Ah ! le coeur me bat ; Car mon fils combat Contre un fier tyran, Qui pis est son parent. Sparte, je rougis D’aimer mon cher Agis : Hélas ! c’en est fait, Peut-être il est défait : S’il vit, je le pleure, Ou dans ma demeure Je mourrai sur l’heure, À moins qu’il ne meure : Ah ! ce n’est qu’ici, Qu’on se console ainsi. J’aperçois Lysander, l’ancien précepteur de mon fils : cet homme-là n’est point sans mérite ; d’ailleurs, il fait fort bien les nouvelles. Sparte enfin, prudent Lysander, Ressuscitera -t-elle ? Ah ! ce bien à nos coeurs si cher, La liberté chancelle. J’entre au Sénat : dans mon ardeur ; Je parle, je pérore ; Mais ils m’ont pris pour un plaideur ; Car ils dorment encore. Ah ! combien nous comptions pourtant Sur leurs décrets suprêmes ! Mais qu’aperçois-je en cet instant ? Parbleu ! ce sont eux-mêmes. Pourquoi dans mon appartement, Leurs faces parasites ? Ah ! c’est qu’ils sont apparemment Dans leur cours de visites. N’allez pas les faire asseoir ; ils s’endormiraient encore. Eh ! Comment les en empêcher, s’ils en ont envie ? Parlez-leur de la Patrie, de la vertu, de la gloire. Ils dormiraient debout : quoi qu’il en soit, essayons une petite mercuriale, à la manière, accoutumée. Je suis de vous Très mécontente, Entendez-vous ? Vous craignez un tyran infâme ; Vous moliriez, s’il était là : Faut-il que ce soit une femme Qui vous reproche ces torts-là ? Chacun pour soi dans cette affaire ; Aucun n’est Grec ni Citoyen : Les uns agissent pour mal faire, Et tous les autres ne sont rien. À la buvette, Vous oubliez votre pays, Et la besogne n’est pas faite, Que l’on vous voit mener Thémis À la buvette. Ces Messieurs ne disent rien. Ils n’en pensent pas moins. Mais attendons Emphases Pour concerter nos projets. Je l’ai vu tantôt vraiment, Méfions-nous-en, Méfions-nous-en : Pour moi je le crois tout bas, Ami de Léonidas : Il semblait sous le fer endormir la victime. Je l’aperçois. Voilà ce que c’est que d’en parler ! On récit va les surprendre ; Mais hélas ! Quel détour prendre ? Comment puis-je leur apprendre Un si déplorable sort ? Que la mère m’intéresse ! Mettons-y beaucoup d’adresse, Et ménageons sa tendresse... Ah ! Madame, Agis est mort. Il est mort ! Quel plaisir ! Ah ! mon désir S’accomplit : je suis heureuse, Mon fils meurt : C’est un malheur Pour Sparte, et non pour mon coeur. La tête lui tourne : rassurons-la. Mais, écoutez, Madame, il n’est peut-être que battu, blessé légèrement, et d’ailleurs en très bonne santé. Qu’entends-je ! Ne me cache rien Du malheur qui m’accable : Ah ! Si mon fils se porte bien, Je suis inconsolable. Au reste, dans l’art des combats Je ne suis pas novice. S’il n’est plus, je cours sur ses pas Demander du service. Pour vous, Messieurs, je vous conseille de prendre votre parti : je sais de très bonne part que Léonidas se prépare à vous remercier. Quel désespoir, D’être sans état à notre âge ! Quel désespoir, Que faire du matin au soir ! À Nous deux maintenant. Profitons du malheur de tous, De moitié nous serons ensemble... Que dis-tu ? Quoi, tu trahis l’État ? Un peu ; mais qu’importe ? Quand c’est sur toi que se fonde Notre commun intérêt ! La fortune me seconde, Mon sort n’est pas encor fait : Chacun pour soi dans ce monde, Le sceptre est beau tel qu’il est. Je ne t’ écoute pas ; laisse-moi, traître, ne compte plus sur mon amitié. Nous mourrons courageusement, Sans que tu sois de la partie. J’en suis indigne assurément ; Admire au moins ma modestie. Te parlant encor, je croirais Partager ton ignominie. Reste tout seul.         