**** *creator_rousseaup *book_rousseaup_mortdebucephale *style_verse *genre_parodie *dist1_rousseaup_verse_parodie_mortdebucephale *dist2_rousseaup_verse_parodie *id_ALEXANDRE *date_1748 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_alexandre Gardes : qu'on se retire, et qu'on nous laisse ici : Demeurez Aridée, et toi, Philippe aussi. Je me flattais, Amis, qu'au gré de mon envie, Je pourrais à mes lois, voir la terre asservie, Conquérir des États dont je n'ai pas besoin ; Et l'ardeur de courir m'eût entraîné bien loin. Je voulais, hors du monde, étendant ma fortune, Attacher à mon char le Soleil et la Lune ; Mais d'un si beau dessein les Dieux semblent jaloux ; Je croyais, vainement qu'ils combattaient pour nous : Et quoi que m'annonçât ma première campagne, Nous faisions, vous et moi, des châteaux en Espagne. Ô combat trop sanglant ! ô victoire funeste ! Je perds tout, chers Amis, Bucéphale est blessé. Lui-même. Je viens vous informer de ce péril extrême. Une balle a percé son généreux poitrail ; Son sang... La voix me manque à ce récit funeste ; Sa vue et mes soupirs vous diront mieux le reste. Sans perdre ici le temps est de vagues discours, Allez le voir ; son mal a besoin de secours. Qu'elle vienne ; malgré ma haine et mes douleurs, Je ne rebute pas de tels Ambassadeurs. De Bucéphale on a percé le flanc, Et l'on vient me parler de Paix et d'Hymenée ? Périsse la Scythie. Vous ne l'avez pas vu. Il est d'un sang illustre, ou digne au moins d'en être. Que ne lui dois-je point ; jamais une Maîtresse Ne serait si fidèle, et n'eut tant de tendresse : Vous le verriez sitôt que je veux le monter, Baisser sa large croupe et me la présenter ; Indomptable à tout autre, et pour moi si docile, Qu'avec lui l'éperon me devient inutile. C'est ce qu'il faudra voir. Auprès de lui je cours ; à regret je vous quitte : Mais nous pourrons conclure après cette visite. Grâces au ciel, son mal chaque instant diminue, Et ses douleurs semblaient se calmer à ma vue. Mais un soin différent me donne du souci ; La Princesse, Seigneur, est-elle encor ici ! Se plaît-elle en ces lieux ! Que vous a-t-elle dit de mon air conquérant ? Pensez-vous qu'un héros peut lui céder sans honte ! Mais les Dieux dont la terre encense les Autels, Ont tous aimé... Ce mépris pour les Dieux peut vous être fatal. Eh ! Pourquoi renverser ainsi l'ordre des temps ! Je vis avant Néron. Je ne puis le cacher, pour elle je soupire. Car enfin il faut bien soupirer malgré soi ; Le Poète aux Héros en impose la loi. Que faire sur la scène ! Oserais-je y paraître ! Un Héros doit-il moins agir en petit-maître ! J'approuve vos raisons, une prompte prudence, Me jette de l'amour, au sein de l'inconstance ; J'avais du goût pour elle : Eh bien n'en parlons, plus ; Qu'elle parte ? Vers moi si promptement quel sujet te rappelle ! Que viens-tu m'annoncer ? Bucéphale est-il mort ? Pour le priver du jour, qu'a-t-il donc fait, grands Dieux ? Si vous voulez punir, lancez votre tonnerre, Sur tant de désoeuvrés, vil fardeau de la terre, Sur le froid nouvelliste, et le mauvais plaisant, L'avide parasite, et le sot complaisant ; Mais hélas, mon Coursier, votre plus bel ouvrage, Boit-il mourir, grands Dieux, à la fleur de son âge ! As-tu donc de ton art épuisé les ressorts ? Ciel ! Je vais donc bientôt regretter Bucéphale. C'en est fait, il est mort, ce discours me l'annonce ; À conserver ses jours, mon médecin renonce. Cette réflexion me paraît bien tardive ! Philippe, je