Ah, vous êtes ici, Monsieur Dupont , je vous faisais chercher partout. Il y a une demi-heure que j’attends. Ah ça, cette saisie, il faudra la faire rendre Mais Monsieur, c’est la seconde fois que ces gens-là sont pris en flagrant délit, On n’en sait rien, ainsi n’en parlez pas. Je sais bien que Madame votre mère s’intéresse pour eux, et je lui ai dit qu’ils n’étaient pas dans le cas qu’on leur fasse de grâce. Vous avez bien fait ; mais Madame de Franville m’a dit qu’elle se brouillerait avec moi, si je ne finissais pas cela comme elle le désire ; ainsi vous voyez bien.... Il n’y aura qu’à faire accroire à Madame votre mère que c’est à sa considération. Sans doute. Monsieur, veut-il signer cette délibération d’hier ? Oui, donnez. J’ai répondu au Receveur d’Étampes qu’il faut qu’il fasse des poursuites. Il faut ajouter, sans quoi il sera cassé. Je l’ai mis aussi. Avez-vous les deux bons pour cet entrepôt de tabac et le grenier à sel ? Oui, Monsieur, les voilà. C’est très bien. Si Monsieur voulait donner l’entrepôt de tabac à mon frère. Votre frère ? Mais je l’ai placé. Oui, Monsieur ; mais il n’a que huit cent francs. Il est encore bien heureux. Mais Monsieur, à moi ; il y a longtemps que vous m’en promettez un. Nous verrons cela une autre fois, est-ce que vous voulez me quitter ? Non, Monsieur, assurément ; mais je le ferais exercer. Cela ne se peut pas, il faut exercer soi-même. Mais Monsieur, il y a des exemples.... Oui, autrefois ; mais à présent cela ne se sait plus. Mais le Grenier à Sel ; mon père est dans cette ville-là et en le mettant sous son nom... Votre père, votre père n’entend rien à ces affaires-là. Monsieur l’Abbé de la Sourdière. Ah, Monsieur l’Abbé, je suis charmé de vous voir. J’avais peur de ne pas vous trouver. Je devais sortir ce matin ; mais une affaire que j’avais, est remise ; j’en suis bien aise, parce que j’ai l’honneur de vous voir. C’est que j’ai une grande affaire à vous : c’est la Vicomtesse, elle voulait venir elle-même mais elle a été obligée d’aller à Versailles. Qu’est-ce que c’est ? C’est pour un homme qu’elle protège beaucoup, et vous lui ferez le plus grand plaisir, si vous pouvez lui donner un entrepôt de tabac, ou un grenier à sel, qui est dans votre département : voilà son mémoire, vous verrez les droits de cet homme-là, elle ne demande pas à propos de rien. Je n’ai pas besoin de voir ; ces deux emplois ne sont pas de mon département et je n’y peux rien du tout. On lui avait pourtant dit que cela vous regardait. Je le voudrais très fort, je serais enchanté de pouvoir lui faire ce plaisir-là, ainsi qu’à vous. Quoi, ni l’un ni l’autre ? Ni l’un ni l’autre. Elle y compte pourtant. J’en fuis désespéré. Elle se plaint déjà beaucoup de vous au moins. De moi ? Oui vraiment, elle dit que vous la négligez depuis quelque temps. Elle est bien bonne ; j’aurai l’honneur de lui aller faire ma cour incessamment. Je lui dirai donc que cela ne vous regarde pas. Si vous voulez bien. Où allez-vous donc, Monsieur l’Abbé ? Est-ce que vous ne dînez pas ici ? Non, je ne peux pas avoir cet honneur-là aujourd’hui. Mais quand vous verra-t-on ? Sûrement demain ou après. Ah ça, vous êtes en affaire, laissez-moi aller. Vous le voulez ? Vous vous moquez de moi. Ne m’oubliez pas. Non, non. Où en étions-nous ? Ah, ces deux cavaliers qui ont été pris avec du tabac ? Monsieur, voilà le procès-verbal. Allons, il faut écrire au Major. Savez-vous où est leur régiment ? Non, Monsieur. Vous vous en informerez. Oui, Monsieur. Il saut répondre à Monsieur Delorme à propos. Écrivez. Ne manquez pas, Monsieur, sitôt la présente reçue. Reçue ? Reçue, de faire faire l’état que vous me proposez. Monsieur, il y a là un employé de Chartres qui demande à vous parler. Savez-vous ce qu’il veut ? Non, Monsieur ; il dit que c’est quelque chose de très pressé. Faites-le entrer, Entrez, Monsieur. Eh bien, Monsieur, qu’est-ce qu’il y a ? Pourquoi venez-vous à Paris sans congé ? Monsieur, c’est que je viens vous demander vos bontés. Pour quoi faire ? C’est que si Monsieur, voulait... Parlez donc. Le Grenier à Sel d’Épernon est vacant et il ne dépendrait que de Monsieur de faire ma fortune. Cela ne se peut pas. Mais, Monsieur, considérez... Allons, Monsieur Dupont, où en sommes-nous ? De faire faire l’état que vous me proposez. Que vous me proposez dans votre lettre du vingt-et-un de ce mois. Si j’osais, Monsieur... Allons, en voilà assez. Mais, Monsieur, si Monsieur voulait se ressouvenir que j’ai eu une fois le bras cassé par des Contrebandiers, et que j’ai été encore une autre fois blessé... Vous avez eu une gratification. Il est vrai, Monsieur, aussi je ne m’en plains pas. Après Monsieur Dupont? Dans votre lettre du vingt-et-un de ce mois. Du vingt-et-un de ce mois; parce qu’en conséquence je ferai délibérer. Monsieur... Je vous dis encore une fois que cela ne se peut pas, et je vous conseille de vous en aller tout de fuite, dans quoi