**** *creator_scarron *book_scarron_ecolierdesalamanque *style_verse *genre_comedy *dist1_scarron_verse_comedy_ecolierdesalamanque *dist2_scarron_verse_comedy *id_LECOMTE *date_1654 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_lecomte Vous ne voulez donc pas, Madame, que je sorte ? Ouvre-moi, Béatris. Béatrix. Madame, est-ce pour rire Que vous voulez ainsi m'enfermer malgré moi ? M'éprouver ? Et pourquoi ? S'il ne tient qu'à cela, vous serez contentée. Hé bien, Madame. Madame, je me tais : mais vous cherchez querelle. Je vois bien où vous voulez venir, Madame : je vois bien où tend votre harangue, Sans tant vous fatiguer et l'esprit et la langue Sachez en peu de mots ce que j'ai sur le cour, Il n'est rien de plus vrai, que votre oil mon vainqueur, Est et sera toujours ma Déité visible ; Mais, Madame, il est vrai, qu'il m'est autant possible De ne vous aimer plus, moi qui vous aime tant ? Que d'être votre époux, et demeurer constant. J'adore une Maîtresse et j'abhorre une Femme, Je n'ai plus rien à dire après cela, Madame. Ha ! Madame. Et que me voulez-vous ? Qui moi ? Me cacher ? Dieu m'en garde. Je pourrais bien sauter de la fenêtre en bas. Madame, où faut-il qu'on se cache ? C'est un homme enfermé, Qui n'est pas sans courage, et n'est pas mal armé. À telle question, Je ne répondrais qu'avec un coup d'épée, Si tu pouvais venger ta vieillesse frappée : Mais ta main est sans arme, et pour des cheveux gris Je n'ai point de colère, et n'ai que du mépris. Je t'attends, va t'armer, et puis reviens mourir. Ôtez ce nom d'époux de votre souvenir. J'ai promis, il est vrai ; mais sans vouloir tenir. À toi, de te combattre, à ta fille, ma main. On joint malaisément sous les lois conjugales Ceux dont les qualités se trouvent inégales. Tes injures, tes cris, ne peuvent m'irriter, Je veux un ennemi qui puisse résister. Je ne veux point de femme, et quand j'en voudrais une, J'en choisirais une autre, et d'une autre fortune. Pour me la faire prendre, il fallait me prier, Non pas me quereller, non pas m'injurier. Je ne fais rien par force, et fais tout par prière ; Aux humbles je suis doux ; aux fiers, j'ai l'âme fière. Et puis vos déplaisirs me seront imputés : Prenez, prenez-vous en à vos témérités. J'ai dit sur le sujet tout ce que je veux dire ; Pensez-y mûrement, et que je me retire. La bravoure sied mal à tout homme grison. Je m'en vais de ce pas songer à ma défense. Ne vous fâchez pas tant, Pour remède à vos maux, j'ai de l'argent comptant. Adieu bel Ange en pleurs. Et vous vieillard colère, Ne vous pressez pas tant de devenir beau-père. Cinq contre un ! Qui pourrait résister ! Levez-vous, Cavalier. Retirez-vous, ma Soeur, et que seul on me laisse, Cavalier, approchez, on ne vous fera rien Tant que j'aurai de vie. Ne me louez pas tant de ce que j'ai dû faire, Songeons à vous sauver, comme au plus nécessaire. Entrez dedans ma chambre, et vous fiez en moi, Que je vous garderai ma parole et ma foi. De vous servir d'asile. Et l'assassin ? L'avis est téméraire, et même peu croyable. Après la mort d'un homme, il n'est pas vraisemblable Que celui qui le tue, aille se perdre au port, Et chercher un asile en la maison du mort. Au fort de la Rumeur, j'ai fait fermer ma Porte, Et je n'ai pas permis qu'aucun de mes gens sorte. Je ne suis pas sorti moi-même, et l'on n'a pu Cacher quelqu'un chez moi, que je ne l'aie su. Faites ce qu'il faut faire en un pareil malheur, Et pardonnez, Messieurs, à ma juste douleur, Si je ne me tiens pas avec vous davantage. Ô désespoir ! Ô rage ! Quel parti dois-je prendre en l'état où je suis ? Je ne me puis venger, lorsque plus je le puis. Je dois à ma parole, et je dois à mon frère, Je dois venger sa mort, si j'en crois ma colère, Je dois la pardonner, si je garde ma foi. Hélas, qui fut jamais plus empêché que moi ? Cavalier, savez-vous qui je suis ? Ne vous étais-je point connu ? Saviez-vous Le nom du malheureux accablé sous vos coups ? Vous ne vous trompez pas le mort était mon frère Et moi le Comte. Vous tuer ! Je saurai choisir un autre temps Pour me venger de vous comme je le prétends. Oui ; mais il faut devant que je vous satisfasse, Et vous ayant promis de vous sauver chez moi, Contre moi-même il faut que je garde ma foi, Je saurai bien ailleurs venger la mort d'un frère, Et vous sacrifier à ma juste colère. Comme un homme d'honneur, je vous sauve la vie, Mais puisque vous l'avez à mon frère ravie, Je vous ferai périr comme un homme offensé. Je vous y forcerai. Avez-vous peur de moi ? On n'en saurait trop faire à qui manque de cour. Si bien que... C'est trop s'entreparler n'étant pas bien ensemble ; Le jardin est ouvert, sortez si bon vous semble : Mais qui frappe à ma porte à la pointe du jour ; Ha c'est toi, Béatris. Béatris je ferai ce que veut ma Maîtresse. Sitôt ? Vous n'êtes pas encore au lit, ma chère sour ? Non plus que vous ma sour je n'en ai point d'envie. Je dois venger un frère au péril de ma vie. Un ami depuis peu, m'a de la Cour écrit, Que celui que j'avais offensé dans Madrid Afin de se venger est parti pour Tolède. Une Dame que j'aime, et de qui je possède Les inclinations, et dont pour un mépris, Le cour peut contre moi de colère être épris M'écrit, qu'accompagné de quelque ami fidèle, J'aille, sans y manquer, passer la nuit chez elle, Ma passion m'y porte, et d'un autre côté, J'ai depuis quelques jours son esprit irrité. Non, c'est par une offense. Je ne vous saurais mieux expliquer mon erreur, Qu'en vous disant que j'aime, et même avec fureur. Sur vos conseils, ma sour, ma passion l'emporte : Mais encore une fois on refrappe à la porte. Holà, qu'on ouvre. Ô Dieux ! Je vois mon ennemi. Je vous croyais bien loin. De vous revoir encore mon âme est étonnée, Et vous tenez fort mal la parole donnée, De me venir braver, au lieu de me fuir. Ôtez-vous Cassandre. Fermez si vous voulez. Que voulez-vous encor ? Parlez. Mais parlez vite. Don Pedre on m'offense en l'honneur, L'ennemi puissant qui m'outrage, Se fie en sa puissance, et méprise mon âge. Viens lui montrer que mon fils a du cour. Oui, je ne serai pas généreux à demi, Je vous veux obliger ennemi comme ami. Allez, allez venger un père qu'on offense : Si je les acceptais, ce serait vous trahir : Constant à vous servir, constant à vous haïr, Vous n'aurez pas plutôt vengé l'affront d'un père Que je prétends sur vous venger la mort d'un frère ; Mais parce qu'étant pris vous êtes en danger, Et qu'ainsi dessus vous je ne me puis venger, Remettez à mon bras ce qu'on demande au vôtre, Vous savez que le mien vaut bien celui d'un autre. Où loge votre père ? Apprenez-moi son nom, Et je vais de ce pas rétablir son renom, Et quand j'aurai pour vous satisfait votre père, Je reviendrai sur vous assouvir ma colère. Que voulez-vous donc faire ? C'est bien fait jusqu'à tant que j'en puisse autant faire, Ma maison vous fournit d'asile salutaire : Entrez donc dans ma chambre, et je vais cependant M'assurer d'un ami fidèle et confident : Une assignation qu'à la nuit on me donne, Et que non sans sujet de fraude je soupçonne, M'oblige à me servir de ces précautions. Et pourquoi ? Je vous croyais plein d'honneur, et de peur incapable, Et c'est par un motif purement pitoyable, Que je vous viens d'offrir de vous tenir caché Dans ma chambre, où jamais vous ne seriez cherché. Ainsi je tiens par là votre vie assurée, Et ma vengeance ainsi n'est qu'un peu différée. Votre valeur me charme, oui venez, je vous aime Quoique ennemi mortel, et nous serons amis, Si par les lois d'honneur il nous était permis. Éteignez le flambeau : Un ami qui me suit ne veut pas qu'on le voie. Je n'en aurai pas moins. Je vous ferai passer une mauvaise nuit. Vous avez de l'honneur. Je n'attendais pas moins d'une âme aussi bien faite. Madame, ouvrez la porte, ou je la mets à bas. Don Pedre à vos côtés je viens vaincre, ou mourir. Il le nomme son fils ! De te trahir Don Pedre, il m'eût été facile : Quand chez moi contre moi je te servis d'asile : Et chez toi cependant, entre ton Père et moi, Je te vois hésiter comme un homme sans foi ? Écoute-moi Don Pedre ; et toi vieillard, demeure. Je sais donner la vie, et la défendre aussi, Et mon bras seul encor peut me tirer d'ici : Mais du père et du fils, quand la fureur unie Aurait versé mon sang, et ma trame finie, Indignes ennemis, pouvez-vous empêcher, Qu'on ne vous puisse un jour justement reprocher, Qu'un fils peu généreux, sans moi serait sans vie, Qu'un Père, dont ma perte est la joie, et l'envie, Sans moi se trouverait sans fils, et sans support, Et que seul contre deux, j'ai disputé ma mort. Pouvez-vous effacer une si noire tache ? Pouvez-vous empêcher que l'Espagne ne sache. Que j'ai fait pour le fils, bien plus que je n'ai dû : Enfin, qu'il me doit tout, et ne m'a rien rendu. Venez après cela, venez, et fils, et père, Venez d'un bienfaiteur, éprouver la colère. Tout à l'heure Gagnez vite la rue, et delà ma demeure. La chose gît en fait. Où te faut-il attendre ? Je n'attends pas longtemps. Ma visite imprévue Vous surprend. Cessez d'expliquer mal ce qui vous est caché. Vous sortirez demain n'ayant point de partie, Et nous nous chercherons après votre sortie. Moi, que vous blâmez tant. C'est moi-même, et qui viens afin que rien n'y manque, D'affermer qu'un des miens vous vit à Salamanque, Le jour que Don Louis fut tué par vos mains. Ces sentiments sont-ils fort bas ? Fort inhumains ? Et savons-nous aussi porter loin la bravoure ? Il m'importerait peu que ce fût à l'instant, Si ce n'est qu'à ma gloire, il est fort important Quand vous serez sorti, de vous chercher moi-même. Et cependant il faut par un malheur extrême, Que le reste du jour, quand vous ne me chercheriez Je me cache, où jamais vous ne me trouveriez ? Quelle hâte avez-vous de sortir tout à l'heure ? Attendez à demain. Faisons donc quelque trêve ? Il faut querelle à part, que de mes bras j'embrasse Mon plus cruel ennemi. Vous avez un père fort colère. Je vous l'avoue, adieu, nous verrons peut-être Demain ; mais d'aujourd'hui, je ne saurais paraître Ayant à m'occuper jusqu'au soir. Je vous exempterai Du soin de me chercher. Moi ! M'arrêter ! Comment ? Et pour quoi ? Monsieur, vous avez fait en tout votre devoir, Laissez-nous ici seuls, et qu'on sache à la porte Que je n'empêche