Par L.C.D.
[Discret]78
Chez JEAN GVIGNARD, au premier
Pillier de la grand’ salle du Palais.
M. DC. XXXVIII.
Avec Privilege du Roy
Édition critique établie par Luca Falcone dans le cadre d'un mémoire de master 1 sous la direction de Georges Forestier (2012-2013)
Introduction : les « noces de vaugirard » une pièce creuset dans un moment de transition §
[...] je puis vous asseurer [...] que les oreilles delicates n’y trouveront point leur satisfaction, que les chercheurs de poinctes en trouveront plus chez les vitriers que dans mon livre [...]
[...] que si les Vers ne sont assez coulans à la fantaisie de ces Messieurs qui les voudront lire, vous le frottiez de beurre frais pour les rendre plus glissans & plus faciles à passer dans leurs delicates oreilles.
Ces deux citations, sont extraites respectivement de chacune des préfaces liminaires des deux seules pièces publiées1 par un auteur mineur des années 1630. On ne sait presque rien sur la vie de cet homme qui, en ayant signé ses pièces sous le sarcastique nom de plume de Discret demeure encore aujourd’hui dans l’ombre. Quoique discret, de nom et de fait, cet auteur ne fut sans doute pas dépourvu d’esprit ni ignorant les débats littéraires de son temps, étant donné que ses mots d’esprits sur les « délicates oreilles [des messieurs] » étaient perçues pour les lecteurs de l’époque, comme une malicieuse allusion à La Gazette de Renaudot, qui, en soutenant la naissante entreprise de réhabilitation du théâtre voulue par le cardinal Richelieu, rendait compte par des termes élogieux, le 6 janvier 1635, de l’épuration enfin réalisée :
[la] Comédie2 depuis qu’on a banni des théâtres tout ce qui pouvoit souiller les oreilles plus délicates, est l’un des plus innocents divertissemens, & le plus agréable à [la] bonne ville de Paris : [la] bonté [du roi] est telle qu’il y veut entretenir trois bandes de Comédiens, la I. à l’hostel de Bourgoigne, la 2. aux marais du Temple, de laquelle Mondori ouvrit le Theatre Dimanche dernier : & la troisième aux faux-bourg S.Germain.
Comme l’on sait, le théâtre français connaît dans la première moitié du XVIIe siècle une série d’importantes transformations qui aboutissent à mettre en place autour des années 1650 ce qu’on appelle depuis le XVIIIe siècle le théâtre classique.
Or l’œuvre restreinte de Discret, et tout particulièrement la pièce Les Noces de Vaugirard,3 représentée en 1637, occupe une position privilégiée en ce qu’elle incarne certains aspects fondamentaux de la sensibilité esthétique d’une période charnière pour l’histoire du théâtre.
Dans le premier XVIIe siècle, c’est à dire quelques années avant la mise en œuvre de la reforme du théâtre, la scène dramatique se caractérise par un goût de la métamorphose et de l’ostentation4 produisant un théâtre, dit baroque, fait d’œuvres instables et irrégulières à l’égard des normes de ce qu’on nommera ensuite le classicisme. La modification du système esthétique baroque s’est faite par ce processus de régularisation qui commence à être mis en place à partir de 1629 à l’initiative de Richelieu, principal ministre du roi, et maître de la vie culturelle française. Cette mise en perspective historique, à peine ébauchée mais sur laquelle nous reviendrons, nous permet dès à présent, de faire apparaître l’intérêt de cet auteur mineur aujourd’hui méconnu. On serait induit en erreur si l’on se bornait à cantonner hâtivement Discret dans le coin des auteurs conservateurs, qui, en raillant ces « oreilles delicates » refuseraient radicalement la voie de la réforme ouverte par Richelieu et les auteurs qu’il protège. Les Noces de Vaugirard, représentée en 1637, témoigne au contraire de l’influence du mouvement réformiste, mais en même temps, elle nous montre aussi ses réticences, qui sont le signe d’une dépendance et d’un attachement à une esthétique antérieure qui reste encore bien vivante malgré le procès de régularisation. De ce point de vue, l’exemple canonique qu’illustre la tension entre ces deux systèmes esthétiques, insinués l’un dans l’autre, est, bien évidemment, Le Cid de Corneille. Cette pièce fut, elle aussi, représentée en 1637, et notre auteur Discret dans la préface de sa première comédie, fait un admiratif récit du retentissement que fit la pièce de Corneille :
[…] depuis quelques mois ont paru sur le théâtre de nos Comédiens avec tant d’éclat & d’admiration de chacun, que le seul bruit du Cid de Monsieur Corneille a fait souhaiter par toutes les bonnes villes de la France, qu’il y eust autant de troupes de Mondory, qu’il y en a maintenant de gendarmes dans la Flandre5 [...]
Le Cid, pour sa structure dramaturgique et thématique appartient pleinement à la tradition de la tragi-comédie, genre éminemment irrégulier. Et pourtant cette pièce constitue, comme l’a dit Hélène Baby : « la première tragi-comédie régulière6 » dans la mesure où Corneille réussit à garder l’essence romanesque du genre tragicomique tout en le pliant aux exigences des règles.
Si nous avons juxtaposé pour un moment deux pièces si différentes que sont Le Cid et Les Noces de Discret qui présente plusieurs traits tragi-comiques, c’est que cela nous permet d’apercevoir comment la tragi-comédie, par son goût du romanesque, est l’un des genres les plus représentatifs du premier XVIIe siècle. C’est un genre très mouvant, et, comme son nom l’indique, la tragi-comédie dès ses débuts entretient des rapports de promiscuité avec les autres genres dramatiques : la comédie, la tragédie et la pastorale.
Or la pièce de Discret reflète tout à fait cette pratique du mélange des genres, dès la page de titre l’on peut s’apercevoir de la bigarrure générique qu’elle contient : Les Noces de Vaugirard se présente en effet au lecteur comme Pastoralle dédiée à ceux qui veulent rire ; et c’est par là, que Discret convoque une diversité de genres. Sa pièce est d’abord explicitement donnée comme appartenant au genre Pastoralle, mais le rire, fonction qu’elle est supposée remplir, fait glisser l’identification générique dans un domaine qui appartient a priori à la comédie ; et en dernier lieu, même si cela n’apparaît pas d’emblée au lecteur, Les Noces prend aussi en compte le genre de la tragi-comédie, qui apparaît en creux dans l’analyse de la structure dramatique de la pièce7. C’est donc dans ce creuset des genres et dans la conséquente tension entre adhésion et résistance aux règles, que réside d’abord l’intérêt littéraire de la pièce de Discret.
La question du mélange des genres se rattache à une deuxième question concernant plus particulièrement le genre comique. On a vu que le comique est directement concerné, dans la mesure où il est question d’une Pastoralle dédiée à ceux qui veulent rire. Or l’utilisation du comique que fait Discret nous montre que les formes traditionnelles du rire ne disparaissent pas en dépit de l’expérience entreprise par Corneille entre 1629 et 1635 de produire une nouvelle Comédie qui, en accord avec la générale entreprise de polissage du théâtre, soit expurgée du rire et du ridicule. Au contraire, ces formes traditionnelles, loin de rester confinées dans la farce, contribuent à innerver les genres dramatiques qui, comme la pastorale, se prêtent à des inflexions comiques de ce type.
Par cette utilisation du comique traditionnel, auquel reviendra plus tard aussi Molière, Discret fait subir à la pastorale un traitement parodique : il s’agit donc de rire de la pastorale. Or dans la conscience commune, le terme de parodie évoque spontanément, et exclusivement, l’imitation à visée satirique, mais en réalité, l’intention moqueuse n’est pas forcement la seule fonction attribuable à la parodie, qui se manifeste aussi par des imitations à visée non satirique. Le régime parodique, est en effet une pratique bien plus complexe en ce qu’elle contient une large gamme de gradations et attitudes différentes qui intéressent le rapport entre l’imitateur et son modèle8. La question de la parodie nous permet ainsi d’analyser les transformations des poncifs du genre pastoral à l’intérieur de la pièce.
La construction de la figure auctoriale §
La condition de l’auteur, « tres-humble & tres obeïssant serviteur » §
En voulant s’arrêter au seuil de la pièce, on s’aperçoit que Discret pratique la parodie dès les préfaces, d’où il fait allusion à l’actualité théâtrale de sont temps sous le mode de la raillerie, comme le montrent les deux citations d’ouverture.
En l’absence des documents nous fournissant directement des éléments sur la vie de cet homme, les textes liminaires nous permettent d’analyser l’image d’auteur avec laquelle il entendait se présenter à son lecteur, et par là nous essayons de formuler des hypothèses concernant ses relations avec le contexte théâtral de son temps.
En ce qui concerne l’origine sociale des dramaturges, nous savons qu’ils appartiennent majoritairement au milieu de la bourgeoisie, et s’ils peuvent aussi provenir de la noblesse, l’appartenance à l’aristocratie ne leur garantit nullement une prospérité financière : tel fut par exemple le cas de Tristan L’Hermite (1601-1655), né de haute condition mais pauvre, à cause de son père, mort tôt et ruiné.
Exercer la carrière d’écrivain ne constitue pas une véritable situation, car les revenues sont limitées et peu sûres. Celles-ci sont constituées essentiellement des gains de la représentation et de ceux provenant de la vente des pièces imprimées.
Pour les représentations, les auteurs sont payés au forfait ou bien au pourcentage. Les forfaits sont évidemment fixés en fonction de l’âge et de la notoriété du dramaturge et les chefs de troupe n’hésitent pas à profiter de quelques jeunes auteurs prometteurs et ambitieux qu’on rémunère assez peu, alors qu’ils doivent accepter les conditions d’un auteur à succès. La rémunération au pourcentage, qui ne se généralise cependant pas avant les années 1660, correspond en général à un douzième ou un treizième du gain des représentations. Les troupes, à la fin de chaque spectacle, après avoir retranché les dépenses, divisent les gains en attribuant une part à chaque comédien, et le dramaturge avait en général aussi droit à sa propre part. En ce qui concerne la vente des pièces imprimées, on enregistre entre 1630 et 1639, grâce à la réhabilitation du théâtre, une forte progression des impressions de pièces de théâtre, c’est à dire une augmentation de la demande commerciale.