prétends que Bucéphale vive. Je suis Roi, Je dois avoir les Dieux et le Destin pour moi. Si le Ciel ne protège un Prince qu'il élève Il vaudrait presque autant être Roi de la fève. Des jours de mon Courues, si les Dieux sont jaloux, Ne pouvant rien contre eux, je ne m'en prends qu'à vous. Allez, et redoutez ma haine. Viens-tu faire un faire pour redoubler ma peine. À ses genoux ! Ô ciel ! Avait-il bonne grâce ? Que n'étais-je présent ! Il ne l'eût point osé. Est-il mort ! Rien de plus ! La Princesse sans doute est entrée en fureur ! Je vois ce qui retient un courroux légitime : Dieux, ne savez-vous pas comme on punit un crime. Un soufflet. Par combien de combats mon coeur est agité ! Que de transports divers, de douleur, de colère ! Ma gloire, mon amour, mon cheval et mon frère ! II faut mettre ordre à tout ; arrêtez mon rival : Je vais voir dans l'instant Statire et mon cheval. Si j'avais épousé cette aimable étrangère, L'ingrat aurait brûlé d'une flamme adultère : C'est donc à quoi tendaient ses perfides avis : Insensé que j'étais, je les aurais suivis. Il condamnait en moi mon amour pour Statire ; Et j'apprends que pour elle, en secret il soupire : Voilà de mes gourmands, qui, flattés d'un ragoût, Pour le dévorer seuls, en donnent du dégoût. Tu reviens ! La douleur dans tes regards est peinte. Que viens-tu m'annoncer ! Explique-toi sans feinte. Poursuis. Eh bien quoi ! Je tremble, explique-toi. Qu'est-ce-à-dire ! Avec ordre du moins conte moi mes malheurs. Je la perds au moment où je voulais l'aimer. L'approche de la mort lui troublait la raison. Mais s'il s'était vengé de quelque trahison ? Sa blessure tantôt n'était pas dangereuse, Et d'un trépas si prompt la cause est bien douteuse. Quoi qu'il en soit ami, ne m'abandonne pas ; Et des derniers devoirs, honorons son trépas: La douleur près de lui m'empêche de me rendre, Je te laisse le soin de recueillir sa cendre. C'est toi ? À ton dernier soupir, ce n'était pas la peine Pour m'insulter ainsi de venir fur la scène. Il n'a pas tort, mais moi je veux avoir raison. Sais-tu qu'un charbonnier est maître en sa maison, Et que de mes sujets à mon gré je dispose ? Si j'ai voulu leur mort, je l'ai fait et pour cause. Nous autres immortels, nous tenons dans nos mains Les méprisables jours des fragiles humains,, Quels poumons : Ah ! C'est trop respecter sa douleur, Malheureux apprends donc à craindre ma fureur : Quelle invisible main arrête ma vengeance ? Mon bras n'est-il armé que pour la contenance. Que dis-tu ? Il garde son secret ! Ô comble de douleurs ! Philippe... Quel soupçon ? Que voulait-il me dire ? Pour me faire enrager, je pense qu'il expire. Le fidèle Philippe aurait manqué de foi. Et malgré mes bienfaits, s'armerait contre moi ! Ma crainte, je le vois, n'est que trop légitime, Tantôt son embarras marquait assez son crime. Je l'aperçois ; grands Dieux, à ce noble maintien, Quel oeil ne serait pas trompé comme le mien, Faut-il que sur le front d'un assassin chimiste ; Règne la gravité d'un docteur Galéniste. Et ne devrait-on pas à des traits éclatants, Reconnaître le coeur de tous ces charlatans. Oses-tu bien encor soutenir la lumière, Reste impur des docteurs qu'a diffamés Molière ! Après que ta fureur a tué mon cheval, Tu me tâtes le pouls et demandes mon mal : Fuis, cruel, et prend garde, âme basse et commune, De voir dans mes états le lever de la Lune. Qui moi ! Te rappeler ! Ah monstre plein d'horreur, Quelle ivresse t'engage à braver ma fureur ! Que