**** *creator_rousseaujb *book_rousseaujb_jason *style_verse *genre_opera *dist1_rousseaujb_verse_opera_jason *dist2_rousseaujb_verse_opera *id_PAN *date_1696 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_pan Un doux repos suspend les troubles de la guerre Dans nos tranquilles champs les jeux vont revenir; Et Mars, las d'alarmer la terre Leur permet de se réunir. Vous, qui du Dieu des bois révérez la puissance, Et vous, peuples heureux qui vivez sur ces bords, Par vos chants de réjouissance Faites éclater vos transports. Chantez la valeur et la gloire Du héros qui vous rend heureux Et qu'une éternelle mémoire Consacre dans vos coeurs ses bienfaits généreux Quel bruit harmonieux ici se fait entendre? a Quelle douce clarté se répand dans les airs? Ces nuages brillants ces aimables concerts M'annoncent que la paix en ces lieux va se rendre. Déesse des plaisirs, douce et charmante Paix, Quel destin fortuné vous rend à nos souhaits? Un roi que le ciel a fait naître, Pour partager tes soins et )e pou voir des Dieux, Fixe mon séjour en ces lieux; C'est lui qui sur ces bords m'ordonne de paraître La guerre contre moi ligue tous les mortels: Leur perfide coeur m'abandonne Pour suivre la fière Bellone, Et leur main sacrilège a brisé mes autels Mais contre leur rage funeste, Ce héros m'offre un sûr appui; Et son empire est aujourd'hui Le seul asile qui me reste. Vainqueur de cent peuples jaloux, Il ne porte chez eux le flambeau de la guerre, Que pour forcer leur injuste courroux D'accepter le repos qu'il veut rendre à la terre. Quel est de cet orgueil le déplorable fruit De leurs derniers efforts tout l'effet se réduit À pouvoir immoler leurs peuples en alarmes À toutes les horreurs de Mars ; Et contre leurs propres remparts Tourner la fureur de leurs armes. **** *creator_rousseaujb *book_rousseaujb_jason *style_verse *genre_opera *dist1_rousseaujb_verse_opera_jason *dist2_rousseaujb_verse_opera *id_LAPAIX *date_1696 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_lapaix C'est en vain qu'à ses ennemis Son coeur se montre favorable Leur orgueil, mille fois soumis, Renaît du malheur qui l'accable. Laissons-les s'égarer dans leurs vagues projets, Et goûtons les douceurs d'un repos plein d'attraits. Retraçons aujourd'hui la célèbre entreprise Qui conduisit Jason sur les bords de Colchos Et montrons ce que peut la vertu d'un héros, Lorsque le ciel la favorise. **** *creator_rousseaujb *book_rousseaujb_jason *style_verse *genre_opera *dist1_rousseaujb_verse_opera_jason *dist2_rousseaujb_verse_opera *id_MEDEE *date_1696 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_medee Je ne viens point, par un indigne effroi Arrêter en ces lieux l'ardeur qui vous anime ; Partez, volez, courez servir le Roi : Aux héros tels que vous, c'est un soin légitime. Plus votre coeur est magnanime, Et plus il est digne de moi. Vous m'aimez, votre ardeur, m'est chère Je frémis des périls où vous allez courir Mais le devoir l'ordonne, il lui faut obéir, Et l'amour doit se taire. Adieu, Jason, évitez-moi Je sens redoubler mes alarmes ; Fuyez de dangereuses larmes ; Je crains pour vous le trouble où je me vois. Que de cris furieux Se font entendre dans ces lieux ! Ô dieux ! Ô justes Dieux ! Quelle rage cruelle ! Quelle horreur ! Quelle triste image ! Mon coeur se sent glacer d'effroi. Peut-être en cet instant mon amant ou le Roi... Ô ciel détourne un si cruel présage ! C'est à toi seul que j'ai recours, Mon art de leurs destins ne peut changer le cours, Je mets mon seul espoir en ta bonté suprême, Conserve-moi tout ce que j'aime ; Juste