point que Don Pedre sorte. Laissez-nous donc ici. Je me croirais par vous comme ressuscité : Car enfin, je me meurs de regret et de honte, De ce qu'on peut penser que je fais peu de compte De garder ma parole, alors que j'ai promis, Moi, qui la sais garder même à mes ennemis. Je me bats aujourd'hui, puisqu'il vous faut tout dire, Et dans une heure ou deux, tout au plus tard expire Le temps que je me dois trouver au rendez-vous : J'y manque, on m'emprisonne, et tout cela pour vous. Mais quel pouvoir, Don Pedre, avez-vous sur la porte. Je ne manquai jamais de parole à personne. Jusques ici nos générosités Ont fait tous nos combats. Si mes voux s'accomplissent Ce sera par la paix. Cavalier, je n'ai pu venir plus promptement : Mais sachons si c'est vous que je dois satisfaire. Je ne sais ce que j'ai pu vous faire ; Car je ne pense pas vous avoir jamais vu. Ha traîtres ! Tant de gens me prendre à l'impourvu. Mais quand bien vous seriez encore davantage, Je vous ferais périr. Suivons-les. Me défendre ! Et de qui ? De vous ! Pourquoi me voulez-vous tant de mal ? Vous m'aviez obligé de me venir défendre, Et mes bienfaits pourraient sans doute vous le rendre. Mais si me défendant vous m'aviez obligé, M'appelant au combat vous m'avez outragé : Sans vouloir pénétrer dans cette extravagance, Je veux bien contre vous me battre à toute outrance : Mais devant, contentez ma curiosité, Et ne vous couvrez plus d'un visage emprunté. Il ne m'importe, ôtez le masque, et qu'on vous voie. Ô Dieu ! C'est vous Don Pedre, et qui l'eût cru ? Mon regret est extrême, D'avoir à me servir de mon bras contre vous. Défends-toi, nous faisons trop languir notre honneur. Il faut mourir, Don Pedre, ou demander la vie. Ta mort est en mes mains. Non, non, de ta valeur la mienne est trop éprise. Je t'attendrai, cours vite, et reviens sans remise Lorsque tu te seras d'un autre fer pourvu. Du corps d'un misérable, Je ne me trouve pas fort bien accompagné, Et je pourrais de meurtre en être soupçonné. Tâchons donc de jeter au fonds de la rivière Ce corps, dont les corbeaux devaient être la bière. Je vois du monde ; il faut l'aller jeter plus bas. Avais-je à le garder. Madame, il n'est pas mort : mais votre esprit s'égare. Console-la ma sour. Je crois qu'un même mal vous fait parler ainsi. Je vous trouve en sa mort toutes deux bien à plaindre. Cependant que ma sour pleurera le trépas De cet aimable mort, qui pourtant ne l'est pas. Madame vous plaît-il. Mais je vois votre Père Qui me vient demander encore votre frère. Si ce mort revenait, il m'épargnerait bien Des contestations qui ne servent de rien. Ce vieillard et ces gens me donnent de la peine. Et qu'ai-je fait, Messieurs ? Si Don Pedre est vivant, si sa sour est trouvée Qu'aurai-je fait encor ? Qu'aurais-je fait du corps ? Et bien vous me tenez, ne contestons donc plus. Et bien ton fils tué, Impétueux vieillard, t'es-t-il restitué ? Don Pedre, l'on m'arrête, Pour vous avoir tué. Don Félix ce n'est pas par tant de violence, Que tu devais tâcher d'avoir mon alliance. Quand tout le monde entier prendrait parti pour toi, La chose dépendrait encor toute de moi. Mis de puissants motifs en ta faveur combattent, Et les fiers sentiments de mon âme s'abattent. Je connais ton mérite, et sais ta qualité, Et tu sauras aussi ma générosité. Je ne refuse plus d'épouser Léonore : Mais d'un frère perdu la douleur dure encore. Triste et couvert de deuil sous l'hymen m'engager, Épouser une sour ? D'un frère se venger ! Sont-ce des actions qui s'accordent ensemble ! Il les faut accorder, si l'hymen nous assemble, Il faut haïr le frère, il faut aimer la sour, Il faut croire l'amour, il faut croire l'honneur, La raison veut aussi que je vous satisfasse. Vous aimez donc ma sour, Don Pedre ? Elle est à vous, et moi je suis à Léonore. Allons chez vous, Monsieur, car un logis funèbre N'admet point d'action si gaie et si célèbre, Que celle dont un jour nos illustres neveux, Si la bonté du Ciel en accord à nos voux, Auront à se vanter chez les races futures, Tant de nos procédés, et de nos aventures, Que de l'état heureux, où l'amour nous a mis, Nous faisons appeler, généreux ennemis. **** *creator_scarron *book_scarron_ecolierdesalamanque *style_verse *genre_comedy *dist1_scarron_verse_comedy_ecolierdesalamanque *dist2_scarron_verse_comedy *id_CASSANDRE *date_1654 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_cassandre Si tu m'aimes, Lisette, avance dans la nuit, Et vois ce qui s'y fait. Sans doute Don Louis avec son point d'honneur, Aura trouvé Don Pedre, et causé la rumeur. Ce n'est qu'un écolier, il est bien vrai Lisette : Mais il a de l'esprit, sa personne est bien faite, Et pourvu que soin feu ne cède point au mien Je lui rendrai commun et mon rang et mon bien. Mais quelqu'un vient à nous. Oui, Lisette, va le mettre au-dessus de ma chambre Où tu sais. Mon frère, qu'avez-vous ? Quelque chose vous presse. Le moyen de dormir après un tel malheur. Est-ce par un oubli ? Prenez vos sûretés, et craignez sa vengeance. Si la femme oubliée est capable de tout, Alors que l'on l'offense, et qu'on la pousse à bout, Elle fait succéder la fureur aux tendresses, On en doit craindre tout, et même ses caresses. L'homme le plus méchant ne la peut égaler, Tant à faire le mal, qu'à le dissimuler : Enfin, c'est une femme, et de plus offensée, Je ne vous saurais mieux expliquer ma pensée. Oui brave Cavalier, sachant qui vous étiez, Sachant votre prison, et que votre noblesse Est riche de mérite, et manque de richesse, Je vous en vient offrir : mais à condition Que sans vous informer de ma condition, Sans vouloir par mon nom connaître ma personne, Vous me saurez gré de ce que je vous donne. Votre raisonnement mes bons desseins élude, Et l'esprit y paraît plus que la gratitude. Je sors d'auprès de vous le visage confus ; Car je ne pensais pas y trouver un refus. Ce que je vous offrais, et qui n'a pu vous plaire Me coûtait mille fois plus à dire qu'à faire : Peut-être en l'acceptant, eussiez-vous obtenu, De savoir un secret qui vous est inconnu. Et qui vous préparait une bonne fortune : Mais je ne songe pas que je vous importune. Vous tentez l'impossible. Je ne saurais vous voir, sans vous être invisible. Ou bien vous vous tiendrez à mes conditions. Ou bien. Ah mon Dieu ! Cachez-moi C'est mon frère. J'ai besoin comme vous de consolation. Nous craignons vous et moi pour deux aimables frères, Nous ne craignons pas moins pour leurs chers adversaires, Je ne vous trouve pas plus à plaindre que moi. Console-moi toi-même. Tu m'es plus odieux, cent fois qu'elle ne t'aime. Oui, Don Pedre m'aimait, et je l'aimais aussi. Peut-être verras-tu que je suis bien à craindre. **** *creator_scarron *book_scarron_ecolierdesalamanque *style_verse *genre_comedy *dist1_scarron_verse_comedy_ecolierdesalamanque *dist2_scarron_verse_comedy *id_DONPEDRE *date_1654 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_donpedre Et tu dis que mon père T'a donné seulement ? La misère! Et ma très chère sour ? La pecque ! Que dit-il lorsque ma lettre il lut ? Il ne faut pas qu'il sache Que je suis à Tolède. Et ne le fais-je pas ? Mille coups d'étrivières. Aux railleurs comme toi. Tais-toi, tête malsaine. Où mon amour me mène. J'adore une Chimène. Sour d'un Comte étranger, éloigné de la Cour Pour un soufflet donné. Moralité, faquin, sans offenser personne. Crispin, encore un coup trêve de raillerie. Comment se porte donc mon père ? Tu perds le respect, franc pendard, Si je prends un bâton. Et nous mangeront-ils ? Et pour combien me comptes-tu, faquin ? Marche avant. Et combien êtes-vous, notre Maître ? Pour commander ainsi ? Pour être En nombre si petit, vous parlez un peu haut, Cherchez-en autres six, je crois qu'il vous les faut : Et quand vous les aurez, il n'est rien que ne fasse Votre humble serviteur, jusqu'à quitter la place ; Cependant je la garde. Je ne sais pas mourir. Ni l'un ni l'autre. À toi jeune cadet. Vous en aurez besoin. Ce jeune homme blessé Se battait en César, et j'en étais pressé. Dieux ! Le pied m'a manqué : mais le bras me demeure. Vous reculiez tantôt, poltrons. Ha traîtres ! Puisque votre bras m'aide, Je ferais tête à tous les braves de Tolède. Allons après, Crispin. Ha, je le sais fort bien, Et que par votre bras la mienne défendue, Quand pour vous mille fois elle serait perdue, Je ne me verrais pas encor acquitté, De tout ce que de moi vous avez mérité. Vous me promettez donc ? Oui, ma vie Sans votre prompt secours m'aurait été ravie. Non. Autant que je l'ai pu par une nuit obscure J'ai connus par sa voix plus que par sa figure, Qu'il était étranger, le frère ou le parent D'un Comte, et quel qu'il soit il m'est indifférent. Ô Dieux ! Et que pensez-vous faire ? Me tuer ! Ce n'est pas un coup sûr, Et peut-être auriez-vous la moitié de la peur. Puisque nous sommes seuls faisons l'expérience, De celui qui de nous se trompe en sa croyance, Battons-nous. Vous avez ce me semble, et le temps, et la place. Vous avez deux desseins qui ne sont pas d'accord, Vous me sauvez la vie, et conspirer ma mort. Je suis au désespoir de ce qui s'est passé : Mais puisque le passé n'est plus en ma puissance, Que votre bienfait même augmente mon offense ? Que cruel ou forcé mon bras vient d'abréger Des jours qui vous sont chers que vous devez venger. Contre mon naturel de ne fuir personne, Et suivant mon humeur de rendre à qui me donne, Je vous veux éviter partout où vous serez, Avec le même soin que vous me chercherez. Vous savez par vos yeux jusqu'où va ma vaillance Et jugerez par là de ma reconnaissance. Je veux être poltron, pour n'être pas ingrat, Et pour rendre un bienfait, refuser un combat. Je suivrai vos approches. J'ai peur de vos reproches. Quand pour vous je renonce à ma propre valeur, Et lorsque contre moi vous irritez la vôtre, Nous suivons du devoir les lois et l'un et l'autre. Si les Cieux, ne me sont ennemis Nous ne nous battrons point, et deviendrons amis. Et moi vous endormi. Ne me condamnez pas devant que de m'ouïr. Alors que je promets il n'est rien de plus ferme. Soyons seuls. Et que je ferme La porte dessus nous. Que je parle. Il faut, que devant toute chose Vous lisiez en ces mots, de mon retour la cause. Vous voyez bien pourquoi je manque à ma promesse, Mais