de ton corps la tête à cent pas de distance, Apprenne à l'Univers ton crime et ma vengeance. Ô Ciel ! Mon pistolet vient de rater tout net. Auriez-vous donc, grands Dieux, vidé le bassinet ! Le bonnet de Docteur rendra-t-il légitimes, Tant de meurtres fameux, qui pour nous font des crimes ! Quelle horrible vapeur se répand dans les airs ! Sous mes pas chancelants des gouffres entrouverts, Conduisent mes regards sur la rive infernale... Quel spectacle, grands Dieux... l'ombre de Bucéphale... Eh quoi... pour augmenter l'horreur de ses tourments, En sa présence on lit tous les nouveaux Romans. Que vois-je... dans le Styx son ombre intimidée, Cherche à se dérober aux regards d'Aridée, Le perfide la fuit... Arrête, malheureux, Ou je vais chez les Morts, pour te prendre aux cheveux. Laisse gémir en paix une ombre que j'adore, Ô rage ! ô désespoir ! Il l'a poursuit encore... Passerai-je mon temps en regrets superflus ! Je succombe et me meurs d'un cholera-morbus. **** *creator_rousseaup *book_rousseaup_mortdebucephale *style_verse *genre_parodie *dist1_rousseaup_verse_parodie_mortdebucephale *dist2_rousseaup_verse_parodie *id_ARIDEE *date_1748 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_aridee En Espagne, Seigneur ! Qui l'aurait pû penser ! Quand Darius vaincu vous permet d'avancer, Et que des Sidniens vous voyez fuir le reste ... Quoi ! De quelques remords, Alexandre pressé... Ciel, qu'entends-je ! Du camp de Darius, Une jeune Princesse Demande à vous parler. Son air seul interesse. Madame, avez vous vu le superbe Alexandres Du pouvoir de vos yeux, a-t-il pu se défendre ! Consent-il... Le cruel ! Qu'avec lui j'ai peu de ressemblance ! Le même sang, dit-on, nous donna la naissance ; Mais jamais nul cheval ne saurait partager, Ce coeur que dans vos fers vous venez d'engager. Aux barrières du Camp, dès que je vous ai vue, D'un tendre empressement mon âme s'est émue ; À travers les soldats vous ouvrant un chemin Je ma suis présenté pour vous donner la main : Hélas, je l'ai sentie à l'instant embrasée ; Sans doute que la vôtre était électrisée. Ce feu qui tout à coup s'est glissé dans mes sens, Excite dans mon coeur... Non, le vin est tiré, Madame, il le faut boire. Moi qui devant le sexe humble, respectueux Sur les filles jamais n'osai lever les yeux : Craignant jusqu'aux effets d'une ardeur innocente Ne leur parlai , jamais que d'une voix tremblante, Aujourd'hui par l'amour tout à coup excité, Je passe de la crainte à la témérité ; Et mon coeur avec vous veut se mettre à son aise. Vous en offensez-vous ! Facile à me troubler, Votre air impérieux m'a d'abord fait trembler : Mais pires de vous bientôt mon âme apprivoisée, S'est promise en secret une conquête aisée : Et vous avez pris soin de me faire entrevoir Que le Sexe n'est pas aussi diable que noir. Qui ! Ô Ciel! Vous savez à la Cour jusqu'où va son crédit ; Et combien le Roi l'aime. Pour vous plaire, faut-il devenir assassin ? Eh quoi !... Philippe ! Quoiqu'il m'en coure, il faut calmer votre colère : Oui, Philippe paraît, je sais ce qu'il faut faire. Conçois-tu ma tristesse ; C'est à toi de calmer le trouble qui me presse ; Tu fus dans tous les temps mon plus fidèle ami. Avec nous, cher Philippe ! Ah ! peux-tu le penser ! Alexandre jamais sut-il récompenser ! En vain pour nous ouvrir le chemin de l'Asie, Tant d'illustres Guerriers ont immolé leur vie ; Le sang qu'ils ont versé, n'est pour lui d'aucun prix ; Et Bucéphale seul occupe ses esprits : Il