ciel ! Prends soin de leurs jours, J'implore ton secours. Mais tout redouble ici mon désespoir extrême. Ah ! Perfide Jason ! Juste ciel, quelle trahison ! Je fuis un traître, un infidèle, Qui n'a que trop mérité mon courroux. Contre un Roi généreux, qui par mille bienfaits S'empresse à combler tes souhaits, Former un dessein perfide, Traître, sont-ce là les effets De la gloire qui te guide ? Malheureux ! J'ai pitié de ta témérité, Tu cours à ta perte certaine. Apprends en quelle extrémité Ton funeste dessein t'entraîne. Deux taureaux indomptés sont les premiers remparts Qui défendent le champ de Mars. La flamme qui se mêle à leur brûlante haleine Forme autour d'eux un affreux tourbillon ; Il faut forcer leur fureur inhumaine À tracer sur la plaine un pénible sillon. Aussitôt du sein de la terre, Tes yeux verront de toutes parts Sortir des escadrons épars, Qui se rassembleront pour te livrer la guerre. Ce n'est pas tout encore : un dragon furieux Fait dans ce lieu terrible une garde constante ; Jamais le doux sommeil n'approcha de ses yeux : Rien ne saurait tromper sa fureur vigilante. La mort, la plus cruelle mort Sera le prix de ton audace. C'en est donc fait, volage ! Puisque mes soins sont superflus, Va, cours ; je ne te retiens plus ; Achève d'accomplir un projet qui m'outrage ; Mais après les périls dont je t'ai peint l'horreur Redoute encor Médée et sa fureur. Fatal courroux, haine mortelle, Venez me secourir contre un amour rebelle. Par un mépris plein de froideur J'avais cru me guérir de ma honteuse flamme ; Mais le jaloux transport qui règne dans mon âme Me fait connaître mon erreur. Fatal courroux, haine mortelle, Venez me secourir contre un amour rebelle. La reine de Lemnos a paru dans ces lieux, Qu'y vient-elle chercher ? Quel soin secret l'appelle ? Mon perfide a senti le pouvoir de ses yeux ; Qu'ils ont d'attraits ! Dieux, qu'elle est belle! Que je sens redoubler contre elle Mes transports furieux ! Je la vois qui s'avance ; Pénétrons le secret de leur intelligence ! À vos charmes puissants, que ne devrons-nous pas ! Que cette heureuse cour en reçoit davantage ! Ils vont de nos tristes climats Bannir ce qu'ils ont de sauvage : Sans vous, sans vos divins appas, L'amour n'aurait jamais embelli ce rivage. Jason se voit comblé d'une gloire immortelle, Il ne lui restait plus que d'être amant fidèle, Au soin de ses amours rien ne peut l'arracher. Votre coeur en semble étonné ? Le plaisir peut avoir son tour Après une illustre victoire, Un héros se doit à l'amour Quand il est quitte avec la Gloire. Ne vous piquez point de constance, Oubliez un perfide amant. Le mépris et l'indifférence Doivent punir le changement. C'en est trop. Je me livre au conseil de ma rage. Sortons. Je ne veux pas en savoir davantage. Quel objet frappe ici mes yeux ? Que vois-je ma rivale et Jason dans ces lieux ? Ah ! C'est trop différer une juste vengeance ; Éclatez, il est temps, mes jalouses fureurs. Perfides, apprenez à craindre ma puissance. Que ce palais se change en un séjour d'horreurs. Démons, monstres affreux, joignez-vous à ma rage, Quittez le ténébreux rivage, Venez, accourez, vengez-moi D'une indigne rivale et d'un amant sans foi. De quel étonnement je sens saisir mon coeur ! Où suis-je ? Où sont ces lieux élevés par ma rage ? Quand je lève le bras pour venger mon outrage, Quelle invisible main enchaîne ma fureur ? Que tardons-nous ? Allons, renouvelons mes charmes ; Remplissons ce séjour de nouvelles alarmes. Enfers, écoutez-moi. Tout est sourd à ma voix. Démons, obéissez. Tout méprise mes lois. N'ayons plus