Toy qui vis autrefois le Fleuve des Romains Triompher des humains, Et porter le Sceptre du monde ? Vertumne, que dis-tu, de ma rive feconde. J’admire, j’admire tes grandeurs, et la felicité De ta belle Cité ; Mais ta merveille la plus grande, C’est la pompeuse Majesté Du Roy qui la commande, Dans l’Auguste LOUIS, je trouve un nouveau Mars, Dans sa Ville superbe une nouvelle Rome ? Jamais, Jamais un si grand homme, Ne fut assis au Thrône des Cesars ; (bis) Aussi sur la Terre et sur l’Onde, Ce Monarque puissant ne fait point de projets que le Ciel ne seconde ? Il est l’amour, Il est l’amour et la terreur, Il est l’amour et la terreur du monde, L’effroy de ses voisins, Le cœur des ses sujets, L’effroy de ses voisins, Le cœur de ses sujets ; Mais quel dessein t’amene, Sur le bord de la Seine. Moy qui forge les visions, Je viens tromper ses yeux de mes illusions, Et luy montrer mes anciennes merveilles ? Sus donc Sus donc Par nos accords amoureux, par nos accords amoureux et touchans, Commençons de charmer son cœur et ses oreilles, Meslons nos voix, et remplissons les Champs, Du doux bruit de nos Chants. Meslons nos voix, et remplissons les Champs, Du doux bruit Du doux bruit du doux bruit De nos Chants. Passons nos jours Dans ces vergers, Loin des amours Et des Bergers ? Passons nos jours,         passons nos jours Loin des Bergers et des amours. Qui voudra s’engage Sous les loix d’amour, Qui voudra s’engage, Et fasse la cour A ce Dieu volage ; Qui voudra l’adore, Pour moy je l’abhorre, Le flot de la mer Est moins infidele, La fleur en est belle, Mais le fruit amer. La fleur en est belle, Mais le fruit amer. Qui croit ce Cajolleur, N’a que peine et douleur. Dans l’empire amoureux Le sort le plus heureux, Est le plus dangereux ; Le flot de la mer est moins infidele, La fleur en est belle, Mais le fruit amer. La fleur en est belle, Mais le fruit amer. Le doux plaisir d’amourette, Est une tendre fleurette, Qui ne dure qu’un matin, Il a le destin Des plus belles choses, Il naist, il fleurit, il passe en un jour, Les chaisnes d’amour Sont chaisnes de roses, (bis) Les chaisnes d’amour Sont chaisnes de roses, Les chaisnes d’amour Sont chaisnes Passons nos jours Dans ces vergers, Loin des amours Et des Bergers ? Passons nos jours, Passons nos jours, Loin des Bergers et des amours. Ah ! ma Sœur, à quoy penses-tu, Veux tu bannir de ton empire, Ce Dieu puissant dont la vertu Anime tout ce qui respire, Et dont les fecondes chaleurs, Font naistre tes fruits et mes fleurs. Je consens que ses flames Bruslent tout l’Univers ; Pourveu que dans nos ames, Il trouve incessamment la glace et les hyvers ? Ah ! si tu connoissois comme moy ses delices ? Ah ! si tu connoissois comme moy ses malices. De combien de douceurs il flate nos desirs. Combien il cause de soûpirs, Que ses fers     Que ses loix     sont doux ,         sont inhumaines, Qu’il est beau         Qu’il est dur de vivre dans ses chaisnes. Il a ses biens, il a ses peines, Et je ne veux que des plaisirs. Soulage donc les flames du grand Dieu des Jardins. De plaisirs eternels il sçait remplir les ames, Renonce pour jamais à l’amour des blondins, Foibles, trompeurs, inconstans et badins, Unissons, Unissons nos cœurs et nos empires, Adjouste au fruit de tes vergers, Les herbes de mes potagers ; Joint mes Melons à tes Poncires, Et mesle parmy tes pignons, Mes truffes et mes champigons. C’est bien à toy, Dieu miserable, De pretendre à tes maux quelque soulagement ; C’est bien à toy, Monstre effroyable, De servir un objet si rare et si charmant ? Elle a beau resister et faire la mutine ? C’est à moy,     C’est à moy,     C’est à moy,         C’est à moy, C’est à moy, C’est à moy que le Ciel la destine : Tout cede,     Tout se rend,     Tout cede,         Tout se rend, Tout cede, tout se rend à mon pouvoir divin:/ ? Vous le dites en vain, On vo° connoist tous deux, Mais éprouvons les vostres? Faites danser les uns, faites chanter les autres: Vive le Dieu des Jardiniers, il est toûjours prest à bien faire; Vive le Dieu des Jardiniers, il est toûjours prest à bien faire;/?