**** *creator_pompigny *book_pompigny_noeuddamour *style_prose *genre_comedy *dist1_pompigny_prose_comedy_noeuddamour *dist2_pompigny_prose_comedy *id_COLIN *date_1779 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_colin Ah ! Babet ! Mon cher oncle, je voudrais proposer un arrangement à ces Messieurs. Messieurs, j'aime Babet de tout mon coeur. Renoncez y, et gardez le présent de Madame la Marquise. Ah ! Babet, que je suis heureux ! Mon cher oncle, je demande du moins de l'entretenir un moment. Vous ne l'ignorez pas, méchante ; mais vous vous jouez de ma bonne-foi. De quoi je me plains ? De la préférence que vous me refusez, et que vous réservez à d'autres. Puisque vous ne voulez pas me l'accorder, n'est ce pas à eux que vous réservez votre noeud ? Eh ! Pourrez-vous résister à leurs efforts ? C'est que... C'était la première fois que vous le défendiez ? Mais on se lasse à la fin. Eh ! Pourquoi me l'avez-vous refusé ? Eh bien ! Oui. Je t'avoue que j'aurais été bien aise d'obtenir la victoire en présence de mes rivaux, et que tout le Village eût été témoin de ma félicité. J'ai eu tort, ma chère Babet ; je le sens bien. Oui, j'ai eu tort. Tiens, ma chère Babet, tu sais combien je t'aime ! Nous sommes seuls... Donne-le moi, je t'en prie. Ce beau noeud qui doit faire mon bonheur. Les moments sont comptés, ils sont précieux ; laisse-le-moi dénouer, je t'en conjure. Eh bien ! Mademoiselle, c'est fort bien fait ! Gardez votre Noeud. Je vois bien que vous ne m'aimez pas. Non. Vous ne me l'avez pas dit ; mais vos manières, vos regards, tout me l'a fait croire jusqu'à ce moment. Eh bien ! Vous n'entendrez plus parler de Colin. Je m'en vais : oui, je m'en vais au bout du monde.... Adieu, perfide. Ah ! Ma chère Babet ! Si je t'ai fâchée, je t'en demande pardon. N'achève pas. Pardonne-moi, ma chère Babet ; je t'en conjure. Non ; je resterai toujours auprès de toi. Mais j'aurai le noeud, n'est-ce pas ? Mais, comment vas-tu faire avec ce vilain chevalier ? Il est vif, hardi ; il a appris à la ville bien des choses que nous ignorons. Pour m'aider à prendre patience, accorde moi du moins... Un petit baiser. Défends-toi bien, ma chère Babet ; tiens, je ne saurais souffrir ce vilain Chevalier. Si je pouvais rester !... Doucement, Monsieur, doucement. Ce vieux m'inquiète. Il est riche, et rusé comme un démon. Je suis perdu ! Elle n'a plus de noeud. Ah ! Le vieux singe ! Ah ! La traîtresse! Babet, ma chère Babet, ne m'oubliez pas. La voilà ! Elle dort. Ah ! Si j'osais ! Qu'elle est belle ! Comme son sein est agité ! Que son haleine est douce ! Mon coeur en a tressailli. Elle s'éveille... Non, je m'abusais. Voilà le moment de lui ravir ce noeud ; ce noeud. Pourquoi la priver du plaisir de me le donner elle-même... Mais elle ne m'a rien promis et je me flatte peut-être d'une vaine espérance ! Ah ! Babet, si tu le réserves au plus fidèle, je suis sûr de le posséder. Mais les filles sont si capricieuses ! Que sais-je ! Quand une fois je l'aurai, je dirai.... que je le tiens d'elle.... Mentir ! Non, jamais je ne pourrais. Je veux qu'elle sache quel sacrifice je lui fais ; je veux lui prendre son collier, et elle sentira mieux combien j'ai respecté sa rosette. Mais le moment approche, elle va prononcer. Baisons du moins sa belle main avant de la quitter. Ô noeud, charmant noeud ! C'est de toi que dépend ma félicité. Ah, Babet ! Je tremble, non, je ne me connais plus. Ah, Babet ! Ma chère Babet ! Je le tiens. Babet, donne-le-moi. Il est à moi ; c'en est fait. Quoi ! Tu serais assez cruelle? Si je t'aime !... Ah, Babet ! Tu le veux.... le voilà. Oh ! Vous venez trop tard. **** *creator_pompigny *book_pompigny_noeuddamour *style_prose *genre_comedy *dist1_pompigny_prose_comedy_noeuddamour *dist2_pompigny_prose_comedy *id_LAMEREBAZU *date_1779 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_lamerebazu Assurément. Je n'ai aucun reproche à me faire. Son père et sa mère me l'ont confiée tour-à-tour en mourant, et j'ai pris autant de soin de son bien que de son honneur : car l'honneur.... Et pourquoi cent louis et cent écus ? Mais Madame la Marquise a mis une singulière condition à ses bienfaits ; pourquoi veut-elle que le choix d'un mari dépende d'un noeud de ruban ? Aussi n'ai-je jamais voulu me marier ici. Madame la Marquise a donc aboli cette vilaine coutume ? Je jurerais bien, sans crainte de mentir, que le noeud de ma nièce est encore tel qu'elle l'a reçu des mains de sa mère. Je sais bien qui aura la préférence. Eh ! Pourquoi le protège-t-elle tant ? C'est un fat. La belle raison ! Oui ; et à nos dépens. C'est Monsieur Tamarin, un honnête apothicaire, que je protège, moi ; car je lui dois la vie. Cela est bien différent ; et puis ma nièce est ma nièce. Pourquoi cet étourdi? C'est-à-dire que vous le protégez à votre tour. Bon ! L'Amour ! Babet ne connaît pas ça. Soyez tranquille. Je craignais que ce fripon de Colin n'eut l'avantage ; mais puisqu'il a échoué, ma nièce se réserve pour vous, et j'en suis sûre, car je le lui ai bien recommandé. Ce n'est qu'avec douceur qu'on obtient une faveur si précieuse, et dans ma jeunesse... J'en suis ravie. Vous voyez que je suis femme de parole. Embrassez-moi, mon cher petit neveu. **** *creator_pompigny *book_pompigny_noeuddamour *style_prose *genre_comedy *dist1_pompigny_prose_comedy_noeuddamour *dist2_pompigny_prose_comedy *id_BABET *date_1779 *sexe_masculin *age_jeune *statut_exterieur *fonction_autres *role_babet Moi ! Je ne veux fâcher personne. Je désirerais pouvoir contenter tout le monde. Qu'ils tirent au sort, et nous verrons après. EH bien ! Qu'avez-vous à me dire? De quoi vous plaignez-vous donc ? Oui ; de quoi vous plaignez-vous ? Eh ! Qui vous a dit que je la leur réservais ? Ils ont autant de droit que vous pour y prétendre ; mais ils ne le tiennent pas encore. Mais puisque vous me croyez si faible, pourquoi n'avez-vous pu réussir à le prendre ? Eh bien ? Vous en avez bien donné des preuves ; mais j'ai bon courage, moi, et les filles ont toujours assez de force pour défendre... ce qu'elles ne veulent pas donner. En vérité !... Là... devant tout le monde, céder aux premières instances de Monsieur Colin !... C'était plus par vanité que par amour que vous vouliez triompher. Tout pour soi, n'est-ce pas ? La belle délicatesse ! Voilà les hommes ! À la bonne heure ! Je pardonne à votre petite vanité, en faveur de votre franchise. Après ? Eh bien ? Quoi donc ? Finissez, Monsieur Colin. Je vous vois venir. Raffinement d'amour-propre ! Vous voulez qu'on dise que c'est par fierté que je me suis défendu devant le monde, mais que je n'ai pu résister en particulier... Finissez, encore une fois, ou je me fâcherai. Est-ce que je vous ai jamais dit que je vous aimais, Monsieur ? En vérité, c'est bien vilain à vous de me dire des injures ! Voilà donc comme vous m'aimez ! Je suis bien aise de vous connaître. Non. Vous êtes indigne de mon amitié ; car je ne sais pas mentir, moi. Oui, j'avais de l'amitié pour vous ; mais.... Que je vous pardonne ! Et vous voulez partir? Oh ! Je ne promets rien. Il faut de la persévérance en amour. Bon ! Quand, il le faut, les villageoises en savent autant que les autres. Quoi donc ? Oui-dà ! Ce sont mes affaires. Va-t-en. Comment donc ! Vous n'y faites pas plus de façons que ça ? Oh ! Je ne suis pas une Dame, moi. Je ne suis qu'une simple villageoise. Bien obligée, Monsieur. Je ne suis pas lasse. Je ne dis pas cela. Je ne dis pas cela non plus. Mais, je ne dis rien, Monsieur ; je vous écoute. Eh bien ! Parlez ; je vous répondrai, si je puis. Non, Monsieur. Encore moins. Parce qu'il n'est destiné qu'à celui qui sera mon époux. Oh ! Vous êtes un trop grand Monsieur pour moi ! Doucement, Monsieur, doucement. Mais, mais vous êtes bien libre. Mais vos façons ne me conviennent point du tout. Je vous réponds qu'aucun de ces moyens-là ne vous réussira. Il faut vous en passer, s'il vous plaît ? Le grand dommage ! Allez, Monsieur le Chevalier Sandis, ce n'est ni la première, ni la dernière fois que votre mérite aura manqué son coup. Est-ce qu'à la ville on fait de pareilles confidences ? Nous sommes plus discrètes au village. Nous aimons mieux donner que promettre. Oh ! Je ne joue pas si gros jeu. Ne le voyez-vous pas ? Toute fille qui se fie à la parole des hommes, veut être abusée ; et c'est vouloir l'être doublement, que de se fier à celle d'un Gascon. Eh bien ! Allez prendre l'air pour vous rafraîchir. Oh ! Non. Je vous jure. Oh ! Sandis, vous ne l'aurez pas. Il paraît que Monsieur le Chevalier n'a jamais fait de mauvais rêves, et je le laisse sur la bonne bouche. Oui. Je sais que vous avez fait beaucoup pour elle ; mais je ne crois pas que vous fassiez grand'chose pour moi. Oh ! Oui. Je crois que je pourrais compter sur vous si j'étais malade, j'en suis bien sûre ; mais je me porte bien, et j'espère que cela durera. Vous êtes bien bon, Monsieur Tamarin. Bien poli, Monsieur Tamarin. Bien honnête, Monsieur Tamarin. Oh ! Cela vous plaît à dire, Monsieur Tamarin. Mais oui. Sans doute. Assurément. Sans contredit. En vous, Monsieur Tamarin ! Il y paraît. Vous avez eu le temps de l'apprendre. Et de quelle manière, je vous prie ? Mais comme on dit que tous les hommes sont trompeurs, ne pourriez-vous pas me l'apprendre d'avance, afin que je sache à quoi m'en tenir ? C'est pour cela que vous en avez fait une si belle provision. Le voici. Mais attendez, ne vous dérangez pas. Je ne dis pas cela. Parce qu'il vous serait inutile. Eh ! Qu'en seriez-vous? Vous, Monsieur Tamarin ? Allons donc, vous voulez rire. Je ne vous le donnerai pas ; mais je veux bien le placer à mon bras pour vous donner plus de facilité à le considérer. Tenez, Monsieur Tamarin. Que faites-vous donc ? Comme vos mains tremblent ! Est-ce que vous avez froid, Monsieur Tamarin ? Oh ! Je m'en aperçois bien. Mais doucement donc ; vous me tordez le bras. Bon ! Voilà vos lunettes par terre. Reposez-vous, Monsieur Tamarin. Vous devez être las. Arrêtez, Monsieur Tamarin ; personne n'a droit de rire à vos dépens, puisque personne n'est plus heureux que vous. Eh bien ! Écoutez. Vous avez accordé cinq minutes à chacun de ces Messieurs pour tâcher de me gagner, j'en demande quinze à mon tour pour me consulter toute seule, et je me déciderai ensuite. Que le Chevalier est ridicule ! Que le vieux Tamarin est fatiguant ! Que Colin !... Oh ! S'il peut s'échapper, je suis assurée qu'il va venir m'impatienter. J'entends du bruit. C'est peut-être lui. Feignons de dormir. C'est le vrai moyen de m'en débarrasser. Mais, s'il osait... S'il avait cette audace... Non, jamais je ne le reverrais. Monsieur Colin, laissez ma main, ou je ne vous pardonnerai jamais. Non, vous dis-je, Colin ; encore un coup, laissez-moi. Oh, Ciel ! Colin, rendez-le-moi ; rendez-le-moi, je vous en conjure. Vous en êtes le maître, puisque vous l'avez. Mais si tu m'aimes.... Rends-le-moi ; j'exige cette preuve de ta tendresse. Et moi, je te le donne.