ne le quitte pas, l'honore de ses larmes, Et sur tous nos périls, tranquille, et sans alarmes, II néglige pour lui, les devoirs qui font dûs Aux mânes des Héros , que nous avons perdus. Pour Bucéphale seul son âme est attendrie ; Il quitte son Palais pour voir son écurie. Pour nos braves Guerriers, quel indigne rival ? Tout lui paraît suspect excepté son cheval. N'est-tu pas indigné de cette préférence ? Il est temps, cher ami, que ce respect finisse. Il faut sur ce cheval nous faire à tous justice ; Philippe, oseras-tu par un illustre effort... Sa mort. C'est pour rendre son maître à fa Cour, à l'Empire. Le crime est apparent, le service est réel. Qu'il meure. Un meurtre nécessaire au repos des États, N'est pas mis, quel qu'il soit, au rang des attentats : Philippe, ce service est pour nous d'importance, Souvent un peu de sang lave une grande offense. Ou plutôt le servir. La haine de la Cour par-là doit s'assouvir. Tout est à craindre, et ton zèle balance ! Je ne m'attendais pas à tant de résistance. L'ongle de la vengeance a tracé ton devoir, Et tu n'écartes pas les maux qu'on sait prévoir ! Ah je ne vois que trop, qu'affectant un faux zèle, Tu voudrais te parer du nom d'ami fidèle ; La feinte est trop grossière ; en ce siècle indigent, Les Médecins n'ont plus d'autre ami que l'argent. Oui, je sais qu'en marchant dans cette route obscure, Votre art impunément frappe d'une main sûre : Mais ces détours sont lents et je veux qu'aujourd'hui, Un trépas imprévu nous délivre de lui. Fais-lui manger la mort dans un boisseau d'avoine. Indigne Médecin, je vous connoissais mal. Eh ! S'il ne m'eût fallu qu'une mort ordinaire, N'était-ce pas assez de votre ministère ? Par un chemin frayé marchant tout uniment ; Votre art jusqu'au tombeau l'eût conduit lentement, Mais quoi ! Si le poison vous cause tant d'alarmes, Pour nous en délivrer, employez d'autres armes, Qu'un suppôt de votre art au carnage aguerri, Lui déchire le flanc d'un coup de bistouri. Je vois tous tes détours ; mes soins font superflus ; Mais si dès ce soir même Alexandre n'est plus, N'en accuse que toi. Du cheval ou du maître on demande la vie ; Choisis. Elle vous attendait dans la tente voisine. Votre accueil la chagrine. Qu'avec deux pieds de plus, vous seriez bien plus grand. Il cesserait de l'être, et quand l'amour nous dompte, Il nous met de niveau du reste des Mortels. Seigneur, suivre de tels exemples, N'est pas le vrai moyen de mériter des Temples. J'en dirais plus de bien s'ils faisaient moins de mal, Néron à votre avis traita-t-il bien sa mère ! Jupiter cependant a fait pis à son père. Seigneur, je vous entends : Votre coeur de ces Dieux vous fait l'apologie, Et vous vous attaquez à la Chronologie ; Un ami trop sincère importune vos yeux, Eh bien, pour mériter un rang parmi les Dieux : Imitez-les, soyez l'esclave de Statire, Qu'y faire ! S'agiter et se battre le flanc, Respirer la vengeance, et répandre du sang? Pester contre les Dieux, s'enfler outre mesure, Et pour paraître grand, sortir de la nature. À d'éternels dangers nous sommes-nous offerts Pour venir dans ces lieux vous voir porter des fers ! Ne valait-il pas mieux dans votre Macédoine, Vivre comme un Bourgeois de votre patrimoine, Chanter, boire, dormir, et voir faire des noeuds, Vous seriez plus tranquille, et nous moins malheureux. Mes soins n'ont pas été déçus. Pour la dernière fois vous voyez devant vous, Un Héros qui devait tomber sous d'autres coups ; J'ai tué Bucéphale, il