Qu’avec plaisir je reviens en ces lieux, Que jadis mon séjour rendis si glorieux, Où régnaient la splendeur et la magnificence ! Le Fils du plus puissant, du plus juste des Rois Leur redonne aujourd’hui par sa seule présence Encore plus d’éclat qu’ils n’eurent autrefois. Depuis le jour que sur votre promesse Nous nous sommes flattés de le voir en ces lieux, Les Dryades mes Soeurs, et tous ces autres Dieux, Après ce doux moment ont soupiré sans cesse. Nous avons préparé pour lui Les fêtes, les concerts que l’allégresse inspire ; Que le sombre chagrin, que le funeste ennui De cet heureux séjour pour jamais se retire ! Que les Plaisirs en foule y viennent aujourd’hui. Suivez les mouvements de votre ardeur fidèle ; Commencez vos concerts, Que le bruit de vos chants raisonne dans les airs ! Heureux ! Si le succès répond à votre zèle ! Suivons les mouvements de notre ardeur fidèle, Commençons nos concerts, Que le bruit de nos chants résonne dans les airs ! Heureux, si le succès répond à notre zèle Dans les jours de réjouissance, J’ai toujours le premier emploi ; Vous seriez-vous flattés de la vaine espérance De pouvoir vous passer de moi ? Que feriez-vous sans l’Abondance ? À mon visage, à ma suite ordinaire Reconnaissez Comus Dieu des Festins, Dont la présence à vos desseins . Est aujourd’hui si nécessaire. Que vous sert d’assembler au gré de vos désirs Tous les Jeux et tous les Plaisirs ? Si vous n’avez ceux de la Table Tous les coeurs seront mécontents, La Fête la plus agréable Sans moi ne peut durer longtemps. Unissons nos efforts, et qu’une ardeur si belle Sans cesse se renouvelle. Unissons nos efforts, et qu’une ardeur si belle Sans cesse se renouvelle. Apollon en ce jour approuve votre zèle Pour un prince charmant, Et vient joindre aux plaisirs d’une fête si belle D’un spectacle nouveau le doux amusement. Au plus grand des Héros j’ai toujours soin de plaire, Eh ! Que puis-je mieux faire Que de vous seconder par des chants destinés À divertir un fils qu’il aime ? Puissent ces mêmes chants un jour plus fortunés, Le divertir encor lui-même ! Digne Fils de ce conquérant, Que ne quittent jamais Minerve et la Victoire, Tu vois par les respects que l’Univers lui rend Le prix de ses travaux, et l’éclat de sa gloire, Tu vois ses ennemis à ses pieds abattus, Tu jouis des exploits de sa main triomphante, Tâche de l’imiter ; sans cesse il te présente Un exemple parfait de toutes les Vertus. Vous, habitants de ce séjour aimable, Redoublez votre empressement, Gardez-vous de perdre un moment D’un temps si favorable. Apollon flatte nos voeux, D’un succès heureux, Nous connaissons sa puissance, Il remplira notre espérance. Apollon flatte nos voeux D’un succès heureux, Nous connaissons sa puissance,. Il remplira notre espérance. C’est vain qu’en ces lieux j’ai devancé l’Aurore, Hélas ! Je n’y vois point la beauté que j’adore, La Mer qui la cache à mes yeux, Se plaît à renfermer ce trésor précieux. Je fais partout voler le nom de Galatée, Je le répète mille fois, Je l’apprends aux échos, aux oiseaux de ces bois, Loin de moi cependant trop longtemps arrêtée. Seule elle semble ici méconnaître ma voix. Vous n’êtes pas le seul de qui la voix plaintive Se fait entendre en ces lieux chaque jour, Une beauté cruelle, un malheureux amour, M’amène aussi sur cette rive. Pouvez-vous comparer vos maux à mes malheurs ? Je suis mortel : j’adore une