Ah ! je pourrais Être en meilleure compagnie. Il m’émeut avec sa vertu : je sens.... Allons, allons, point de faiblesse ; les petits scrupules dérangent les grands projets. J’entends Agis et les boucliers des soldats. Défait, proscrit, chassé, comment, peut-il rentrer dans Lacédémone ? Le tyran est trop prudent pour le lui permettre. Ah ! J’ai bien peur que ce ne soit point la faute de Léonidas. Tenez, parlez-moi des grands-hommes Pour n’être jamais abattus. Messieurs, je pense que nous sommes Assez bruyants pour des battus. Ceci finira la campagne ; Tant que j’ai pu, j’ai bataillé : Nous jouions au Roi dépouillé ; Mon beau-père est celui qui gagne. Allez, mes chers amis ; je suis très reconnaissant de vos services, et je vous réforme. C’est ma femme : enfin plaignons-nous De son humeur légère ; Vous aviez quitté votre époux. Non, j’ai suivi mon père. Tu souffres ; je dois partager Ton malheur et ta chaîne. Peut-on voir, sans le soulager, Un homme dans la peine ? Ces sentiments là sont très-beaux, et vous êtes justifiée. J’aperçois ma mère. Eh bien, ma mère ? Eh bien, mon fils ? Cet échec est déplaisant, Que faut-il faire à présent ? Pendant qu’un tyran prépare Un supplice affreux, barbare, Je crois qu’il serait malin De me tuer de ma main. Faut d’la vertu, pas trop n’en faut, L’excès partout est un défaut, bis. Quand on est mort, c’est pour longtemps, L’on est affranchi des méchants, De l’esclavage et des tyrans. Tu ne m’entends donc pas, mon cher Agis ? Faut d’la vertu, etc. Soyez donc d’accord avec vous, ma mère. Vous désiriez impatiemment ma mort, si j’étais battu : je le suis, vous m’engagez à vivre, Ah ! J’ai tort, j’ai tort ; c’est une petite inconséquence maternelle, dont je rougis. Fais tout ce que tu jugeras à propos, je ne t’en empêcherai pas. Maintenant je suis refroidi ; d’ailleurs, j’aperçois Léonidas qu’il faut que j’insulte un peu pour humilier sa victoire. J’ai puni ton audace Et la mort où tu cours... Je ris de ta menace, Et crains peu pour mes jours. Çà n’durera pas toujours. Mon cher Agis, mon père ! Ah ! Puissai-je en ce jour, me montrant fille et femme... Mais, mon cher enfant, c’en est aussi trop à la fois. Et toi ! Crois-tu que mon courroux dissimule l’affront, Que mon sceptre brisé fit jaillir sur mon front. Encore un coup, mon père, ne dites pas de ces folies-là. Hélas ! pouvez-vous voir, sans en être attendri, Ces vêtements de deuil, ce visage flétri ? Regardez ces traits Pâles et défaits. Hélas ! Mon oeil est éteint : Pleurer, a gâté mon teint. Voyez ma douleur, Je tombe en langueur. Ah ! papa, si j’avais su, J’aurais eu Moins de vertu. Pourquoi donc, ma chère fille, M’étourdir de tels regrets ? Ta mine est toujours gentille, Tes appas sont toujours frais : Plus d’un que ta bouche frappe, Épris de cet oeil mutin, Mordrait encor à la grappe Dans la vigne du voisin. Mon père, laissons la bagatelle, et daignez accorder à mon mari... Que demande- t-il ? Selon les anciens usages des tyrans, Prendre nos biens sans nuls ménagements. Goûter