me rend la pareille. Moi-même ; autant vous en pend à l'oreille. Par lui de vos exploits, le lustre était terni : Vous nous le préfériez, et je l'en ai puni. Plus offensée encor de cette préférence, Statire a dans mon coeur fait passer sa vengeance; Il m'en coûterait trop pour te désabuser ; Un coeur tel que le mien, ne sait point s'excuser. La Princesse à mes coups a marqué la victime, J'ai frappé, mais gratis et voilà tout mon crime, J'en fuis assez puni par un sort rigoureux, Je me venge en mourant, c'est tout ce que je veux. C'est un droit aux Héros acquis depuis longtemps : Je vais te retracer tous tes emportements, Et par un long discours terminant ma carrière, Quand je t'aurai tout dit, je quitte la lumière. Prête sans t'émouvoir, l'oreille à ce discours, D'aucun mot, d'aucun cri, n'en interrompt le cours. Où sont tous ces Guerriers, l'honneur de la Patrie ! En est-il échappé quelqu'un à ta furie ! L'Inceste, Philotas, Parmenion, Clitus, Le sage Asclepidor, le fier Amphoterus, Ces Guerriers que tu vis au fort de la tempête, Offrir leurs boucliers réunis sur ta tête ; Sanglants, percés de coups, te couvrir de leurs corps, Et pour te faire vivre affronter mille morts. Quel prix ont-ils reçu pour ces fameux services ! L'un sur de vains soupçons, périt dans les supplices, L'autre a vu tout son sang au milieu d'un festin, Ce sang qu'il te vouait, répandu par ta main. Dans le piège cruel, que tu lui faisAis tendre, Parmenion mourut, sans qu'on daignât l'entendre ; Lui qui, poux te servir, devenant assassin , De Philotas lui-même, avait percé le sein. Ainsi de tes fureurs, instruments, ou victimes, Ils se perdaient l'un l'autre, et consommaient tes crimes. Qu'avaient fait ces Guerriers pour t'animer contre eux ! Je vois tous leurs forfaits ; ils étaient vertueux. Pour être en sûreté dans cette cour profane, Pour te plaire, il faut être un autre Narbasane, Trahir honteusement son honneur et sa foi, Te livrer sa Patrie, assassiner son Roi, Insulter les Bourgeois, jouer dans les casernes Se battre avec le guet, et casser des lanternes. D'un ridicule orgueil cesse d'enfler ton âme : Ta mère Olimpia fut une honnête femme ; Et quand au fond du coeur elle l'eût moins été Sa laideur répondait de fa fidélité. Monstre, tu voudrais donc avoir un Dieu pour père, Aux dépens de l'honneur de ta défunte mère ! Fils ingrat, tu feras une mauvaise fin. Dans ta Cour, après moi, je laisse un assassin ; Jusques dans le tombeau je vais porter ma haine. Si la force servait la fureur qui m'entraîne, L'on me verrait bientôt libre de tous remords M'abreuver de ton sang, et mutiler ton corps. C'est alors que ma haine, à moitié satisfaite, Lirait avec plaisir ta mort dans la gazette. Eh qui peut t'arrêter dans ton cruel dessein ! Assouvis ta fureur ; frappe, voilà mon sein : Tu calmeras ainsi ma haine opiniâtre : Trappe donc, si tu veux faire un coup de théâtre. Mais Philippe bientôt... Je me meurs. **** *creator_rousseaup *book_rousseaup_mortdebucephale *style_verse *genre_parodie *dist1_rousseaup_verse_parodie_mortdebucephale *dist2_rousseaup_verse_parodie *id_STATIRE *date_1748 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_statire Ne vous étonnez point, Seigneur, qu'on m'ait choisie ; Pour traiter avec vous du destin de l'Asie ; Mon Père a ses raisons ; il sait que d'un procès Deux beaux yeux quelquefois assurent le succès : Pour moi, dans l'âge heureux où l'on brave une Armée, J'ai traversé ce camp sans en être alarmée ; Et