/; Bergeres portez vos paniers, il a dequoy vous satisfaire, Bergeres, portez vos paniers, il a dequoy vous satisfaire: Sans luy les Jeux, les Passe temps Ont une douceur imparfaite, Et s’il n’est de la Feste, L’on ne rit pas longtemps, (bis) Et s’il n’est de la Feste, L’on ne rit pas longtemps. (bis) Rien n’est si doux que sa fureur, Ny si plaisant que sa folie, Elle bannit de nostre cœur La plus noire melancholie? Sans luy les Jeux, les Passe temps, N’ont qu’une douceur imparfaite, Et s’il n’est de la Feste, L’on ne rit pas longtemps. (bis) Et s’il n’est de la Feste, l’on ne rit pas longtemps. (bis) He bien: dans tes buissons, Tes Oyseaux, chantent-ils de pareilles Chansons : Il est vray que jamais Rossignols d’Arcadie, N’ont fait, N’ont fait plus douce melodie. A vous Bouviers, illustre bande, Touchez, Touchez n’importe Menestriers, Passepied, Menüet, Gavote ou Sarabande. Couronnez il est temps, couronnez le vainqueur: Donnez-lui vostre main. Donnez-luy, Donnez-luy, Donnez-luy, Donnez-luy vostre cœur. Cueillez Nymphes dans ces prairies, Cueillez pour eux des guirlandes fleuries, Et vous ma sœur couronnez le vainqueur. Donnez-luy vostre main,         Donnez-luy vostre cœur, Donnez-luy, Donnez-luy, Donnez-luy,         Donnez-luy vostre cœur. Venez voir couronner vos tendres amourettes, Et recevoir le premier de ses dons? Ah! pour un plus heureux on garde les fleurettes, Pour vous l’Epine et les chardons?         Ah! Ah ! Pour un plus heureux on garde, on garde les fleurettes, Pour vous, Pour vous l’Epine et les chardons. Voila le prix de vos Musiques, Et ce que meritent vos Chans? Voila le prix, Voila le prix de vos Musiques. SECONDE ENTRÉE DES BOUVIERS. Voila le fruit du Dieu des Champs, Et dequoy paistre ses bourriques. (bis) Voicy le fruit du Dieu des Champs, Et dequoy paistre, paistre ses bourriques. Voicy le fruit du Dieu des Champs, Et dequoy paistre ses bourriques. (bis) Helas ! Que me sert-il de changer tous les jours De forme et de figure, Et de me déguiser à toute la nature, Si je ne puis changer l’objet de mes amours : J’ayme une insensible Maistresse, Une ingrate et fiere Déesse, Qui se rit du tourment, Et des soins d’un Amant: Que ferons-nous mon cœur         en des peines si dures? Ah! Puisque vainement je dirois mes langeurs, Il faut nous transformer, et sous d’autres figures, Tacher de vaincre ses rigueurs: Vous que le Ciel soûmet à mon obeïssance? Hola!folets venez, volez, suivez mes pas; Mais ne vous montrez pas, A mes loix seulement rendez obeïssance. Fin du premier Acte. Entr’acte. INTERMEDE I. Symphonie. Ah! N’est-ce pas assez qu’on ayme et qu’on soûpire, Pendant le cours de sa jeune saison? Pourquoy faut-il amour étendre ton empire. Jusques sur nostre aage grison: Malgré tous mes efforts, malgré toutes mes feintes, Je sens vivre tes feux dans mes cendres éteintes, D’une cruelle ardeur je me voy, je me voy consumer, Que la glace des ans ne fait que r’allumer: J’ayme un Dieu, le voicy, tachons de le surprendre, Il resve à ses amours, Cachons-nous pour l’entendre. O Doux Zephir vous enflammez la terre par vos soûpirs, Et de vos pleurs, On voit dans ce parterre naistre des fleurs? Helas! Ainsi que vous je suis tendre et fidelle, discret et doux, Et mes douleurs ne touchent point la belle Pour qui je meurs. Mais pourquoy tant gemir, poursuy ton entreprise, Lasche c’est trop se plaindre et soûpirer en vain, Use de ton pouvoir divin, Joins à l’amour la ruse et la surprise; Il faut l’attendre icy dans ce boccage vert, Elle y cherche souvent le frais et le couvert. Quoy? Toûjours inflexible, Toûjours sourd à mes vœux, Et toûjours amoureux D’une belle insensible. Le ridicule objet, l’Enfer l’amene icy pour troubler mon projet. Quoy? Tant d’amour. ingrat:         Evitons sa poursuite? Arreste et voy du moins ma peine et mes langueurs, Un moment encor et je meurs. Il faut l’épouvanter et luy donner la fuite? Que voyez-vous mes yeux, Quel Dragon furieux ; Mais non r’assurons-nous, c’est luy qui se transforme En ce Monstre difforme ? Hé bien ? Hé bien, cruel saoule toy de mon sang, Contente ton envie, Dechire-moy le flanc, Arrache-moy la vie, Je beniray mon sort, Et je ne puis mourir, Et je ne puis mourir d’une plus douce mort ? Mais quel éclair, quel horrible tonnerre, Quel tremblement de terre ? Quels fantosmes affreux et quelles visions ? Que de Monstres armez, de feu, de fer, de foudre, Pour me reduire en poudre ? Je vous connois folets et vos illusions ; Vous croyez m’étonner par ces alarmes feintes, Et me joüer à vostre tour : Mais l’on ne peut for-