déesse, Quelle source pour moi d’éternelles douleurs ! Je n’ose qu’en tremblant exprimer ma tendresse, Et souvent en secret je dévore mes pleurs. Acis, détrompez-vous, Espérez un destin plus doux, Vous ne pousserez point de soupirs inutiles, Après vos longs chagrins, la joie aura son tour, Les Déesses en amour Ne sont pas les plus difficiles. Hélas ! Que n’en est-il de même Du malheureux Télème ? La charmante Scylla, l’honneur de nos hameaux Me fait gémir sous le poids de sa chaîne, Et la rigueur de l’inhumaine Change en hivers tous mes jours les plus beaux... Que d’un coeur méprisé l’état est déplorable ! Qu’une ingrate beauté fait souffrir sous sa loi ! Ah ! Je succombe au tourment qui m’accable, Peut-on sans espérance aimer autant que moi ? Vous attendez ici l’objet qui vous engage, Vous le verrez bientôt paraître sur ses bords, Je vais chercher Scylla dans le prochain bocage, J’ai déjà trop contraint ma flamme et mes transports. Faudra-t-il encore vous attendre Fière Beauté qui régnez dans mon coeur ? Venez par un regard soulager ma langueur, Songez que d’un moment mes jours peuvent dépendre Mes cris ne sauraient vous toucher, Si le récit de ma peine, Si ma mort presque certaine Du fond des flots ne peut vous arracher, Venez jouir du moins sur ce rivage De tout ce que la Terre a de charmants appas. Les fleurs y naîtront sous vos pas, Jamais leur riche émail n’éclata davantage, Vous ne paraissez point ! Qui peut vous retenir ? Peut-être quelque Dieu de la Cour de Neptune Cause-t-il seul mon infortune ? Ah ! Ce serait trop me punir : Dieux ! Mais mon trouble cesse, et je la vois venir. J’ai cru trouver ici la Nymphe qui m’est chère, Je vais lui reprocher son peu d’empressement. Sans cette Nymphe hélas ! Ce rivage charmant N’a-t-il rien qui puisse vous plaire ? Je suis sensib1e aux charmes de ces lieux, Mais ma joie eût été plus grande, Si ce rivage eût offert à mes yeux La Nymphe que je demande. Ah ! Si vous connaissez par la seule amitié Les ennuis que l’absence cause, N’aurez-vous point quelque pitié Des tourments où l’Amour m’expose ? Finissez ce discours : ne pouvez-vous parler Que de votre tendresse ? Hélas ! Un seul moment peut-on dissimuler Des peines qu’on souffre sans cesse ? Pourquoi me voulez-vous forcer à vous celer La douleur qui me presse ? Cherchez-vous à la redoubler ? À regret je vous entends plaindre D’un mal que je ne puis guérir, Étouffez un amour qui vous fait trop souffrir, Vous n’aurez plus à vous contraindre. Ah ! Vous me haïssez, je n’en saurais douter Par cet ordre cruel votre haine s’explique. Suspendez vos regrets pour me laisser goûter L’heureuse paix de ce séjour rustique, J’y viens avec plaisir, tout y charme mes yeux, J’y vois les champs parés de mille fleurs que j’aime ; Enfin le doux penchant qui m’attire en ces lieux L’emporte sur l’horreur extrême D’y rencontrer un Géant odieux. Quoi ! M’arrêterez-vous en dépit de moi-même ! Que me servent les soins que mon coeur prend pour vous ? Mon sort en est-il plus doux ? Hélas ! Plus je vous aime, Plus mon amour aigrit votre courroux... Ô Ciel ! Quel destin est le nôtre ? Quel est le succès de nos voeux ? Serons-nous toujours l’un et l’autre Les plus tendres amants et les plus malheureux ? Ah ! Qu’un Amant dont la plainte Nous cause trop de contrainte Sait peu l’art de nous charmer ! Loin de plaire, il embarrasse, Et ne saurait quoi qu’il fasse, Nous