**** *creator_quinault *book_quinault_atys *style_verse *genre_show *dist1_quinault_verse_show_atys *dist2_quinault_verse_show *id_ATYS *date_1676 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_atys Allons, allons, accourez tous, Cybele va descendre. Trop heureux phrygiens, venez ici l'attendre. Mille peuples seront jaloux Des faveurs que sur nous Sa bonté va répandre. Le soleil peint nos champs des plus vives couleurs, Il a séché les pleurs Que sur l'émail des prés a répandu l'aurore ; Et ses rayons nouveaux ont déjà fait éclore Mille nouvelles fleurs. Non, tu dois mieux juger du parti que je prends. Mon coeur veut fuir toujours les soins et les mystères ; J'aime l'heureuse paix des coeurs indifférents ; Si leurs plaisirs ne sont pas grands, Au moins leurs peines sont légères. Si je parle d'amour, c'est contre son empire, J'en fais mon plus doux entretien. Idas, il est trop vrai, mon coeur n'est que trop tendre, L'amour me fait sentir ses plus funestes coups. Qu'aucun autre que toi n'en puisse rien apprendre. Sur l'univers entier son pouvoir doit s'étendre. Si vous les écoutez, ils parleront d'amour. Un roi redoutable, Amoureux, aimable, Va devenir votre époux ; Tout parle d'amour pour vous. L'amour fait trop verser de pleurs ; Souvent ses douceurs sont mortelles : Il ne faut regarder les belles Que comme on voit d'aimables fleurs. J'aime les roses nouvelles, J'aime à les voir s'embellir, Sans leurs épines cruelles, J'aimerais à les cueillir. Non vous ne me connaissez pas. Je me défends d'aimer autant qu'il m'est possible ; Si j'aimais, un jour, par malheur, Je connais bien mon coeur Il serait trop sensible. Mais il faut que chacun s'assemble près de vous, Cybèle pourrait nous surprendre. On voit dans ces campagnes Tous nos phrygiens s'avancer. Sangaride, ce jour est un grand jour pour vous. Ce jour même, un grand roi doit être votre époux Je ne vous vis jamais si contente et si belle ; Que le sort du roi sera doux ! Vivez tous deux contents, c'est ma plus chère envie ; J'ai pressé votre hymen, j'ai servi vos amours. Mais enfin ce grand jour, le plus beau de vos jours, Sera le dernier de ma vie. Ce n'est qu'à vous que je veux révéler Le secret désespoir où mon malheur me livre ; Je n'ai que trop su feindre, il est temps de parler ; Qui n'a plus qu'un moment à vivre, N'a plus rien à dissimuler. Vous me condamnerez vous-même, Et vous me laisserez mourir. Non, rien ne me peut secourir, Je meurs d'amour pour vous, je n'en saurais guérir ; Il est trop vrai. Je vous aime. Vous me condamnerez vous-même, Et vous me laisserez mourir. J'ai mérité qu'on me punisse, J'offense un rival généreux, Qui par mille bienfaits a prévenu mes voeux : Mais je l'offense en vain, vous lui rendez justice ; Ah ! Que c'est un cruel supplice D'avouer qu'un rival est digne d'être heureux ! Prononcez mon arrêt, parlez sans vous contraindre. Vous soupirez ? Je vois couler vos pleurs ? D'un malheureux amour plaignez-vous les douleurs ? Si je vous perds, et si je meurs, Que puis-je encore avoir à craindre ? Aimé ! Qu'entends-je ? Ô ciel ! Quel aveu favorable ! Mon malheur en est plus affreux, Le bonheur que je perds doit redoubler ma rage ; Mais n'importe, aimez-moi, s'il se peut, d'avantage, Quand j'en devrais mourir cent fois plus malheureux. Hé comment ! Hé pourquoi Voulez-vous que je vive, Si vous ne vivez pas pour moi ? Devoir impitoyable ! Ah quelle cruauté ! Aimons un bien plus durable Que l'éclat de la beauté : Rien n'est plus aimable Que la liberté. Mais déjà de ce mont sacré Le sommet paraît éclairé D'une splendeur nouvelle. Sangaride s'avançant vers la montagne. La déesse descend, allons au devant d'elle. Quittez votre cour immortelle, Choisissez ces lieux fortunés Pour votre demeure éternelle. Son choix sera pour vous, seigneur ; Quelle tristesse semble avoir surpris votre coeur ? Elle honore aujourd'hui ces lieux de sa présence, C'est pour vous préférer aux plus puissants des rois. À nos jeux, à nos chants, j'étais trop appliqué, Hors la fête, seigneur, je n'ai rien remarqué. Seigneur, que dites-vous ? Seigneur, soyez content, que rien ne vous alarme ; L'hymen va vous donner la beauté qui vous charme, Vous serez son heureux époux. Son coeur suit avec soin le devoir et la gloire, Et vous avez pour vous la gloire et le devoir. Vous aimez d'un amour trop délicat, trop tendre. Qu'un indifférent est heureux ! Il jouit d'un destin paisible. Le ciel fait un présent bien cher, bien dangereux, Lorsqu'il donne