu'est-ce donc qui se passe à mon désavantage ? Il doit m'être, en ce jour, arrivé des malheurs ; Tout inconnus qu'ils sont, ils m'arrachent des pleurs. Ne me les laissez pas ignorer davantage ; Innocente, ou coupable, instruisez-moi de tout. Cette infortune est réelle et publique. Ah ! Vous dissimulez. Pourquoi donc, à présent, attiré-je les yeux De tout ce qui nous environne ? D'où viennent ces regards furtifs et curieux Qu'on attache en secret sur toute ma personne ? Quoi donc ! Ai-je changé ? Ne suis-je plus la même ? Ils ont d'autres motifs que je ne puis savoir. Et par quelle aventure, à nulle autre pareille, N'est-ce que d'aujourd'hui qu'on m'examine ainsi ; Et qu'en me regardant tout le monde d'ici Sourit avec malice, et se parle à l'oreille ? Et ma tante elle-même, avec la dureté La plus grande et la plus cruelle, Vient de me chasser de chez elle. Elle a poussé la cruauté Jusques à me défendre à jamais sa présence. Et moi, toute éperdue, examinant en vain Ma triste et timide innocence, Je suis venue ici ; j'ai trouvé votre fils, Qui m'a dit quelques mots, où je n'ai rien compris. À peine il m'a laissée incertaine et flottante, Au milieu de mon trouble et du plus grand effroi, Qu'alors on est venu m'avertir que ma tante, Toujours de plus en plus en courroux contre moi, Veut se débarrasser de ma vue importune, Et me faire enlever. Quoi donc ? Quel est donc ce regret ? Daignez m'en éclaircir... Vous parlez de secret ! Qu'entends-je ? Que m'apprenez-vous ? Ce n'est pas sur la foi du lien le plus doux Que je suis chez vous et chez elle ? Eh ! Pourquoi donc ici m'avez-vous fait venir ? ... Ciel ! Je frémis de tout ce que je me rappelle. Ah ! Cessez de me retenir. De toutes les horreurs j'éprouve la plus noire. Ah ! Dieu ! Peut-on former un si cruel projet ? Du plus affreux roman je me vois le sujet. Je veux savoir de qui j'ai reçu la naissance. Remettez-moi sous leur puissance ; Quels que soient mes parents... Parlez ; je ne veux plus languir dans cette attente. Je vais m'aller jeter aux genoux de ma tante... Quel nom m'échappe encor ! De cette horreur faites-moi donc sortir ; La fin n'en peut être trop prompte. Je ne crains que la honte De nourrir plus longtemps l'opprobre où je me vois. Non ; c'est au désespoir à rétablir ma gloire ; Je ne puis faire trop d'éclat. Qui ! Vous... Mon père ? Eh ! Pourquoi si longtemps me cacher mon bonheur ? J'entrevois à présent le fond de ce mystère. Puisque j'ai le bonheur de vous appartenir, Le sort peut, à son gré, régler mon avenir. Il m'a plus fait de bien qu'il n'en saurait détruire. Quel malheur est le mien ! Eh ! Pourquoi voulez-vous que je sois à jamais Le fléau de ceux que j'adore ? Joignez à vos bontés la grâce que j'implore ; Et souffrez qu'en partant je vous rende la paix. Que s'est-il donc passé ? Je vois, sur son visage, Tous les traits du courroux qui va tomber sur moi. Sans doute que j'ai fait rompre ce mariage. Hélas ! Je tombe à vos genoux. Disposez de mon sort. Que voulez-vous de plus ? N'est-il pas en votre puissance ? Ordonnez ; et comptez sur une obéissance Qui servira du moins à me justifier. Délivrez-vous de ma présence. Je ne demande, hélas ! Qu'à me sacrifier. Je n'ai que du malheur ; vous pouvez m'en punir. Accusez mon erreur et non pas mon audace. Madame, on m'a trompée en m'amenant ici : C'est une vérité qui peut être attestée. Si j'avais été libre, y serais-je restée ? D'aujourd'hui seulement mon sort est éclairci. Et dès que je l'ai su, j'ai tout mis en usage Pour qu'on me laissât fuir. Je n'ai pu l'obtenir. Ai-je rien de plus cher que de vous réunir ? On a dû vous l'apprendre. Vous savez qui je suis. On ne vous a point dit qui j'étais ? Je frémis d'une erreur où je vous vois encore. Hélas ! Je ne vois point mon père. Cet abandon me désespère. Quand vous me connaîtrez... Qui ? Moi ! Je n'en possède et n'en prétends aucune. Je menais hors du monde une vie inconnue. Dans un couvent, Depuis que je suis née, on m'a toujours tenue. Fixez-y mon destin. Je suis