on vous apprendra à venir à Paris sans congé. Monsieur, j’espère que vous me pardonnerez. Oui ; mais que cela ne vous arrive plus. Allons, adieu. Monsieur, je suis bien fâché... Allons, allons, c’est bon ? Madame de Villemare. Ah, mon frère, je suis charmée de vous trouver. Moi, je suis bien aise de voir que vous vous portiez bien à présent. Ah, ne parlez pas de cela, je suis dans un état affreux depuis huit jours ; j’arrive de la campagne pour voir ce que je ferai à mes nerfs. Comment est-ce que la campagne ne vous a pas fait de bien? Non, vraiment, au contraire. C’est que vous vous êtes toujours couchée au jour, je le parierais. Eh bien oui ; mais je ne peux pas faire autrement ; ne parlons plus de cela. Je n’en parlerai pas si vous voulez ; mais si vous vous couchiez comme moi à minuit, vous verrez que vous vous porteriez à merveille. Je le disais encore hier à votre mari. Si vous m’aimiez, voilà ce que vous ne lui diriez pas. Mais je vous demande pardon ? C’est parce que je vous aime. Nous allons le voir ; car je viens vous demander de me faire un plaisir. Qu’est-ce que c’est ? Vous connaissez la Marquise de Comciere? Oui. Vous savez comme nous nous aimons. Oui, comme les femmes s’aiment. Vous ne le croyez pas ; cependant rien n’est plus vrai, je l’aime beaucoup moi. Il y a un homme pour qui elle s’intéresse vivement, je me suis chargé de vous demander pour lui un entrepôt de tabac qui est vacant et que vous... Il est donné. Mais il y a un Grenier à Sel. Tout cela est donné. Mais son père doit vous écrire aussi. Le Père de la Marquise ? Oui, vous ne pouvez pas le refuser/ Pourquoi cela ? Il n’est plus en place. Ah, mon frère !... Un homme comme lui ! Mais, Madame, je ne peux pas faire l’impossible. Ma mère vous en parlera, je vous en avertis. Ma mère me tourmente toujours ; tenez, Monsieur Dupont, peut vous dire qu’il y a deux de ses protégés à qui je sauve aujourd’hui les galères. Bon, voilà une belle misère ! Mon frère si vous pouviez vous me feriez plaisir, d’ailleurs vous connaissez celui pour qui nous demandons. Qui est-ce ? Monsieur Demérin. Demérin ? Oui, il est là dans votre antichambre. Ah bien, j’arrangerai cela avec lui. Je vous en aurai la plus grande obligation. Ne vous inquiétez pas. C’est charmant à vous. Je m’en vais en ce cas-là. Pourquoi ne dînez-vous pas ici ? Est-ce que je dîne ? Vous avez tort. Oui, avec mon estomac. Ah ça, adieu mon frère. Embrassez-moi donc. Quand est-ce que je vous verrai ? Ce soir ou demain. Monsieur Demérin, entrez un peu ici. Monsieur, Madame votre soeur a eu la bonté de vous parler en ma faveur. Oui, oui ; mais je voudrais bien savoir à propos de quoi vous vous avisez de me faire parler comme cela par tout le monde. Monsieur ; c’est que je n’ai osé vous parler moi-même. Et vous avez bien fait Monsieur. Je trouve votre demande fort extraordinaire. Comment, Monsieur... Il me semble que vous deviez être content de l’emploi que vous avez. Monsieur, ce sont ces Dames qui veulent bien s’intéresser à moi, et qui ont cru, que vous voudriez bien me protéger. Je vous protégerai aussi ; mais c’est pour vous conserver ce que vous avez et je vous défends de jamais penser à autre chose. Monsieur, je n’ai pas cru... Il n’est pas question de cela, Monsieur, je vous le dis très sérieusement. Cela suffit, Monsieur. Pensez-y, et qu’il ne me vienne plus de recommandation à votre sujet, allons, voilà qui est fini. Monsieur, comme vous voudrez. Ces Messieurs-la ne font jamais contents avec douze cents francs il me semble qu’il y a pourtant bien de quoi vivre. Monsieur, il y a là Monsieur Dubois et un de ses parents. Qu’est-ce que c’est que Monsieur Dubois ? C’est le valet de chambre de Madame de Franville. Faites-le entrer. Qu’est-ce qu’il y a, Monsieur Dubois ? Monsieur, Madame de Franville vous fait bien ses compliments, et voilà une lettre qu’elle m’a chargé de vous remettre. Ah, ah, voyons. Voilà aussi Monsieur Delafond, le frère de Mademoiselle Julie, qu’elle vous recommande. C’est le frère de Mademoiselle Julie ? Oui, Monsieur, la femme de chambre de Mademoiselle. Ah je suis bien aise de lui faire plaisir, ainsi qu’à vous, Monsieur Dubois. Monsieur, nous vous serons très obligés. Monsieur Dupont, mettez le nom de Monsieur Dubois, au bon pour l’entrepôt de tabac et à celui du Grenier à Sel celui de Monsieur... Delafond, Monsieur, à vous servir. Vous direz à Madame de Franville que je ne lui écris pas ; mais que j’aurai l’honneur de la voir ce soir. Monsieur, je n’y manquerai pas. Monsieur, c’est fini. Tenez, Messieurs, ah ça, j’espère que vous vous comporterez bien. Ah, Monsieur, vous pouvez en être bien sûr. Allons, je suis charmé de vous avoir fait plaisir. Nous vous avons bien de l’obligation, et nous ne l’oublierons jamais. C’est très bien. Adieu, adieu. Monsieur est servi. Allons, Monsieur Dupont, allez-vous-en dîner, nous achèverons cela tantôt. Revenez de bonne heure. Oui, Monsieur.