j'ose me flatter que ce n'est pas en vain, Que je viens vous offrir la paix avec ma main. D'ailleurs d'une beauté languissante et flétrie, Je ne viens point vouer le reste à ma Patrie ; Je vaux mieux que la guerre, et sans verser de sang On peut... Interdite, étonnée, Seigneur, je l'avouerai, je n'avais pas prévu Qu'un cheval dût ainsi.... Il est vrai, je n'ai pas l'honneur de le connaître. De ma beauté peut-être est-ce trop présumer ; Mais comme lui, Seigneur, je puis me faire aimer. On pourrait l'imiter en faisant son devoir, Et ma docilité... Ah ! Qu'un accueil si froid me le rend odieux ! Moi qui présumais tant du pouvoir de mes yeux,. Un cheval m'a vaincue. En quel siècle nous sommes ! Voilà notre pouvoir sur les esprits des hommes : Fille d'un Roi fameux, et pour dire encore plus, Jeune et belle, est-ce à moi d'essuyer des refus. Il n'a pas le temps de m'écouter, Et pour voir son cheval, il vient de me quitter. Seigneur, je vous entends : Gardez-vous d'achever, vous alarmez ma gloire. Vous voulez donc traiter l'amour à la Française ! Si vous voulez pour vous que mon coeur s'attendrisse Il faut que par vos soins mon ennemi périsse. Bucéphale. Vous êtes interdit ! Ah ! C'est ce qui m'offense ! Je ne veux plus sur moi qu'il ait la préférence. Pour le tuer, gagnez son médecin. J'entrevois votre poltronnerie ; Eh bien, Seigneur, je vais moi-même à l'écurie, Là, de mon ennemi je saurai m'approcher ; Je percerai ce coeur où vous n'osez toucher, Et mes sanglantes mains sur moi-même tournées Sauront du même fer, joindre nos destinées ; Et tout cheval qu'il est il me sera plus doux De mourir avec lui que de vivre avec vous. J'entrevois le bonheur auquel vous prétendez, Et je vous permettrai, Seigneur... vous m'entendez, Je vous laisse avec lui. **** *creator_rousseaup *book_rousseaup_mortdebucephale *style_verse *genre_parodie *dist1_rousseaup_verse_parodie_mortdebucephale *dist2_rousseaup_verse_parodie *id_EPHESTION *date_1748 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_ephestion Je dois vous faire part d'un coup inopiné, Dont comme moi, Seigneur, vous serez étonné. Passant près de la tente où reposait Statire, J'entends quelqu'un qui gronde, et quelqu'un qui soupire ; Je m'arrête à l'éclat d'un éventail cassé. Dans le fond de mon coeur tout mon sang s'est glacé. Et soudain on s'écrie, arrêtez, téméraire Et respectez en moi l'amour de votre frère. J'entre, je vois Statire ardente de courroux ; Le Prince, votre frère était à ses genoux. Dans ses yeux éclataient, et l'amour, et l'audace. « Quoi ( disait-il ) pour vous, quand je m'expose à tout, De votre cruauté je ne viens pas à bout ? Depuis un jour entier que je cherche à vous plaire, Vous résistez encor ! On n'est plus si sévère... » Elle ne répond pas ; il devient furieux : Alors, sans respecter les hommes ni les Dieux, II se lève, s'élance, et sa main criminelle, A déchiré, Seigneur, une aune de dentelle. En vain à ses transports on se fût opposé. Mais le Ciel qui toujours protège l'innocence, De Statire aussitôt embrassant la défense A voulu... j'en frémis... l'horreur éteint ma voix... Aridée... Il s'est piqué les doigts. C'est beaucoup dans le si7cle où nous sommes, Où tout semble permis à L4audace des hommes. Pour marquer du dépit, elle avait trop de coeur. Les Dieux ont mesuré la vengeance au forfait. Que pouvait-il de plus recevoir ! Quand l'amour fait trop loin pousser une aventure, L'amant ne reçoit plus la moindre égratignure ; Après