prête à partir. J'offre d'y retourner, pour n'en jamais sortir. Vous pouvez le connaître. Mais c'était auprès de Poitiers. Je le sais. Oui. Ne me pressez pas davantage De vous entretenir de ses faibles attraits. Connaissez-la par d'autres traits Plus précieux, plus chers et pour vous et pour elle : C'est sa soumission et son profond respect. Cet éloge n'est point suspect. Quels que soient vos desseins, elle y sera fidèle. Votre fille, à jamais, saura s'y conformer. Vos projets lui sont tous aussi chers qu'à vous-même. Il me reste à vous informer... De sa tendresse extrême. Le demandez-vous ! Pour une mère qu'elle adore. Hélas ! Pardonnez-moi. Qu'il m'est doux de me voir entre des bras si chers ! Oserais-je, en faveur de mon frère, Unir ma faible voix à celle de mon père ? Pour qui réservez-vous un généreux pardon ? Me refuserez-vous une première grâce ? Eh ! Madame, croyez le serment que j'en fais, S'il en coûte si cher à mon malheureux frère, J'aime mieux, avec lui, pleurer votre colère, Que d'en accepter les bienfaits. Sa grâce. Elle sera la mienne. Si vous l'abandonnez, que faut-il qu'il devienne ? Il m'aimera... craignez l'effet de sa douleur, Et de son désespoir extrême. Sa faute et ses remords. **** *creator_nivelle *book_nivelle_ecolemeres *style_verse *genre_comedy *dist1_nivelle_verse_comedy_ecolemeres *dist2_nivelle_verse_comedy *id_ROSETTE *date_1744 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_rosette Monsieur, ma maîtresse est visible. On l'attend tous les jours. C'est qu'un mari, pour l'ordinaire, N'est jamais si pressé de retourner chez lui. Quoi qu'il en soit, on dit qu'il revient aujourd'hui. Qu'est-ce ? Vous n'êtes pas le plus content du monde ? Ceux d'un père et d'un fils sont toujours orageux. Il a tort ; et son goût devrait suivre le vôtre. Que concluez-vous de cela ? Mauvaise conséquence. Nous ne nous faisons point ces confidences-là. Voyez donc ! Oh ! Ce n'est pas comme vous autres. Vous avez vos propos, et nous avons les nôtres. Une mode, une étoffe, une robe nouvelle, Des gazes, des pompons, des fleurs, une dentelle, Sont d'abord des sujets qui ne tarissent point. Quand on est en gaieté, quelquefois on y joint Des historiettes de fille, Des contes de couvent. Enfin, que sais-je, moi ? On parle, on cause, on jase, on caquette, on babille, Et l'on rit bien souvent, sans trop savoir pourquoi. Je sers d'exception. Qui ? Lui ! Ils ne produiraient rien. Comment ! Vous érigez ce marquis en héros ! Il est vrai que l'on nous accuse D'apporter toutes en naissant Ce malheureux levain de la coquetterie, Et ce goût effréné pour la galanterie. Nous pourrions à bon titre en dire autant de vous. Mais, sans récriminer, croyez que parmi nous Il est encor des coeurs dignes d'un honnête homme. D'ailleurs, en vains soupçons votre esprit se consomme ; Le Marquis choisit mieux. Marianne est sans doute extrêmement aimable : La bonté de son coeur la rend inestimable. C'est un trésor. Heureux qui pourra s'en saisir ! Mais enfin, par vous seul, en silence adorée, Marianne est presque ignorée. On ne la connaît point à la ville, à la cour : Et les gens du bel air ne rendent point les armes, Si la célébrité n'est jointe avec les charmes. Chez eux, la gloire a pris la place de l'amour. Tel est ce cher marquis d'impression nouvelle. Un des plus grands travers qui troublent sa cervelle, C'est qu'aucune beauté ne saurait le tenter, Qu'autant qu'elle est de mode, et qu'il voit autour d'elle La cour la plus brillante. Il aime à supplanter. Plus le concours est grand, plus il la trouve belle. Aussi, pour parvenir jusqu'au suprême honneur De l'avoir sur son compte, il n'est rien qu'il n'emploie. En un mot, ce qui fait sa gloire et son bonheur, C'est l'opprobre éclatant dont il couvre sa proie, Et la rage qu'il porte au sein de ses rivaux. Voilà le seul exploit digne de ses travaux. L'esprit et le bon-sens vont rarement ensemble. Parlez-lui donc vous-même ; il tourne ici ses pas. Ces embrassades-là sont aussi du bel air. Tiens, Rosette