un coeur trop sensible. Indigne que je suis des honneurs qu'on m'adresse, Je dois les recevoir au nom de la déesse ; J'ose, puisqu'il lui plaît, lui présenter vos voeux : Pour le prix de votre zèle, Que la puissante Cybèle Vous rende à jamais heureux. Que servent les faveurs que nous fait la fortune Quand l'amour nous rend malheureux ? Je perds l'unique bien qui peut combler mes voeux, Et tout autre bien m'importune. Que servent les faveurs que nous fait la fortune Quand l'amour nous rend malheureux ? Je commande en ces lieux, vous n'y devez rien craindre. Vous devez avec moi partager mon bonheur. L'heure approche où l'hymen voudra qu'elle se livre Au pouvoir d'un heureux époux. Qui peut la dégager du devoir qui la presse ? Cybèle pour moi s'intéresse, J'ose tout espérer de son divin secours... Mais quoi, trahir le roi ! Tromper son espérance ! De tant de biens reçus est-ce la récompense ? Je souhaite, je crains, je veux, je me repends. Je ne puis me résoudre à cette violence. Le plus juste parti cède enfin au plus fort. Allez, prenez soin de mon sort, Que Sangaride ici se rende en diligence. Nous pouvons nous flatter de l'espoir le plus doux Cybèle et l'amour sont pour nous. Mais du devoir trahi j'entends la voix pressante Qui m'accuse et qui m'épouvante. Laisse mon coeur en paix, impuissante vertu, N'ai-je point assez combattu ? Quand l'amour malgré toi me contraint à me rendre, Que me demandes-tu ? Puisque tu ne peux me défendre, Que me sert-il d'entendre Les vains reproches que tu fais ? Impuissante vertu laisse mon coeur en paix. Mais le sommeil vient me surprendre, Je combats vainement sa charmante douceur. Il faut laisser suspendre Les troubles de mon coeur. Venez à mon secours, ô dieux ! Ô justes dieux ! Pardonnez au désordre où mon coeur s'abandonne ; C'est un songe... Les songes sont trompeurs, et je ne les crois pas. Les plaisirs et les peines Dont en dormant on est séduit, Sont des chimères vaines Que le réveil détruit. Ô ciel ! Une grande divinité Doit s'assurer toujours de mon respect extrême. Je sais trop ce que je vous dois Pour manquer de reconnaissance... Je parlerai pour vous, que votre crainte cesse. Le sang et l'amitié nous unissent tous deux. Que votre secours la délivre Des lois d'un hymen rigoureux, Ce sont les plus doux de ses voeux De pouvoir à jamais vous servir et vous suivre. Ah ! C'en est trop... Qu'il sait peu son malheur ! Et qu'il est déplorable ! Son amour méritait un sort plus favorable : J'ai pitié de l'erreur dont son coeur s'est flatté. Dieux ! Qu'est-ce que j'entends ! Sangaride, eh d'où vient ce changement étrange ? Moi ! Quel funeste courroux ! Beauté trop cruelle, c'est vous. Ah ! C'est vous, beauté trop cruelle. Il est vrai qu'à ses yeux, par un secret effroi, J'ai voulu de nos coeurs cacher l'intelligence : Mais ce n'est que pour vous que j'ai craint sa vengeance, Et je ne la crains pas pour moi. Cybèle m'aime en vain, et c'est vous que j'adore. Moi ! Vous trahir ? Vous le pensez ? Ingrate, que vous m'offensez ! Hé bien, il ne faut plus rien taire, Je vais de la déesse attirer la colère, M'offrir à sa fureur, puisque vous m'y forcez... Je jure, Que rien ne vous étonne ; Servons-nous du pouvoir que Cybèle me donne, Je vais préparer les zéphyrs À suivre nos désirs. Cet hymen déplaît à Cybèle, Elle défend de l'achever : Sangaride est un bien qu'il faut lui réserver, Et que je demande pour elle. Seigneur, je suis à la déesse, Dés qu'elle a commandé, je ne puis qu'obéir Apprenez, audacieux, Qu'il n'est rien qui n'obéisse Aux souveraines lois de la reine des dieux. Qu'on nous enlève de ces lieux ; Zéphyrs, que sans tarder mon ordre s'accomplisse. Ciel ! Quelle vapeur m'environne ! Tous mes sens sont troublés, je frémis, je frissonne, Je tremble, et tout à coup, une infernale ardeur Vient enflammer mon sang, et dévorer mon coeur. Dieux ! Que vois-je ? Le ciel s'arme contre la terre ? Quel désordre ! Quel bruit ! Quel éclat de tonnerre ! Quels abîmes profonds sous mes pas sont ouverts ! Que de fantômes vains sont sortis des enfers ! Sangaride, ah fuyez la mort que vous prépare Une divinité barbare : C'est votre seul péril qui cause ma terreur. Quels hurlements affreux ! Il faut combattre ; amour, seconde mon courage. Que je viens d'immoler une grande victime ! Sangaride est sauvée, et c'est par ma valeur. Un calme heureux succède aux troubles de mon coeur. Sangaride, nymphe charmante, Qu'êtes-vous devenue ? Où puis-je avoir recours ? Divinité toute