Monseigneur,
La forte passion que j’ai de vous dédier cette pièce de théâtre l’emporte sur les raisons qui pouvaient m’en dissuader ; et sur la connaissance que j’ai qu’il ne vous faut rien présenter qui ne soit digne de vous, je me suis persuadé, Monseigneur, que les généreux, comme vous, ont plus d’indulgence que les autres, et que, comme rien ne peut approcher de leur éclatant mérite, qu’il n’est point de lumière qui ne pâlisse auprès de celle de leurs esprits, vous souffririez ce faible rayon du mien ; et que s’il fallait toujours mesurer les présents à la dignité de celui à qui on les adresse, on ne vous en ferait jamais. J’ai même encore considéré que mon ouvrage n’aurait rien d’illustre si je ne vous le présentais, et qu’étant faible, et l’auteur inconnu, il fallait le seigneur de France le plus renommé pour le rendre considérable. Le zèle que j’ai pour votre service s’est trouvé d’intelligence avec le besoin que j’avais de mettre quelque chose d’auguste sur le front de cette tragicomédie. Mon but principal était d’y faire paraître la vertu opposée au vice ; j’ai fait tous mes efforts pour abaisser ce monstre sous les pieds de cette déesse ; mais je n’aurais pu réussir dans cette entreprise, si je n’en eusse trouvé le modèle parfait en vous, Monseigneur. D’ailleurs, cette pièce est étrangère, et je ne lui pouvais trouver une plus heureuse protection, ni rencontrer un moyen plus glorieux pour vous faire connaître, que je suis, Monseigneur, votre très humble, très obéissant et très obligé serviteur, N. Dorimon