rougit ; elle te fait un signe. Notre entretien roulait sur un sujet plus digne. Point de panégyrique, où je ferai le vôtre. Ne cherchons point tous deux à nous humilier. Trêve entre nous de gentillesse. Si madame vous croit un être si parfait, Eh ! Bien, à la bonne heure ; elle est fort la maîtresse. Elle peut vous gâter, comme elle a toujours fait. Mais comme je n'ai pas la même ivresse qu'elle, Je pourrais m'égayer aux dépens des railleurs : Ainsi, monsieur, cherchez vos passe-temps ailleurs. Finissez mon éloge, et me laissez en paix. Eh ! Vraiment oui ; monsieur en est fort amoureux. Comme il vous croit un rival dangereux, (Car, pour peu que l'on aime, on a peur de son ombre,) Il me communiquait sa crainte et son erreur. Il ne pouvait voir sans terreur Que vous fussiez aussi du nombre De ceux que Marianne a soumis à ses lois. Mais nous en étions là, quand vous êtes venu ; Et j'allais à peu près lui dire, ce me semble, Qu'il ne peut se fonder aucune liaison Entre deux coeurs qui n'ont ensemble Aucun de ces rapports qu'exige la raison. Il faut savoir nous vaincre avec nos propres armes. S'il se forme entre amants de ces noeuds pleins de charmes, Que l'amour et le temps ne font que redoubler, L'étoile n'y fait rien : voilà tout le mystère ; C'est qu'au moins par le coeur et par le caractère Il faut un peu se ressembler. Venons à Marianne. Sans doute ; et cependant elle n'en fera pas. Le bon-sens fut toujours ami de la vertu. Malgré le train qui règne en ce siècle commode, Marianne suivra celui du bon vieux temps, Et ne prendra jamais ces travers éclatants Qu'il faut avoir pour être une femme à la mode. J'ai dit. Vous entendez cet avis indirect. Pardonnez, au surplus, si dans cette occurrence Je n'ai pas eu pour vous le plus profond respect ? J'y rentre, et je vous fais mon humble révérence. Un peu de patience. Je l'ai fait avertir ; il ne tardera pas. À quelques importuns qui retardent ses pas, Il achève à présent de donner audience. Comment ! Qui vous fait soupirer ? En quoi, madame, y peut-il conspirer ? N'êtes-vous pas toujours la plus heureuse mère ? De la part du marquis, que s'est-il donc passé ? Vous serait-il moins cher ? L'excès en est permis, quand il est bien placé. Ma foi, ce n'est pas moi. N'allons pas à l'appui D'un accès de raison qui passera bien vite. Qu'avez-vous découvert qui vous déplaise en lui ? Il me semble pourtant qu'il est toujours de même. Ma surprise est extrême. Eh ! Peut-il être mieux, sans y perdre ? Il est bien. S'il cessait d'être un fat, il ne serait plus rien. Madame, dépouillons les préjugés vulgaires. S'il a quelques défauts, ils lui sont nécessaires. Je le soutiens, et nous serons d'accord. Quoi ! Trouvez-vous mauvais qu'il soit l'homme de France Qui sçait le mieux choisir une étoffe de goût ; Qui s'habille et se met avec une élégance Qu'on cherche à copier, sans en venir à bout ? Lui reprocheriez-vous, dans l'humeur où vous êtes, Qu'il aime un peu le luxe et la frivolité ? Qu'il cherche à ressembler aux gens de qualité ? Qu'il aime le plaisir, et contracte des dettes ? Eh ! N'en voulez-vous pas faire un homme de cour ? Ne vous plaignez donc point. Il ira loin. Pour moi, je n'en suis point en peine. La demande est nouvelle ! Est-ce qu'on peut jamais concevoir ces gens-là ? Oui, sa prévention contre un fils si bien né... Ce n'est que depuis peu que son humeur varie, Qu'il a des volontés, et qu'il vous contrarie. Il lui sied bien, en vérité ! Il faudrait arrêter cette témérité... Mais vous auriez la paix, si, pour le satisfaire, (Aux dépens du marquis, s'entend,) Vous vouliez retirer, ainsi qu'il le prétend, Votre fille du cloître. Pourquoi faire ? Pour priver Le Marquis de la moitié du bien ? Affaire de ménage, où l'homme n'entend rien. Votre dessein n'est pas de l'en laisser le maître ? Rien n'est plus naturel qu'un si grand sacrifice. Ce projet vous est cher ; vous l'avez résolu. Il faut bien, à son tour, que monsieur obéisse. Vous n'avez que trop fait tout ce qu'il a voulu. Il