puissante, Cybèle, ayez pitié de nos tendres amours, Rendez-moi, Sangaride, épargnez ses beaux jours. Tu la peux voir, regarde. Ah quelle barbarie ! Sangaride a perdu la vie ! Ah quelle main cruelle ! Ah quel coeur inhumain !... Moi, j'aurais immolé la beauté qui m'enchante ? Ô ciel ! Ma main sanglante Est de ce crime horrible un témoin trop certain ! Quoi, Sangaride est morte ? Atys est son bourreau ! Quelle vengeance ô dieux ! Quel supplice nouveau ! Quelles horreurs sont comparables Aux horreurs que je sens ? Dieux cruels, dieux impitoyables, N'êtes-vous tout-puissants Que pour faire des misérables ? Barbare ! Quel amour qui prend soin d'inventer Les plus horribles maux que la rage peut faire ! Bienheureux qui peut éviter Le malheur de vous plaire. Ô dieux ! Injustes dieux ! Que n'êtes-vous mortels ? Faut-il que pour vous seuls vous gardiez la vengeance ? C'est trop, c'est trop souffrir leur cruelle puissance, Chassons-les d'ici bas, renversons leurs autels. Quoi, Sangaride est morte ? Atys, Atys lui-même Fait périr ce qu'il aime. Ah ! Ne m'arrachez pas Ce qui reste de tant d'appas : En fussiez-vous jalouse encore, Il faut que je l'adore Jusques dans l'horreur du trépas. Je meurs, l'amour me guide Dans la nuit du trépas ; Je vais où sera Sangaride, Inhumaine, je vais où vous ne serez pas. Je suis assez vengé, vous m'aimez, et je meurs. **** *creator_quinault *book_quinault_atys *style_verse *genre_show *dist1_quinault_verse_show_atys *dist2_quinault_verse_show *id_CYBELE *date_1676 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_cybele Venez tous dans mon temple, et que chacun révère Le sacrificateur dont je vais faire choix : Je m'expliquerai par sa voix, Les voeux qu'il m'offrira seront sûrs de me plaire. Je reçois vos respects ; j'aime à voir les honneurs Dont vous me présentés un éclatant hommage, Mais l'hommage des coeurs Est ce que j'aime davantage. Vous devez vous animer D'une ardeur nouvelle, S'il faut honorer Cybèle, Il faut encor plus l'aimer. Je veux joindre en ces lieux la gloire et l'abondance, D'un sacrificateur je veux faire le choix, Et le roi de Phrygie aurait la préférence Si je voulais choisir entre les plus grands rois. Le puissant dieu des flots vous donna la naissance, Un peuple renommé s'est mis sous votre loi ; Vous avez sans mes soins, d'ailleurs, trop de puissance, Je veux faire un bonheur qui ne soit du qu'à moi. Vous estimez Atys, et c'est avec justice, Je prétends que mon choix à vos voeux soit propice, C'est Atys que je veux choisir. Il m'est doux que mon choix à vos désirs réponde ; Une grande divinité Doit faire sa félicité Du bien de tout le monde. Mais surtout le bonheur d'un roi chéri des cieux Fait le plus doux plaisir des dieux. Portez à votre ami la première nouvelle De l'honneur éclatant où ma faveur l'appelle. Tu t'étonnes, Mélisse, et mon choix te surprend ? J'ai fait encor pour lui plus que tu ne peux croire. Tu ne vois que sa moindre gloire ; Ce mortel dans mon coeur est au dessus des dieux. Ce fut au jour fatal de ma dernière fête Que de l'aimable Atys je devins la conquête : Je partis à regret pour retourner aux cieux, Tout m'y parût changé, rien n'y plut à mes yeux. Je sens un plaisir extrême À revenir dans ces lieux. Où peut-on jamais être mieux, Qu'aux lieux où l'on voit ce qu'on aime ? J'ai crû me faire un coeur maître de tout son sort, Un coeur toujours exempt de trouble et de tendresse. Non, trop d'égalité rend l'amour sans appas. Quel plus haut rang ai-je à prétendre ? Et de quoi mon pouvoir ne vient-il point à bout ? Lorsqu'on est au-dessus de tout, On se fait pour aimer un plaisir de descendre. Je laisse aux dieux les biens dans le ciel préparés, Pour Atys, pour son coeur, je quitte tout sans peine, S'il m'oblige à descendre, un doux penchant m'entraîne ; Les coeurs que le destin a le plus séparés, Sont ceux qu'amour unit d'une plus forte chaîne. Fais venir le sommeil ; que lui-même en ce jour, Prenne soin ici de conduire Les songes qui lui font la cour ; Atys ne sait point mon amour, Par un moyen nouveau je prétends l'en instruire. Que les plus doux zéphyrs, que les peuples divers, Qui des deux bouts de l'univers Sont venus me montrer leur zèle, Célèbrent la gloire immortelle Du sacrificateur dont Cybèle a fait choix, Atys doit dispenser mes lois, Honorez le choix de Cybèle. Atys, ne craignez rien, Cybèle est en ces lieux. Parlez, quel songe vous étonne ? Expliquez-moi votre embarras. Ne méprisez pas tant les songes