Cependant malgré cette progression, cela ne suffisait pas à vivre. Même des auteurs célèbres et à « gros tirage9 » comme Corneille ou Scarron, ne pouvaient pas compter sur ces seules revenues pour avoir un train de vie honorable. Bref, les dramaturges ne pouvaient pas vivre de leur plume. Ainsi il était nécessaire d’acquérir un état, exercer une profession, une charge ou un office quelconque et surtout il était fondamental, pour les auteurs qui voulaient réussir, de chercher la protection et les faveurs de quelque puissant seigneur. Il s’agit donc pour l’écrivain de s’appuyer sur les ressources du clientélisme et du mécénat, deux systèmes très répandus au XVIIe siècle qui étaient fondés sur la logique du service et de la reconnaissance10. Par conséquent, pour remercier les seigneurs, pour exprimer leur gratitude d’une faveur particulière, ou pour solliciter surtout la gratification d’un mécène, les auteurs placent au début de leur œuvre ces fameuses épîtres, véritables cérémonials de flatterie du « tres-humble & tres obeïssant serviteur ». Or, face à cette pratique, la teneur du discours entrepris par Discret dans les préfaces semble le situer à l’opposé de la figure du dramaturge qu’on vient de décrire. C’est ainsi que dans l’épître des Noces, il tient à prévenir son lecteur du fait que :
Vous n’y trouverez point dans l’Advertissement au Lecteur ce que les Autheurs du temps ont coustume d’y mettre : [...] car pour moy je ne sçaurois flatter, je dis librement mes pensées [...] sans chercher la protection des grands, ainsi que beaucoup font, & qui s’imaginent que le nom de ceux à qui leurs livres sont dediez excusent leurs fautes, & deffendent leurs œuvres de la médisance [...]
Discret paraît donc refuser le système d’asservissement auquel s’adonnent la plupart des auteurs. Par conséquent, puisqu’il ne recherche pas l’appui d’un protecteur, figure si importante pour la réussite de la carrière d’un écrivain, cela nous induit à penser qu’il ne s’agit que d’un homme modeste, dépourvu de toute volonté de parvenir à la gloire d’une véritable réussite littéraire ; lui-même nous dit d’ailleurs dans sa première publication : « je ne fais point profession d’être poëte11 » et il développe ensuite plus longuement cette considération dans l’épître de sa deuxième pièce :
mon humeur indifferente ne se soucie de la probation des doctes, ny du mépris des ignorans [...] Je vous faits present (Messieurs) de cette Pastoralle, recevez la telle qu’elle est, acheptez la, ne l’acheptez pas, lisez la, ne la lisez pas, riez en, n’en riez pas : Il y a long-temps que je faits profession de ne me soucier des loüanges du monde & que j’ay perdu la volonté de paroistre habile homme, puisque j’ay recogneu avoir esté né pour ne l’estre pas12.
C’est par ces quelques lignes de supérieure indifférence qu’il livre nonchalamment en 1638 sa deuxième et dernière pièce au goût du lecteur. Mais faut-il vraiment croire à cette attitude d’indifférence ? Il est vrai que sa production restreinte, laisse penser qu’il ne s’agit là que d’un auteur occasionnel, qui a probablement arrêté sa carrière assez tôt. En outre ses pièces ne semblent pas être très représentatives des la production théâtrale des années 1630, puisque, comme le dit Charles Mazouer : « [les] genres pratiqués [...] sont ceux qui ont la faveur du public en ces années : la tragi-comédie et la tragédie d’abord ; assez loin derrière la comédie et plus loin encore la pastorale13. » Or à travers leurs frontispices14 on voit que ses deux pièces de Discret s’affichent précisément comme appartenant à ces deux derniers genres assez démodés qu’on vient d’évoquer.
Le public visé par Discret §
Cependant le fait que Discret choisit d’écrire dans des genres qui ne sont plus à la mode, n’explique pas forcément l’attitude d’indifférence dont il se pare, et la condition d’amateur qu’on pourrait lui prêter. À regarder de plus près la production théâtrale de ces années, on se rend compte que ces genres désuets, qui avaient connu leur apogée dans le premier tiers du siècle, arrivent malgré tout à survivre : la pastorale trouve une nouvelle longévité en se glissant dans les genres voisins de la tragi-comédie et de la comédie ; le genre comique de son côté, qui avait été directement concerné par le mouvement de réhabilitation et de normalisation du théâtre dirigé par Richelieu, garde néanmoins un espace pour le comique traditionnel, même s’il est désormais confiné à une vie plus marginale mais qui trouve malgré tout son public. Dès lors, peut-on parler, en suivant l’abbé D’Aubignac, d’un public populaire, qui n’ayant du plaisir que pour les spectacles « des-honnestes » n’est que « populace élevée dans la fange15 » ? Il est certain que, D’Aubignac avait trop d’intérêt à rabaisser le comique traditionnel pour qu’on puisse prêter foi à ses affirmations. Nous somme plutôt, enclin à penser que, compte tenu des catégories socioprofessionnelles qui peuvent se permettre d’aller au théâtre à cette époque16, Discret s’adresse à un public choisi, appartenant « au meilleures maisons de Paris17 », mais qui ne dédaignent pas pour autant la trivialité d’un comique s’inspirant de la farce traditionnelle. C’est ainsi que l’attitude détachée qu’il manifeste dans ses advertissements aux égards des pratiques flatteuses des auteurs à la mode peut être vue comme une stratégie d’écrivain visant à proposer une image d’auteur différente, fondée sur le refus et la subversion railleuse des autres pratiques auctoriales. Dès lors, Discret n’est pas forcement l’auteur insensible au sort de sa pièce, comme il veut le laisser croire ; et ses advertissements au lecteur contiennent tout une série de signaux textuels qui montrent la volonté de l’auteur de promouvoir son œuvre et son attention au contexte théâtral.
La parodie de la pratique auctoriale §
La comparaison des deux éditions successives de sa première comédie, Alizon, nous montre, la volonté de l’auteur d’inscrire dans ses publications l’actualité théâtrale de son temps, et cela même dans l’espace considérable d’une vingtaine d’année qui sépare les deux éditions de sa pièce. En effet, alors que dans la première édition de 1637, on trouve les allusions à la troupe de Mondory et au succès retentissant du Cid18, dans l’édition de 1664, n’étant plus d’actualité, la référence particulière à cette représentation est supprimée, tout comme un long passage relatant les trois représentations privées de sa pièce19. À côté de ces retranchements, on voit en revanche apparaître toujours dans cette deuxième édition de 1664, une épître dédicatoire dédiée à « Mesdames les beurières de Paris », qui affirme et prolonge la stratégie de subversion de la figure auctoriale déjà entamée, vingt ans plutôt, dans l’Advertissement au lecteur des Noces20.
Bouleversant ainsi la figure habituelle du destinataire de l’épître, Discret dégrade indirectement la pratique des autres auteurs, en s’inscrivant dans la tradition burlesque inaugurée par Sorel et poursuivie par Scarron chez qui l’on trouve des stratégies auctoriales similaires21. On peut dès lors parler d’une sorte « d’anti-épître dédicatoire22 » construit sur le refus parodique de la pratique auctoriale sérieuse ; un refus qui cependant n’exclue pas, comme on l’a vu, l’intention de l’auteur de s’approprier un public.
Le souci de Discret, dans la mise en place de la stratégie d’auteur, ne reste pas confiné dans les épîtres car au théâtre l’appareil para-textuel déborde souvent les contours de la feuille écrite : de telle façon que, en paraphrasant Pierre Larthomas23, nous pouvons dire que le texte théâtral se construit par un « compromis » entre deux espaces d’expression : celui du livre et celui de la scène. C’est ainsi que dans la première comédie de Discret, le titre même : Alizon, établit un pont avec la réalité théâtrale du temps, et nous aide à comprendre le type de relations que le dramaturge aurait pu avoir avec les théâtres parisiens et leurs comédiens. Alizon est le nom d’un personnage comique appartenant à la tradition farcesque qu’on trouve bien avant 1637, et comme ce personnage de vieille au franc-parler et à l’affût d’amours tardives constitue la figure principale autour de laquelle la pièce est construite, il était normal que l’auteur choisisse de le faire apparaître dans le titre. D’autant plus que Alizon était aussi le nom de scène que portait un acteur de cette période spécialisé dans ce rôle24. Ainsi Discret aurait pu concevoir sa pièce, en pensant la faire jouer par cet acteur ; ce n’était pas qu’une pratique isolée d’écrire des pièces faites « sur mesure », exploitant le nom d’un acteur célèbre, qui pouvait ainsi assurer la venue du public, désireux de voir tel ou tel acteur sur scène25.
Les conditions de creation et de représentation §
Autour de la coïncidence entre le nom de l’acteur et le titre de la pièce, une partie de la critique, principalement représenté dans la figure de H. C. Lancaster, a avancé l’hypothèse que la pièce Alizon, aurait été représentée au théâtre de l’Hôtel de Bourgogne. Cette hypothèse a ensuite été contestée, par une proposition adverse, qui est allée plutôt dans le sens d’une éventuelle représentation donnée au Théâtre du Marais. Ce débat autour des représentations s’est avéré précieux pour notre recherche même si cela ne concerne pas directement la pièce des Noces. En l’absence d’informations sur les conditions de représentation de celle-ci, la considérable proximité — autant dans le temps que dans le traitement — des Noces (1638) avec Alizon (1637) ; nous permet de faire valoir pour toutes les deux les considérations que nous allons entreprendre sur les représentations d’Alizon.
Lieux et modalités de la représentation §
La circulation des comédiens §
Dans le dictionnaire des Frères Parfaict, une notice26 concernant cette pièce indique que Alizon aurait été représentée à l’Hôtel de Bourgogne en 1637, l’année même de sa publication. Suivant cet indication, H. C. Lancaster a tenté de démontrer que cette même année, l’acteur Alizon, après une série d’allées et venues de la troupe du Marais à celle de l’Hôtel de Bourgogne27, faisait partie de cette dernière et qu’il aurait par conséquent interprété le rôle traditionnel de la vieille Alizon dans la pièce homonyme de Discret28. Cette proposition a été ensuite reprise par Dierkauf-Holsboer, qui a montré comment certains éléments de la reconstruction de Lancaster étaient sans fondement29, venant ainsi à la conclusion que l’acteur Alizon avait bien fait partie de la troupe de l’Hôtel de Bourgogne mais seulement pendant quelque mois en 1635 pour ensuite quitter Paris et continuer sa carrière en province30.