le premier pas, il n'est plus arrêté. Seigneur... Statire... Aridée... Bucéphale... Ô douleur.... Les flots, un coup de pied, le trépas... Vous perdez Bucéphale, Aridée et Statire. Le trouble convient mieux dans les grandes douleurs. Piquée au fond du coeur de se voir dédaignée, Statire de ce camp est sortie indignée ; En vain pour l'arrêter vos soldats ont couru : Sur les bords du Cidnus sitôt qu'elle a paru, Pans les flots étonnés se faisant un passage À l'aide du panier s'est sauvée à la nage. Tandis qu'elle passait les flots sans s'alarmer, Bucéphale touchait à son heure dernière ; Aridée est venu lui fermer la paupière. Ce superbe coursier le voyant avancer, Dans les convulsions dont il se sent presser, Hélas d'un coup de pied donné d'une main sûre, Lui fait dans le diaphragme une large blessure. **** *creator_rousseaup *book_rousseaup_mortdebucephale *style_verse *genre_parodie *dist1_rousseaup_verse_parodie_mortdebucephale *dist2_rousseaup_verse_parodie *id_PHILIPPE *date_1748 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_philippe Bucéphale, grands dieux ! Daignez de ce malheur nous faire le détail. Je ne sais pas, Seigneur, m'attacher à demi. Parlez. Mais quoi ! Tandis qu'enchaînant la victoire, Alexandre avec vous vient partager sa gloire... Oui, comme vous, Seigneur, sa conduite m'offense ; Mais malgré mon dépit, la crainte et le respect Sur tout ce que je vois, me rendent circonspect. De mon zèle ? Seigneur, qu'exigez vous ! La mort de Bucéphale ! Ô ciel, qu'osez-vous dire ! Ah ! Pourrai-je, Seigneur, sans être criminel... Mais enfin attenter à fa vie C'est insulter le Roi jusqu'eN son écurie ! C'est trahir Alexandre. Mais quoi !... Je vous obéirais, Seigneur, sans nul salaire ; Mais vous en croyez trop une aveugle colère : Souvent pour se porter aux plus noirs fureurs, De la vertu le vice emprunte les couleurs. Vos discours sur mon coeur ont un puissant empire. Dans ce même moment ( puisqu'il faut tout vous dire ) Je tremble pour ma vie ; et dans son médecin, Le Roi peut aisément découvrir l'assassin : Mais donnez-moi du temps afin de le détruire : Pas à pas au tombeau je saurai le conduire ; Notre art pour de tels coups, n'est jamais en défaut ; S'il a besoin du froid, j'ordonnerai le chaud : De son sang par degrés j'épuiserai la source ; Des plus forts purgatifs, j'emploierai la ressource, Et si de tels moyens ne m'ont pas réussi, Je vais tout ordonner, jusqu'aux eaux de Passy. Le poison ! Que dira de moi la Macédoine 1 Philippe empoisonneur ! Et de qui ? D'un cheval ? Quel est l'homme , Seigneur, dont la main intrépide, Oserait se prêter à ce chevalicide ! Ciel ! Quelle perfidie ! Hasardons tout dans un pressant besoin, Je vais empoisonner une botte de foin. Ô funeste nouvelle ! Il attend vos adieux. J'ai fait pour le sauver d'inutiles efforts. On pourrait, si son mal avait quelqu'intervalle, Saisir l'occasion, et de son râtelier, L'envoyer del'Asie en poste à Montpellier. Je n'y renonce pas, mais prendrai-je sur moi Le soin de guérir seul le cheval de mon Roi ! Mais si le Ciel s'oppose à vos voeux. Eh quoi ! Seigneur... Ah que vois-je, Seigneur, quel funeste nuage, A pu troubler ainsi votre auguste visage Oubliez Bucéphale, et ne songez qu'à vous ; Permettez-moi du moins de vous tâter le pouls. Vous calmerez, Seigneur, cet injuste courroux ; Quand on se porte bien, on se moque de nous : Mais chacun a son tour : plus timide qu'un lièvre, Vous me rappellerez au moindre accès de fièvre.