L'amour peut emprunter leur voix, S'ils font souvent des mensonges, Ils disent vrai quelque fois. Ils parlaient par mon ordre, et vous les devez croire. N'en doutez point, connaissez votre gloire. Répondez avec liberté, Je vous demande un coeur qui dépend de lui-même. Les dieux dans leur grandeur suprême Reçoivent tant d'honneurs qu'ils en sont rebutés, Ils se lassent souvent d'être trop respectés, Ils sont plus contents qu'on les aime. Les dieux sont les protecteurs De la liberté des coeurs. Allez, ne craignez point le roi ni sa colère, J'aurai soin d'apaiser Le fleuve Sangar votre père ; Atys veut vous favoriser, Cybèle en sa faveur ne peut rien refuser. Non, non, il n'est pas nécessaire Que vous cachiez votre bonheur, Je ne prétends point faire Un vain mystère D'un amour qui vous fait honneur. Ce n'est point à Cybèle à craindre d'en trop dire. Il est vrai, j'aime Atys, pour lui j'ai tout quitté, Sans lui je ne veux plus de grandeur ni d'empire, Pour ma félicité Son coeur seul peut suffire. Allez, Atys lui-même ira vous garantir De la fatale violence Où vous ne pouvez consentir. Laissez-nous, attendez mes ordres pour partir, Je prétends vous armer de ma toute-puissance. Qu'Atys dans ses respects mêlé d'indifférence ! L'ingrat Atys ne m'aime pas ; L'amour veut de l'amour, tout autre prix l'offense, Et souvent le respect et la reconnaissance Sont l'excuse des coeurs ingrats. Sangaride est aimable, Atys peut tout charmer, Ils témoignent trop s'estimer, Et de simples parents sont moins d'intelligence : Ils se sont aimés dés l'enfance, Ils pourraient enfin trop s'aimer. Je crains une amitié que tant d'ardeur anime. Rien n'est si trompeur que l'estime : C'est un nom supposé Qu'on donne quelquefois à l'amour déguisé. Je prétends m'éclaircir, leur feinte sera vaine. Va, Mélisse, donne ordre à l'aimable Zéphyr D'accomplir promptement tout ce qu'Atys désire. Espoir si cher, et si doux, Ah ! Pourquoi me trompez-vous ? Des suprêmes grandeurs vous m'avez fait descendre, Mille coeurs m'adoraient, je les néglige tous, Je n'en demande qu'un, il a peine à se rendre ; Je ne sens que chagrins, et que soupçons jaloux ; Est-ce le sort charmant que je devais attendre ? Espoir si cher, et si doux, Ah ! Pourquoi me trompez-vous ? Hélas ! Par tant d'attraits fallait-il me surprendre ? Heureuse, si toujours j'avais pu m'en défendre ! L'amour qui me flattait me cachait son courroux : C'est donc pour me frapper des plus funestes coups, Que le cruel amour m'a fait un coeur si tendre ? Espoir si cher, et si doux, Ah ! Pourquoi me trompez-vous ? J'aimais Atys, l'amour a fait mon injustice ; Il a pris soin de mon supplice ; Et si vous êtes outragé, Bientôt vous serez trop vengé. Atys adore Sangaride. L'ingrat vous trahissait, et voulait me trahir : Il s'est trompé lui-même en croyant m'éblouir. Les zéphyrs l'ont laissé, seul, avec ce qu'il aime, Dans ces aimables lieux ; Je m'y suis cachée à leurs yeux ; J'y viens d'être témoin de leur amour extrême. Eh pouvez-vous douter qu'Atys ne soit aimé ? Non, non, jamais amour n'eût tant de violence, Ils ont juré cent fois de s'aimer malgré nous, Et de braver notre vengeance ; Ils nous ont appelés cruels, tyrans, jaloux ; Enfin leurs coeurs d'intelligence, Tous deux... ah je frémis au moment que j'y pense ! Tous deux s'abandonnaient à des transports si doux, Que je n'ai pu garder plus longtemps le silence : NI retenir l'éclat de mon juste courroux. Mon coeur à les punir est assez engagé ; Je vous l'ai déjà dit, croyez-en ma colère, Bientôt vous serez trop vengé. D'un supplice cruel craignez l'horreur extrême. Toi, qui portes partout et la rage et l'horreur, Cesse de tourmenter les criminelles ombres, Viens, cruelle Alecton, sors des royaumes sombres, Inspire au coeur d'Atys ta barbare fureur. Atys me sacrifie une indigne rivale. Partagez avec moi la douceur sans égale, Que l'on goûte en vengeant un amour outragé. Je vous l'avais promis. Achève ma vengeance, Atys, connais ton crime, Et reprends ta raison pour sentir ton malheur. Les coups dont elle meurt sont de ta propre main. Atys, je vous ai trop aimé : Cet amour par vous-même en courroux transformé Fait voir encor sa violence : Jugez, ingrat, jugez en ce funeste jour, De la grandeur de mon amour Par la grandeur de ma vengeance. Ôtez ce triste objet. Je commence à trouver sa peine trop cruelle, Une tendre pitié rappelle L'amour que mon courroux croyait avoir banni, Ma rivale n'est plus, Atys n'est plus coupable, Qu'il est