les plaisirs toujours à nos dépends, C’était ton ancienne méthode : Aujourd’hui rends-nous la douce égalité, Que chacun ici trouve la liberté, Et mettons nos femmes en communauté, Par-là nous serons à la mode. L’égalité ! Chimère : et sur qui régnerais-je ? Sur toi-même. Le bel empire ! Décide-toi, Léonidas.... Où suis-je ? Ici, je crois. Licurgue ressuscite, Sparte renaît triomphante. Qu’a-t-il donc ? C’est une vision ; il est sujet à cela depuis son enfance, ce ne sera pas la dernière. Eh bien, Léonidas, sommes-nous égaux ? Je ne dis pas non, seulement qu’Emphasés approche et que je lui dise deux mots à l’oreille. Il faut user de ruse pour me défaire de tous ces gens-là ; les Sénateurs me contrarieraient, anéantissons-les. D’un héroïsme plaisant. Chacun d’eux s’entête ; Cherche un Sénat complaisant, Et pas trop honnête : Je te fais dès-à-présent Le Roi de la fête. Bien obligé, Monseigneur. Emphasés, encore un mot. Monseigneur ! Agis peut nuire aux projets Que j’ai dans la tête : Il a pour lui nos sujets, Et l’émeute est prête. Toi, dans l’instant, En sortant, Prends soin qu’on l’arrête. Monseigneur, comptez sur mon exactitude. C’est-il fait ? J’y suis. Or écoutez petits et grands ; Nous finirons en bons parents ; Je rends, en abdiquant l’empire, L’égalité qu’Agis désire : Admirez comme en un moment S’est fait en moi ce changement ! Chantez, dansez, moi désormais Je quitte un rang que je dédaigne ; Je me détrône : oui, qu’à jamais Seule ici la liberté règne. Ah ! Je ne demande plus rien ; Tout était mal, et tout est bien. Ah ! nous, ne demandons plus rien ; Tout était mal, et tout est bien. Ô Ciel ! Quel retour prospère ! Un Roi nous, rend tous égaux ; Amis, chantons mon beau-père ; Rimons lui... cent madrigaux : Embrassons tous mon beau-père, Certes il l’a bien mérité ; Faisons danser mon beau-père ; Pour fêter la liberté. Depuis que j’ai brisé les chaînes, Et des pédants et des tuteurs, J’ai mangé mon bien dans Athènes, Entre l’amour et les prêteurs : J’ai tes mains nettes ; Mais en tout cas L’égalité paiera mes dettes : Ce système a beaucoup d’appas. Danse toujours, mais n’t’y fie pas, Danse toujours, etc. Cléandre par l’hymen me tente, Comment prétendre à ce lien ? Ma mère est esclave indigente, Son père est riche et citoyen : Chose importune ! J’étais sans bien, L’égalité fait ma fortune ; Que notre hymen aura d’appas ! Danse toujours, etc. J’abjure l’humble ministère Qui m’ attachait à Monseigneur ; Sa Grandeur ne sommeille guère, Et je souffrais de son humeur. Mais s’il l’agrée, De très grand coeur, Ce soir, je lui rends sa livrée ; Vivre sans, maître a tant d’appas ! Danse toujours, etc. Fort bien, mes amis ! Allez maintenant vous asseoir au banquet qu’Emphasés a fait préparer par mon ordre ; c’est le verre à la main que nous ratifierons nos traités. Allons, allons, allons nous réjouir, allons. J’ai la balle en main, Je suis en bon train ; Mais il faut enfin Mener tout à la fin. Heureusement qu’Agis n’est pas malin, Il n’en serait pas dupe. Emphasés arrive avec l’air empressé ; je gagerais bien que mon Sénat est fait. Eh bien, faut-il que je te nomme ? Tout est-il prêt, peut-on siéger? Je n’ai pu résoudre un seul homme À s’asseoir ici pour juger. Comment ! Répugnance absolue ! Quel est leur motif ou