puisqu'à la tenir mon honneur s'intéresse, Un homme à qui je dois et la vie et l'honneur, Ne me traitera pas de toute sa rigueur. Un père qu'on outrage, à qui la force manque, Et qui croit que je suis encore à Salamanque, Lui qui peut tour sur moi, me conjure instamment De le venir trouver, et sans retardement. Logeant au même lieu que la Poste demeure, Mon Hôte m'a rendu la lettre toute à l'heure : Je vous conjure donc, ennemi généreux, Puisque aussi bien me vaincre est un exploit honteux, Que je n'ai point d'honneur puisqu'on l'ôte à mon père, Qu'un homme sans honneur ne peut vous satisfaire ; De me donner le temps, de me mettre en état, Ou de tenir parole en fuyant le combat, Ou bien d'y succomber plein d'honneur et de gloire, Sans que vous rougissiez d'une telle victoire. Vous verrez des effets de ma reconnaissance. Ces deux desseins sont beaux, et très dignes de vous Mais le second dépend aucunement de nous, Ma valeur vous en rend l'issue assez douteuse. La proposition du premier m'est honteuse. Le nom d'un offensé ne se révèle point, L'honneur me le défend, et le même m'enjoint De ne remettre pas à la valeur d'un autre, Ce que peut achever un bras comme le nôtre. Éviter le danger D'être pris, sans laisser pourtant de me venger. Je veux rompre avec vous toutes conventions. Je reprends ma parole. Je vous fie, Mon secret, mon honneur, et je vous dois la vie, Vous ne me croyez pas assez homme d'honneur Assez reconnaissant, assez homme de cour, Pour vous pouvoir servir d'une fidèle escorte, Avec moi vous deviez agir d'une autre sorte, Et je ne comprends pas, pour qui vous m'avez promis, Et comment au bienfait vous joignez le mépris ? Ou bien vous vous battez tout à l'heure avec moi, Ou vous vous y fierez, assuré de ma foi Que je vous garderais contre père même. Ne songez point en moi, songez à votre affaire. Contre mon propre père, Contre le monde entier contre moi conjuré. Je pérorais pour vous, puisque je l'ai juré ; Je vous l'ai déjà dit, et je vous le répète. Je devais différer davantage Au mandement exprès d'un Père qu'on outrage, Et le suivre plutôt qu'un mortel ennemi. Demain au point du jour sans même avoir dormi J'irai trouver mon Père, et savoir quelle offense Inspire à ses vieux ans un désir de vengeance. Sa Lettre était pressante, et j'ai bien reconnu Que quelque grand malheur lui doit être venu. Manquer à son devoir ; hasarder son estime ; C'est en quelque façon commettre un double crime, J'en suis au désespoir. Que peut avoir mon père ? En toute cette rue, Que j'ai cent et cent fois visitée et courue, Il ne logea jamais Dame de qualité Ni fille de mérite, ou de rare beauté, Qui méritât d'un Comte être galantisée. L'aventure est pourtant suspecte et malaisée ; Puisqu'un homme de cour y trouve du danger, Et se munit ainsi d'un secours étranger. Un homme vient à moi l'épée toute nue, Défendons notre poste : arrête, où je te tue. C'est mon père ! Ha qu'est-ce que je vois ! Mon Père ici. Ô que non sans sujet ce discours me fait peur ! Venger notre infamie ! Ne sachant pas l'offense. Je sers mon ennemi contre mon propre honneur. Ô Dieu ! Que de malheurs sur moi le Ciel assemble. Non mon Père attendez, vous n'y pouvez entrer. Je vous dis vrai, mon Père, Vous n'y pouvez entrer moi vivant. N'entrez pas ; je garde cette porte. Mon Père, ma raison ne fut jamais plus saine : Mais un juste sujet. Contre son Père, Défendre son ennemi ! Je n'ai point à choisir, il faut sauver le Comte. Manquer à sa parole est la dernière honte. Mon Père il faudrait voir. Mon Père, je lui dois ma parole, et ma vie. Vous me l'avez donnée ; il me l'a pu ravir. Chez lui contre moi seul, il a pu se servir De sa rare valeur à ma perte animée, Par le sang répandu d'une personne aimée : Il a pu se servir de valets contre moi, Et vous étiez sans fils, s'il eut été sans foi. Mon Père où vous transporte un aveugle courroux ? Ah que sur moi plutôt ce tragique dessein Se commence et s'achève. À croire mon honneur, à croire ma vertu, À garder ma parole, à venger mon offense. Mon père, si jamais. Comte, tu te vois seul, et connais aisément, Que plusieurs nous pouvons te perdre en un moment, Puisque je le pourrais seul, et sans avantage : Mais je dois pour le moins t'égaler en courage. Tu sais que perdre un frère, et perdre son honneur, N'est pas perte pareille entre les gens de cour. Ma générosité surpasse donc la tienne, D'autant que ton offense est moindre que la mienne Je paye avec usure, un bien que tu m'as fait : Mais ce n'est pas assez que tu sois satisfait ; Il faut que je le sois. Ta mort seule est capable, Si ton crime envers nous peut être réparable, De mettre mon honneur en son premier éclat. Sors donc ; mais pour entrer tôt après au combat. Un combat satisfait les mânes de ton frère ; Ta mort, satisfera moi, ma sour, et mon Père. Étant homme de cour, tu la disputeras : Mais le Ciel est injuste, ou bien tu périras. Dans la place, où je vais tout à l'heure me rendre. J'ai hâte plus que toi, De te voir seul à seul aux mains avecque moi. Va-t'en donc. Je le trouverai bien. Quoi mon Père ! Ma sour. On m'impute la mort d'un certain Don Louis, Dont je suis déchargé par les témoins ouïs. Un Seigneur Zamorin, un brave à toute outrance ; Ne m'iras pas charger contre sa conscience, Et ne voudra jamais à mes dépends mentir, Quand même pour cela l'on le ferait sortir. Je vous laisse à juger si je suis innocent. De l'obligation Je me revancherai. Mon brave, je vous suis tout à fait redevable. Qu'entendez-vous par là ? Je vous suis obligé d'une telle nouvelle. Vous verrez comme je suis fidèle. Que dis-tu ? Elle prend mal son temps, et peut bien s'en aller. Je suis bien éloigné de songer à l'amour. Mais la voici qui vient. Mon brave au premier jour Nous nous revancherons. Madame, l'on m'a dit que vous me demandiez. Quand le Ciel m'aurait fait d'humeur à recevoir, Je ne puis accepter votre offre sans vous voir, Ni vous en savoir gré devant que vous connaître. Je crains le nom d'ingrat, je croirais déjà l'être Acceptant un bienfait dont j'ignore l'auteur. M'irai-je faire ingrat de gaieté de cour ? Madame, je vois bien qu'il vous faut obéir : Mais souhaiter vous voir, est-ce se faire haïr ? Et sans vous offenser. Vous venez donc, comme des visions Tenter les prisonniers ? Montre-moi ton visage. Ange de taffetas. Et bien qu'as-tu ? Et c'est vous Madame ? Entrez, entrez vitement. Il est vrai que vous me surprenez, Vous me rendez visite, et vous m'emprisonnez. Venez-vous empirer le sort d'un misérable ? Vous repaître les yeux du malheur qui m'accable ? Insulter au captif, sans défense et sans mains ? Comte, ces sentiments sont bas, sont inhumains. Et je vous aurais cru d'âme trop généreuse Pour vous venger de moi par une voie honteuse, De moi ; qui me vois pris pour vous avoir cherché. Et qui me fait sortir ? C'est vous qui me rendez ce service important ! Ô Dieu ! Sera-ce à moi d'avoir toujours à courre. Mon ennemi que j'aime, et qu'il faudra pourtant Que je perde, ou périr moi-même en combattant, Si vous me délivrez ; est-ce qu'il vous importe Que ce soit tout à l'heure, ou demain que je sorte ? Il m'importe, ou je meurs. Oui, donnez-moi la main. Mais à condition qu'elle finit demain. Quelle étrange disgrâce ! Faut-il en même temps, vous aimer vous haïr ? Mais mon père. Comte, n'en parlons point ; car enfin, c'est mon Père. À bien considérer combien vous l'offensez, Et qu'il nous a trouvés tout à l'heure embrassés, Mettez-vous dans sa place ; est-il homme si sage, Offensé comme il est par un dernier outrage, Qui ne suive d'abord son premier mouvement, Et qui ne m'eût traité comme lui rudement ? Je saurai Bientôt où vous serez. J'en ai de déplaisir plus que vous l'âme atteinte : Mais comment a-t-il pu faire sitôt sa plainte ? Je suis fâché de voir que l'on vous traite ainsi : Mais fiez-vous en moi ; Je vous donne parole, De vous faire passer au travers de la geôle Sans que d'aucun Geôlier vous soyez arrêté. Pourvu que vous sortiez, Comte, que vous importe Comment vous sortirez. Je vous ferai sortir ; Mais à condition, de ne se départir D'un ordre très exprès, qu'il faut que je vous donne. Je saurai bien d'ailleurs prendre mes sûretés. Venez. Il faut qu'elles finissent Bientôt par un duel. Nous le saurons demain Si nous nous voyons seuls, et le fer à la main. N'ai-je pas fait sortir le Comte adroitement. Tais-toi fat. Aussi ne m'y fiant que de la bonne sorte, N'as-tu pas remarqué qu'au sortir de la porte Je l'ai toujours suivi, jusqu'à tant que sa sour Se séparant de lui, se soit mise en lieu sûr. On l'a délivrera, Avecque de l'argent le plutôt qu'on pourra. Elle est à la campagne. Je te mène à la gloire. Ignorant mon dessein. Je me vais battre. Oui je te le promets : Mais tantôt, je proteste Si tu dis où je suis. Voici le lieu fatal, Où j'espère acquérir un honneur sans égal. Mais quelqu'un vient ici : ce sont mes hommes même. Cachons-nous. Je suis pour vous, courage. Le plus méchant est mort. Ils fuient les poltrons. Laissez, laissez les vivre. Songez à vous défendre, au lieu de les poursuivre. De moi. De moi. Je le dois. Vous n'y trouverez pas un grand sujet de joie. Je l'ôte. Je pense avoir payé ce que je vous ai dû : De votre part aussi vous en ferez de même ; Et me satisferez. Je le crois : mais enfin que dirait-on de nous. Ne différons donc plus, bannissons la tendresse, Ne faisons plus agir que la force et l'adresse. Du premier coup je suis sans épée ? Ô malheur ! J'aime mieux mille fois qu'elle me soit ravie Que de la demander, fais ce que tu pourras. Et ma vie en mes bras. Ô Dieu ! Faut-il encor qu'un malheur imprévu Me surprenne, et me rende envers vous redevable. Je reviens à l'instant. Mon père et des archers. Il entre du Crispin ici : mais si tantôt Je te trouve à l'écart. À cet honneur insigne ajoutez une grâce, Peut-être ignorez-vous, que j'aime votre sour Avec tous les respects, avecque tout l'honneur, Qu'elle peut exiger d'un esclave fidèle : Elle sait les tourments que j'ai soufferts pour elle, Et que pour son sujet le destin a permis, Le funeste accident qui nous rend ennemis : Le Ciel me soit témoin, que défendant ma vie, Quand sans votre secours elle m'était ravie, Si j'eusse reconnu l'auteur d'un tel dessein, J'eusse à son fer cent