aisé d'aimer un criminel aimable Après l'avoir puni. Que son désespoir m'épouvante ! Ses jours sont en péril, et j'en frémis d'effroi : Je veux d'un soin si cher ne me fier qu'à moi, Allons... mais quel spectacle à mes yeux se présente ? C'est Atys mourant que je vois ! Ah ! C'est ma barbarie, C'est moi, qui lui perce le coeur. Atys, il est trop vrai, ma rigueur est extrême, Plaignez-vous, je veux tout souffrir. Pourquoi suis-je immortelle en vous voyant périr ? Que mon amour funeste armé contre moi-même, Ne peut-il vous venger de toutes mes rigueurs. Malgré le destin implacable Qui rend de ton trépas l'arrêt irrévocable, Atys, sois à jamais l'objet de mes amours : Reprends un sort nouveau, deviens un arbre aimable Que Cybèle aimera toujours. Venez furieux corybantes, Venez joindre à mes cris vos clameurs éclatantes ; Venez, nymphes des eaux, venez dieux des forêts, Par vos plaintes les plus touchantes Secondez mes tristes regrets. Atys, l'aimable Atys, malgré tous ses attraits, Descend dans la nuit éternelle ; Mais malgré la mort cruelle, L'amour de Cybèle Ne mourra jamais. Sous une nouvelle figure, Atys est ranimé par mon pouvoir divin ; Célébrez son nouveau destin ; Mais malgré la mort cruelle, L'amour de Cybèle Ne mourra jamais. Sous une nouvelle figure, Atys est ranimé par mon pouvoir divin ; Célébrez son nouveau destin ; Mais malgré la mort cruelle, L'amour de Cybèle Ne mourra jamais. Sous une nouvelle figure, Atys est ranimé par mon pouvoir divin ; Célébrez son nouveau destin, Pleurez sa funeste aventure. Que cet arbre sacré Soit révéré De toute la nature. Qu'il s'élève au dessus des arbres les plus beaux : Qu'il soit voisin des cieux, qu'il règne sur les eaux ; Qu'il ne puisse brûler que d'une flamme pure. Que cet arbre sacré Soit révéré De toute la nature. Que ses rameaux soient toujours verts : Que les plus rigoureux hivers Ne leur fassent jamais d'injure, Que cet arbre sacré Soit révéré De toute la nature. Atys au printemps de son âge Périt comme une fleur Qu'un soudain orage Renverse et ravage. **** *creator_quinault *book_quinault_atys *style_verse *genre_show *dist1_quinault_verse_show_atys *dist2_quinault_verse_show *id_IRIS *date_1676 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_iris Cybele veut que Flore aujourd'hui vous seconde. Il faut que les plaisirs viennent de toutes parts, Dans l'empire puissant, où règne un nouveau Mars, Ils n'ont plus d'autre asile au monde. Rendez-vous, s'il se peut, dignes de ses regards ; Joignez la beauté vive et pure Dont brille la nature, Aux ornements des plus beaux arts. s **** *creator_quinault *book_quinault_atys *style_verse *genre_show *dist1_quinault_verse_show_atys *dist2_quinault_verse_show *id_IDAS *date_1676 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_idas Vous veillez lorsque tout sommeille ; Vous nous éveillez si matin, Que vous ferez croire à la fin Que c'est l'amour qui vous éveille. Tôt ou tard l'amour est vainqueur, En vain les plus fiers s'en défendent, On ne peut refuser son coeur À de beaux yeux qui le demandent. Atys, ne feignez plus, je sais votre secret. Ne craignez rien, je suis discret. Dans un bois solitaire et sombre, L'indifférent Atys se croyait seul, un jour ; Sous un feuillage épais où je rêvais à l'ombre, Je l'entendis parler d'amour. Tel se vante de n'aimer rien, Dont le coeur en secret soupire. J'entendis vos regrets, et je les sais si bien Que si vous en doutez je vais vous les redire. Amants qui vous plaignez, vous êtes trop heureux : Mon coeur de tous les coeurs est le plus amoureux, Et tout près d'expirer je suis réduit à feindre ; Que c'est un tourment rigoureux De mourir d'amour sans se plaindre ! Amants qui vous plaignez, vous êtes trop heureux. Peut-on ici parler sans feindre ? Fiez-vous à ma soeur. D'où vient votre peine nouvelle ? Il s'est percé le sein, et mes soins pour sa vie N'ont pu prévenir sa fureur. **** *creator_quinault *book_quinault_atys *style_verse *genre_show *dist1_quinault_verse_show_atys *dist2_quinault_verse_show *id_DORIS *date_1676 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_doris L'amitié fut toujours égale entre vous deux, Et le sang d'assez près vous lie : Quel que soit son bonheur, lui portez-vous envie ? Vous, qu'aujourd'hui l'hymen avec de si beaux noeuds Doit unir au roi de Phrygie ? Quel mal vous fait l'amour ? Votre chagrin m'étonne. Aimeriez-vous Atys, lui dont l'indifférence Brave avec tant d'orgueil l'amour et sa puissance ? C'est le