d'espoir qu'en ma rage, C'est l'unique recours des coeurs désespérés ; Une rivale qu'on outrage Porte des coups plus assurés. Que les Démons, l'Enfer et les Dieux conjurés. Hâtons-nous... Mais, ô Dieux ! Quelle pitié soudaine S'oppose à mes transports jaloux ? Vains efforts d'une juste haine, Contre l'Amour, hélas ! De quoi nous servez-vous ? Cependant ma crainte redouble, L'antre de la Sibylle est voisin de ces lieux. Allons lui confier mon trouble ; Qu'elle éclaircisse enfin un mystère odieux. Clamez une crainte inutile. Je ne viens point troubler vos plaisirs innocents, Je viens consulter la Sibylle, Puisse-t-elle adoucir les maux que je ressens. Toi qui dans ce lieu solitaire, Des profanes humains fuis l'importunité, Des secrets d'Apollon sainte dépositaire, Toi, pour qui l'avenir est sans obscurité, Daigne de mon destin dévoiler le mystère, Et fais-en à mes yeux briller la vérité. Jason me cause une peine mortelle. Ma raison et mes yeux me l'ont peint infidèle Mais mon amour dément mes yeux et ma raison. Éclaircis cette incertitude, Je souffre plus de mon inquiétude, Que je ne souffrirais de voir sa trahison. Non rien ne peut changer le dessein qui m'appelle, Si Jason me trahit, je mourrai de douleur, Mais une prompte mort me sera moins cruelle Que le jaloux soupçon qui dévore mon coeur. Approchons-nous. Ô ciel ! Mon espérance est vaine. J'entends déjà gronder les fougueux Aquilons. Quels affreux sifflements ! Quels épais tourbillons ! Tout l'empire d'Éole en ces lieux se déchaîne. Prêtresse d'Apollon, daigne employer ta voix Pour m'expliquer du ciel les redoutables lois. Quelle énigme fatale ! Est-il un sort plus rude ? Ô funeste embarras ! Oracles superflus ! Chaque moment fait naître à mon esprit confus, Un abîme d'incertitude. Suivons mes premiers sentiments, Il faut qu'Hypsipyle périsse Allons, par mes discours et par mon artifice ; Faire servir ses feux à mes ressentiments. C'est trop persécuter votre innocente ardeur J'ouvre les yeux enfin, et vois mon injustice. Oubliez, s'il se peut, un aveugle caprice Qui n'a servi qu'à tourmenter mon coeur. Jason m'avait fait une offense, Contre lui, contre vous, mon dépit s'est armé : Il est mort. Son trépas a rempli ma vengeance. Les destins l'ont puni, mon courroux est calmé. Hé quoi pouviez-vous croire Que son orgueil ambitieux Le pourrait emporter sur Médée et les Dieux ? Séduit par les appas d'un fol espoir de gloire, Il a voulu braver la mort ; Voyez le sang couler étendu sur ce bord. Votre douleur est légitime, Il vous aimait avec fidélité. Meurs, objet odieux, satisfais mon envie. Le coup précipité qui t'arrache à la vie Ne fait qu'épargner à mon bras Le soin d'achever ton trépas. C'en est fait ; mon amour n'a plus rien qui le gêne, Suivons-en désormais les tendres mouvements ; Déjà, par mes enchantements, J'ai calmé la rage inhumaine. Des farouches taureaux qui défendent ces lieux Achevons et rendons Jason victorieux, Que ce rare bienfait dans mes noeuds le ramène : Que dis-je ? Malheureuse et quel est mon espoir ? Ciel ! Puis-je ainsi trahir la loi de mon devoir ? Dans le fond de mon coeur je l'entends qui murmure ? Qu'un reste de vertu nous coûte de remords ! Cessez, cruels combats, inutiles efforts, C'est trop renouveler le tourment que j'endure. Les droits de l'amour sont plus forts Que tous les droits de la nature. Seigneur, que dites-vous? Par ce noir et fatal présage Pourquoi troubler votre repos? Si dans l'empire de Colchos Du pouvoir souverain la Toison est le gage ; Le trône de Scythie, acquis par vos exploits, N'est point sujet à ces injustes