fois laissé percer mon sein, Ou peut-être cherché mon salut en ma fuite, Plutôt que repousser son ardente poursuite. Je me vis attaqué d'un jeune homme en fureur, Et comme il me pressait, avec plus de rigueur Que les lâches poltrons, que nous mîmes en fuite, Jugez où ma valeur se trouva lors réduite. J'avais à me défendre, ou j'avais à mourir : Prêt de périr moi-même, ou de faire périr, Il est plus naturel de choisir l'un que l'autre, Et c'est comme arriva mon malheur et le vôtre. Mais Monsieur me donnant Cassandre, cet honneur D'un ennemi vous fait un frère, un serviteur. Je l'adore. **** *creator_scarron *book_scarron_ecolierdesalamanque *style_verse *genre_comedy *dist1_scarron_verse_comedy_ecolierdesalamanque *dist2_scarron_verse_comedy *id_LEONORE *date_1654 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_leonore Non, je ne le veux pas. Ferme, ferme la porte. Ferme-là, quoi qu'il te puisse dire. Non, c'est pour t'éprouver. Tu ne t'en iras pas sans m'avoir écoutée. Mais je veux qu'on m'écoute avec attention. Hé bien, pour me faire écouter, Devrais-je être réduite à te faire arrêter ? Est-ce là l'action d'un amant si fidèle. Je ne la cherche point : mais toi m'en accuser C'est m'en vouloir faire une, et c'est en mal user. Depuis que tes respects, tes soupirs, et tes plaintes, Ont su gagner mon cour et dissiper mes craintes, Enfin depuis le temps que la première fois, Tu me juras de vivre et mourir sous mes Lois. Deux hivers à la terre ont ses beautés voilées, Et deux étés deux fois les ont renouvelées. Mon esprit, cependant par le tien enchanté, N'a jamais eu soupçon de ta sincérité, Et sur moins de serment, de lettres, de promesses Ne t'en aurait pas moins témoigné de tendresses. Pendant cet heureux temps que Tolède et l'Amour Te faisaient oublier et Madrid et la Cour ; Tu sais bien que mes yeux des Galants de Tolède, Étaient en même temps le mal et le remède. T'ayant donné mon cour, les autres vainement Cherchaient dans mes faveurs le moindre allégement. Quoique de ton amour trop tôt persuadée, Ma vertu toutefois m'avait toujours guidée. Je réglais mes faveurs aux lois de mon honneur ; Alors que trop sensible aux soupirs de ton cour, Ou pour dire le vrai, trop inconsidérée, Dans mon appartement je te donne une entrée. Là sans prêter l'oreille à ma faible raison, Et sans m'assurer mieux contre une trahison ; Sur un simple papier tu vois que je m'expose, Aux transports indiscrets d'un amant qui tout ose. Peut-être que ton feu devient déjà plus lent, Parce qu'il a trouvé le mien trop violent. La crainte d'un mépris m'a déjà l'âme atteinte, Déjà le repentir accompagne ma crainte : Mais à ce repentir, cher Comte, si tu veux Tu feras succéder la joie, et tu le peux. Tu sais que notre Race est égale à la tienne, Et que pour être pauvre, elle est fort ancienne. Ta promesse t'oblige à me donner la main ; Ta foi de l'accomplir sans attendre à demain. Tu dépends de toi-même, et contre ta parole, Tu ne peux m'alléguer qu'une excuse frivole ; Et puisque mon amour fait un excès pour toi, Il faut que ton amour fasse un excès pour moi : Mais que dis-je un excès ? Tout ce que tu peux faire, Et même cet Hymen ne me peut satisfaire, S'il faut que cet Hymen que ta main m'a promis, Par ton cour refroidi soit tant soit peu remis. L'honneur que j'en reçois, qui d'autant plus me touche, Qu'il n'aura rien d'indigne exigé de ma bouche, Ne se verra jamais hors de mon souvenir, Et jamais. Tu n'as plus rien à dire ! À moi ! Cruel, à moi ! Tu n'as plus rien à dire à qui fait tout pour toi ? Perfide ! Il n'est plus temps de déguiser ton crime. À mon amour au moins tu devais de l'estime, Et loin de m'estimer esprit méconnaissant, Tu payes mon amour d'un mépris offensant. J'adore une Maîtresse, et j'abhorre une femme ! Sont-ce là les discours d'un honnête homme ? Infâme ! Et j'abhorre une femme ! À moi, de tels discours ? Moi, Reine de ton cour, l'arbitre de tes jours : Moi, ta félicité, ta Déesse adorable, Sans qui tout autre objet t'était insupportable. Ce sont là les discours si souvent répétés, Et crus trop aisément comme trop écoutés. Tu ne les faisais donc d'une voix languissante Que pour te jouer mieux d'une fille innocente. Tu me trahissais donc ? Et de cette action, Ta vanité se rit à ma confusion. Mais tu n'es pas encor, scélérat, où tu penses, Un cour noble offensé sait venger ses offenses. Je vengerai la mienne, et si je ne le puis, Je ne veux plus survivre à l'état où je suis. La réputation n'est plus considérée, Quand on est trop éprise, ou trop désespérée. Tu me verras partout sans cesse sur tes pas, Tant que sous ma douleur je ne périrai pas : Et quand de ma douleur je serai la victime, Mon ombre jour et nuit le bourreau de ton crime, Te poursuivant partout, méchant, tu serviras, D'épouvantable exemple aux Traîtres, aux Ingrats. Mais à quoi différer mon trépas davantage, Il faut que ton fer même achève ton courage. Ha ! Cruel. Je veux perdre la vie. Dieux ! L'on frappe à la porte. Cache-toi donc de grâce, et promptement. Ô quel malheur ! Ha ! Songe à mon honneur qui pour toi se hasarde. Elle est grillée. Saute sur la fenêtre, et la ferme après toi. Attends ; ouvre. J'avais pris mes habits, parce qu'elle m'a dit Que vous étiez malade. Hélas ! Il sait ma faute. Mon père cette offense Se pourra réparer. Il m'a cent fois promis. Mon père, à vos genoux Je vous promets pour lui qu'il fera. Je reprends mes esprits. La Lettre est fort dévote. De sa Relation, pour moi je suis ravie. Et que lui voulez-vous ? Ha ! Béatris, je tremble, Notre Comte est trouvé : Bons Dieux ! Ma frayeur est extrême. Ha, mon père ! Où voulez-vous courir ? Mon père, où vous conduit une aveugle fureur ? Vous ne la pouvez suivre et sauver mon honneur. Puisqu'on veut m'épouser, puisqu'on m'aime et que j'aime : Perdrez-vous mon époux ? Vous perdrez-vous vous-même ? Ha ! Perfide, sans foi. C'est pour me mieux venger de lui. Hélas ! Que tu vois clair dans le fond de mon cour, Et que de son oubli mon amour a de peur. S'il s'en va, Béatris ? Bien loin que ma rigueur le charme, et le retienne, Elle le doit chasser. Et qui l'y forcera, Dis-moi grande folle ! Il le témoigne mal. C'est ce qu'il est le moins. Tu crois que je voudrais lui donner un rival. Jamais. Et moi donc ? Que tes discours auraient mon esprit diverti, Si par ma passion il n'était perverti. Il ne viendra jamais. C'est en vain tu ne sortiras pas. Quoi ? Mon père et mon frère ? Cher Comte, à tes côtés je suis prête à périr. Madame, c'est ici que j'ai laissé mon Maître Je ne sais pas pourquoi, pour se battre peut-être. Il n'y paraît personne. Ha je n'en doute plus, S'en est fait : et nos pas sont ici superflus Si l'un d'eux, ou tous deux ont achevé de vivre, Ils m'auront enseigné par où je les dois suivre N'en doutez point Cassandre, en un malheur pareil De mon seul désespoir je suivrai le conseil. Alors aimable sour d'un peu sincère frère, Peut-être ferez-vous ce qu'il aurait dû faire, Vous aurez de mes maux quelque compassion. Ô Dieu ! N'est-ce pas là le Comte que je vois, Sans chapeau, sans casaque, au bord de la rivière ? D'un funeste accident j'ai la peur toute entière, Je le vois dans l'état qu'on est quand on se bat, Je n'en dois plus douter ils ont fait leur combat, Il est seul, et mon frère aura perdu la vie, Et le barbare Comte à sa rage assouvie, Et mon malheur est tel, que si j'ose songer À me venger sur lui, c'est sur moi se venger Allons, Cassandre, allons trouver ce sanguinaire, Allons lui demander votre amant, et mon frère. Ô méchant, que mes yeux ont peine à regarder Qu'as-tu fait de mon frère ? Oui, traître tu l'avais si ton âme cruelle, M'avait aimée autant, que je te suis fidèle. Que tu te sais bon gré, dis-moi la vérité, De m'avoir fait ouïr une brutalité ? Avais-je à le garder ! Ô réponse barbare ? Perfide ! Mon esprit, n'a point à s'égarer : Il s'égara dès lors qu'il t'ouït soupirer, Que sur de faux soupirs, et sur de fausses plaintes, Il crut trop aisément à tes promesses feintes : Mais tu sais bien mon faible, et que j'ai trop d'amour. Tu peux impunément m'offenser chaque jour. Si du bien que je perds le penser m'est funeste, Il ne me l'est pas moins pour celui qui me reste, Tout ingrat que tu m'es, je ne te puis haïr, Et ma bouche ne peut longtemps mon cour trahir. Mon père. Mon Père, pardonnez. **** *creator_scarron *book_scarron_ecolierdesalamanque *style_verse *genre_comedy *dist1_scarron_verse_comedy_ecolierdesalamanque *dist2_scarron_verse_comedy *id_DONFELIX *date_1654 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_donfelix Ouvrez. Ouvrez. À la fin je me fâche, Ouvrez, dis-je. Et l'on se rit de moi, Chienne de Béatris, si tantôt. La belle diligence À tourner une clef. Toujours des serruriers, et de l'argent dépendre. Des bourreaux de valets ne valent pas le pendre. Quoi, ma fille vêtue au lieu d'être en son lit ! Il est vrai que mon rhume M'a tourmenté la nuit et plus que de coutume : Mais mon rhume n'est pas ce qui m'amène ici ; Quand on a des enfants on n'est pas sans souci. Et par trop d'indulgence On se rend malheureux. Oui, j'en aurai raison ; Car enfin, c'est jouer à perdre ma maison. Et folle, à la promesse D'une inconsidérée et peu sage jeunesse Veux-tu bien te fier ? Mon courroux L'emporte sur mon sang. Quand on est trop bon père On gâte ses enfants : votre fripon de frère A perdu son argent. Je crois qu'à Salamanque il emporte le prix Des fripons signalés. Venez ouïr sa lettre, Je ne m'y fierai plus, il aura beau promettre. La paix du Seigneur vous soit donnée, etc. Le beau commencement de lettre que voici : Croit-il me tromper mieux en m'écrivant ainsi. La paix du Seigneur vous soit donnée : Vous apprendrez par la présente, que j'ai joué et perdu à la prime l'argent de ma pension : mais au moins j'ai la satisfaction d'avoir perdu mon argent à cinquante cinq, et qu'il n'a pas moins fallu qu'un flux pour me faire perdre. Je vous prie de ne vous en alarmer point ; car j'ai fait serment de ne renvier jamais sans les avoir en la main. Vous savez mieux que moi, que qui n'a pas de quoi manger court risque de mourir de faim, et que vous êtes tenu de m'en fournir, ne vous ayant point prié de me mettre au monde. Au reste, je suis d'une humeur si pacifique que je ne