engager à l’aimer. Un amant que l’on dédaigne Doit causer peu d’embarras, Et qu’importe qu’il se plaigne, Si l’on ne l’écoute pas ? Mais quels concerts se font entendre ? Qu’elle troupe paraît, et s’approche de nous ? Ce sont des coeurs unis par l’amour le plus tendre, Des coeurs libres de soins et de soupçons jaloux ; Tous leurs jours sont charmants, tous leurs moments doux, Écoutez leurs chansons, et vous pourrez apprendre Si leurs plaisirs n’ont rien d’agréable pour vous. Que l’Amour qui nous enchaîne Flatte nos tendres désirs ! Goûtons les plus doux plaisirs, Ils viennent s’offrir sans peine, Et pour payer nos soupirs Chaque jour nous les ramène. Que l’Amour qui nous enchaîne Flatte nos tendres désirs ! Que mon coeur est charmé ! Que mon âme est contente ! Je ne puis exprimer la douceur qui m’enchante. Sans l’amour de nos feux Serions-nous heureux ? Redoublons sans cesse Notre tendresse. Redoublons sans cesse Notre tendresse. Former les mêmes désirs, Vivre l’un pour l’autre, Servir de nouveaux plaisirs, Voilà quel sort est le nôtre. L’Amour dans ces beaux lieux nous a tous rassemblés, Célébrons les faveurs dont il nous a comblés. L’Amour dans ces beaux lieux nous a tous rassemblés, Célébrons les saveurs dont il nous a comblés. Que les plus galantes fêtes Parmi nous soient toujours prêtes ! Qu’au bruit de nos chansons la plus fière beauté Ne puisse un seul moment garder sa liberté. Que les plus galantes Fêtes Parmi nous soient toujours prêtes : Qu’au bruit de nos chansons la plus fière beauté Ne puisse un seul moment garder sa liberté. Le fier Poliphème s’avance, Bergers, éloignez-vous, C’est assez de sa présence Pour changer en chagrins vos plaisirs les plus doux. Je regarde partout, et ma recherche est vaine, Ces nymphes, ces bergers que sont-ils devenus, Se peut-il qu’en ces lieux je ne les trouve plus ? Le soin de m’éviter dans ces bois les entraîne ? Où prétendent-ils se cacher ? Connaissent-ils bien Poliphème ? Est-il quelque antre affreux où ma fureur extrême Ne les aille chercher ? Allons, courons punir leur fuite. Mais je vois Galatée, et mon âme interdite Perd toute sa fureur ; Je me sens agité de trouble et de terreur. Que tardons-nous ? Parlons de l’ardeur qui m’anime, Est-ce à moi de trembler ? Si d’un cruel amour je deviens la victime, Qui pourrait me contraindre à le dissimuler ? Vous voyez, charmante Déesse, Un Amant que vos yeux ont soumis à vos lois, J’ignorais le pouvoir de ce Dieu qui me blesse, Je l’éprouve aujourd’hui pour la première fois. Que dites-vous ? Puis-je vous croire ? Je vous fais connaître l’Amour ? Peut-être avant la fin du jour Vous applaudirez-vous d’une telle victoire ? Tout ce que vous voyez reconnaît mon pouvoir, Le Dieu des Eaux m’a donné la naissance, Si vous y consentez je puis vous faire voir Mes richesses et ma puissance : Je veux que tous les coeurs qui vivent sous ma loi Viennent vous rendre hommage, Leur zèle parlera pour moi. Approuvez-vous ces soins où mon amour m’engage ? Je ne condamne point ce dessein généreux. Je suis au comble de mes voeux, Je vais tout préparer pour cette grande fête. Vous connaîtrez bientôt quelle est votre conquête. Enfin j’ai calmé sa fureur, Des coeurs qu’il a troublés dissipons 1a terreur. Quoi ? Vous avez promis d’assister à la fête Que Poliphème vous apprête ? Les soins de ce barbare ont pu vous attendrir, Dans ses projets votre bonté le