en contracterait l'habitude importune. C'est bien assez d'avoir reçu, dans la maison, Cette nièce orpheline, et presque sans fortune, Qu'il vous fit accueillir, par la seule raison Qu'elle porte son nom. Notez, par apostille, Qu'elle reçoit sa nièce et refuse sa fille. Que c'est vous montrer La tante la meilleure et la plus généreuse Qu'on puisse jamais rencontrer. Déjà ! L'aventure est heureuse ! Ah ! Comme il sait la prendre ! Moi ! Madame ! Oui-da ! J'ignore à quel sujet cet accès de rigueur La prend d'une façon si brusque et si cruelle ; D'autant plus qu'une fois, d'abondance de coeur, Elle disait, j'oublie en quelle conjoncture : "Il faudra s'en laisser charmer ; Cette petite créature Finira par se faire aimer. " Il faut bien que le diable ait ici fait des siennes : Je ne connais que lui pour jouer de ces tours. Mais vos recherches et les miennes Ne nous avancent pas ; il faut d'autres secours : Vous ne savez pas tout. Je me suis évadée Pour vous dire à quel point madame est en courroux ; En un mot, elle est dans l'idée De vous faire enlever, de s'assurer de vous. Monsieur adresse ici ses pas. Voyez si vous pourrez parer cette entreprise ; Et surtout ne me nommez pas. La Fleur, que fais-tu là ? Ton étoile ! Comment ? Est ce qu'en bonne foi Tu crois en avoir une à toi ? Qu'as-tu ? Qu'arrive-t-il dans tes affaires ? Ton congé, mon enfant ? Qu'as-tu fait ? Tu mens. Eh ! Bien, tu mens encor. Regrette moins ton maître ; il t'aurait perverti. D'ailleurs, peut-on savoir d'où vient tout ce grabuge ? M'est-il permis d'entrer dans vos douleurs secrètes ? D'où viennent donc ces pleurs qui coulent malgré vous ? Je ne vous vis jamais dans l'état où vous êtes. Aurait-il refusé cette grande alliance ? On pourra le sauver. Mais il pourrait un jour... **** *creator_nivelle *book_nivelle_ecolemeres *style_verse *genre_comedy *dist1_nivelle_verse_comedy_ecolemeres *dist2_nivelle_verse_comedy *id_LAFLEUR *date_1744 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_lafleur Ouf ! Oh ! Palsembleu, Monsieur, souffrez que je respire. Si vous continuez ainsi, vous me tuerez. Vous autres, que Dieu fit pour être voiturés, Vous allez à votre aise, et vous parlez de même. Il n'en est pas ainsi des malheureux piétons. Morbleu, je suis bien las de ces courses maudites. La liste des visites. Elle est de ce matin. Demandez au suisse ; oui, rien n'est plus certain. Il est certaines gens, pour certaine raison, Qui vont dès le matin. Le propriétaire De votre petite maison. Le tapissier. Le traiteur. Le loueur de carrosse. Ainsi du reste. Non pas eux, mais leurs gens. Leurs gens sont des sergents ; Et voici, monsieur, de leur prose, Et de leurs billets doux. Chantez ; c'est bien prendre la chose. Beau diable de profit ! Plus invisiblement que n'eût fait un esprit. Bien. Mal. C'est qu'il n'était pas jour chez elle ; Et qu'ainsi je n'ai pu voir que sa demoiselle. Ce n'est pas là mon compte, à moi. Quoi ! Pas même, monsieur, ce qu'on me donnera ? Ah ! Ce ne sera pas de rendre. On va la marier. Tout-à-fait ; À ce baron qui la pourchasse : Il prétend, dès demain, que la noce se fasse. Un petit billet vous mettra mieux au fait. D'un tour assez falot, Dont la suivante d'Arthénice Vient, à votre sujet, de régaler un sot. J'étais dans l'antichambre à causer avec elle, En tout bien, tout honneur. Nous parlions d'amitié, quand la fausse femelle A pensé me dévisager. "Va-t-en, m'a-t-elle dit, au diable, avec ton maître. Depuis assez longtemps, il a dû reconnaître Qu'il prend un inutile soin. Ma maîtresse n'en veut, ni de près, ni de loin." Alors, tout ébaubi, j'ai détourné la tête : C'est que le vieux baron lui-même, à pas de loup, Venait d'arriver tout-à-coup, Qui mordant à la grappe, et d'un air tout honnête, Accompagné pourtant d'un geste cavalier, M'a flatté, si jamais le hasard me ramène, Qu'il aurait la bonté de m'épargner la peine De descendre par l'escalier. Eh ! Non pas, s'il vous plaît ; souffrez que je m'en passe. J'ai volé chez Michel, et de-là chez