puis dormir quand j'ai une querelle si je ne la vide aussitôt. L'autre jour un écolier Aragonais m'importunant pour se battre avec moi, qu'il lui en coûta un oil. Vous voyez par là que je ne suis pas si perdu que vous pensez. Je vous envoie Crispin, que vous me renverrez s'il vous plaît avec de l'argent. Je me recommande à vos bonnes grâces, cher Père de mon âme, lumière de mes yeux. Je prie Dieu qu'il vous conserve, et ma petite sour aussi, de qui quoique indigne je me souviens toujours dans mes oraisons. Votre humble fils Don PEDRE DE CESPEDE, De Salamanque ce dernier octobre. Et voyez, je vous prie, Et son hypocrisie et sa veillaquerie. Un more grenadin est plus que lui dévot, Encore que d'origine il soit chevalier Goth. Je meure s'il songea jamais à ses prières, Je lui veux retrancher ses vertus écolières, Et vous veux faire voir son député badin, Un très rare animal, moitié cuistre et gredin, Holà, Crispin. Parle Chrétien, sot homme. Si je prends un bâton, je t'assomme, Pour trois mots de Latin que le maroufle sait, Il en est importun. Hé bien donc, comment fait Mon bon vaurien de fils. Encore ? Ha ! Je t'étranglerai, Pédantesque pécore. Ton Maître donc ? Pour un sot de collège, il parle plaisamment. Mais n'a-t-il rien de bon, ce mauvais garnement ? Voilà comme j'étais durant mes jeunes ans. Il faut que fils la jeunesse se passe, Tiens voilà de l'argent : mais dis-lui bien qu'il fasse Beaucoup mieux qu'il n'a fait, et qu'il soit ménager. Quoi ! Des bottes, faquin, comme un chevau-léger, Comment es-tu venu ? L'invention m'en plaît : va, ta dépêche est faite. Non, de l'argent suffit. Je ne saurais dormir alors qu'on m'a fâché ; Et ma toux me reprend quand je veille couché. Vous autres couchez-vous, il est tantôt une heure ! Mais appelez Crispin : j'oubliais où je meurs De lui dire une chose importante à mon fils, Il faut le rappeler ; va vite, Béatris. La double paresseuse ; à peine est-il en bas, Il peut être en la rue, appelle à la fenêtre. Peut-être est-il encor auprès de la maison. Oui, je rendrai raison De ce que je commande ? Venez voir comme il faut appeler un valet. On a collé sans doute, ou cloué ce volet, De la façon qu'il tient. Comment, Diable ? Je crois qu'il s'ouvre de lui-même. Dieux ! Qu'est-ce que je vois ? Ô toi, qui que tu sois, de qui je prends ombrage, Tant pour l'heure, le lieu, que pour ton équipage, Et de qui la surprise est la conviction, Qui t'a mis en ces lieux ? Permets-moi de sortir, promets-moi de m'attendre. Et tu seras bientôt réduit à te défendre. Ha, ma fille ! Aide à mon ennemi, sers à ton propre outrage, Je vois mon déshonneur écrit sur ton visage. Puisque tu l'as promis, il faut que tu le tiennes, Et l'inégalité de mes forces aux tiennes, Ne diminuera rien de mon ressentiment. Satisfait Léonore, et sans retardement, Où ravis à la fois on honneur et ma vie : Ta rage ainsi sera pleinement assouvie. Tu prétends moi vivant refuser, inhumain. Tu ne t'en iras pas sans me faire raison. D'autres bras que les miens vengeront mon offense. Ha, si mon bras m'épargne, insolent ravisseur Je préfère ses coups à ta fausse douceur. M'ayant ôté l'honneur en ma fille ravie, Pour allonger mes maux me laisses-tu la vie ? Viens, viens, finir mes jours, ils n'ont que trop duré, Si j'avais moins vécu j'aurais moins enduré. Mais différons encor cet extrême remède, Rappelons cependant Don Pedre dans Tolède. Ce fils que Dieu me laisse, est jeune, et courageux, Il saura bien venger un mépris outrageux. Et si dans ce dessein sa vaillance succombe, Nous chercherons alors le repos dans la Tombe. Et toi fâcheux objet de mes yeux désolés, Va-t'en verser plus loin tes pleurs dissimulés, Évite ma fureur, crains ton généreux Frère. Et plus que tout cela, crains le Ciel en colère ; Il n'est point favorable aux Amants aveuglés, Et fait payer bien cher les plaisirs déréglés. Béatris, donne-moi l'épée et la lanterne Qui sont près de mon lit. Vas-y donc promptement. D'ici près chaque jour partent journellement. La plupart des Coches qui vont à Salamanque : Si j'attends à demain, j'ai peur que je ne manque D'un commode moyen, de faire revenir Don Pedre : je vais donc sa place retenir, Son coquin de valet s'est amusé peut-être, Et n'aura pas encor retourné vers son Maître. Je ne me trompe pas : Je viens d'ouïr, du bruit, des paroles, des pas, Je veux m'en éclaircir. À ce bruit que j'entends, si je crois ma colère, Si le fer à la main je cours où j'ois du bruit. On se sauve aisément à l'aide de la nuit Ayons de la lumière. Tu mourras le premier. Et c'est toi ! Don Pedre, mon cher fils. Mon fils, qui t'a dit ma demeure ? Et comment as-tu pu la trouver à telle heure ? Il faut mourir Don Pedre, ou venger mon honneur, Mais mon fils, je te vois l'âme toute interdite, Et tu me parais froid alors que je t'excite. Sais-tu déjà par où notre honneur est taché ; Car un pareil malheur n'est pas longtemps caché : Ou ton bras punissant une vie ennemie, Aurait-il pu déjà venger notre infamie ? Oui, mon fils, la venger, Au prix de notre mal, c'est un fardeau léger. Venge-moi, venge-toi. Tu la sauras trop tôt, courons à la vengeance : C'est par ce seul moyen, que notre honneur perdu Ou le sera sans honte, ou nous sera rendu. Mais mon fils, sans rougir, te puis-je rendre compte ; Du commun déplaisir qui nous couvre de honte. Épargne-moi, mon fils, la honte et le regret De révéler moi-même un si fâcheux secret. Dispense-moi, mon fils, d'un récit si funeste, Va-t'en trouver ta sour, apprends d'elle le reste : Mais si tu m'aimes bien, parle-lui doucement, Parle-lui de pardon, plus que de châtiment : En apprenant son mal apprends-lui son remède : Car en fin dans mon cour, mon sang pour elle plaide, Et souviens-toi, qu'elle est, et ma fille, et ta sour. Don Pedre, faisons mieux allons la voir ensemble, Et flattant sa douleur, tâchons de lui montrer. Moi je n'y puis entrer ! Quelle misère ? Ou quelle extravagance ? Es-tu dans ton bon sens ? Et pourquoi ces soupirs, et ces yeux languissants ? Ôte-toi. Résister à son Père ? Et parler de la sorte ! Il ne me manquait donc pour combler mon malheur, Que ta raison blessée, autant que mon honneur ? Ne crains-tu point ma haine ? Fils ingrat. Un homme chez ma fille, ô Dieu ! Mon fils, c'est l'ennemi qui nous perd, et nous brave. Il faut que son sang lave Notre commune offense, il faut que notre honneur Revive dans la mort d'un lâche suborneur Tu parles bas mon fils ? Ha je n'ai vu que trop. Apprends-moi mon devoir. Quoi ! Mon fils, aux raisons que sa peur lui suggère, Ton cour prête l'oreille et la ferme à ton Père ; Il t'a sauvé la vie, il s'en est fait honneur : Mais il ravit le tien, l'insolent suborneur. Vengeons, vengeons, mon fils, vengeons notre infamie. Préfère une parole à la hâte donnée, À ta gloire flétrie, à ta sour subornée. Va, va, sauve la vie à ton conservateur ? Mais ne me nomme plus de la tienne l'auteur. Oui, que je sois sans fils, qu'il nous tue, ou qu'il meure. Oui seul, et sans mon fils, je m'expose à tes coups. À me perdre, à te perdre, à poignarder ma fille. Ô peste détestable a toute ta famille ; Il faut que sur le champ un poignard dans son sein. Ôte-toi. Enfin donc, fils sans cour, à quoi te résous-tu ? Tu mets donc l'une et l'autre en égale balance ? Tu lui fais perdre un frère, il suborne ta sour ; L'un est un déplaisir, l'autre, est un déshonneur ; L'un ne veut qu'un combat, l'autre veut une vie, L'un fait porter le deuil, et l'autre l'infamie. Vois, vois, comme je sais me venger, et sans toi. Ne parle point à moi. Je m'en vais enfermer cette imprudente fille Dans sa chambre, et demain dans une austère grille. Quoi mon fils ! Il sort avec la vie ? À qui te perd d'honneur tu ne l'as point ravie ? Trouve plutôt ta sour, Infâme confident d'un cruel ravisseur. Est en fuite, est sauvée : Mais ne te montre point qu'elle ne soit trouvée ; Ou plutôt, lâche fils, ne te montre jamais. Je ne veux plus de fils, de fille, ni de paix. La lâcheté d'un fils, la honte d'une fille, Perdent également l'honneur de ma famille : Perdons-en la mémoire, et sans plus différer, Allons du Souverain la Justice implorer ; Et s'il n'est point pour nous de Justice à Tolède, La violence alors, sera notre remède. Oui mon fils, c'est fort bien m'obéir, C'est croire les conseils d'un Père, c'est les suivre ; Fils ingrat, fils poltron, fils indigne de vivre. Tu venges donc ainsi ton honneur offensé ? Et satisfait ainsi ton Père courroucé ? Tu te souviens ainsi de ta sour subornée ? Et tu gardes ainsi ta parole donnée ! Toi qui la sais garder si rigoureusement, Que tu fais moins d'état de moi que d'un serment. Et ne m'avais-tu pas engagé ta parole, De venger mon honneur sur celui qui le vole ! Et par ces mêmes bras dont tu l'as embrassé Que je verrais son corps de mile coups percé ? S'il avait eu des miens une pareille étreinte, Encor que leur vigueur soit déjà presque éteinte, Ils auraient déchiré son cour en un instant. Et si je t'embrassais, ils t'en feraient autant. Peut-on bien sans pleurer, me voir pleurer infâme. Vois, vois couler mes pleurs, c'est le sang de mon âme. Au péril d'épuiser mon corps de tout le sien, Je répandrai celui qui fait glacer le tien. Mais laissons-là ce fils, qui faisait tant le brave, Qui fait aux yeux d'un Père une action d'esclave. Ce malheureux verra son vieil Père aujourd'hui Vaincre, ou mourir plutôt, que vivre comme lui. Tu te ris insolent de ma vaine menace ; Mais mes ans ont encor du feu parmi leur glace : L'insolence est souvent réduite à supplier. Là-bas qui fait les grands peut les humilier. Tiens-toi bien. Ne l'aperçois-je pas ma déloyale fille ? Cet opprobre honteux d'une illustre famille, Mais le Ciel juste enfin me l'a fait retrouver, Et son amant ici ne la saurait sauver. Tu me viens de tuer Un fils, et tu me dois aussi restituer L'honneur que me ravit une fille enlevée. Tu t'en ris inhumain. Et ton habit sanglant, et ta sanglante main Ne convainquent que trop ton âme meurtrière. Il est dans la rivière. Le voilà bien confus. Tant que je l'aie vu vivant j'ai tout à craindre. Qu'as-tu fait de ton maître ? Mon malheur N'est que trop avéré ! Hélas mon fils est mort ! Ôte-toi, mal plaisant et froid bouffon. Oses-tu me parler sans craindre ma colère ? Oses-tu sans rougir