commun défaut des belles. L'ardeur des conquêtes nouvelles Fait négliger les coeurs qu'on a trop tôt charmés, Et les indifférents sont quelquefois aimés Aux dépens des amants fidèles. Mais vous vous exposez à des peines cruelles. Je vais prendre soin de presser Les nymphes nos compagnes. Mon frère est votre ami. Quoi, vous pleurez ? N'osez-vous découvrir votre amour à Cybèle ? **** *creator_quinault *book_quinault_atys *style_verse *genre_show *dist1_quinault_verse_show_atys *dist2_quinault_verse_show *id_MELISSE *date_1676 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_melisse Atys vous doit beaucoup, et son bonheur est grand. Est-il pour un mortel un rang plus glorieux ? Tous les dieux ont aimé, Cybèle aime à son tour. Vous méprisiez trop l'amour, Son nom vous semblait étrange, À la fin il vient un jour Où l'amour se venge. Vous braviez à tort L'amour qui vous blesse ; Le coeur le plus fort À des moments de faiblesse. Mais vous pouviez aimer, et descendre moins bas. Ce n'est pas un si grand crime De ne s'exprimer pas bien, Un coeur qui n'aima jamais rien Sait peu comment l'amour s'exprime. Quels secrets par les dieux ne sont point pénétrez ? Deux coeurs à feindre préparés Ont beau cacher leur chaîne, On abuse avec peine Les dieux par l'amour éclairés. **** *creator_quinault *book_quinault_atys *style_verse *genre_show *dist1_quinault_verse_show_atys *dist2_quinault_verse_show *id_SANGARIDE *date_1676 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_sangaride Que dans nos concerts les plus doux, Son nom sacré se fasse entendre. Les dieux suivent ses lois et craignent son courroux. Écoutons les oiseaux de ces bois d'alentour, Ils remplissent leurs chants d'une douceur nouvelle. On dirait que dans ce beau jour, Ils ne parlent que de Cybèle. Il est vrai, je triomphe, et j'aime ma victoire. Quand l'amour fait régner, est-il un plus grand bien ? Pour vous, Atys, vous n'aimez rien, Et vous en faites gloire. Quand le péril est agréable, Le moyen de s'en alarmer ? Est-ce un grand mal de trop aimer Ce que l'on trouve aimable ? Peut-on être insensible aux plus charmants appas ? Atys est trop heureux. Atys, est trop heureux. Souverain de son coeur, maître de tous ses voeux, Sans crainte, sans mélancolie, Il jouit en repos des beaux jours de sa vie ; Atys ne connaît point les tourments amoureux, Atys est trop heureux. Je te fie un secret qui n'est su de personne. Je devrais aimer un amant Qui m'offre une couronne ; Mais, hélas ! Vainement Le devoir me l'ordonne, L'amour, pour mon tourment, En ordonne autrement. J'aime, Atys, en secret, mon crime, est sans témoins. Pour vaincre mon amour, je mets tout en usage, J'appelle ma raison, j'anime mon courage ; Mais à quoi servent tous mes soins ? Mon coeur en souffre davantage, Et n'en aime pas moins. Toujours aux yeux d'Atys je serai sans appas ; Je le sais, j'y consens, je veux, s'il est possible, Qu'il soit encor plus insensible ; S'il me pouvait aimer, que deviendrais-je ? Hélas ! C'est mon plus grand bonheur qu'Atys ne m'aime pas. Je prétends être heureuse, au moins, en apparence ; Au destin d'un grand roi je me vais attacher. Nous ordonnons tous deux la fête de Cybèle, L'honneur est égal entre nous. L'indifférent Atys n'en sera point jaloux. Ô dieux ! Je frémis, ma crainte est extrême ; Atys, par quel malheur faut-il vous voir périr ? J'armerai, s'il le faut, tout le pouvoir suprême... Quoi ? Vous ? Vous m'aimez ? Hélas ! Atys, que vous seriez à plaindre Si vous saviez tous vos malheurs ! C'est peu de perdre en moi ce qui vous a charmé, Vous me perdez, Atys, et vous êtes aimé. Vous en serez plus misérable. Si vous cherchez la mort, il faut que je vous suive ; Vivez, c'est mon amour qui vous en fait la loi. On vient, feignez encor, craignez d'être écouté. La terre sous vos pas va devenir plus belle Que le séjour des dieux que vous abandonnez. J'ai recours à votre puissance, Reine des dieux, protégez-moi. L'intérêt d'Atys vous en presse... Tous deux unis des plus beaux noeuds... Hélas ! Hélas ! J'aime... Hélas ! J'aime... Je ne puis. Hélas ! J'aime un perfide Qui trahit mon amour ; La déesse aime Atys, il change en moins d'un jour, Atys comblé d'honneurs n'aime plus Sangaride. Hélas ! J'aime un perfide Qui trahit mon amour. J'embarrassais Atys, je l'ai vu se troubler : Je croyais devoir révéler Notre amour à Cybèle ; Mais l'ingrat, l'infidèle, M'empêchât toujours de parler. Cybèle hautement déclare qu'elle l'aime, Et l'ingrat n'a trouvé