flatte, C’en est donc fait, ingrate, Vous me condamnez à mourir. Quel reproche osez-vous me faire ? Non, non, je ne puis plus me taire ; Attendez-vous de voir Les plus sanglants effets d’un mortel désespoir. Quoi ? Que voulez-vous entreprendre ? Pourquoi cherchez-vous à l’apprendre ? Si vous ne m’aimez pas, Que vous peut importer ma vie ou mon trépas ? Sans que pour vous l’Amour me sollicite, Je puis souhaiter d’être instruite De vos desseins secrets. Eh bien ! Apprenez donc que ma mort est certaine, Vous ne jouirez plus de mes tendres regrets, En terminant mes jours, je finirai ma peine. Je braverai le Géant furieux Qui me ravit tout ce que j’aime, J’irai troubler ses jeux, et l’attaquer lui-même, Content de succomber sous sa fureur extrême, Et de verser tout mon sang à vos yeux. Écoutez mes tristes adieux ; Je vous laisse, je pars, je cours à mon supplice, Ce n’est que pour la mort que je forme des voeux, Agréez seulement ce dernier sacrifice D’un coeur toujours fidèle, et toujours malheureux. Il me quitte ; arrêtez, Acis, je vous l’ordonne, Je ne puis soutenir le trouble où je vous vois, Contre un si tendre amour ma fierté m’abandonne, Et ma faible raison ne répond plus de moi. Qu’entends-je ? Votre coeur dans mon sort s’intéresse ? Vous n’avez point perdu vos soins, Je vous ai fait voir ma faiblesse, Vos yeux en ont été de fidèles témoins. Jouissez de mon trouble et de votre victoire, Il ne veut point vous en ravir la gloire ; Connaissez le bonheur qui vous est préparé, Je l’ai rendu plus doux quand je l’ai différé. Mais, puisque vous vouliez couronner ma tendresse, Fallait-il du Cyclope approuver les désirs ? Je craignais pour vos jours sa fureur vengeresse ; Je voulais à ses yeux dérober nos soupirs Par une agréable promesse. Immortels habitants des Cieux ! Dans les transports de mon âme ravie Je puis regarder sans envie Votre sort glorieux. Aimer, d’un doux succès voir sa flamme suivie, N’est-ce pas un plaisir réservé pour les Dieux ? De mon fidèle amant j’ai rempli l’espérance, Mon coeur répond à ses désirs ; De ce tendre berger couronnez la constance, Ne lui refusez plus le prix de ses soupirs. Suivez l’exemple qu’on vous donne, Une déesse à l’amour s’abandonne, Son coeur ne peut plus résister, Que peut mieux faire Une bergère Que de l’imiter ? Vous défendez-vous encore, Contre un amant qui vous adore, Et dans un jour au bonheur destiné, Serai-je seul infortuné ? En vain vous prétendez inspirer à mon âme Le désir de s’enflammer, L’exemple et les conseils nous forcent-ils d’aimer ? Par son propre penchant il faut qu’un coeur s’enflamme, Vous l’avez entendu cent fois, Je fuis l’Amour, je méprise ses lois, Quittez une entreprise vaine ; Vos soupirs importuns me pourraient engager À redoubler votre peine Plutôt qu’à la soulager. C’en est trop ! Vos mépris étouffent ma tendresse, Je sens le calme heureux de ma première paix, Et je dois rougir désormais D’avoir montré tant de faiblesse. Cependant redoutez la vengeance des Dieux, Ils me font pressentir le sort qui vous menace, Ils éteindront ce feu qui brille dans vos yeux, Ils rendront vos attraits sans douceur et sans grâce. Que dis-je ? Ils changeront ces riches dons des Cieux En des marques de leur colère, Et vous serez un jour par ce retour sévère L’objet le plus funeste et le plus odieux. Quelque fureur qui l’inspire Il ne saurait m’alarmer, Je crains moins les malheurs