leur but ! Ils ont peur que Sparte ne hue : Tout acteur tremble à son début. Point d’hommes ! Cela ne m’a pas empêché de faire un Sénat. De femmes, peut-être ? Précisément. Tu te moques. Non, Monseigneur, un très joli sénat, oh s’y trompera, soyez-en bien sûr. Comment pourront-elles juger, trancher, décider, condamner sans appel ? Eh ! Monseigneur, elles ne font que cela toute la journée. Comptez d’ailleurs sur un profond mystère Elles auront l’air décent et posé. Leur rôle ici ne sera pas aisé. Pourquoi, Seigneur ?         C’est qu’il faudra se taire. Mais quelles femmes as-tu choisi ? J’ai des coquettes pour briller, Du bel-esprit pour babiller, Des médisantes à prouesses, Pour instruire et pour démêler ; Pour condamner j’ai des Lucrèces, Et des minois pour consoler. Je doute fort qu’à ce cadeau Sparte entière applaudisse. Pourquoi pas ! L’amour n’ a-t-il pas un bandeau, Ainsi que la justice ? Sera-ce la première fois, Au bon temps comme au nôtre, Que l’un aura dicté les lois Et les arrêts de l’autre. Des femmes ! N’ayez aucune inquiétude, Allez, tout ira pour le mieux ; Ne fût-ce que par habitude, Mon Sénat fera des heureux. À la bonne heure, où sont-elles ? Dites donc, où sont-ils ? Feignez de ne pas les reconnaître. Fort bien, allons, fais-les entrer, que je les installe chez-moi, cela me fera beaucoup plus commode. Bonjour, la compagnie, Bonjour, Bonjour, la compagnie. Gentil Sénat, écoutez-moi, Respectez Et dictez Ma loi ; N’allez pas contredire, Et fâchez que s’il ne me faut Pour vous créer qu’un petit mot, Un petit mot, Un petit mot Suffit pour vous détruire. Je suis content de leur silence ; prenons-les par la coquetterie. Contre Agis Sparte se récrie ; Sénat, il faut, par équité, Punir un traître à la Patrie, Qui nous parle d’égalité. L’égalité : ce mot seul m’indigne ; c’est qu’outre les malheurs sans nombre dont il affligerait l’État, il entraînerait nécessairement la décadence de la toilette, cet art enchanteur de corriger la nature ou d’ajouter à ses dons. Oui, je suis sûr que ce grand Maître Proscrit cet art ingénieux : Pour paraître belle à nos yeux, Regarde donc, il faudra l’être. Il est coupable, il a grand tort ; La mort, la mort, c’n’est pas trop fort. Plus de toilette, plus d’opulence. La brillante et riche Aspisie Doit renoncer à la douceur De voir sa compagne ou sa soeur, Mourir cent fois de jalousie. Il est coupable, il a grand tort ; La mort, la mort, c’n’est pas trop fort. Elles me paraissent bien préparées. Agis doit être en ce moment Dans la chambre prochaine ; Allez, qu’il paroisse humblement, Sans oublier sa chaîne. Ô Ciel, comme il est équipé ! Quel attirail gothique ! C’est un Peintre qui m’a drapé ; Je suis d’après l’antique. Mais à propos. On ose m’arrêter, J’aurais dû m’en douter ; Ma prudence est légère ; Tyran, tyran, tyran sanguinaire, Ah ! du moins ma colère Te dira bien ton fait. Qu’est-ce que c’est, etc. Le Sénat t’interroge. Oui dà ! Je suis donc au Sénat! La belle jeunesse ! D’honneur, mon cher tyran, la mascarade est gaie. Ces Messieurs n’ont pas l’air auguste. Au Sénat parle décemment ; Il se pique au moins d’être juste. Je leur en fais mon compliment. Ma foi, lui-même il nous engage À punir cet amer langage. Prononcez son arrêt sans peur. Tu les fais trop durs. Moi je