paraître au jour ainsi ? Je te revois encore agréable surprise ! Non, c'est à ma requête Pour avoir enlevé ma fille, et je prétends, Qu'un mariage seul peut nous rendre contents. Tout n'a que bien été. Hasardant votre honneur vous l'avez augmenté. **** *creator_scarron *book_scarron_ecolierdesalamanque *style_verse *genre_comedy *dist1_scarron_verse_comedy_ecolierdesalamanque *dist2_scarron_verse_comedy *id_CRISPIN *date_1654 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_crispin Adsum. Non possum. Male facit. Tout beau, Monsieur, tout beau, je n'en cracherai plus. Il loge avecque sept goulus Débauchés comme lui, dans une chambre seule, Où toujours quelqu'un jure, ou dit des mots de gueule. L'hiver, le vent y donne autant que dans les champs, Ils couchent quatre à quatre en deux lits fort méchants : Les murs y sont parés de rondelles, d'épées, De portraits de charbon, de toiles d'araignées. Ces huit bons écoliers, ou plutôt huit bandits ; Chôment les Samedis comme les Vendredis. Haïssent les leçons comme les Patenôtres, Et ne font chaque jour que débaucher les autres. La nuit venue, ils vont enlever des manteaux, Plier quelque toilette, et jouer des couteaux, Ils se couchent fort tard, et se lèvent de même, Une servante maigre, acariâtre et blême, Sèche, ferrant la mule, et qui compte trente ans Depuis qu'elle renonce à l'usage des dents, Leur apprête à manger. Chacun y mange en Diable, Ou si l'on veut en chien. Un coffre y sert de table, Du vin à quantité, peu de mets délicats, Des Livres pleins de graisses y tiennent lieu de plats. Quand l'un mange trop fort, les sept autres enlèvent Ce qu'il a devant lui, le pillent, et s'en crèvent, S'entend, alors qu'ils ont prou de quoi se crever ; Car souvent ce n'est que pas coup sûr que d'en trouver : En peu de mots, voilà de votre fils la vie. De bon ! Il a tout bon, quoi que j'aie pu dire. Il est de bonne humeur, il a le mot pour rire. Quand il est question d'un discours sérieux, Un Caton le Censeur ne le ferait pas mieux. Il est officieux, ne refuse personne, Il prête sans regret, sans faire attendre donne, Il est fort ponctuel alors qu'il a promis, Civil quoique vaillant, et fait beaucoup d'amis, Au reste libéral autant qu'un Alexandre. Enfin, c'est grand malheur qu'il n'a de quoi dépendre Ayant bon appétit et de meilleures dents. Par la poste, en charrette. Vous n'écrivez donc point ? C'est agir à mon sens comme un homme d'esprit. Que Dieu garde de mal tout père de la sorte. Là-dessus je prendrai le chemin de la porte. Deux cents francs. Non pas même un salut. Je ne lui vis pas lire. Il faut donc qu'on se cache, Où n'aller que la nuit. Vous faites justement l'amour comme les chats. Il ne vous manque plus que courir les gouttières. Vous feriez chat complet. Mille bosses et trous, À tous coureur de nuit, chats-huants comme vous. Si vous vouliez au moins tirer la laine, On s'y pourrait sauver. Malsaine ou non, l'esprit en est pourtant bien sain. Je ne vois pas bien clair en votre noir dessein. Où me conduisez-vous ? Nous sommes mal conduits. J'ai peur que votre amour N'arrive dessus nous quelques coups d'époussette. Ce Comte souffrira que sa sour la coquette Vous épouse ; il fera le Diable. Encore bon Si vous étiez un Comte, ou du moins un Baron : Mais on n'en trouve plus, à ce que j'entends dire, Cela sent le vieux temps : pour des Comtes pour rire, Ou bien faits à plaisir, de Marquis, Ducs et Pairs, L'année en est fertile, et les chemins couverts. De Maréchaux de Camp l'année est aussi bonne. La race des Crispins eut du Ciel ce talent; Comme vous posséder celui d'être Galant. Tantôt parlant de vous, notre avare bonhomme Disait ce que l'on dit de qui revient de Rome, Vous savez le Proverbe, et lorsque l'on va là, Que cheval on revient, si cheval on alla. Puisque je ne dors point, trouvez bon que je rie. Ha le penard ! Il dit que. Monsieur, je vois des hommes. Ils sont six ; nous ne sommes Que deux. Pour dix : mais avec vous ayant le cher Crispin, Qui n'est pas autrement homme propre à combattre. Il faut que de vos dix vous en rabattiez quatre : Qui de dix ôte quatre, il en restera six, Vous voilà tant à tant, faites bien l'Amadis. Ils sont tous de taille gigantine, Vilains hommes à voir, et de mauvaise mine. Hélas, si j'avais fait un mot de testament. Or çà, Maître Crispin, ménageons la bravoure ; Nulle témérité. Peste, comme il les bourre : Que mon Maître est vaillant ! Allons, quoique bien las : Car je n'avais jamais tant remué les bras. Madame, une cohorte De Sergents affamés me suit d'étrange sorte, Il y va de la mort si j'étais attrapé ; Car un homme est dit-on mortellement frappé. Mon Maître en étourdi s'est mêlé dans l'affaire. Et j'ai fait comme lui seulement pour lui plaire. Je vous laisse à juger si j'ai bien ou mal fait, Si vous saviez un trou, ce serait bien mon fait. Il n'est trou, quel qu'il soit, et fut-il même immonde Où je ne veuille entrer le plus content du monde, Pourvu qu'inaccessible à tous vilains Sergents, On n'y viole point le sacré droit des gens. Là-dessus je me tais, Chère Dame, et pour cause ; Car de n'être pas vu, s'il importe à la chose, Il n'importe pas moins de n'être pas ouï. Et bien voulez-vous donc me recevoir ? La frayeur m'attaque en chaque membre : Que puissiez-vous jamais n'avoir besoin de trous, Et que jamais Sergents ne courent après vous. Aimez autant que vous êtes aimable, Si vous voulez aimer autant que moi, etc. Dieu te gard la soubrette. Je viens faire diète. Le fantasque vieillard a rappelé son fils. Nous venons d'arriver tous deux au jour préfix, Moi de mon pied gaillard, sur sa mule mon maître. Je ne puis deviner, où le Seigneur peut-être, Ni comment sur sa mule, et parti le premier, Il ne sera pourtant ici que le dernier. Que dis-tu, Béatris, de chose tant étrange ? Me coucher ? Mon bel ange, Je pourrais t'obéir si je me sentais las ; Mais je ne le suis point n'étant venu qu'au pas. Mon Maître ; est un fou sans remède. Il bat présentement le pavé dans Tolède, Et sans considérer que son Père grison A changé brusquement depuis peu de maison, Et que moi seul j'en sais le quartier, et la rue, Ayant la Lettre seul, reçue, ouverte et lue ; Ce fameux étourdi sans me dire pourquoi, En arrivant ici s'est séparé de moi. Encor faut-il qu'on vive Et conserver un peu quand des champs on arrive. Lit, ni draps d'aujourd'hui ne verront mon corps nu, Que je n'aie causé comme un nouveau venu. Mon Dieu : qu'as-tu fille la moins traitable Des filles de Tolède, et la moins conservable ? Mais je suis bien las. Je ne disais pas bien, Béatris ma mignonne, Médisons un moment sans respecter personne : Médis de ta Maîtresse, et moi je te dirai, Du Maître que je sers tout ce que je saurai. Parlons de nos profits : contons-nous des histoires, Exerçons à l'envi nos heureuses mémoires : Je t'en veux conter une. Il était une fois, Un Roi. Ce Roi faisait sa demeure en un bois. Au milieu de ce bois passait une rivière. Sur la rivière un pont de beauté singulière, Joignait au Pont-levis d'un superbe château, Environné de tours, et de fossés pleins d'eau. Dans ces fossés pleins d'eau nageaient une Sirène. Cette Sirène était. Ma chère ; on siffle, et ce sifflage, Est-ce pour bon dessein, ou pour concubinage ? Va, va, fais ton métier, loin de t'en empêcher, Pour te faire plaisir je m'en vais me coucher. Pour te dire le vrai ; j'adoptais la visite ; Car tu la devais bien à mon rare mérite. À ce bruit effroyable Que l'on a fait la nuit, à la maison du Diable Qu'ont fait le fils, le Père, et le Comte acharnés À trouver maux nouveaux, et se les dire au nez, J'ai quitté le grabat, et j'ai suivi mon Maître, Qui sortait furieux, et pâle comme un traître, Jurant entre ses dents, nommant souvent sa sour, Et la donnant au Diable, elle et son ravisseur. De quartier en quartier il a cherché le Comte : Nous ne l'avons trouvé, ni lui, ni notre compte. Un prévôt nous a pris, et nous a mis leans ; Leans, c'est un manoir qui ressemble à céans ; Céans, c'est la prison ; Prison ; c'est où je peste ; Pester, c'est dire, mort, tête, sang, je déteste, Détester... Si bien que vous avez dégarni la Maison ? Si bien que Léonore avec toi s'est sauvée ? Et sa sour Cassandre ? Je t'apprends que mon Maître est un amant fidèle, Et c'est pour son sujet qu'à son frère germain, Il fit comme tu sais perdre le goût du pain. Cependant, je verrai tantôt face de juge, Cela ne me plaît point ; mais pourquoi sortiez-vous ? Nous sommes en prison, où Crispin et son Maître Sont, me semble, aussi mal qu'ils puissent jamais être, Pour moi je me console, et je rencontre ici, Des gens qui comme moi se consolent aussi. Je viens de leur payer à tous ma bienvenue. En te remerciant. J'espère à mes souhaits si Dieu prête l'oreille, En même occasion te rendre la pareille : Adieu causeuse. Me viendras-tu revoir ? Une fille de bien, qui pour moi s'intéresse. Sont-ils aller dormir nos braves conviés. J'ai fait selon le lieu, le temps et la misère. Le Seigneur Zamorin a dit bien, et très bien. Aussi, n'y suis-je pas pour la première fois. Plus de deux mois, Et pour n'avoir rien fait. La passion extrême Que j'eus pour un objet charmant. Je vous vais raconter l'affaire jusqu'au bout. Un Avocat coquet à tête perruquée, Gardait bien chèrement une bourse musquée, Je ne hais pas cela ; j'en devins amoureux. La Donzelle n'eut pas le cour trop rigoureux, Dans ma poche aussitôt l'amitié nous assemble. L'Avocat enragé de nous voir bien ensemble, (À vous dire le vrai j'avais ravi sa fleur,) Informa contre moi, me traita de voleur ; On m'arrêta pour rapt, me trouvant avec elle, Je fus mis en prison séparé de la belle ; J'alléguai mes raisons, dis qu'elle était à moi, Et soutins qu'elle avait ma parole et ma foi : L'Avocat fit pourtant, rompre le mariage, Et sans mes bons amis j'étais longtemps en cage. Pour aimer par excès. Non, mais un chien de maître ; un vaurien que j'adore. Allant ce Maître et moi, la nuit galantiser, Et vous ne devez pas vous en scandaliser. Car enfin l'homme est homme, et sujet à faiblesse, Comme chacun de nous cajolait sa Maîtresse, La Justice est venue, et nous le fer au poing Nous l'avons repoussée, et poussée assez loin. Notre Maître d'abord a fait de sa main blanche Une plaie au Prévôt au dessus de la