qu’il vient de me prédire, Que le péril d’aimer. Je ne puis approuver cette fierté rebelle Qui flatte votre vanité, Une extrême cruauté Pour un amant fidèle Est toujours criminelle. Vous aimez tendrement ; je déteste l’amour, Et déjà ma fierté commence à vous déplaire ; Je me bannis de votre Cour, Pour éviter votre colère. Quelle erreur loin de nous précipice ses pas ! Dieux ! qu’un vain orgueil l’abuse ! L’insensible ne connaît pas Les plaisirs qu’elle refuse. N’assurerez-vous point ma gloire et mon bonheur ? Après le don de votre coeur Aurai-je encor des voeux à faire ? Je puis donner ma foi par l’aveu de mon père, Je l’ai sur votre amour dès longtemps pressenti, À vos désirs Nerée a consenti. Le Temple de Junon nous offre un seul asile, Nous y serons en liberté, Il est bâti dans l’endroit de cet île Le plus inaccessible et le moins fréquenté. Allez y préparer l’encens et les victimes Dignes de consacrer nos ardeurs légitimes, J’aurai soin de m’y rendre avant la fin du jour, J’y conduirai l’hymenée et l’amour. Qu’une injuste fierté nous cause de contrainte, Et tyrannise nos désirs, Tandis qu’à mon Amant j’ai caché mes soupirs, J’ai souffert mille maux dans cette longue feinte, À peine mon amour s’est expliqué sans crainte, Que j’ai senti mille plaisirs ; Qu’une injuste fierté nous cause de contrainte, Et tyrannise nos désirs ! Doux transports d’une âme contente Que vous êtes charmants ! Mais je vois le Cyclope, il prévient mon attente, Contraignons-nous quelques moments. Qu’à l’envi chacun se presse De me suivre dans ces lieux, Pour un coeur que l’Amour blesse Les moments sont précieux ; Préparez à ma Déesse Un triomphe glorieux ; Hâtez-vous, il faut sans cesse Rendre hommage à ses beaux yeux. Qu’à l’envi chacun se presse De me suivre dans ces lieux. Qu’à l’envi chacun se presse De vous suivre dans ces lieux ! Pour un coeur que l’Amour blesse Les moments sont précieux, Préparons à la Déesse, Un triomphe glorieux ; Hâtons-nous, il faut sans cesse Rendre hommage à ses beaux yeux, Qu’à l’envi chacun se presse De vous suivre dans ces lieux ! Connais, puissant Amour, ta dernière victoire, Ce triomphe suffit pour te combler de gloire, Tu ranges sous tes lois un coeur audacieux, Qui méprise la foudre et brave tous les Dieux. Ô vous ! Adorable immortelle Écoutez favorablement Les voeux de votre amant, Vous ne ferez jamais de conquête si belle, Plus un coeur est loin d’aimer, Plus il est beau de l’enflammer. Je suis content de votre zèle, À mes yeux vos transports ont assez éclaté, Voyons s’ils ont su plaire à ma divinité : Qu’on me laisse seul avec elle. Chaque moment me tue, et redouble mes feux, Je ne puis plus souffrir l’ardeur qui me dévore, Hâtez-vous de me rendre heureux. Voulez-vous accabler un coeur qui vous adore ? Le seul Nerée a droit de disposer de moi, Jamais à ses désirs mon coeur ne fut contraire, Peut-on sans son aveu me demander ma foi ? Allez : et pour l’hymen que votre amour espère, Méritez le choix de mon père. Oui j’obtiendrai l’aveu charmant Qui seul peut assurer le repos de ma vie, Ma demande sera suivie D’un prompt consentement. Pour hâter mon bonheur je vais tout entreprendre, Votre père connaît ma force et mon pouvoir, Et sait trop ce qu’on doit attendre D’un amant tel que moi réduit au désespoir. Vous qui dans ces lieux solitaires Célébrez avec moi Junon et ses mystères, Ministres de son Temple, et