gage Qu’on ne meurt pas de lour rigueur. Insolent ! Tu sentiras tout-à-l’heure.... De leur courroux impuissant, Lorsque tu me menaces, Tu te crois bien imposant, Tu n’as l’air que d’un pédant En classes, en classes, en classes. Ô toi qu’ici je retrouve ! Et pour nous deux j’en rougis, Feu Licurgue, accepte, approuve, L’hommage et les voeux d’Agis. Tes vertus font effacées Le crime a seul de l’éclat. Dans quelles mains sont placées Les affaires de l’État ! Tout tourne autour de moi ; je m’ élance, où suis-je ? Encore une vision ; ce tic-là ne laisse pas que d’être désagréable. Dans ce nuage qui s’ entr’ ouvre, Postérité je te découvre : C’est toi, là’ bas, là-bas, là-bas, La terre s’enfuit sous mes pas. Il est timbré. Messieurs, voyez la gloire, Consacrant mon histoire.... Qu’on lira peu. Ciel ! La race future Redit mon aventure Au coin du feu. (bis.) Ah ! Monseigneur, arrivez promptement ! Le peuple a battu votre Suisse ; Il est déjà dans votre appartement, Et prétend se faire justice : Il est puissant, Pressant ; Dans son dépit Il dit, Que Monseigneur est celui qu’on abhorre : On nous demande Agis, Le fils : Et partout réclamé, Nommé, Chacun le bénit et l’adore. Je n’aurai pas un moment de repos ! Mais à la fin c’est un martyre : Cet accident vient d’ailleurs à propos ; Car Agis n’a plus rien à dire. Soyez certains, Mutins, Que dans ce cas, Mon bras, Saura punir cet insolent caprice. Que l’on amené Agis, Mon fils ; Qu’il soit dûment coffré, Serré. Gardes, allez ; qu’on m’obéisse. Eh bien, qu’ dis-tu d’ çà ? Moi, mon coeur, j’en ai la migraine. Écouter tout çà, Sans répondre un seul mot à çà ! Mais comme Agis nous mène ! Comme nous souffrons çà ! Dam’ ! C’n’était pas la peine De nous, créer pour çà. Puisque c’est comm’ çà, Quittons la morgue qui nous gêne ! On peut s’passer d’çà, N’est-on pas à nos pieds sans çà ? À mon dernier récit. Ne perdons point la carte ; Je suis long, Mais pardon ; Un vieillard même à Sparte N’est pas toujours concis, Quand il fait des récits. Seul.... qu’en croire ? L’Auditoire Pressé de défiler.... Quand j’apporte une histoire, Personne à qui parler ! Personne, pas seulement un Sénat ! Narrons toujours Imaginez donc, Monsieur ou Madame. Nous sommes pris par trahison, Le tyran nous jette en prison. Partout nombreuse Si bonne escorte : Le peuple, impatient, troublé, Lui demande assez haut la clef: Le tyran dit qu’il l’a perdue ; prétexte gauche et ridicule ! Ces tyrans n’ont jamais de bonnes raisons. Oh ! Qu’a-t-on fait ? Patapan, patapan, Nos amis ont brisé la porte. Sparte, entre ses Rois, balance, Quand Léonidas s’élance, Et porte- cent coups de lance, Qu’Agis reçoit sans compter; Déjà le cruel l’embrasse, Mon -héros s’en débarrasse, Le prend au col, le terrasse, Et s’ amuse à lui chanter: Par pitié daigné vous rendre, Que mou sang se fasse entendre. Léonidas lui dit oui, Terminons dès aujourd’hui, L’amitié parle, elle opère : Fais-tu grâce à ton beau-père ? Vraiment, mon beau-père, Oui. Tout a l’air d’être fini, point du tout. Car le traître prend le large, Et partout, Tout-à-coup, Fait sonner la charge. Fait sonner la charge. Des deux côtés à l’instant, En plein, plan, R’ Lan tan plan tireli ramplan ; On s’approche en combattant, Moi, je regarde faire. Longtemps chacun espère Pour