Les allusions textuelles §
D’autres critiques sont allés plus loin ; jusqu’au point de remettre en cause l’idée que la pièce ait pu être représentée dans le théâtre de la rue Mauconseil. Comme on l’a vu, l’Advertissement au lecteur, contient des allusions élogieuses à la troupe de Montdory, mais surtout avant le début de la pièce, on trouve un poème liminaire où l’on fait allusion à plusieurs œuvres dramatiques que l’on sait avoir été toutes représentées au théâtre du Marais : « A luy-mesme. / Mariane, le Cid, Cesar, & Cléopatre31, / Paroissans au théâtre, / Ont ravy les esprits par l’oreille & les yeux : / Mais qui preferera le plaisir à tristesse, / Doit cherir Alizon autant qu’une Deesse / Comme un present des Cieux. / C.M. Fort de ces indices, l’auteur de l’unique édition critique d’Alizon32 a cru, puisque Discret s’exprimait en des termes élogieux envers des pièces représentées au théâtre du Marais, que sa pièce ne pouvait être destinée qu’à ce théâtre. En voulant suivre le raisonnement de ce critique, on pourrait corroborer son argumentation en avançant que, considération faite de la rude concurrence que le Marais et l’Hôtel de Bourgogne se faisaient l’un l’autre, Discret ne se serait pas employé à mettre en bonne lumière le théâtre du Marais s’il n’y avait pas été attaché par des intérêts personnels. Toutefois ce critique, se limite à ce raisonnement déductif et ne propose aucun autre argument pour fortifier la thèse selon laquelle Alizon aurait été représentée au Marais.
Le répertoire des théâtres parisiens §
Si les arguments fournis par Lancaster n’apparaissent pas plus probants, en revanche la prise en considération des répertoires des pièces jouées, appartenant aux deux seuls théâtres stables parisiens des années 1630, nous porte plutôt à attribuer, comme étant plus plausible, la possibilité d’une représentation de la pièce de Discret à l’Hôtel de Bourgogne.
Grâce au processus de régularisation du théâtre, l’Hôtel de Bourgogne connut un renouvellement important des membres de sa troupe et de son répertoire, afin de se focaliser sur le théâtre littéraire et devenir ainsi le premier théâtre de Paris. Toutefois, il n’y eut pas de coupure nette avec le répertoire comique traditionnel, qui avait caractérisé la scène de ce théâtre pendant la période finissant où il avait été dirigé par le célèbre acteur Robert Guérin, mieux connu sous son nom de guerre Gros-Guillaume. Le répertoire comique de l’Hôtel de Bourgogne gardait donc un lien fort avec le comique traditionnel. Au contraire, la troupe de Charles Le Noir et Montdory, qui se transformera en la troupe du Marais, s’était illustrée pour avoir joué dans son répertoire Mélite, la première comédie de Pierre Corneille, qui entre 1629 et 1634 produisit un type de comédie nouvelle dépourvue des ressorts traditionnels du comique grossier traditionnel. Cela nous invite à mieux considérer comment les pièces de Discret, franchement rattachées à l’esprit du comique traditionnel, pouvaient être plus facilement accueillies dans le répertoire de l’Hôtel de Bourgogne que dans celui du Théâtre du Marais.
D’autre part, en revenant aux pièces imprimées, on observe que si l’on a trouvé des allusions aux pièces jouées au Marais dans l’appareil para-textuel d’Alizon, celui des Noces ne se trouve pas non plus dépourvu d’indices textuels de ce type, mais qui semblent plutôt faire référence à l’Hôtel de Bourgogne. Dans l’Advertissement des Noces que nous avons déjà cité plus haut, Discret, cherchant à se distinguer des autres auteurs, nous dit : « moy je ne sçaurois flatter [...] sans chercher la protection des grands, ainsi que beaucoup font, & qui s’imaginent que le nom de ceux à qui leurs livres sont dediez excusent leurs fautes, & deffendent leurs œuvres de la médisance [...] ». Selon Lancaster, ce passage est une pique lancée contre les prétentions de Rotrou qui, dans l’épître dédicatoire de L’heureuse constance de 163633, représentée pour la première fois en 1631 à l’Hôtel de Bourgogne34, avait manifesté son désintérêt hautain à l’égard de tout jugement sur son œuvre. L’identification de Rotrou en tant que cible de l’accusation allusive faite par Discret semble être plausible, d’autant plus qu’à l’intérieur de l’Advertissement, l’auteur des Noces étale sa critique railleuse en conseillant « aux Autheurs du temps [...] de donner plus de temps à la composition de leurs ouvrages, & de ne les entreprendre si jeunes ». Par rapport au contexte théâtral évoqué au début de l’introduction, nous avons toutes les raisons de croire que ces jeunes auteurs sont ceux qui constituent la « société des cinq » voulue par Richelieu. Parmi ceux-ci, Jean de Rotrou, tout de suite après Corneille, est l’auteur le plus jeune du groupe35 : en 1637, l’année de la publication des Noces, il a 28 ans, et si l’on accepte l’année 1631 comme datation de la représentation de L’heureuse constance, cela signifie qu’il ne pouvait avoir plus de 22 ans lorsqu’il écrivait cette pièce. Le jeune Rotrou avait commencé sa carrière à l’Hôtel de Bourgogne dont il en était devenu le poète à gage. Bien qu’appartenant à ce groupe de jeunes dramaturges désireux de renouveler le théâtre, il restait le grand représentant de la tragicomédie traditionnelle. À la différence de Corneille, qui étais le poète phare du Marais, Rotrou ne participa jamais aux tendances contemporaines36. Malgré les critiques que Discret fait à Rotrou, la constante présence de ce poète manifeste que le répertoire de l’Hôtel de Bourgogne restait plus attaché à la tradition, donc qu’il pouvait plus facilement accueillir une pièce présentant les caractéristiques traditionnelles comme celle de Discret. De plus, Dierkauf-Holsboer qui a reconstitué le répertoire de la rue Mauconseil dans les années 1636 et 1637, grâce aux données fournis par le Mémoire de Mahelot et les travaux de Lancaster, indique comme très probable la possibilité que Les Noces ait pu être représentée à l’Hôtel de Bourgogne37.
Les conditions matérielles §
Le décor au théâtre de l’hôtel de bourgogne §
Savoir dans quel théâtre Les Noces de Vaugirard a pu être représentée, on a vu que ce n’était pas une chose facile à déterminer. Mais quelle que soit la salle de représentation envisagée, cela ne comporte pas de différences sensibles en ce qui concerne le décor, car les dispositifs scénographiques pratiqués par le Théâtre du Marais et l’Hôtel de Bourgogne étaient à peu près équivalents pendant les années 1630. Les genres dramatiques qui dominent nettement cette période, et d’autant plus qu’ils ne se distinguent pas toujours clairement l’un de l’autre sont la tragi-comédie et la pastorale. C’est à ce dernier qu’appartient la pièce de Discret et cela constitue pour notre étude un avantage considérable dans la compréhension du décor des Noces. La scénographie de la pastorale en effet, au contraire de la tragi-comédie, présente une fixité des décors, puisqu’on utilisait toujours les mêmes lieux topiques. Le caractère récurrent que présente le décor pastoral est manifeste dans les annotations du répertoire de Mahelot où, comme le fait remarquer Pierre Pasquier :
Il arrivera [que] le rédacteur ne jugera plus utile de décrire les chambres à constituer et se bornera à s’en remettre à l’expérience du peintre chargé de la réalisation des décors. Ainsi la notice des Trois semblables commence par ces mots : « Il faut que le théâtre soit en Pastorale, a la discretion du feinteur » [...] Sans doute la confection des décors de pastorales obéissait-elle, à cette époque, à une tradition déjà ancienne qui ne laissait plus guère place à l’invention et les peintres se contentaient de reproduire des patrons, peut-être transmis par les Italiens38.
Par conséquent, grâce à la fixité des éléments du décor de la scénographie pastorale qui les rendent aisément identifiables, nous pouvons reconstruire assez précisément, à partir des esquisses de Mahelot, le décor probable des Noces selon les indications textuelles présentes dans la pièce. L’usage général dans l’élaboration du décor à l’Hôtel de Bourgogne correspond au dispositif des cinq chambres ou compartiments. L’usage consistait à installer cinq chambres autour de l’espace vide au centre de la scène ; deux chambres étaient placées côtés jardin, deux côté cour et une au centre du dispositif au fond de la scène.
Il existe quelques exceptions à cet usage, mais elles restent assez peu nombreuses et la plupart des dispositifs scéniques dessinés par Mahelot suit l’usage des cinq chambres. Cet usage paraît avoir été si influent au point que des pièces s’y conforment même si la spatialisation de leur action à représenter nécessite moins de cinq chambres.
La caractérisation des chambres entourant l’espace vide obéit à un usage et à une typologie bien précise. C’est ainsi qu’à travers les croquis de Mahelot, on peut dresser un inventaire des chambres qui étaient employées dans la scénographie. Dans l’élaboration de cet inventaire, Pierre Pasquier énumère les différents types en faisant remarquer la distinction hiérarchique qu’il y avait entre les chambres majeures et les chambres mineures, selon leur fréquence d’apparitions dans les dispositifs scéniques dessinés par Mahelot. En ce qui concerne le genre de la pastorale, P. Pasquier nous dit que :
d’autres types de chambres semblent procéder de la scénographie de la pastorale, telle que l’on la concevait au XVIe siècle dans les cours italiennes et telle qu’elle s’est transmise à la France du XVIIe siècle [...] Il s’agit parmi les chambres majeures, de la grotte, du jardin, du bois, des rochers et peut-être du palais, parmi les chambres mineures, de la fontaine ou de la source, du temple, du tombeau, de la rivière, et de l’arche de verdure.