cet honneur que trop doux ; Il change en un moment, je veux changer de même, J'accepterai sans peine un glorieux époux, Je ne veux plus aimer que la grandeur suprême. Trop heureux un coeur qui peut croire Un dépit qui sert à sa gloire. Revenez ma raison, revenez pour jamais, Joignez-vous au dépit pour étouffer ma flamme, Réparez, s'il se peut, les maux qu'amour m'a fait, Venez rétablir dans mon âme Les douceurs d'une heureuse paix ; Revenez, ma raison, revenez pour jamais. Après une trahison Si la raison ne m'éclaire, Le dépit et la colère Me tiendront lieu de raison. Seigneur, j'obéirai, je dépends de mon père, Et mon père aujourd'hui veut que je sois à vous. Ce n'est point la grandeur qui me peut éblouir. Seigneur contentez-vous que je sache obéir, En l'état où je suis c'est ce que je puis dire... Expliquez en votre faveur Tout ce que vous voyez de trouble dans mon coeur. Épargnez-vous le soin d'être si pitoyable, Son amour obtiendra ce qu'il a mérité. Qu'il faut que je me venge. Que j'aime enfin le roi, qu'il sera mon époux. N'est-ce pas vous, ingrat, qui voulez que je change ? Quelle trahison ! Amant infidèle, c'est vous. Ah ! C'est vous amant infidèle. Vous m'avez immolée à l'amour de Cybèle. Après votre infidélité, Auriez-vous bien la cruauté De vouloir me tromper encore ? Ah ! Demeurez, Atys, mes soupçons sont passés ; Vous m'aimez, je le crois, j'en veux être certaine. Je le souhaite assez, Pour le croire sans peine. Je promets, Quel tourment de cacher une si belle flamme. Redoublons-en l'ardeur dans le fonds de nôtre âme. Mon père vient ici. Atys reconnaissez votre funeste erreur. Quel monstre vient à nous ! Quelle fureur le guide ! Ah respecte, cruel, l'aimable Sangaride. Atys, mon cher Atys. Atys ! Je meurs. **** *creator_quinault *book_quinault_atys *style_verse *genre_show *dist1_quinault_verse_show_atys *dist2_quinault_verse_show *id_FLORE *date_1676 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_flore Quand j'attends les beaux jours, je viens toujours trop tard, Plus le printemps s'avance, et plus il m'est contraire ; Son retour presse le départ Du héros à qui je veux plaire. Pour lui faire ma cour, mes soins ont entrepris De braver désormais l'hiver le plus terrible, Dans l'ardeur de lui plaire on a bientôt appris À ne rien trouver d'impossible. **** *creator_quinault *book_quinault_atys *style_verse *genre_show *dist1_quinault_verse_show_atys *dist2_quinault_verse_show *id_MELPOMENE *date_1676 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_melpomene Retirez-vous, cessez de prévenir le temps ; Ne me dérobez point de précieux instants : La puissante Cybele Pour honorer Atys qu'elle a privé du jour, Veut que je renouvelle Dans une illustre cour Le souvenir de son amour. Que l'agrément rustique De Flore et de ses jeux, Cède à l'appareil magnifique De la muse tragique, Et de ses spectacles pompeux. **** *creator_quinault *book_quinault_atys *style_verse *genre_show *dist1_quinault_verse_show_atys *dist2_quinault_verse_show *id_ZEPHIR *date_1676 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_zephir Le printemps quelquefois est moins doux qu'il ne semble, Il fait trop payer ses beaux jours ; Il vient pour escorter les jeux et les amours, Et c'est l'hiver qui les rassemble. **** *creator_quinault *book_quinault_atys *style_verse *genre_show *dist1_quinault_verse_show_atys *dist2_quinault_verse_show *id_MORPHEE *date_1676 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_morphee Régnez, divin sommeil, régnez sur tout le monde, Répandez vos pavots les plus assoupissants ; Calmez les soins, charmez les sens, Retenez tous les coeurs dans une paix profonde. Écoute, écoute Atys la gloire qui t'appelle, Sois sensible à l'honneur d'être aimé de Cybèle, Jouis heureux Atys de ta félicité. **** *creator_quinault *book_quinault_atys *style_verse *genre_show *dist1_quinault_verse_show_atys *dist2_quinault_verse_show *id_PHOBETOR *date_1676 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_phobetor Ne vous faites point violence, Coulez, murmurez, clairs ruisseaux, Il n'est permis qu'au bruit des eaux De troubler la douceur d'un si charmant silence. Goûte en paix chaque jour une douceur nouvelle, Partage l'heureux sort d'une divinité, Ne vante plus la liberté, Il n'en est point du prix d'une chaîne si belle. **** *creator_quinault *book_quinault_atys *style_verse *genre_show *dist1_quinault_verse_show_atys *dist2_quinault_verse_show *id_PHANTASE *date_1676 