lois. Mais de vos ennemis je préviendrai l'audace. Ils paraissent bientôt la terre va s'ouvrir; Mille soldats armés à leurs yeux vont s'offrir. Ne vous exposez point au coup qui les menace. Allez, et bannissant un inutile effroi, De nos destins communs reposez-vous sur moi. Arrêtez, c'est à moi de finir cette guerre, De vos combats sanglants voici l'illustre prix ; Rentrez, fiers enfants de la terre, Dans le gouffre profond d'où vous êtes sortis. Cesse d'en redouter les funestes effets, Elle meurt avec ma rivale ; Son trépas comble mes souhaits Et te punit assez des maux que tu m'as faits. De mon coeur je ne suis plus maîtresse: La nature cède à l'amour. Je t'offre la Toison, et, je vais dans la Grèce, Par ce gage éclatant racheter ton retour. **** *creator_rousseaujb *book_rousseaujb_jason *style_verse *genre_opera *dist1_rousseaujb_verse_opera_jason *dist2_rousseaujb_verse_opera *id_JASON *date_1696 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_jason Au milieu des horreurs d'une guerre effroyable, Dois-je accabler encore un roi trop déplorable, Qui nous a comblés de bienfaits ? Le Scythe sur ces bords a porté t'épouvante D'un combat furieux nous voyons les apprêts. Ce prince espère en nous remplissons son attente ; Combattons pour ses intérêts, Et que de notre zèle une preuve éclatante Puisse autoriser nos projets. Hélas Tu connais mes malheurs Vainement je voudrais te cacher mes douleurs. Hypsipyle m'aimait mon coeur brûlait pour elle Les jours les plus heureux n'étaient faits que pour nous. Fatal devoir, gloire cruelle, Que je serais heureux sans vous ! Il fallut la quitter, cette reine si belle. La perte d'un bonheur que je trouvais si doux, Porte à mon coeur les plus sensibles coups Plus mon sort eut d'attraits, plus ma peine est mortelle. Trop cruel souvenir d'un bonheur qui n'est plus, N'offrez plus à mon coeur votre douceur passée Éloignez-vous, fuyez de ma triste pensée ; Pourquoi m'entretenir des biens que j'ai perdus ? Je guérirais des maux dont j'ai l'âme blessée, Si de mes esprits prévenus Votre image était effacée : Trop cruel souvenir d'un bonheur qui n'est plus, N'offrez plus à mon coeur votre douceur passée. Écoute le secret de ma nouvelle flamme, Et plains mon destin rigoureux ; En perdant la Toison, le roi perd sa puissance. Pour prévenir les coups du sort, Médée a de son art employé l'assistance. Que peut contre elle un inutile effort ? Et quelle valeur indomptable De ses enchantements pourrait forcer le cours ? Pour vaincre son art redoutable L'Amour, le seul .Amour m'offre ici son secours. Cependant conçois-tu l'excès de ma tristesse ? À de feintes ardeurs j'immole ma tendresse Malgré moi je trahis un objet plein d'appas. Ah ! C'est une rigueur extrême D'être réduit à quitter ce qu'on aime Pour s'attacher à ce qu'on n'aime pas ! Cours rassembler nos Grecs ; je te suis, laisse-nous. Princesse, où vous exposez-vous ? Ah ! Fuyez un séjour d'horreur et de tristesse. Ne puis-je obéir à ma gloire Qu'en quittant l'objet que je sers ? Tous les honneurs de la victoire Pourront-ils me payer des douceurs que je perds ? Vos ennemis, livrés au destin de la guerre, De leur perfide sang ont fait rougir la terre. Leur roi seul échappé de ce désordre affreux, Traînait de ses soldats les débris malheureux Nos Grecs n'ont songé qu'à le suivre ; Je l'ai joint dans ce bois et sa mort vous délivre D'un ennemi si dangereux. Laisse-moi respirer, malheureuse contrainte, Funeste effet d'une odieuse feinte, Triste remords qui vient me déchirer, Laisse-moi respirer. Quelle honte, grands Dieux ! Ah ! Quel