le fils, pour le père ; On se rosse en attendant, En plein, plan, R’ lan tan plan tireli ramplan ; Un cri part, c’est le tyran Prêt à frapper la mère. Agis en deux pour fond le traître Un bras par-ci, l’autre par-là..... Mais c’est lui-même, qu’on apporte, je reprendrai ce récit-là. Je penche tout d’un côté. Mes amis, je crains la chute, Et je dois, en vérité, Vivre encor une minute. Mon bouclier est là-bas ; C est-là ce qui m’importe. Ah ! Meurs tranquille ; à son bras Un des nôtres, le porte. Cherche le, car je ne mourrai pas Qu’on ne me le rapporte. Grands Dieux ! Sous tes coups abattu, Faut-il que mon père meure ! Plaisants regrets ! Et franchement crois-tu Que ma santé soit meilleure ? Mon trépas n’a rien qui t’ étonne, C’est le cas de prendre un parti ; Chélonis à Lacédémone, Peut encor faire un bon parti ; Mille amants assiégeant ta trace, Auprès de toi cherchaient accès ; Qu’un d’eux par l’hymen me remplace. Cher Agis, hélas ! J’y pensais. Ma bonne amie, vous êtes une femme de précaution je l’ai toujours dit. Ah ! que mon coeur, est content Cher Agis combien on t’aime ! Sparte est libre en nu moment, Mon fils doit mourir gaiement; Un fait tout particulier, C’est que j’ai sans bouclier, Triomphé d’Emphases même, Dans un combat singulier. Allons, mes amis. Que notre coeur est content! Cher Agis, combien on t’aime! Sparte est libre en un moment, Agis doit mourir gaiement. Ma mère, modérez cette joie, je n’en mourrai peut-être pas. Oh que si, mon bon ami, défie-toi moins de la bonté des Dieux. Vous êtes cruellement Lacédémonicienne. Imitez-moi ; dans mon âme, C’est l’honneur qui fait la loi. C’est qu’entre nous deux, Madame, Vous perdez bien moins que moi. Mon fils meurt, mais dans l’histoire Il n’aura jamais d’égal. Ah ! Plusieurs, malgré sa gloire, Diront qu’Agis finit mal. Mesdames, vous parlez toujours ; Défaut que je déteste! Mon cher fils...         Mes tendres amours... Dans mon état funeste, Ma mère, je n’ai pas tout dit, Et je sens bien que mon esprit, Mon fils, mettez vite à profit Le peu qui vous en reste. Il est donc temps que je quitte ces lieux ; Ah! recevez mes plus tendres adieux ; Ce n’est pas tout de montrer du courage, De bonne grâce Agis doit s’en aller. Or, d’un mourant ai-je bien l’équipage ? La voix touchante, et l’air et le langage ! Un peu plus bas, je crois qu’il faut parler. Si bas qu’il faudra, même pas du tout. Ah! je le perds, quel affreux sort ! Puisqu’il se tait, il est bien mort ; Blâmez ces pleurs, si vous l’osez ; Des maris là fleur m’est ravie. Tenez, ma mère. Étouffons-le de nos baisers Pour le rendre à la vie. Grands Dieux, je renais, où suis-je ? Quand mes jours étaient finis ; Qui fait donc un tel prodige ? Un baiser de Chélonis. Mon amour t’en félicite ; Ce trait-là fera cité.... Voilà comme on ressuscite Dans les bras de la beauté. J’ai tout-à-l’heure, en guerrière, Supporté la mort d’Agis ; Je reprends un coeur de mère, Et crains peu pour les jours d’un fils, Mourant pour Sparte agitée, S’il remplissait mes désirs, Je serais aussi flattée Qu’il vécut pour vos plaisirs. Honneur à la Tragédie Qui mérita des succès. Grâce pour la Parodie, Toutes deux font des essais. Et bon parent, sans malice, Agis, tout récemment me, Demande qu’on l’applaudisse, En faveur de son aîné.