Parmi ces onze lieux topiques du genre de la pastorale à quoi correspond une chambre pour chacun, on en trouve, à travers les références textuelles, bien six dans les Noces. À ceux-ci il faut en rajouter deux autres qui témoignent de l’inflexion que la pastorale connaît dans la pièce de Discret. Le cadre idyllique de la pastorale, est atténué en effet par la présence des deux lieux scéniques supplémentaires appartenant plutôt au genre de la comédie. Il s’agit: premièrement du décor représentant le village, qui devait correspondre à une chambre placée au fond de la scène ; et deuxièmement celui représentant un carrefour39, prolongement spatial du village dans l’espace vide de la scène.
Une fois identifiés, à travers l’analyse textuelle, tous les lieux40 où est censé se passer l’histoire de la pièce, nous avons essayé de comprendre à quels emplacements pouvaient avoir été disposées les chambres pour former le décor, selon les nécessités de l’action et du jeu des acteurs dans la pièce.
Résumé de la pièce §
Acte premier [Première journée] §
• I , 1 • Pancrace, le vieux berger du village, se félicite de voir enfin son dessein accompli pour le mariage de sa fille Amarille avec Floridon, lequel, aux yeux du vieux père, passe pour être le meilleur gendre qu’on puisse espérer. Le vieux Pancrace est d’autant plus satisfait que, s’il n’avait pas veillé à contrôler les événements, le mariage qu’il ambitionnait aurait pu s’écrouler à cause des amourettes que sa fille entretient avec un jeune nommé Polydas que tout le monde croit un berger étranger mais qui se révèlera être en réalité un jeune noble parisien. Amarille, bien qu’elle se soit pliée aux volontés de son père, a néanmoins exigé de faire ajouter au contrat de mariage une clause interdisant à son époux de coucher avec elle avant une période de six mois à compter du jour des noces. Pancrace a bien voulu la contenter, convaincu du fait qu’une fois mariée, sa fille cédera bien facilement aux attraits de la vie conjugale, et se laissera faire par son époux. C’est pourquoi il s’en va accueillir allègrement les invités pour mener les danses de la fête organisée pour les noces. • I , 2 • Entretemps Floridon, l’heureux époux, s’apprête à célébrer le jour qui va désormais l’unir avec sa bien aimée Amarille, mettant ainsi un terme à ses peines et à ses attentes interminables. En croyant que l’amour de cette union est réciproque, Floridon, pense ingénument que la clause des six mois, n’est en réalité qu’une adroite manière de son épouse pour tromper Polydas en lui donnant un faux espoir afin de n’être plus embarrassée par lui. • I , 3 • De son côté, le berger Polydas, qui entretient cette relation amoureuse avec la fille de Pancrace, se plaint de s’être fait dérober sa belle Amarille pour laquelle il était venu habiter la campagne. Il aurait déjà tué Floridon, afin de punir son insolence d’avoir voulu rivaliser avec lui, si Amarille ne lui avait pas prouvé, par cette clause des six mois, son amour et sa volonté de lui rester fidèle malgré le fait d’avoir été unie en mariage avec Floridon. Conforté par l’engagement qu’Amarille a pris avec lui, Polydas décide de patienter, tout en se disant que, quand dans quelques jours un bateau qu’il attend aura jeté l’ancre, il pourra enfin enlever Amarille. Avec cet espoir il décide d’aller participer à la fête des noces afin de ne pas donner la possibilité de faire naître des soupçons sur lui. • I , 4 • Pendant que Pancrace exhorte ses invités à prendre part aux danses, Polydas apparaît, mais, ne voulant pas se faire remarquer, décide d’observer la scène en se tenant à l’écart ; tout à coup, pendant qu’il observe le groupe, il aperçoit parmi les invités Lydiane et il en tombe amoureux à l’instant même. Dès lors, ne pouvant plus demeurer à l’écart, il se décide à aller joindre le groupe et invite Lidiane à une danse. Après un certain temps où les invités se délectent avec les danses Pancrace fait taire les musiciens et invite jovialement ses hôtes à rentrer au logis pour se régaler du banquet nuptial organisé pour la fête. • I , 5 • C’est ainsi que, ayant laissé partir tout le monde, Amarille peut profiter d’un moment de solitude pour donner libre cours à son affliction en se demandant comment l’ingrat Polydas ait pu danser, sous ses yeux, avec Lidiane. Or à ce moment là, Amarille voit s’approcher le berger Polydas dont elle vient de se plaindre. Celui-ci, se croyant seul, déclare passionnément l’extraordinaire beauté de Lidiane qu’il avait dû jusque-là retenir en son cœur. S’étant ensuite aperçu de la présence d’Amarille il se précipite sur elle avec des paroles douces en espérant qu’elle n’ait rien entendu. Amarille demeure, dans un premier temps, insensible aux tendresse du berger en lui reprochant sa conduite ; mais finalement Polydas réussit adroitement à la persuader du fait qu’il n’aurait dansé avec Lidiane que pour écarter les soupçons sur son compte, mais qu’en fait derrière cette comédie, il lui reste fidèle plus que jamais. Ainsi, grâce à cette ruse Polydas réussit, plus ou moins, à rassurer Amarille qui, après lui avoir donné un baiser, s’en retourne à la fête. La voyant s’en aller, Polydas sent sur lui le chatouillement d’un petit remords mais il s’innocente facilement en se disant que de toute façon il ne peut rien faire pour résister aux charmes de Lidiane et qu’il ne croit pas du tout que Floridon puisse vraisemblablement attendre les six moins exigés par Amarille. C’est ainsi qu’il s’apprête à rejoindre les autres invités au souper des noces en espérant jouir des faveurs de Lidiane.
Acte II [Deuxième journée] §
• II , 1 • L’acte s’ouvre par de mélancoliques réflexions de Lidiane sur la misérable condition de l’homme, soumis aux souffrances de l’amour et aux aléas de la vie terrestre. Elle évoque la guerre qui les a obligées, elle et sa mère Luciane, à quitter leur contrée, les souffrances interminable face auxquelles elle a, plus d’une fois, souhaité de mettre fin à sa vie. Enfin pour occuper son esprit à des réflexions moins tristes, Lidiane se met à songer aux charmes de Polydas, qui ont fait grand effet sur elle la veille au soir. Voici alors que Polydas survient et les deux amoureux commencent à se faire des galanteries, se déclarant ainsi réciproquement leur amour pour ensuite disparaître ensemble sous la fraicheur des ormeaux. • II , 2 • Non loin de là, le berger Pysandre mène son petit troupeau dans les prés, et comme il se trouve à passer près d’une grotte, il entend la voix d’Écho qui s’adresse à lui. Mais Pysandre, craignant d’entendre des mauvais présages, s’éloigne de la grotte pour aller attendre dans un coin tranquille l’arrivée de sa bergère Cleanide. Une fois celle-ci arrivée, Pysandre lui fait croire d’avoir été mordu sur les lèvres par une abeille et il lui demande de soulager sa douleur par des baisers. Après ce petit jeu, Pysandre et Cleanide aperçoivent Polydas et Lidiane, alors les deux couples se rejoignent et décident de passer le reste de la journée ensemble dans les prés, avec aussi Amarille qui, ayant pu se débarrasser de son mari importun Floridon, les a rejoint entretemps. Pour divertir la compagnie, Polydas sort de sa poche un petit livre de divination, et à tour de rôle les bergers lisent un quatrain qui contient, sur le ton de la révélation et du présage, des réprimandes malicieuses concernant les amours de chacun. La compagnie s’arrête de jouer quand Floridon, le niais du groupe arrive et demande de pouvoir s’unir à leur compagnie. Alors, pour se débarrasser de lui, Polydas propose à la compagnie de jouer à la cligne-musette. C’est ainsi qu’au deuxième tour du jeu, grâce aux tricheries d’Amarille et Polydas, c’est à Floridon de devoir chercher les autres. Ainsi pendant qu’il garde les yeux fermés, toute la compagnie se sauve l’abandonnant dans le pré alors que la nuit commence à tomber. Floridon reste quelque temps à les chercher en vain, jusqu’à ce qu’il comprenne, pendant qu’Écho se moque de lui, qu’il a été berné. Il rentre donc au village en jurant de se venger de l’affront subi. • II , 3 • Entretemps, avec la tombée de la nuit, le vieux Pancrace, s’étant épris de Luciane depuis la fête des noces, se dirige en parfait amant sous la fenêtre de la vieille pour lui faire une sérénade au clair de la lune. Celle-ci apparaît alors à la fenêtre en coiffe de nuit et, pour le remercier, elle lui tend en signe de sa faveur un anneau que le vieux berger reçoit avec milles transports.