supplice extrême ! Je feins de haïr ce que j'aime, Et d'adorer ce que je hais. Je trahis Hypsipyle, et Médée, et moi-même : Quelle honte, grands Dieux ! Ah ! Quel supplice extrême ! Mais quoi ? Ce riche don que je m'étais promis, Sans ce secours ne peut m'être permis Tout m'annonce une mort affreuse. Que dis-je ? Ah ! Bannissons une terreur honteuse, Ce prix serait trop acheté, S'il fallait l'obtenir par une indignité. Ma feinte à la Princesse a trop fait d'injustice N'abusons plus de sa crédulité. Je vais, par un aveu dépouillé d'artifice, Faire éclater la vérité. Mais quels concerts se font entendre ? Quelle Divinité dans ces lieux va descendre ? C'en est trop, déesse charmante, Je vais, sans balancer, répondre à votre attente. Quel prix d'une flamme si belle ? Que mon destin a de douceur ! Après un tel bienfait, m'est-il permis, Seigneur, De me flatter d'une grâce nouvelle ? Nos Grecs ont partagé mes soins et mes travaux: Ils doivent partager votre reconnaissance ; Daignez encore à ces héros Accorder une récompense. Tant que le ciel pour eux répandra sa lumière, Rien ne peut les toucher que la riche toison. Daignez à leur valeur guerrière Ouvrir cette noble carrière. Le Dieu du jour vous donna la naissance, Un grand peuple est soumis à votre obéissance ; Vos ennemis gémissent dans vos fers, Tout comble ici votre bonheur extrême : Vous n'avez plus à craindre un funeste revers, Votre sort désormais dépendra de vous-même. Pour nous, qu'un fier tyran tient ses lois soumis, Tel est le malheur qui nous presse, Qu'une honteuse mort nous attend dans la Grèce Si de notre retour la Toison n'est le prix. La mort ne nous étonne pas. Plus le péril est redoutable, Et plus la victoire a d'appas. Dans quel mortel chagrin un tel discours me laisse ? Que je sens un cruel tourment ? Vous me fuyez, chère princesse Quoi ! M'abandonnez-vous en cet accablement ? Plaignez plutôt ma fortune cruelle, Du plus ardent amour mon coeur ressent les coups, Mais je ne puis trahir la gloire qui m'appelle. Si je dois vivre pour vous. Je dois vivre aussi pour elle. Exilés du climat qui nous donna le jour, Un serment solennel engage notre gloire À méditer notre retour Par cette éclatante victoire. Non, non. je ne crains point le coup qui me menace, Mon courage et les Dieux sont garants de mon sort. Vaine fureur, impuissante colère ! Non, non, ce n'est pas toi qui causes mes tourments ; Je souffre beaucoup plus de l'indigne mystère Qui cache ici mes sentiments : Vaine fureur, impuissante colère, Non, non, ce n'est pas toi qui causes mes tourments ; Quelle pompe éclatante S'approche de ces bords ! D'où naissent ces nouveaux accords ; À mes regards surpris quel objet se présente 1 C'est Hypsipyle, ô Ciel ! en croirai-je mes yeux ; Quel sort l'a conduite en ces lieux ? Mon âme confuse éperdue, Soutiendra-t-elle encor sa vue ? Elle vient, je la vois, Dieux qui l'avez permis, Sont-ce là les secours que vous m'aviez promis ? Le voici, cet ingrat que vous devez haïr, Il se livre à votre colère À vos justes transports vous devez obéir. Je suis trop criminel d'avoir pu vous déplaire. De la plus tendre ardeur mon âme est possédée, Je n'adore que vos beaux yeux : Mais le prix éclatant qui m'attire en ces lieux, > Dépend du pouvoir de Médée Et si j'ai feint pour elle une coupable ardeur, C'est un crime des Dieux, et non pas de mon coeur. Ah ! Perdez des soupçons si vains. Médée aux éléments peut déclarer la guerre, Son art confond les Cieux, l'Enfer, l'Onde et la Terre; Il soumet la nature, et transporte à son choix, Les rochers, les monts et les bois ; Mais