hanche, A de son Lieutenant offensé le sternum, Et j'ai fait au greffier visage de guenon. Lui faisant choir du nez la meilleure partie ; L'estafilade est rare, et faite en symétrie ; Elle lui sied fort bien, et partout passerait Pour être naturelle à qui ne le saurait. La plupart des archers sont blessés par mon Maître. Cela pourrait bien être. Les cloches ont sonné, dit-on, auprès de là. L'affaire, s'il vous plaît, soit secrète inter nos. Volontiers camarade, Et moi je vais dormir. Le soleil éclipsé sous un sombre brouillard, Ou bien si vous voulez, sous un noir taffetas, Demande à vous parler. Qu'une femme Dont la mine à mon sens est plus d'une grand Dame Que d'un moulin à vent, demande à vous parler. Elle n'en fera rien : car elle est résolue De vous voir, en dût-elle être ici retenue. Brisons-là, je vous prie ; Je voudrais faire plus pour votre Seigneurie. En perdrais-je les yeux ? Et bien voyons, tant mieux. Mais j'aperçois venir le Diantre qui m'emporte. Ha mon cher Maître ! Près de la porte Je viens devoir le Comte. Et c'est donc toi Lisette ? S'il l'a vue Nous allons voir beau jeu. La peste, mon Patron, et que vous en savez. Et quel homme êtes-vous, qui si bien les sauver ? Que si bien, les prisons fourbes à la sourdine. Votre esprit en sait plus ; que n'en dit votre mine. Sa sour n'a t-elle pas tremblé cruellement, Voyant à ses talons son frère et non Lisette ? Elle aura bien pesté contre vous, la coquette. Ce grand Comte en femme travesti, Avait plus peur que vous, alors qu'il est sorti. Déguisé d'une robe, et couvert d'une mante, Il sentait son fantôme, et non pas sa servante. Au reste il cheminait si masculinement, Que je me divertis d'y songer seulement. Mais hasarder ainsi sa sour sur sa parole C'est, ne vous en déplaise, une action très folle ; Car enfin, par hasard, par curiosité, Ou comme vous voudrez, ce mystère éventé, C'était à vous à courre, et cette pauvre fille Tombait de mal en pis, allait de cage en grille, Était au moins rasée, et par provision, Son beau teint recevait quelque contusion. La pauvrette pour vous de la sorte engagée De ce bon tour d'ami vous est fort obligée : Mais avouez, Monsieur, que vous ne l'avez fait, Que pour passer partout pour Cavalier parfait, Que pour passer partout pour Oreste, ou Pylade : Et tout cela Monsieur, qu'est-ce ? Fanfaronnade. Et Lisette en prison ? Et si l'on la demande ? Ma foi, vous êtes fourbe, et le plus grand d'Espagne. Mais j'ai bien d'autres soins que vos folles amours, Et qui me touchent plus ; changeons donc de discours. À quoi bon, cher Monsieur, ce mortel équipage : À quoi ce pistolet instrument de carnage ? À quoi bon ce poignard ; cette épée ? Et pourquoi, Tant de fer, et vouloir que j'en prenne aussi, moi. Ah, je m'appelle gloire, Je ne tâchai jamais d'avoir place en l'histoire. Vous n'êtes pas plutôt délivré de prison, Que comme un furieux, un homme sans raison, Au sortir d'un malheur vous entrez dans un autre, Je ne vois point d'esprit bâti comme le vôtre. Je crois qu'il est fort beau. Vous allez vous baigner ? Ou bien laisser dans l'eau Mille sales acquêts que votre Seigneurie Aura peut-être faits dans la Conciergerie ? Allez-vous près du Pont dérober les passants ? Enfin qu'allez-vous faire, homme de peu de sens ? Hé quoi, vous en tâtez encore ! Au nom de Dieu, Monsieur, que vos desseins j'ignore, Et de grâce, écoutez quatre mots seulement. On ne nagea jamais plus pitoyablement Que moi, si pour cela vous cherchez la rivière ; Si c'est pour le combat, je recule en arrière, Vous m'avez vu cent fois de vos yeux reculer ; Je pourrais vous servir si vous alliez voler ; Mais je ne le crois pas. Permettez-moi, beau Sire, Puisque vous me savez très habile homme à nuire, Que je suis trop prudent, et vous trop hasardeux Que je m'aille ébaudir pour un quart d'heure ou deux. Je me doute du reste. Adieu, Monsieur, adieu. Les porteurs sont fourbus. Armé comme un voleur Il est tantôt venu jusqu'ici. Le regard fort funeste, Et l'esprit fort hargneux. J'ignore tout le reste. J'ai couru vous chercher, et ne vous trouvant pas J'ai trouvé votre fille, elle a doublé le pas En Basque, et cette Dame est venue avec elle : De tout ce que je sais c'est le récit fidèle. Il était fort mortel, Si peu que je l'ai vu, je l'ai reconnu tel. Défâchez-vous mortels, je vois venir ici, De tant de gens fâchés l'infaillible remède, C'est comme qui dirait, Don Pedre de Cespede. Où je me trompe fort, l'affaire est en sa crise. Ha fouillez-moi plutôt, Si j'ai parlé de rien. Béatris de mon cour. De ces heureux Amants faisons l'épithalame. Ou bien de Béatris. **** *creator_scarron *book_scarron_ecolierdesalamanque *style_verse *genre_comedy *dist1_scarron_verse_comedy_ecolierdesalamanque *dist2_scarron_verse_comedy *id_BEATRIX *date_1654 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_beatrix Je ne puis, ni ne dois. Maudit soit le verrou qui m'a pincé les doigts. Elle l'est autant vaut. Mais vous ; parlez plus bas de peur d'invasion, Notre vieillard qui dort, est d'un sommeil fort tendre ; Si vous parlez trop haut, il pourra vous entendre. Ha ! Mon Dieu, filez doux. Le vieillard réveillé tousse depuis une heure, Et crache son poumon depuis deux, ou je meure. Et même rudement. La clef ne tourne pas. La serrure est mêlée. Ouvrirai-je ? Patience, Je me brisais les doigts. On ne s'en peut aider, Il faut un serrurier pour la raccommoder. Vraiment il est bien loin d'ici, le vilain homme, Il a tiré de longue ayant touché la somme, J'aurais beau l'appeler, il ne m'entendrait pas. De la façon qu'il court, Monsieur, il n'y peut être. Il me le semble. Je veux que l'on me berne S'il ne fera le fou. De la part de l'amour, Qui comme vous le savez sur la raison l'emporte, Je viens au point du jour heurter à votre porte. Nous changeons de logis, Madame vous veut voir. Et ce billet, Monsieur, vous fera tout savoir, Faites ce qu'il contient, et donnez-moi licence, D'aller mettre ordre au mal que ferait mon absence. Si mon voyage ici du vieillard soupçonné, Irritait son esprit de Démon incarné. Et moi je gagne au pied. L'heure me presse. Votre âme vainement se vantait d'être forte. Votre colère cède à l'amour qui l'emporte. Vous rappelez le Comte et je gagerais bien, Que la paix entre vous ne tient plus presque à rien. Madame, à d'autres : Je sais comment sont faits les cours comme les vôtres. Comme je suis femme, et je sais ce que c'est, Que le désir de voir un Amant qui déplaît. Le Comte est un ingrat, si vous voulez un traître, Son mépris est sensible autant qu'il le peut être, Son oubli toutefois plutôt que son mépris, Est tout ce qui vous rend le cour de rage épris. Et vous aimeriez mieux qu'il vous eût offensée, Que son oubli vous eût de son âme effacée. Madame, croyez-moi, les hommes sont des drôles, Et le temps est passé des Amadis des Gaules : Quand j'ai tantôt rendu votre obligeant billet, Qu'en langage d'amour on appelle poulet. J'ai bien vu que le Comte, avec sa fausse mine A pour vous plein son cour de l'amour la plus fine, Et qu'il nous fait semblant, cet artificieux, Que son cour en a moins que n'en prennent ses yeux. Madame, tenez bon ; quoi qu'il dise, ou qu'il fasse, Quand vous serez tantôt avec lui, face à face, Quoique votre billet l'ait chez vous amené, Faites bien la méchante, et qu'il soit mal mené. Il faudra qu'il revienne. Il faudra courre après ; Mais sur lui vos beaux yeux ont fait trop de progrès. Il reviendra cent fois puisqu'il en revient une, Que s'il fait le cruel, faites lors l'importune. J'irai, je reviendrai lui parler ; il faudra, Qu'il revienne, ou qu'il crève. Moi, son amour, vous Madame, Qu'il aime, quoi qu'il fasse, et du meilleur de l'âme. S'il revient aujourd'hui, Il n'est pas sous le Ciel un plus féru que lui. Il vous aime, sans doute, Ou bien, en cas d'amour Béatris ne voit goutte. Mais, Madame, il me semble, et sous correction, Que votre bel esprit manque d'invention. Dites-moi, donc, Madame, un peu de jalousie N'a-t-il jamais un peu troublé sa fantaisie ? Ne l'avez-vous pas fait ? Voilà le mal. Je l'aimerais lui seul ; mais en ligne indirecte J'aurais d'autres galants pour me rendre suspecte. Et quand le beau Narcisse en ferait le cruel, Il ne manquerait pas de matière à duel. Je verrais les doux yeux ; et dessus sa moustache À quelque fanfaron ; c'est là trouver la cache, C'est le meilleur secret de mettre à la raison, Un amant, qui d'amour se croit le vrai tison. Ma foi, de fermeté la sotte qui se pique, Fait un sauvage amant, d'un amant domestique. Il ne faut point saouler un amant affamé, Qui toujours aime peu, quand il est trop aimé. C'est de cette façon que Béatris en use, Aussi suis-je en amour un aigle. Buse. Il viendra sur mon âme : Qu'ainsi ne soit j'entends du bruit, allez, Madame, Allez vous retirer dans votre appartement ; Je m'en vais au-devant du fugitif amant. C'est le chien de Crispin. Que viens-tu faire ici ? Que tu t'ailles coucher. Ton Maître donc ? Va l'attendre en ton lit. Mon Dieu ! Va-t-en chercher ton Maître. Et tu disais tantôt que tu ne l'étais pas. Double fièvre quartaine À ce maudit Pédant. S'il voit le Comte ici, Bon Dieu ! J'entends siffler, et crois que le voici. Tout est perdu. Par ma foi, j'ai bien eu besoin de patience, Voyez un peu son flegme, et son impertinence, Il m'a fait enrager ; mais je le lui rendrai, Il n'en use pourtant pas mal à mon gré, Et j'en attendais pis d'une âme si mal faite. Or ça suivant les pas de feu Dariolette, Faisons entrer le Comte. Il siffle en étourneau. Entrez voleur de nuit. Madame en vous voyant aura beaucoup de joie. Ne faisons pas de bruit. Trêve de compliment ; notre ennemi commun Est tendre à s'éveiller autant qu'un homme à jeun. Doucement. Je venais seulement voir ton Maître, et pour toi Je ne te croyais pas en la Maison du Roi, Mais comment t'a-t-on pris ? Ha tais-toi, tu ris hors de saison. Je t'ai conté comment la chose est arrivée. Chez le Comte. Elle nous fit Un merveilleux accueil ; sa bonté nous ravit ; Enfin, ce n'est plus qu'un de ma Maîtresse et d'elle. J'appris hier cette mort pendant tout leur grabuge. Parce qu'on ne parlait que de donner cent coups, Et savez-vous de quoi ! De poignard, et le père Nous paraissait alors aussi fou que le frère, Nous sommes chez le