Acte III [Troisième journée] §
• III , 1 • Le lendemain, devant son fidèle ami Pysandre, le berger Polydas se plaint de ne pouvoir plus revoir la belle Lidiane. Pysandre alors, voulant lui apporter du secours, le prie de lui révéler la cause de son malheur. Ainsi, après quelques hésitations Polydas lui raconte que, ayant raccompagné Lidiane chez elle, celle-ci lui a donné un baiser sur la bouche devant sa porte, mais que par malheur, la vieille Luciane, les ayant surpris par la fenêtre, a giflée sa fille en lui interdisant de ne plus sortir pendant six mois. Ayant entendu ce pitoyable récit, Pysandre se propose d’aider son ami en tant qu’intermédiaire entre les deux amants. Polydas alors lui confie une lettre à apporter à la belle Lidiane. Ainsi les deux amis se séparent avec la promesse de se retrouver une heure plus tard au même endroit. • III, 2 • Entretemps Amarille se plaint d’être délaissée par Polydas au profit de Lidiane ; et pendant qu’elle tient ce discours, son mari Floridon débarque. Mais se voyant durement rejeté par sa nouvelle femme, Floridon lui dit qu’elle devra bien un jour se plier aux lois du mariage et que de toute façon désormais Polydas ne veut plus d’elle. Une fois la dispute entre les époux terminée, Floridon s’en va et Amarille se voyant accablée de toutes parts, s’en prend à l’injustice des pères, qui marient leurs filles contre leurs volontés. Elle espère enfin que le ciel, prenant pitié d’elle, changera son sort. • III, 3 • Luciane, déçue par sa fille Lidiane, déplore la décadence des mœurs du temps, en évoquant en contrexemple la stricte pudeur de son époque. Mais Pancrace, beaucoup moins stricte qu’elle, à l’inverse, considère d’un bon œil le fait de vouloir suivre son désir amoureux, et sur le ton badin reproche à Luciane, de ne pas avoir été si chaste en sa jeunesse comme elle voudrait le laisser croire. Puis le vieux berger lui propose de l’accepter comme époux, mais, bien que Pancrace lui assure d’avoir encore bien de vigueur, Luciane cherche à le dissuader en raison de leur âge avancé. Luciane revient enfin sur le déshonneur causé par sa fille, et Pancrace s’offre vaillamment à aller donner une leçon à ce coquin séducteur. Les deux aperçoivent alors un berger s’approcher, que Luciane prend dans un premier moment pour celui qui a embrassé sa fille. Mais, voyant qu’il ne s’agit que de Pysandre, Pancrace refroidit son élan vengeur et invite galamment sa nouvelle fiancée Luciane à aller prendre une collation. • III , 4 • Pysandre de son côté, une fois arrivé devant la maison où Lidiane demeure enfermée par sa mère, lui fait passer la lettre de Polydas à travers la fenêtre. Elle lit la lettre immédiatement sans en révéler le contenu puis dit à son cousin de rapporter à Polydas que, bien qu’elle ait de la crainte pour la résolution prise par Polydas, elle se tient néanmoins prête à le suivre. Une fois Pysandre parti, elle va donc préparer ses bagages pour la fuite nocturne. • III , 5 • Luciane et Pancrace, reviennent de leur collation, mais en chemin, ils voient approcher de l’autre côté Pysandre et Polydas, qui ne les ayant pas aperçus continuent leur conversation, jusqu’au moment au où Pancrace les interpelle brusquement. Le vieux et les bergers commencent à s’insulter pendant que la vieille Luciane essaie de retenir la fureur de Pancrace, dont les deux jeunes se moquent éperdument. Enfin Luciane réussit à ramener Pancrace vers le village, sous les railleries des deux bergers. • III , 6 • Pancrace revient tout seul portant une hallebarde pour se battre. Mais ne trouvant personne, il se rit de la couardise de Polydas qui selon lui n’a pas eu le courage de l’attendre pour le duel. Enfin le soir tombant, il rentre au village.
Acte IV §
• IV , 1 • Polydas s’avance dans la nuit un flambeau à la main en invoquant les dieux pour qu’ils veuillent bien l’assister dans son périlleux projet. Arrivé au village il met le feu à une maison afin qu’une fois l’incendie répandu, il puisse, au milieu de la confusion générale, enlever Lidiane sans qu’on s’en aperçoive. • IV , 2 • Au beau milieu de la nuit, Luciane lance l’alarme de sa fenêtre ; Pancrace, en chemise de nuit, se précipite à son secours, avec bientôt le support de Pysandre et d’autres bergers. Tout le village est en tumulte, et on envoie chercher de l’eau pour essayer de maîtriser les flammes. • IV , 3 • Le moment est ainsi propice pour Polydas qui entre dans la maison de Lidiane et l’enlève. Puis, arrivés au bord d’un rivage Polydas fait monter Lidiane dans un bateau qu’il avait placé là pour s’enfuir, mais au moment où il s’apprête à monter à son tour, la corde à laquelle le bateau était accrochée se rompt, et Lidiane est ainsi emportée par le courant. Polydas en proie à la panique cherche un moyen pour la rejoindre, mais il ne trouve rien, et comble du malheur, il voit au loin Lidiane tomber dans l’eau. Ainsi en proie à la folie Polydas s’en prend à Neptune et à l’inclémence des dieux qui ont voulu lui ravir sa belle. Il décide alors de se donner la mort, en se précipitant dans la grotte des démons, et avant de se précipiter il grave au couteau quelques vers funèbres sur un rocher près du lieu de sa mort. • IV , 4 • Luciane, attristée par la fuite de sa fille, implore les dieux de lui dire pourquoi ils lui infligent de telles souffrances ; elle qui a toujours vécu de façon vertueuse. Puis en invoquant la lettre que Lidiane a oubliée dans la maison, Luciane déplore d’avoir une fille si sotte au point de se laisser duper par les galantes promesses de son ravisseur. Elle en vient enfin à se souhaiter une mort prochaine plutôt que de voir le nom de sa famille couvert de déshonneur par sa fille. Ce disant, elle retourne vers son logis pour recueillir ce qui a survécu aux flammes, en s’en allant elle pense à envoyer sa servante Pernelle à la recherche de sa fille. • IV , 5 • Après la fuite de Polydas, Amarille ayant été abandonnée éclate de colère, et invoque la justice des Dieux afin d’obtenir vengeance. Cependant, comme les dieux ne répondent pas à son appel elle en tire la conclusion qu’ils doivent plutôt prendre plaisir à la voir souffrir. Alors afin d’arrêter ses souffrances elle décide de se donner la mort, quand, s’approchant d’un rocher, elle découvre l’épitaphe gravée par Polydas par quoi elle comprend que celui-ci s’est suicidé à cause de la perte de Lidiane. Par conséquent elle décide aussi de mettre un terme à sa vie, et se précipite dans la grotte en espérant de rejoindre Polydas dans l’outre tombe. • IV , 6 • Pysandre et Cleanide déplorent la fuite de Polydas et Lidiane, ils se disent de ne pas avoir été au courant, ni l’un ni l’autre, de leur funeste dessein autrement ils auraient tenté quelque chose pour les en dissuader. Leur discussion se porte ensuite sur les dégâts causés par l’incendie. Comme Cleanide a perdu sa maison, Pysandre lui propose galamment de dormir sous son toit, mais trop enflammé par cette idée il se laisse aller à des allusions licencieuses que Cleanide semble trouver inconvenantes. • IV , 7 • Floridon se plaint d’avoir perdu ses biens et sa femme Amarille, qu’il croit aussi dans les bras de Polydas. Il s’en prend aux dieux, et en proie au désespoir décide de se donner la mort. Mais après quelques hésitations, il choisit finalement de rester en vie pour trouver le traître et se venger. Pendant ce temps, apparaît son beau-père Pancrace, qui vient le soutenir dans son chagrin. Tout les deux, réclament une vengeance sanglante contre Polydas qui passe ainsi pour avoir enlevé à la fois Amarille et Lidiane. Après cette plainte commune, Pancrace et Floridon retournent au village pour organiser les recherches avec les autres bergers.
Acte V [Quatrième journée] §
• V , 1 • Au même endroit où elle avait était séparée de Polydas, Lidiane est ramenée au petit matin par deux pêcheurs qui l’ont miraculeusement sauvée. En le quittant elle les remercie du fond de son cœur et, pour les récompenser, leur fait cadeau d’une précieuse bague. Ainsi, de retour sur le rivage, Lidiane se hâte de retrouver Polydas pour qui elle craint les pires malheurs à cause de son désastreux projet d’enlèvement. Entretemps Floridon et ses hommes, qui parcourent les bois à la recherche de Polydas, aperçoivent Lidiane et la saisissent pour l’amener devant le juge, convaincus du fait qu’elle sait où se trouve l’infâme Polydas. • V , 2 • Le juge se montre plutôt enclin à être clément pour juger l’affaire qui concerne Polydas ; alors que l’impitoyable procureur qui l’assiste exige qu’il soit condamné à mort, et il s’emploie à mettre sous les yeux du juge les arguments qui valident la condamnation du berger. Pendant qu’un désaccord a lieu entre les deux juristes, Lidiane est amenée par Floridon devant le juge qui l’invite à donner sa version des faits. Elle raconte alors son histoire en entier : du baiser échangé avec Polydas jusqu’au sauvetage par les pêcheurs. Le procureur ne la croit pas et le juge émet la sentence de mort contre elle. • V , 3 • Pysandre accourt pour rapporter la malheureuse nouvelle de la sentence de mort à Cleanide, peu après arrive Luciane qui est déjà au courant de la chose, ainsi Pysandre et Cleanide l’accompagnent pour se rendre tous ensemble devant le juge en espérant de lui faire changer d’opinion. • V , 4 • On amène Lidiane sur le lieu où elle doit être exécutée et on lui signifie qu’elle peut encore se sauver en révélant au juge où se trouve Polydas. Mais à ce moment précis, elle aperçoit l’épitaphe gravée par celui-ci sur le rocher, juste avant de mourir. Cela prouve son innocence, mais puisque son Polydas est mort, désormais elle veut mettre fin à sa vie au plus vite. Entretemps sa mère Luciane, accompagnée de Pancrace et des autres bergers, arrive pour implorer le juge d’épargner sa fille ; celui-ci ne semble pas disposé à céder quand au milieu de cette confusion générale, surgit de la grotte l’ombre de Castrape, amenant avec lui Polydas et Amarille ressuscités. Castrape rétablit l’ordre et invite toute la compagnie à retourner au village, le juge devant cette manifestation de justice divine retire alors sa sentence, et toute la compagnie s’en retourne au village chacun avec sa compagne pour profiter des douceurs de l’amour. Ainsi Amarille revient au près de son époux légitime Floridon, et Lidiane au près de Polydas qui se prépare à regagner Paris avec sa belle.