Passeau. J'ai vu vos deux habits ; ma foi, rien n'est si beau ; Je ne crois pas qu'on puisse en avoir de plus lestes. Après, j'ai, sans aucun délai, Été chez la Duchapt ; et puis, chez la Bourrai ; Leurs filles sont après à garnir vos deux vestes ; L'une est en petit jaune, et l'autre en petit bleu. Vous les aurez dans peu ; Mais l'argent à la main. C'est ce qu'ils disent tous. Par l'homme en question j'ai fini mes messages ; Seriez-vous assez fou pour en tâter encore ? Oui, mais au poids de l'or. Il demande un billet du triple, et de bons gages. Faute de les avoir retirés dans le mois, Ils lui sont dévolus. Ignorez-vous l'usage ? Quel besoin si pressant En pouvez-vous avoir ? Sans être libertin, on peut se réjouir. Ah ! Mon cher maître, Vous l'êtes beaucoup plus, en croyant ne pas l'être. Eh ! Parbleu, tout vous duit à la fois ; somme toute, Rien n'y manque, le vin, le jeu, l'amour. Vous les menez un train de chasse ; Et vous indisposez le public contre vous. En faux raisonnements votre morale abonde. Mais, encore une fois, sachez vous limiter. Si vous ne changez pas tout-à-fait de conduite, Empêchez que du moins on n'en parle en tous lieux. Madame votre mère en pourrait être instruite. Elle a beau vous aimer, elle ouvrira les yeux. Vous avez une soeur, qu'elle vous sacrifie : Songez-y ; je vous signifie Qu'elle pourrait fort bien la tirer du couvent, Pour lui faire, avec vous, partager l'héritage, Et peut-être encor davantage. Vous savez que monsieur l'en presse assez souvent. Pour boire, je boirai. Je l'entends un peu mieux que tout autre négoce. S'il venait en buvant, je roulerais carrosse. Jugeons un peu moins vite, ou soyons indulgents. Supposé que l'amour ait part à ce mystère, Il me semble qu'un fils devrait, avec raison, Ignorer ou cacher les faiblesses d'un père. Je n'ai rien vu. Mais à propos, j'espère... Qu'enfin nous allons prendre un autre train de vie. Parce qu'on vous marie. Il a cette vertu D'amender les gens de votre âge. La raison les attend au fond de leur ménage. L'hymen est ordinairement Le tombeau du libertinage, À moins qu'on n'ait le diable au corps. Vous vivrez comme auparavant ? Ah ! Pauvre malheureuse ! Moi, je ne dis mot. Tenez, c'est un billet joliment tortillé. Comme il a l'air émoustillé ! Quelle est donc cette histoire ? Dans votre cabinet. Quelle affaire nous presse ? La fête sera belle ! Et la future y sera-t-elle ? Allons. Ma surprise est extrême. Voilà bien des apprêts ! Des habits et du linge ? Est-ce que vous voulez y faire une retraite ? Mais, monsieur, tout ceci... franchement, à vrai dire, Un jour comme aujourd'hui, me donne du tintoin. Bon ! Le jour est bien loin. Allons. Il a de l'argent frais ; Je n'en serai jamais payé que par surprise. Je m'en y vais. Oui, risquons le paquet. Vous allez me gronder. C'est qu'avec votre argent... Je viens d'acquitter Pour vous, en votre nom, une dette criarde. La pitié, le besoin. Vous avez de l'argent. C'était un pauvre erre ; il n'avait pas le sou : Et puis six cens écus, la somme n'est pas forte. Me le pardonnez-vous ? Mais d'honneur ? La Fleur. Moi. Droit au cabinet dirigeons notre course. Et vite et vite, allons nous payer par nos mains. La bonne femme est folle, ou le diable s'en mêle. Comment donc ! Eh ! Pour qui madame me prend-elle ? Pour un benêt de précepteur ? J'eusse été bien venu, quand j'en serais capable. Mais a-t-on jamais fait payer au serviteur Les sottises du maître ? Il est assez probable Que je ne perdais pas dessus, grâce à mes soins ; Et j'allais m'arranger pour y perdre encor moins. Serviteur ; on me chasse : où diantre faire voile ? Je maudis mon étoile. J'ai Que madame m'a fait agréer mon congé. Oui, pour présent de noce. Moi ? Mon crime est d'être un sot. On m'impute un négoce Que mon maître a baclé, sans m'en dire un seul mot ; Et la prévention demeurant la plus forte, L'innocence est mise à la porte ; On m'oblige, avec elle, à prendre mon parti : Je vais lui chercher un refuge. En vérité, madame, il est à naître...