Comte, et ma maîtresse et lui Ne s'aimèrent jamais tant qu'ils font aujourd'hui. Et moi, je m'en revois comme je suis venue. Il n'y a pas de quoi, Alors qu'on te pendra je prierai Dieu pour toi. Adieu. Si j'y viens, ce sera peut-être vers le soir. Ou pour le moins bien las. Cher Crispin de mon âme. J'en suis : souhaitons leur des filles et des fils De l'humeur de Crispin. **** *creator_scarron *book_scarron_ecolierdesalamanque *style_verse *genre_comedy *dist1_scarron_verse_comedy_ecolierdesalamanque *dist2_scarron_verse_comedy *id_LISETTE *date_1654 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_lisette Je crois que l'on s'y tue. Il tranche avecque vous de l'Époux et du Père, Et vous avez, Madame, un fâcheux petit frère : Mais après tout, Madame, il faudrait oublier Don Pedre ; car enfin, ce n'est qu'un écolier. Tu cherches ton dommage, Et si tu m'avais vue. Tu perdrais ta franchise. **** *creator_scarron *book_scarron_ecolierdesalamanque *style_verse *genre_comedy *dist1_scarron_verse_comedy_ecolierdesalamanque *dist2_scarron_verse_comedy *id_ZAMORIN *date_1654 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_zamorin Reposez-vous sur nous : En matière d'honneur nous nous connaissons tous. L'Écolier est-il brave ? Tant mieux. Tant mieux. Il est expédié, Je le garantis tel, s'il n'appelle à son pied. Or ça, mes compagnons, choisissons un bon poste, Et va d'estramaçon, de pointe, et de riposte. Il faut perdre la vie ou perdre le terrain. Courage. Il est pris pour le coup, point de quartier, qu'il meure, Pour mieux sauter. Elle a parbleu bon air ! Quelle est cette Princesse ? Elle n'est pas pourrie ! Et porte bien les pieds. Ils se sentent un peu de bonne chère. Il faut se réjouir, car nous serons demain Peut-être en l'autre monde, ou du moins en chemin. Pour moi déjà trois fois en cette même place, J'ai vu comme l'on dit le trépas face à face, Je n'en ai pas moins bu, je n'en ai pas moins ri, Car s'en trouve-t-on mieux, pour faire le marri, Vous ai-je pas fait voir des hommes d'importance ? Vive Dieu, si jamais, et l'Espagne, et la France, A vu pareille troupe, et de plus braves gens, En un lieu rassemblés par les mains des Sergents, Nous y tuons le temps à conter quelque Histoire, À jouer, à dormir, à ne rien faire, à boire, Et professons en tout d'agir en gens de bien. Pour voir votre personne en ces lieux écrouée, Je ne vous en vois pas l'humeur moins enjouée. En avez-vous déjà tâté ? Chacun en dit de même, Enfin qui vous y mit ? Dites-vous tout ? Tous les hommes d'honneur sont malheureux ainsi : Mais aujourd'hui pourquoi vous a-t-on mis ici ? Est-ce une bourse encore ; En est-il mort quelqu'un ? Si cette affaire est vraie, et va comme cela, Il y pourrait entrer un tant soit peu d'échelle : Mais à l'homme de cour ce n'est que bagatelle. Con lisenza Patron, je vais dire deux mots, À l'homme que je vois. Mon ami la Taillade Et qui t'amène ici ? Tu me vois en prison. Celui qui t'accusa du vol de deux chevaux ? T'a-t-elle dit l'affaire Comme elle est ? Un certain écolier, Galantisait la sour de certain cavalier. Ce certain Cavalier, nous ayant fait bien boire Et bien payer aussi, pendant une nuit noire, Nous posta cinq bretteurs, pour réduire à néant, En pur assassinat ce brave étudiant. Ce brave étudiant n'était pas une poule. Cinq nous l'attaquons seul ; seul, il nous bat en foule Et donne au Cavalier d'abord entre oil et bat, De ces coups qu'entre nous on nomme échec et mat. Le bourgeois s'accumule, et la justice arrive, On m'attrape, on m'arrête, on demande qui vive, Je ne dis pas le mot ; on me met en prison, Où j'ai toujours dit non, ainsi que de raison. On fait courir de nous un bruit sourd de Galère : Grâce à Dieu, je ne suis ni traître ni faussaire. Si l'on veut que je rame, et bien je ramerai, J'y suis maître passé : mais je me vengerai, Et certains happe-chair en auront dans leurs panses. Et quand tu m'as cherché, Que voulais-tu de moi ? Est-ce affaire de sang ? Vous faites bon marché, Supprimer un seigneur pour si peu c'est péché. Qui seront les acteurs. Vos armes ? L'épée et le poignard assurent mieux un jeu. Ha par ma foi j'enrage De n'en pouvoir pas être, et de me voir en cage. Qui m'en empêchera ! Dieu me garde De la cacher jamais. Tant plus je le regarde, (C'est pourtant l'Écolier je le reconnais bien) Le coupable, et Monsieur ne ressemblent en rien. Celui dont vous parlez, était rouge en visage, Plus petit que Monsieur, et plus gros de corsage : Il était gras à lard, dans sa taille engoncé, Des jambes, il faisait un I grec renversé : Car il était cagneux afin que je m'explique, Et Monsieur est bien fait, et droit comme une pique, Ma déposition seule en vaut plus d'un cent. Je vous le maintien tel, au péril de ma vie. Des hommes je ferais le plus abominable, Et pire qu'un poltron enté sur un voleur, Si je n'avais servi votre rare valeur. Je vous ai vu de pieds, et n'ai vu de ma vie Homme, dont la valeur m'ait donné plus d'envie, Et même ait donné plus à ma mienne à songer. Au reste vous saurez que le Comte étranger Qui vous retient ici, vous payera la dette. Que son affaire est faite. Quelques braves, tous gens de parole et d'effet, Tantôt auprès du Pont lui donneront son fait. Un Seigneur de la Cour, pourvu que l'on l'assomme, Leur doit payer content une notable somme. Un cartel supposé l'amène au rendez-vous, Où leurs bras agiront et pour eux, et pour vous. Le secret. **** *creator_scarron *book_scarron_ecolierdesalamanque *style_verse *genre_comedy *dist1_scarron_verse_comedy_ecolierdesalamanque *dist2_scarron_verse_comedy *id_LATAILLADE *date_1654 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_lataillade Le dessein de te voir. Je viens de le savoir. Ayant à te parler, d'une course inutile J'ai fait en un moment tous les coins de la ville, J'ai couru tous les lieux d'assemblée, et d'ébats, Où nous délibérons des affaires d'État. Enfin, n'espérant plus d'avoir de tes nouvelles, Par bonheur, j'ai trouvé Jane des Écrouelles, La veuve du Boiteux qu'on pendit à Burgos. Le même. Tu sais bien comme la vieille cause ; Elle m'a dit ta prise, et m'en a dit la cause ; Et moi, sans perdre temps, je te suis venu voir. Enragé que ce soit en ce hideux manoir ; Mais il faut en sortir. Je ne sais. Je la trouve peu claire Comme elle la raconte. Cher Zamorin il faut pardonner ses offenses, Nous sommes tous chrétiens. Te mettre d'un marché Pour lequel, j'ai touché milles écus à bon compte. C'est pour tuer un Comte, Le même qui te tient si bien emprisonné, Et l'on lui fait le tour pour un soufflet donné. Un cartel de défi vers le soir nous l'amène Au bout du Pont, où l'eau nous tirera de peine D'ensevelir le corps. Il n'y faut plus songer, c'est une affaire faite. Le Gaucher, la Cliquette, Le Sévillan, et moi. Sont à feu. Nous aurons l'un et l'autre. Tu n'y vieilliras pas. De bel argent de Dieu que la Taillade aura : Seul je touche deux parts, écoute... Grâce à Dieu, peu de visages blêmes Entre quatre bretteurs que nous sommes ici ; Mais ils sont tous choisis par la Taillade aussi. Mes braves compagnons, nous devons rendre compte De cinq cents écus d'or, ou de la mort d'un Comte : Nous sommes bien payés soyons loyaux Marchands, Je hais plus que la mort tous les hommes méchants. Si j'étais bien payé pour mettre à mort mon frère Je le ferais mourir sans faire de mystère. Amorçons nos fusils, visitons nos couteaux, Et n'allons pas ici, Messieurs, faire les veaux ; Si nous opérons mal, nulle miséricorde ; Il y va de la roue, ou du moins de la corde. Notre homme vient à nous, je m'en vais l'amuser, Mais surtout, prenez garde à bien arquebuser ; Ajustez bien vos coups sans faire d'équivoque ; Paraissez à propos, quand il faudra qu'on choque. Cachez-vous cependant dans ce vieil bâtiment. Oui c'est moi. Mon arme a pris un rat. Quelque fat Se ferait assommer. **** *creator_scarron *book_scarron_ecolierdesalamanque *style_verse *genre_comedy *dist1_scarron_verse_comedy_ecolierdesalamanque *dist2_scarron_verse_comedy *id_DONLOUIS *date_1654 *sexe_masculin *age_sans-age *statut_exterieur *fonction_autres *role_donlouis Vous savez mon dessein. Autant qu'on le peut être. On dit qu'il fait des armes comme un Maître. Faisons main basse. Chaque nuit sans manquer il passe par ici, Je vois de la lumière, et crois que le voici. Attendons-le au passage. Cavalier, cédez-moi la rue, et promptement, Je le veux. Nous sommes six. Ha ! C'est trop discourir, Tu mourras, Fanfaron. Donne à lui, Zamorin. J'enrage ! Le traître m'a blessé. Je n'en puis plus. **** *creator_scarron *book_scarron_ecolierdesalamanque *style_verse *genre_comedy *dist1_scarron_verse_comedy_ecolierdesalamanque *dist2_scarron_verse_comedy *id_PREVOT *date_1654 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_prevot Monsieur, vous trouverez ma visite incivile : Mais le triste accident qui m'amène si tard Veut que sans différer l'on vous en fasse part. On vient d'assassiner Don Louis votre frère Devant votre logis. J'espère Que nous l'aurons bientôt ; car j'ai su d'un voisin Que l'on a vu céans entrer cet assassin. Vous avez l'intérêt tout entier dans l'affaire, Le nôtre est seulement le dessein de vous plaire. Nous ferons notre charge. Que l'on sorte, Demeurez Zamorin ; et poussez cette porte. Dites la vérité, Zamorin. Sa déposition aide fort à l'envie Que j'ai de vous servir. Même sans caution On vous peut élargir dès aussitôt qu'au Comte Des informations on aura rendu compte. Vous n'êtes ni connu, ni chargé de témoins : Sans un plus fort indice, on ne peut faire moins Que de vous laisser libre : en tout cas cette affaire Irait à quelques frais, qu'il faudrait encor faire. Je ne dit pas pour moi, qui n'aime pas le bien : Mais vous savez, Monsieur, qu'on ne fait rien pour rien. Monsieur, à la Requête Du Seigneur Don Félix, avec regret j'arrête Un homme comme vous. C'est, Monsieur, pour un enlèvement. Devant que de venir il avait obtenu Le décret. Vous savez, à quoi je suis tenu : Si d'ailleurs je pouvais par quelque bon office Qui dépendît de moi, vous rendre du service, Dessus moi vous avez un absolu pouvoir. L'ordre est déjà donné. Monsieur, vous êtes pris, la résistance est vaine. On vous l'a vu jeter. S'il vit, vous n'aurez pas grand sujet de vous plaindre.