contre l'aimable Hypsipyle Dans le coeur de Jason sa force est inutile. Bannissez d'injustes alarmes. Mon amour doit vous rassurer. Divin Orphée, à qui les Dieux Ont. prodigué des sons la science charmante, Par les accents mélodieux De sa lyre savante Suspends la rage menaçante De tant de monstres furieux Des enfers déchaînés il calme la colère. Invincibles guerriers, venez, suivez mes pas. Hâtons-nous d'achever cette grande victoire. De votre colère fatale Venez-vous contre moi renouveler les traits ? Juste ciel ! Ne crois pas m'échapper, cruelle Il faut que de ta mort ce gage soit le prix, Et que mon bras plongé dans ton sang infidèle, Apaise les funestes cris De celui qu'a versé ta rage criminelle. Mais quel trouble soudain s'empare de mes sens ? Mes yeux sont obscurcis par d'affreuses ténèbres, Où suis-je ? Quels objets funèbres ! Ô ciel ! Quels lugubres accents ! Quelle ombre !... Ah ! Charmante princesse, Je vous revois ? Dieux, quel bonheur ! Ciel ! Quel nuage épais la dérobe à mes yeux ? Peuples cruels de ces royaumes sombres, Impitoyables ombres, Pourquoi m'arrachez-vous un bien si précieux ? Un calme heureux succède à mes transports, La raison revient dans mon âme ; Je reconnais enfin ce barbare séjour, Ces lieux où j'ai perdu l'objet de mon amour. Ne tardons plus, cédons à la fureur extrême Que m'inspire un juste transport, Partons et que bientôt ma mort Succède à la douceur de venger ce que j'aime. **** *creator_rousseaujb *book_rousseaujb_jason *style_verse *genre_opera *dist1_rousseaujb_verse_opera_jason *dist2_rousseaujb_verse_opera *id_ORPHEE *date_1696 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_orphee C'est trop garder un timide silence Nos Grecs, si longtemps abusés, Ne souffrent plus qu'avec impatience Cet indigne repos où vous les réduisez. De la riche Toison ils cherchent la conquête; Colchos garde en ses murs ce dépôt précieux Le ciel nous y conduit : leur troupe est toute prête ; Et vous seul retardez ce dessein glorieux. Pour nous engager à vous croire, Cessez de prendre un vain détour Le voile pompeux de la gloire Sert souvent à cacher l'amour. Aux rives de Lemnos une reine charmante A long-temps arrêté vos pas; Et lorsqu'un sort heureux répond à notre attente, La beauté de Médée amuse votre bras. Ah quand la gloire nous appelle Est-il temps de languir dans une amour nouvelle? N'en suspendrez-vous point le cours trop odieux ?a Tant d'illustres guerriers n'ont-ils quitté la Grèce, Que pour venir être en ces lieux Les témoins de votre faiblesse ? Vous soupirez? Tandis qu'en cette cour vous prodiguez vos voeux, Croirai-je qu'Hypsipyle occupe encor votre âme? Je vois paraître la princesse. Fille du Ciel, ô divine Harmonie, Répands ici ta douceur infinie. Tu peux calmer La fureur et la rage, Tu sais charmer Le coeur le plus sauvage. De tes douceurs Quel coeur peut se défendre ? Tes sons flatteurs Forcent tout à se rendre. Fille du Ciel, ô divine Harmonie, Répands ici ta douceur infinie. Monstres terribles, Calmez vos sens, Soyez sensibles À mes accents. Fille du Ciel, ô divine Harmonie, Répands ici ta douceur infinie. Jason, connaissez votre erreur, Embarquons-nous, venez, le temps nous presse. Étouffez une vaine flamme Partons, éloignons-nous de ces funestes bords. **** *creator_rousseaujb *book_rousseaujb_jason *style_verse *genre_opera *dist1_rousseaujb_verse_opera_jason *dist2_rousseaujb_verse_opera *id_HYPSIPILE *date_1696 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_hypsipile Enfin je vous revois et mon âme interdite... Que vois-je ? Et quelle est ma douleur ? Quoi ! Jason me voit et m'évite ! Un noir pressentiment s'empare de mon c?ur ; Ô Neptune ! En ces lieux ne m'auriez-vous conduite Que pour voir de plus près son crime et mon malheur ? Soupçons mal éclaircis, jalouse inquiétude, Ah que vous déchirez mon coeur ! Que ne prouvez-vous mieux sa noire ingratitude, Sans tenir mon âme en langueur! Soupçons mal éclaircis, jalouse inquiétude, Ah ! Que vous déchirez mon coeur ? Si des maux de l'amour l'absence est le plus rude, J'en ai soutenu la rigueur; Mais le mal que je souffre en cette incertitude De tout mon courage est vainqueur : Soupçons mal éclaircis, jalouse inquiétude, Ah ! Que vous déchirez mon c?ur ! Vos jeux ont des charmes pour moi : Mais mon devoir m'engage à voir le Roi, Et mon amour près de Jason m'appelle ; Laissez-moi quitter ce séjour, Les plaisirs les plus doux loin d'un amant fidèle, Sont autant de moments dérobés à l'amour. Tout respire en ces lieux l'innocence et la paix, Tout m'y paraît doux et tranquille ; Mais, hélas ! Il n'est point d'asile Pour les coeurs que l'amour a blessés de ses traits Dans cette illustre cour je vois chacun me rendre Tout ce qu'en mes États j'aurais osé prétendre ; Jason seul à mes yeux prend soin de se cacher. Quoi dans ces lieux Jason serait sensible ! Je croyais qu'à la gloire un héros destiné, Aux plaisirs de l'amour était inaccessible. De mes empressements, Ciel ! Quel triste succès ! Pour lui seul en ces lieux ma tendresse m'appelle, Et je vois l'infidèle Soupirer pour d'autres attraits. Avant qu'un amant nous engage, Ne peut-on s'assurer de sa fidélité ? Faut-il, pour connaître un volage Qu'il en coûte à la liberté ? Non, non ; mon faible coeur n'est plus en ma puissance D'une trop vive ardeur se sent animer ; Contre un ingrat qui nous offense, En vain d'un fier courroux nous voulons nous armer. Jamais l'amour n'a tant de violence, Que lorsqu'on veut ne plus aimer. Je ne puis étouffer une flamme fatale. Mais je sens en mon âme un secret mouvement Qui tourne contre ma rivale, La haine que je dois à ce perfide amant. De quoi me servez-vous contre un ingrat que j'aime, Faible raison, inutile secours ? Puis-je écouter, hélas ! Vos superbes discours, Quand mon coeur révolté s'arme contre moi-même? Faible raison, inutile secours, De quoi me servez-vous contre un ingrat que j'aime ? Cruel, vous savez trop que mon faible courroux Ne saurait vaincre ma tendresse Et vous venez ici jouir de la faiblesse Que vous savez que j'ai pour vous. Ciel que me faites-vous entendre ? Médée est ma rivale ? Et dans ce triste jour C'est elle à qui je viens d'apprendre Mon désespoir et mon amour. Infortunée, hélas! Je n'ai plus d'espérance, Mes maux ne sont plus incertains. Médée, il est trop vrai, cause votre inconstance: Son art, sa beauté, sa puissance, Tout m'assure à la fois du malheur que je crains. Hélas ! Je n'ose l'espérer. Que je crains Médée et ses charmes ! Que vos discours ont de puissance ! C'en est fait, et mon c?ur se rend à vos serments : Heureuse d'avoir pu juger par mes tourments De mon amour et de votre constance. Quel est d'un si grand art l'effet prodigieux ? Ah ! Que je sens d'inquiétude Ne pourrai-je sortir du trouble où je me vois ? Mon amant va combattre en cette solitude, Tout y redouble mon effroi ; Ah ? Que je sens d'inquiétude ! La mort, dans ces funestes lieux, Sous mille horribles traits se présente à mes yeux. Dieux ? S'il faut que Jason périsse, Épargnez-moi l'horreur de le voir expirer ; Si sa mort doit nous séparer. Que mon trépas nous réunisse. Qu'entends-je, malheureuse ! Dieux ! Quelle sanglante victime ! Ciel ! Ô ciel quelle cruauté C'en est donc fait je perds tout l'espoir qui me reste, Dieux cruels, Dieux jaloux, vous êtes satisfaits ! Ô pressentiment trop funeste ! Tu m'avais annoncé la perte que je fais. Mais je puis m'affranchir d'un si cruel supplice, Et ce fer va finir ma vie et mes douleurs. Reçois ce sanglant sacrifice, Chère ombre, cher amant c'est pour toi que je meurs. **** *creator_rousseaujb *book_rousseaujb_jason *style_verse *genre_opera *dist1_rousseaujb_verse_opera_jason *dist2_rousseaujb_verse_opera *id_VENUS *date_1696 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_venus Vénus s'intéresse à ton sort, Garde-toi d'écouter le dangereux transport Où ton coeur s'abandonne. L'Amour veut par tes soins être victorieux, Tu dois suivre ce qu'il ordonne, La vertu des mortels est d'obéir aux Dieux. **** *creator_rousseaujb *book_rousseaujb_jason *style_verse *genre_opera *dist1_rousseaujb_verse_opera_jason *dist2_rousseaujb_verse_opera *id_NEPTUNE *date_1696 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_neptune N'accuse plus ton héros d'inconstance. Son coeur t'aime toujours avec sincérité, Sur les rapports trompeurs d'une vaine apparence, Ne doute plus de sa fidélité. Divinités qui régnez sur les ondes, Néréides, Tritons, Dieux soumis à mes lois, Quittez vos retraites profondes, Venez remplir ces lieux du bruit de votre voix ; Et vous, peuples de ce rivage, Par vos jeux et par vos concerts Rendez à cette reine un éclatant hommage ; Jamais Vénus, sortant du sein des mers Ne fit voir à vos yeux un plus riche assemblage De grâces et d'attraits divers. **** *creator_rousseaujb *book_rousseaujb_jason *style_verse *genre_opera *dist1_rousseaujb_verse_opera_jason *dist2_rousseaujb_verse_opera *id_LAMOUR *date_1696 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_lamour L'amour vient terminer votre peine cruelle, Tendres amants, soyez heureux. Disparaissez, monstres affreux; Rentrez dans la nuit éternelle. Venez, charmants plaisirs, changer ces tristes lieux, En des jardins délicieux. Amants, conservez l'espérance Tôt ou tard un heureux moment Est la récompense De votre tourment. Quand après de longues chaînes L'amour comble vos désirs, Le souvenir de vos peines Doit redoubler vos plaisirs. Marquez, aimables jeux, votre réjouissance, Que tout ressente ici l'amour et sa puissance. **** *creator_rousseaujb *book_rousseaujb_jason *style_verse *genre_opera *dist1_rousseaujb_verse_opera_jason *dist2_rousseaujb_verse_opera *id_LASIBYLLE *date_1696 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_lasibylle Cesse de vouloir me contraindre, Ne cherche plus à t'assurer Des malheurs que ton coeur peut craindre, C'est toujours un bien d'espérer, Et les maux ne sont point à plaindre, Tant que l'on peut les ignorer. Vers ces antres inhabitables Vois s'élever aux cieux cet arbre révéré, C'est sur son feuillage sacré Que j'écris du destin les lois irrévocables ; Mais du sage Apollon les ordres éternels Défendent aux coeurs criminels De jouir de cet avantage. Si par quelque noirceur ton coeur est profané, Tu verras dans les airs disperser ce feuillage, De la fureur des vents jouet infortuné. Je vais répondre à ton attente, Mes sens sont agités d'une sainte fureur. Le fatal avenir à mes yeux se présente. Dieux ! Quel spectacle plein d'horreur! 1 Tu meurs, ô déplorable amante! Tu t'immoles toi-même à ta vaine terreur ; Et ta rivale triomphante Jouit en paix de ton erreur. Mais quel forfait épouvantable Va cimenter son bonheur odieux ? Tremble, malheureuse coupable, Crains le juste courroux des Dieux.