favoris des Cieux, Qui faites vos plaisirs du service des Dieux, Préparez les fleurs les plus belles, Et l’encens le plus précieux, Vous verrez bientôt en ces lieux Arriver deux amants fidèles, Ils sont dignes des soins que vous prendrez pour eux, L’hyménée et l’amour veulent qu’ils soient heureux. Puissent-ils près de nous trouver un sûr asile ! Daigne le juste Ciel favoriser leurs voeux ! Puissent-ils voir croître leurs feux Dans un hymen doux et tranquille. Qu’ils forment chaque jour mille nouveaux désirs ! Que 1’Amour seul ait soin de régler leurs plaisirs ! Puissent-ils près de nous trouver un sûr asile ! Daigne le juste Ciel favoriser leurs voeux ! Puissent-ils voir croître leurs feux. Dans un hymen doux et tranquille. Les voici ces tendres amants, Dans leur impatience ils comptent les moments, Avançons vers le Temple, et par un sacrifice Intéressons Junon à leur être propice. Que vois-je ? Quel objet pour un amant jaloux ? L’Ingrate Galatée, et le berger qu’elle aime ? Tu mourras, téméraire, et Jupiter lui-même Ne saurait dérober ta tête à mon courroux. Le Cyclope menace ! Ô Ciel protège nous ! Sers-toi pour nous sauver de ton pouvoir suprême. Fuyons sa violence extrême ; Heureux de pouvoir l’éviter. Vous me quittez ? Hélas ! N’osez-vous arrêter ? Fuyez Acis, s’il est possible Ou votre perte est infaillible. Mourant pour vos beaux yeux, je ne crains point la mort. Où puis-je la trouver plus belle ? Dois-je enfin me plaindre du sort Si je meurs heureux et fidèle ? Quel chemin ont-ils pris ces amants trop heureux ? Sans doute Jupiter s’intéresse pour eux. Qu’il se montre, ce Dieu que l’Univers révère, C’est un objet digne de ma colère. Je l’attends : mais il craint de paraître à mes yeux, Et croit braver ma rage enfermé dans les Cieux ; J’y monterai malgré l’effort de son tonnerre, J’entasserai ces monts pour aller jusqu’à lui, Et ferai plus trembler tout l’Olympe aujourd’hui, Que ne firent jadis les enfants de la terre. Mais commençons d’exercer mon courroux Sur un rival que je déteste. Qu’il soit anéanti par un seul de mes coups, Que sa mort soit enfin si triste et si funeste, Que de tout son bonheur je ne sois plus jaloux ! Allez, éloignez-vous, faut-il vous le redire ? Vous me fuyez ? Par où l’ai-je donc mérité ? Traître, reçois le prix de ta témérité. Déesse c’en est fait, je vous perds, et j’expire. Il est mort l’insolent ! J’ai trompé son attente, Je suis content puisque je suis vengé, Ah ! Quel plaisir pour un coeur outragé Qu’une vengeance sanglante. Et toi Déesse perfide, Pleure l’indigne Amant que tu m’as préféré ; Ma tendresse a fait place au transport qui me guide, J’ai repoussé les traits dont j’étais pénétré. Publions par tout ma victoire, Elle assure à la fois mon repos et ma gloire, J’immole dans le même jour Mon rival et mon amour. Enfin j’ai dissipé la crainte Qui m’arrêtait au fond des flots, Je vois régner ici le calme et le repos, Ma flamme désormais ne sera plus contrainte. Cherchons seulement Le berger charmant Que mon coeur adore ; Hélas ! Il ne vient point encore. Acis, mon cher Acis en quels lieux êtes-vous ? Revenez près de moi, tout est ici tranquille ; Vous n’avez plus besoin d’asile Contre un injuste courroux. Quoi, tu ne réponds point à ma voix qui t’appelle ? Je commence à sentir une peine mortelle De ton éloignement ; Reviens, mon cher Acis, dois-tu perdre un moment ? Mais quelle