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_phantase Que l'amour a d'attraits Lorsqu'il commence À faire sentir sa puissance ! Que l'amour a d'attraits Lorsqu'il commence Pour ne finir jamais. Trop heureux un amant Qu'amour exempte Des peines d'une longue attente ! Trop heureux un amant Qu'amour exempte De crainte et de tourment ! Que l'amour a d'attraits Lorsqu'il commence À faire sentir sa puissance ! Que l'amour a d'attraits Lorsqu'il commence Pour ne finir jamais ! **** *creator_quinault *book_quinault_atys *style_verse *genre_show *dist1_quinault_verse_show_atys *dist2_quinault_verse_show *id_CELAENUS *date_1676 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_celaenus N'avancez pas plus loin, ne suivez point mes pas ; Sortez. Toi ne me quitte pas. Atys, il faut attendre ici que la déesse Nomme un grand sacrificateur. Les rois les plus puissants connaissent l'importance D'un si glorieux choix : Qui pourra l'obtenir étendra sa puissance Partout où de Cybèle on révère les lois. Mais quand j'ai vu tantôt la beauté qui m'enchante, N'as-tu point remarqué comme elle était tremblante ? Son trouble m'a surpris. Elle t'ouvre son âme ; N'y découvres-tu point quelque secrète flamme ? Quelque rival caché ? Le seul nom de rival allume mon courroux. J'ai bien peur que le ciel n'ait pu voir sans envie Le bonheur de ma vie, Et si j'étais aimé mon sort serait trop doux. Ne t'étonnes point tant de voir la jalousie Dont mon âme est saisie, On ne peut bien aimer sans être un peu jaloux. Tu peux me rassurer, Atys, je te veux croire, C'est son coeur que je veux avoir, Dis-moi s'il est en mon pouvoir ? Ne me déguise point ce que tu peux connaître. Si j'ai ce que j'aime en ce jour L'hymen seul m'en rend-t-il le maître ? La gloire et le devoir auront tout fait, peut-être, Et ne laissent pour moi rien à faire à l'amour. L'indifférent Atys ne le saurait comprendre. Quand on aime bien tendrement On ne cesse jamais de souffrir, et de craindre ; Dans le bonheur le plus charmant, On est ingénieux à se faire un tourment, Et l'on prend plaisir à se plaindre. Va songe à mon hymen, et vois si tout est prêt, Laisse-moi seul ici, la déesse paraît. J'aime Atys, et je vois sa gloire avec plaisir. Je suis roi, Neptune est mon père, J'épouse une beauté qui va combler mes voeux : Le souhait qui me reste à faire, C'est de voir mon ami parfaitement heureux. Le sang approche Atys de la nymphe que j'aime, Son mérite l'égale aux rois : Il soutiendra mieux que moi-même La majesté suprême De vos divines lois. Rien ne pourra troubler son zèle, Son coeur s'est conservé libre jusqu'à ce jour ; Il faut tout un coeur pour Cybèle, À peine tout le mien peut suffire à l'amour. Belle nymphe, l'hymen va suivre mon envie, L'amour avec moi vous convie À venir vous placer sur un trône éclatant, J'approche avec transport du favorable instant D'où dépend la douceur du reste de ma vie : Mais malgré les appas du bonheur qui m'attend, Malgré tous les transports de mon âme amoureuse, Si je ne puis vous rendre heureuse, Je ne serai jamais content. Je fais mon bonheur de vous plaire, J'attache à votre coeur mes désirs les plus doux. Regardez mon amour, plutôt que ma couronne. Ne sauriez-vous m'aimer sans que l'on vous l'ordonne. Votre coeur se trouble, il soupire. Rien ne m'alarme plus, Atys, ma crainte est vaine, Mon amour touche enfin le coeur de la beauté Dont je suis enchanté : Toi qui fus témoin de ma peine, Cher Atys, sois témoin de ma félicité. Peux-tu la concevoir ? Non, il faut que l'on aime, Pour juger des douceurs de mon bonheur extrême. Mais, près de voir combler mes voeux, Que les moments sont longs pour mon coeur amoureux ! Vos parents tardent trop, je veux aller moi-même Les presser de me rendre heureux. Atys peut s'engager lui-même à me trahir ? Atys contre moi s'intéresse ? Vous m'ôtez Sangaride ? Inhumaine Cybelle ; Est-ce le prix du zèle Que j'ai fait avec soin éclater à vos yeux ? Préparez-vous ainsi la douceur éternelle Dont vous devez combler ces lieux ? Est-ce ainsi que les rois sont protégés des dieux ? Divinité cruelle, Descendez-vous exprès des cieux Pour troubler un amour fidèle ? Et pour venir m'ôter ce que j'aime le mieux ? Atys l'adore ? Ah le perfide ! Ô ciel ! Atys plairait aux yeux qui m'ont charmé ? La mort est pour leur crime une peine légère. Fuyez, sauvez-vous de sa rage. Je n'ai pu retenir ses efforts furieux, Sangaride expire à vos yeux. Ô promesse fatale ! Sangaride n'est plus, et je suis trop vengé.