pan | flo | pol | pys | lid | cle | ama | luc | pes | Jug | pro | gre | dep | cas | |
I.1 | X | |||||||||||||
I.2 | X | |||||||||||||
I.3 | X | |||||||||||||
I.4 | X | X | X | X | X | X | X | X | ||||||
I.5 | X | X | ||||||||||||
II.1 | X | X | ||||||||||||
II.2 | X | X | X | X | X | X | ||||||||
II.3 | X | X | ||||||||||||
III.1 | X | X | ||||||||||||
III.2 | X | X | ||||||||||||
III.3 | X | X | ||||||||||||
III.4 | X | X | ||||||||||||
III.5 | X | X | X | X | ||||||||||
III.6 | X | |||||||||||||
IV.1 | X | |||||||||||||
IV.2 | X | X | X | |||||||||||
IV.3 | X | X | ||||||||||||
IV.4 | X | |||||||||||||
IV.5 | X | |||||||||||||
IV.6 | X | X | ||||||||||||
IV.7 | X | X | ||||||||||||
V.1 | X | X | X | |||||||||||
V.2 | X | X | X | X | X | X | ||||||||
V.3 | X | X | X | |||||||||||
V.4 | X | X | X | X | X | X | X | X | X | |||||
9 | 8 | 10 | 9 | 8 | 5 | 6 | 8 | 1 | 1 | 1 | 1 | 1 | 1 |
Les sources §
Les seules indications par rapport aux sources de notre pièce sont celles qui ont été signalé par H. C. Lancaster. Ces indications sont relatives à quelques épisodes de la pièce : La ruse de Pysandre concernant la morsure de l’abeille (II , 2) et le sauvetage de Lidiane par les pêcheurs (V , 1) ; ainsi que le thème du mariage blanc entre Amarille et Floridon et la scène du procès faite à Lidiane. En ce qui concerne la thématique de l’abeille, Lancaster fait remarquer qu’elle provient de la tradition ancienne du roman grec, et indique comme source principale Les Amours de Leucippé et Clitophon de Achille Tatius (IIe siècle après J. C.) :
Les Noces, II , 2, vv. 524-539 | Achille Tatius (IIes. après J.-C.) Les Amours de Leucippé et Clitophon II, 7, 3-4 |
PYSANDRE. A l’aide, helas ! je meurs, ô secours ô secours ! [...] Sachez rare merveille, Qu’en passant dans ce pré une mauvaise abeille M’a planté l’ayguillon sur la lévre, ha je meurs Les violents efforts de ces aspres douleurs, Me ravissent l’esprit, adieu chaste Bergere, CLEANIDE. Prend courage Pasteur, la peine est fort legere. Si ce n’est que cela, mon berger, ce n’est rien, Dans un quart d’heure au plus tu te porteras bien, Preste* que je la succe, ô la fortune estrange ! Sens-tu allegement ? Elle le baise à la bouche. PYSANDRE. Pas encore mon ange, Elle le baise encore. CLEANIDE. He bien es-tu guery ? PYSANDRE. Non encore un petit, Ce remede excellent me met en appetit*. CLEANIDE. Finet* seroit ce point quelque tour de souplesse* ? PYSANDRE. Non je jure tes yeux ma fidelle maistresse. |
C'est alors que le hasard voulut qu’une abeille ou une guêpe, qui bourdonnait autour de mon visage, se précipitât sur moi, je saisis ce prétexte et, ayant porté la main à mon visage, je fis semblant d’avoir été piqué et d’avoir mal. Leucippé s’approcha, retira ma main et me demanda où j’avais été piqué. « à la lèvre, répondis-je, mais que ne fais-tu pas ton incantations, ma chérie ? ». Elle s’approcha, posa sa bouche comme pour faire l’incantation et murmura quelque chose, en effleurant mes lèvres42. |
La comparaison entre les deux extraits ci-dessus se montre assez convaincante pour soutenir la filiation suggérée par Lancaster. Cependant il est très surprenant que le chercheur n’ait pas mentionné une autre œuvre fondamentale pour l’histoire de la pastorale dramatique où l’on retrouve la même thématique de l’abeille. Nous faisons bien évidemment allusion à l’Aminta du Tasse qui, dès la fin du XVIe siècle, exerce une influence majeure pour la constitution de la pastorale dramatique en France. L’engouement pour la petite fable bocagère se manifeste en effet rapidement en France avec une importante diffusion de l’œuvre qui connaît plusieurs traductions, dont la première remonte à 1584, seulement quatre ans après la parution de l’editio princeps en Italie. En 1632 l’œuvre est donc bien connue dans le théâtre français et fréquemment imitée par ses dramaturges43. Cette intense imitation fait donc de l’Aminte un des hypertextes principaux de la pastorale dramatique. Or comme Discret entendait faire une parodie du genre, il est très vraisemblable qu’il ait tiré cet épisode de l’abeille depuis la pièce du Tasse, qui était déjà représentée à l’Hôtel de Bourgogne depuis 1632 dans la traduction de Rayssiguier44 :
Amour qui me rendit plus fin que je n’estois, / Me fit avoir bien-tost ce que je souhaitois, / Je feins subtilement, qu’un abeille, de mesme / Me laissoit sur la levre, une douleur extreme, / Mon visage troublé l’oblige à m’accorder, / Ce que ma langue alors n’eust osé demander, / Elle m’aproche donc, & doucement me baise, / Mon ame en la baisant tressaillit toute d’aise, / Mais je me pleins encor, afin qu’en me plaignant, Mon ame en ce plaisir feust longtemps se baignant : / Ma Nimphe qui croyoit ma douleur veritable, / Par un second baiser me rend moins guerissable, Elle accreust mon desir des cet heure, si fort / Que je ne pouvoy plus arrester son effort, /
Quant à l’épisode du sauvetage de Lidiane par les pêcheurs, qui intervient au début du cinquième acte des Noces, Lancaster signale comme source première L’Astrée d’Honoré d’Urfé, roman fleuve constituant une immense pépinière dans laquelle les dramaturges avaient l’habitude de puiser. L’épisode fait partie de l’histoire de Madonte et de son amoureux Damon, qui, poussé au désespoir par l’amour, avait tenté de se donner la mort en se jetant dans un fleuve :
Je fus incontinent englouti par les flots, où je perdis toute connoissance. Déjà le courant m’avoit emporté bien loin, lorsque des pêcheurs m’ayant apperçu vinrent à moi, & après m’avoir tiré dans leur bateau, ils gagnerent le rivage. Là ils m’entendirent sur le sable, ils me dépouillerent, & remarquant mes blessures qui sembloient encore fraiches, ils furent bien étonnés; mais ils le furent surtout lorsqu’ils me trouverent des bagues pretieuses aux doigts, & beaucoup d’or dans mes poches. Ce jour, dit l’un d’eux, va faire tout notre bonheur, ou tout notre malheur. Voici dequoi nous enrichir à jamais.45
Lancaster signale aussi que Jean Auvray, dramaturge aussi peu prolifique que Discret, avait déjà repris cette histoire contenue dans L’Astrée pour en tirer La Madonte, tragi-comédie représentée en 1630 dans l’un des théâtres parisiens46et qu’il fit publier en 1632. Il est ainsi probable que Discret ait repris l’épisode des pêcheurs à partir de cette pièce, car le traitement de l’épisode et son agencement dans la structure des Noces présente des points communs avec la pièce de d’Auvray. En effet, chez Madonte comme dans les Noces, les pêcheurs sont des personnages secondaires qui apparaissent dans le récit de façon ponctuelle pour remplir une fonction dramatique d’adjuvant. En deuxième lieu, bien que les intentions et le rapport entre les pêcheurs et le héros changent sensiblement d’une pièce à l’autre, leur caractérisation dans la scène est assez proche, car chez Discret comme chez Auvray, le comique est basé sur le contraste entre la richesse du héros et la rusticité des pêcheurs :
Discret, Les Noces, V, 1, vv. 1596-1617 | Jean Auvray, La Madonte47 |
LIDIANE. Les deux pescheurs rameinent Lidiane dans le basteau. AMis de qui je tiens le repos & la vie, Que la fureur des eaux m’avoit presque ravie : Que je suis obligee à vostre bon secours, Je m’en resouviendray le reste de mes jours : [...] Elle leur donne une bague. Premier pescheur. Bergere grand mercy je n’eusse pas pensé Devoir estre de vous si bien recompensé. Second pescheur. Ma foy ny moy non-plus; car de toute l’annee Nous n’avons tant gaigné comme cette journee. Premier pescheur. Nous voudrions tous les jours prendre de tels poissons, Et si ne nous faudroit lignes ny hameçon. LIDIANE Faites vostre proffit, Second pescheur. Que tout vous soit prospere. [...] Premier pescheur. Parle compere, Allons vendre à Paris ce riche diamant, Puis nous partagerons l’argent ensemblement : Afin d’en acquerir quelque bon heritage. Second pescheur. Nous boirons en passant dans ce petit village. |
III , 3 LE PREMIER [PÊCHEUR] En fin je ne plus le porter longuement Marquons en ce lieu cy son dernier logement. LE SECOND [PÊCHEUR] N'importe en quel endroit : mais en cette ocurrence Je pretens bien au moins avoir la preference, Je l’ay veu le premier dans le courant de l’eau Il eust passé sans moy dessous nostre bateau. LE PREMIER Cette pesche ne peut mécontenter personne, Voyons auparavant ce que le Ciel nous donne. LE SECOND Voyons, voyons ! LE PREMIER […] C'est sans doute un seigneur de remarque & de gloire LE SECOND Je croy qu’il a les mains plus blanches que l’yvoire Silence compagnon, voicy le beau du jeu; Vois-tu ces deux anneaux plus brillans que du feu. Il ne faut que cela pour marier nos filles ET pour mettre en repos nos deux pauvres familles, Tous mes doits sont trop gros, ils n’y sçauroient entrer |
Enfin les deux dernières indications que Lancaster nous donne concernent d’une part le thème du « mariage blanc » entre les bergers Floridon et Amarille ; et d’autre part la scène du procès faite à Lidiane (V, 2). Le « mariage blanc » proviendrait de La Vraie Histoire comique de Francion de Charles Sorel ; quant à la scène du procès, on retrouve dans l’Aristène, pastorale de Pierre Troterel (1626), l’utilisation d’une scène de jugement vers la fin de la pièce (IV, 1). Ces deux dernières indications demeurent cependant assez vagues, et le rapprochement que fait Lancaster se limite au signalement d’un thème qui reste dépourvu d’un quelconque rapprochement formel.