terreur secrète M’alarme et m’inquiète ? Quelle image, grands Dieux ! vient frapper mon esprit ? Je tremble, quel objet à mes yeux se présente ? Les rochers renversés, et la terre sanglante M’assurent le malheur que mon coeur m’a prédit. Que ne puis-je expirer après ce coup funeste ? Mon amour à jamais fera couler mes pleurs ; Heureux mortels ! Dans de pareils malheurs. L’espoir de la mort vous reste. Fut-il jamais un destin plus affreux ? Quel coeur a ressenti la douleur qui me presse ? Je perds l’objet de ma tendresse Quand nous sommes prêts d’être heureux. Faut-il encor pour croître mon supplice Que de sa mort je sois complice ? J’ai pu l’abandonner dans ce pressant danger ? Quand son amour faisait éclater son courage. Ah ! Je ne puis y songer, Sans frémir de honte et de rage ! Songeons du moins à le venger. Poursuivons le Géant, invoquons les Furies, Qu’il ne puisse trouver d’asile ni d’appui ! Qu’elles exercent sur lui Toutes leurs barbaries : Mais ce cruel châtiment Me rendra-t-il mon amant ; Pour soulager ma peine extrême Il faut me rendre ce que j’aime. Puissantes Divinités, Généreuse Thétis, favorable Neptune ! Si jusqu’à vous mes soupirs sont portés Faites cesser mon infortune, Ranimez mon amant, redonnez-lui le jour, Et s’il se peut encor augmentez son amour. Je sors de mes grottes profondes, Tes cris ont pénétré jusques au fond des ondes, Tes maux par mon secours seront bientôt finis, Je viens pour réparer le crime de mon fils. Vous que la Loi du sort soumet à ma puissance, Dieux ! Qui suivez ma Cour, Paraissez sur les Eaux, honorez ce grand jour De votre auguste présence. Nous accourons au seul bruit de ta voix, Notre plus doux plaisir est de suivre tes lois. Ma fille, le Destin répond è ta prière. Vivez, Acis, vivez, revoyez la lumière ; Mais vivez désormais Pour ne mourir jamais,. Acis, vivez désormais Pour ne mourir jamais. Que votre sang se change et devienne une eau pure, Dont l’agréable murmure Fasse naître dans tous les coeurs D’innocentes ardeurs. Cher Acis !     Galatée ?         Il m’est permis encore De revoir ce que j’adore. Jouissez des biens éternels Qui sont faits pour les immortels. Vous Fleuves amoureux, vous Naïades charmantes Venez de ces amants redoubler les plaisirs ; Venez, animer leurs désirs Par les chansons les plus touchantes. Sous ses lois l’Amour veut qu’on jouisse D’un bonheur qui jamais ne finisse. Tendres coeurs venez tous, En jouir avec nous. Sous ses lois l’Amour veut qu’on jouisse D’un bonheur qui jamais ne finisse, Tendres coeurs venez tous En jouir avec nous. Vous qui croyez l’amour une faiblesse, Ne venez point troubler notre innocente paix, Ce n’est point pour des coeurs sans tendresse Que nos chants amoureux et nos plaisirs sont faits. Tendres coeurs conservez l’espérance, C’est en vain qu’on vous fait résistance, Qu’on s’arme de rigueur, de haine et de courroux ; Que ne vaincrez-vous point si i’Amour est pour vous ? Tendres coeurs conservez l’espérance, C’est en vain qu’on vous fait résistance, Qu’on s’arme de rigueur, de haine et de courroux Que ne vaincrez-vous point si l’Amour est pour vous ? Désormais on doit aimer sans crainte, De quoi sert une injuste contrainte ? Beautés à qui le Ciel a donné mille appas, L’Amour vous punira de n’en profiter pas. Sous ses lois l’Amour veut qu’on jouisse D’un bonheur qui jamais ne finisse. Tendres coeurs venez tous En jouir avec nous.