Le contexte théâtral §
De la pastorale tragi-comique à la tragi-comédie pastorale §
Pour indiquer la spécificité des Noces nous avons dit qu’elle ressentait à la fois l’influence de la période baroque et de l’esthétique classique en train de se fixer autour des années 1630, et que ses attributs étaient en grande partie ceux du genre tragi-comique en plein épanouissement. Or par rapport à ce constat deux questions se posent : premièrement, pourquoi le fait de s’intéresser au genre de la pastorale nous mène nécessairement sur le terrain de la tragi-comédie ? Deuxièmement, comment la tragi-comédie, fer de lance de l’esthétique baroque irrégulière, passe-t-elle dans le camp adverse au point que l’on voit apparaître des pièces comme la nôtre que l’on peut paradoxalement définir comme tragi-comédies régulières ? La pastorale et la tragi-comédie, sont deux genres qui se rencontrent très tôt sur leur chemin. D’abord parce que la tragi-comédie est un genre qui dès ses débuts pose des problèmes de définition48, dans la mesure où elle se constitue en tant que mélange des autres genres et par conséquence elle transgresse les frontières établies. Le terme tragi-comédie est originairement une invention du poète latin Plaute. Il est repris par le Cinquecento italien qui fait l’objet de réflexions théoriques précises sur ce genre qu’on appelle aussi à l’époque « drame mixte ». Un de ces théoriciens italiens, Giraldi Cinthio (1504-1573) introduit la mode des sujets romanesques pour créer une Tragédie qui soit à fin heureuse et qui s’inspire de la fiction plutôt que de l’histoire. C’est là qu’on trouve le premier point de conjonction avec le drame pastoral. Car celui-ci est en train de se développer avec des œuvres marquantes telles que le drame pastoral de l’Aminte (1573) et la tragicommedia pastorale du Pastor Fido (1589). La pastorale, qui mêle facilement les tons, contribue par là à l’élaboration de l’univers moyen de la tragi-comédie. Le Tasse donne avec l’Aminte le modèle du mélange des tons (dits « tragique » et « comique ») et Guarini mène une réflexion sur la tragi-comédie qui aboutit à la publication de son Compendio della poesia tragicomica49 qui fait autorité sur la matière. L’auteur du Pastor Fido soutient que la tragi-comédie est une troisième forme et revendique la modernité du genre à travers le mélange des éléments comiques et tragiques, alors que ses adversaires comme le professeur de la prestigieuse université de Padoue Giasone de Nores définissait le genre tragi-comique comme une « composition monstrueuse et disproportionnée50 ». Au moment donc de se déverser de l’autre côté des Alpes, la pastorale et la tragi-comédie sont déjà des genres très voisins. Ce qui va encore plus les rapprocher c’est le fait que les auteurs français s’éloignent de plus en plus du modèle de la pastorale pure de l’Aminte, considérée comme un exemple de « parfait équilibre51 », pour embrasser plutôt le modèle tragi-comique du Pastor Fido de Guarini. Ainsi la pastorale qui avait déjà pour domaine un monde imaginaire, affirme son penchant en « cédant aux extravagances romanesques52 ». Si donc la pastorale avait dans un premier temps influencé la tragi-comédie, c’est elle à son tour qui subit l’ascendant tragi-comique au point de perdre son identité d’origine ; dans son ouvrage de référence sur la pastorale, Marsan encore une fois exprime fort bien cette double influence qui se solde, si l’on peut dire, par une inversion des rôles : « l’essentiel est devenu l’accessoire, et, d’une pastorale de forme tragi-comique nous passons à une tragi-comédie n’ayant de pastoral que le costume de ses héros53 ».
Discret entre réguliers et irréguliers §
C’est ainsi qu’en s’appuyant de plus en plus sur son côté romanesque le genre protéiforme de la tragi-comédie connaît une grande prospérité en France. À partir de 1628 s’ouvre pour elle une grande époque, surtout parce que celle-ci devient l’étendard éclatant des modernes irréguliers pendant les six années de débat théorique qui traversent le théâtre français54. Ce débat est provoqué par la vague du mouvement de régularisation qui pose la question de la fonction du théâtre : du moment que l’on cherche à épurer l’art dramatique, celui-ci ne peut plus se limiter à être un simple divertissement mais elle se doit, pour être honnête, d’avoir une fonction instructive à l’imitation du théâtre des anciens. Deux factions opposées vont ainsi se former : celle de réguliers qui exigent un théâtre moralement instructif et celle d’irréguliers revendiquant le plaisir comme seul but de l’art dramatique. À l’essor du débat, ces deux fonctions, plaisir et instruction, vont réduire considérablement leur opposition du départ, pour retrouver le précepte horatien de l’utile dulci. Le procès de régularisation va ainsi redéfinir les principales parties de la composition du poème dramatique ; et la pièce de Discret en 1637 est un exemple de l’aboutissement de ce processus : une tragi-comédie dans son ossature mais avec tous les ajustements nécessaires pour évacuer les éléments scabreux de l’esthétique baroque.
Ces ajustements se font de manière progressive dans le débat qui oppose les deux factions adverses. Ainsi le refus de l’instruction au théâtre se déploie d’abord sur la question de l’ elocutio. Les modernes, partisans de Malherbe, rejettent en bloc la poétique ronsardienne à laquelle était attachée la vieille génération des dramaturges. Ainsi les déclarations de Hardy, qui recommande en 1628 « la douceur des digressions » et « un grave mélange de belles sentences55 », sentent trop le didactisme pédant pour les modernes qui prônent un théâtre affranchi des règles et ayant pour seul but le plaisir.
C’est à travers le système représentatif de Chapelain basé sur l’idée d’illusion mimétique qu’on arrive à réunir plaisir et utilité, en proposant pour le théâtre une instruction qui ne tombe pas dans le défaut du didactisme mais qui s’accorde parfaitement avec l’esthétique moderne du plaisir56. Discret, bien qu’il soit un auteur mineur, témoigne à sa manière de ce débat, révélant ainsi l’acquisition désormais assurée en 1637 de l’idée d’une instruction insensible où tout ces « belles sentences » qui tendent à rompre l’illusion théâtrale, doivent être condamnées chez les mauvais auteurs, dont il blâme « [ces] poinctes, qui, pour proprement parler, ne sont que metaphores hyperboliques forment des espines si piquantes, que leur honneur s’y escorche le plus souvent57 » ; et plus loin, en précisant d’avoir fait preuve de beaucoup de mesure et de discrétion, il prévient son lecteur que : « [...] dans [ce] livre, [...] les belles pensées, & les bons mots y sont clairs semez ».
Cependant la réflexion élaborée par Chapelain ne se limite pas au plan de l’elocutio. Une fois que le plaisir a été reconnu nécessaire, un partage est fait entre deux sortes de plaisirs : les faux et les véritables. Les premiers sollicitent un mélange désordonné, alors que les vrais plaisirs nécessitent « l’ordre dans la dispositio et la vraisemblance58 »
Ainsi pour les différents plans de construction du poème, on indique que le véritable plaisir est dans la règle parce qu’elle est source de clarté. Par conséquent les irréguliers se trouvant privé de leur justification principale, le principe de plaisir contre celui de l’utilité, vont au fur et à mesure se plier aux règles. La tragi-comédie donc se régularise, et, bien qu’il reste encore quelques irréguliers irréductibles59, la plupart des auteurs se font plus scrupuleux quant à l’application des règles sur la composition du poème. Désormais les arguments de la violente critique portée jadis contre la tragi-comédie de Guarini60 sont repris par les modernes qui, même s’ils n’y arrivent pas toujours, ont un grand souci de faire une composition bien réglée. C’est ainsi que l’on retrouve même chez l’auteur des Noces, les idées principales de l’argumentation régularisante maintenant appliquées à la tragi-comédie ; s’adressant aux auteurs qu’il dédaigne, Discret dit :
je conseillerois volontiers à ces esprits de donner plus de temps à la composition de leurs ouvrages, [...] il n’y a pas un vers qui n’en fournisse quatre pour ronger ce qu’il y a de mal digeré dans leur travail ; de sorte que comme la chauve-souris à cause de sa difformité n’ose paroistre devant le jour, ces ouvrages devroient demeurer enfermez, ou n’estre mis en lumiere que par le feu61
et un peu plus loin, quant à la composition de sa pièce, il s’empresse de mettre en avant tout son zèle de régulier « [la] Pastoralle que j’ay faicte, [...] j’ay beaucoup de fois repassé par dessus, j’y ay corrigé quantité de choses, j’ay faict mon possible pour la polir, & empescher qu’il n’y eust point de fautes remarquables ».
Analyse dramaturgique §
Ayant montré le chemin que la tragi-comédie et la pastorale parcourent ensemble, nous allons à présent nous concentrer sur le fonctionnement dramaturgique à l’intérieur de la pièce. La tragi-comédie, est un genre qui cherche à établir des archétypes, par conséquent il est relativement aisé pour le lecteur de se rendre compte de la répétition des mêmes processus actantiels et des traits distinctifs permanents. Pour ce faire, nous suivrons de près l’analyse menée par H. Baby62, afin de voir comment les codes dramaturgiques du genre s’actualisent dans Les Noces en précisant les infléchissements particuliers et les atténuations que le processus de régularisation exige.
Le schéma actantiel général §
La structure actantielle des Noces, correspondant au schéma topique « des amours contrariés63 » se bâtit autour d’une histoire qui met en scène les tribulations d’un couple d’amants luttant pour asseoir sa relation amoureuse. La pièce ne s’intéresse pas aux aventures d’un seul personnage, mais elle met en scène un couple aux prises avec les obstacles provoqués par les divers opposants. Le couple qui constitue l’axe central du schéma actantiel est celui formé par les personnages principaux de la pièce. On peut certes déterminer cela de façon intuitive par le fait que les personnages principaux sont ceux vers qui tous les intérêts se tournent, mais une analyse actantielle plus précise, nous montre que pour remplir cette fonction, le couple principal doit réunir d’abord deux conditions : avoir une relation amoureuse réciproque, et être formé par des personnages de rang nobles.
Seules ces deux conditions ensemble, permettent de hiérarchiser les couples à l’intérieur de la pièce, et de reconnaître dans la relation Polydas-Lidiane le couple principal. Les autres couples, qui présentent tantôt une condition tantôt l’autre mais jamais les deux ensemble, constituent des intrigues secondaires reliés ou pas à l’intrigue principal. Ainsi l’exposition du premier acte des Noces, contribue à informer le spectateur sur la composition des différents couples et des leurs relations internes parmi lesquelles se produit la rencontre de Polydas et de Lidiane dans la scène de danse (I , 4). Une fois posée cette structure, le début du deuxième acte précise par le biais du monologue de Lidiane (II , 1) le type de relation entre les deux personnages, présentant ainsi les caractères du couple des héros. On est alors instruit du fait que Lidiane n’est pas une bergère mais qu’elle s’est réfugiée avec sa mère à Vaugirard en fuyant la guerre :
Je n’avois pas encore l’usage de raison, 360Lors que je commençay de gouster le poison.Des douloureux regrets d’une fuite causee,Par les guerriers exploits du Prince de Luzee :
S’ouvre par conséquent la possibilité d’une naissance noble de Lidiane, confirmée dans plusieurs passages successifs, comme lorsque sauvée par les pêcheurs (V, 1) elle les remerciera en leur offrant une précieuse bague ; exprimant ainsi par cette action la largesse aristocratique, qualité noble par excellence. Quant à Polydas, les mêmes caractéristiques sont évoquées par Lidiane qui reconnaît en lui sa véritable qualité :
Et je croiray plustost que ce soit quelque DieuEn Berger deguisé, qu’un pasteur de ce lieu. 385Toutes ses actions & sa docte eloquence,Font veoir que d’un Pasteur il n’a point pris naissance :Son port plus relevé que cette nation,Monstre qu’il tire lieu de nostre extraction :C’est peut estre un Seigneur, que quelque subject porte 390A delaisser la Cour déguisé de la sorte :
À l’appartenance à la noblesse vient s’ajouter la deuxième caractéristique de l’amour réciproque, qui nous montre les deux amants soupirer l’un pour l’autre tout au long de la pièce. Cette dernière condition détermine l’action-type des amoureux de la tragi-comédie qui est celle de lutter pour son amour et retrouver finalement l’objet aimé. Mais si la qualité d’amant correspond à la fonction actorielle, le couple est toujours soumis à une instance qui leur est supérieure. Au couple d’amoureux s’ajoute ainsi une troisième catégorie qui est celle de la « non-souveraineté64 », situation de dépendance qui permet la création des obstacles. Ceux-ci sont provoqués par les opposants, catégorie actantielle dont font partie à la fois les personnages rivaux (Amarille, Floridon) et les acteurs parentaux (Luciane, Pancrace).
La catégorie des opposants dans Les Noces présente une disposition particulière dans le schéma actantiel général. La pièce démarre sur un schéma actantiel qui met au centre le couple Polydas-Amarille. Mais à partir du moment où Polydas délaisse Amarille pour Lidiane (I, 5) on se place dans un nouvel schéma actantiel construit cette fois-ci sur le couple Polydas-Lidiane. Cependant le schéma du départ n’est pas complètement neutralisé grâce à l’incertitude qui demeure sur le délaissement d’Amarille par Polydas. En effet Floridon, le naïf époux d’Amarille et par conséquent rival de Polydas, est persuadé lorsqu’il tombe sur Lidiane (V, 1) que Polydas a aussi enlevé son épouse Amarille alors qu’on l’a vu se suicider auparavant :
FLORIDONFidelles deputez de tout le voisinage,Pour rechercher celuy qui de nostre village 1645A la perte causé par un embrasement,Commis pour enlever ma femme nuictament :[...]Où est ce Polydas,[...]Il vous a emmenee, 1665Et Amarille aussi,LIDIANE.Rien moins, croyez pasteurQue jamais Polydas ne fut d’un crime autheur.
La méconnaissance du suicide d’Amarille par les autres personnages, crée ainsi un quiproquo permettant de faire fonctionner les opposants du premier schéma dans le deuxième.
Acteurs et action types §
Les actions des opposants §
À partir de cette organisation actantielle nous pouvons individualiser le profil de chaque catégorie agissante sur le couple des amants.
Dans la catégorie des opposants nous avons d’abord le rival dont la fonction consiste à aimer sans réciprocité, et à ruiner la relation amoureuse du couple principal de quelque manière que ce soit. Cependant sa fonction ne se concrétise pas nécessairement par une action directe mais peut s’exercer passivement. Le rival devient alors un « opposant passif65 » et se contente de refuser l’union des deux amoureux sans s’engager dans une action précise, comme si sa présence équivalait seule à la création de l’obstacle. Cette passivité n’est souvent que la traduction de l’impuissance du rival comme dans le cas d’Amarille qui, soumise à la volonté de son père, ne peut faire grand chose pour ramener à soi Polydas. Mais surtout, alors que dans la tragi-comédie les sentiments et les conflits sont habituellement exprimés par le biais de l’extériorité d’une action, l’exploitation de l’opposant passif dans Les Noces permet d’opérer un infléchissement dans le repli intérieur du personnage, qui se manifeste par la plainte amoureuse, trait typique provenant de la pastorale. Ainsi la présence d’Amarille sur scène se caractérise par des plaintes accompagnant l’espoir de récupérer Polydas mais sans que cela implique une quelconque action de sa part.
L’Esprit inquieté de milles pensemens*, [III, 2]Dont la jalouse ardeur blesse mes sentimens :Sans resolution je demeure confuse, 820Et dans ma passion une crainte m’abuse : [...]Helas que deviendray-je apres tant de travaux*,Peut estre que le Ciel adoucira mes maux. 915 [...]PLeure Amarille helas ton malheur sans pareil, 1350 [IV, 5]Que les larmes jamais ne seichent dans ton œil,Souspire incessamment ton douloureux desastreL’amante, sans repos l’injure de ton astre : [...]Je n’auray pas ce bien que de les veoir punir,Je serois trop contente à ce doux souvenir :Il faut auparavant que l’inhumaine Parque, 1380Me face devaller* dans l’infernalle barque [...]Je veux presentement malgré vostre puissance,En me donnant la mort apaiser ma souffrance :
Le deuxième type d’opposant est l’acteur parental incarné par le personnage de Luciane. À la différence du rival, elle ne demeure pas passive mais, étant pourvue d’une autorité, elle est engagée dans une action contraire au désir de sa fille Lidiane, qui se traduit par l’enfermement de celle-ci (III, 1), constituant ainsi l’obstacle principal de la pièce.
L’action du héros et le rapport avec la structure dramatique §
L’enfermement, selon H. Baby est l’un des obstacles faisant partie du répertoire récurrent de la tragi-comédie ; et l’attitude du héros peut varier entre la passivité et l’action violente, quoique ce dernier type de réaction demeure dans les limites déjà imposées par l’inventaire fixe des obstacles. Polydas, le héros de notre pièce, répond à l’obstacle en prenant la fuite avec Lidiane après l’avoir délivrée. Avec le moyen de la fuite Polydas adopte l’action-type privilégiée par le héros tragi-comique. Cette préférence s’explique par des raisons d’ordre structurel : la tragi-comédie qui est un genre spectaculaire, provoque majoritairement des obstacles extérieurs qui déterminent une structure fonctionnant dans l’exploitation de l’accidentel. Or comme l’événement accidentel se manifeste dans le court terme, pour nourrir suffisamment une intrigue, la tragi-comédie doit nécessairement multiplier ces obstacles extérieurs. La fuite est donc un excellent moyen pour les auteurs de tragi-comédie d’organiser le parcours du héros selon cette « dramaturgie de l’extériorité66 ». À travers les multiples péripéties qui composent l’action de Polydas (mise au feu du village, sauve-qui-peut général, irruption dans la maison et enlèvement de Lidiane, cavale nocturne avec noyade de celle-ci, conséquent désespoir et suicide du héros) on voit bien que Discret reste sensible à cette esthétique du spectaculaire, et de la prolifération de l’obstacle extérieur.
L’unification de l’obstacle §
Cependant on ne peut pas véritablement parler des Noces comme d’une pièce qui épouse pleinement les ressources de la fuite dans ce que Jacques Morel67 a nommée la « tragi-comédie de la route » puisque, à la différence de ce type où « les héros ont pris la route bien avant la première scène, et que l’action débute sur une des étapes de leur itinéraire » la séquence de la fuite de Polydas et Lidiane n’intervient que très tard dans la pièce (acte IV). Par conséquent, cette introduction tardive ne contribue pas à la pleine exploitation du motif de la fuite avec une grande prolifération des obstacles extérieurs. La restriction que Discret applique à l’exploitation de l’obstacle extérieur semble être le résultat de l’influence du critère de la vraisemblance dans le processus de régularisation. Alors que la route consacre le règne du hasard, faisant succéder librement les obstacles sous le mode de la rencontre et des coïncidences, l’action des Noces se construit sur un seul obstacle majeur (l’enfermement de Lidiane) à partir duquel, toutes les péripéties qui se produisent pendant la fuite sont liées par des rapports de causalité qui montrent la volonté du dramaturge d’aller vers l’unification de l’action, qui demande, pour se faire, la suppression d’événements dus au seul hasard68.
Alternance entre scènes d’actions et scènes de genre §
Se privant de faire intervenir le motif de la fuite plus tôt, Discret ne peut alors remplir les premiers actes de sa pièce par une commode successions d’obstacles comme dans la plus conventionnelle des tragi-comédies. Dès lors, une fois que l’exposition s’achève (I, 2) en donnant le cadre complet des relations entre les personnages, l’action dramatique procède par touches, et dans les moments où l’action dramatique se suspend entre des scènes ou à l’intérieur d’une même scène viennent s’intercaler des intrigues secondaires proposant des séquences qui mêlent un comique de mœurs et des moments topiques du genre pastoral. Faisant ainsi alterner l’action dramatique avec la peinture de mœurs bourgeois et les clichés de la pastorale, Discret s’éloigne de la structure tragi-comique de base pour chercher à réaliser un équilibre difficile entre scènes d’action et scènes de genre.
Prolifération et concentration des intrigues §
Comme on l’a vu, la tragi-comédie raconte presque toujours les aventures d’un couple de jeunes amants qui lutte pour établir ou préserver leur amour. Par rapport à ce sujet-type, elle privilégie deux sortes d’intrigues69 : le premier, celui qui appartient à la tragi-comédie de la route, exploite clairement sa dépendance au roman mettant l’accent sur les multiplications des péripéties70 et des coups de théâtre. En revanche le deuxième type cherche, comme dans le cas des Noces, à rassembler son action sur un obstacle majeur qui s’oppose au couple d’amants. L’accent, au lieu de porter sur la prolifération des aventures, est alors mis sur les amants et leurs réactions devant les persécutions dont ils sont l’objet ; de la même manière qu’il peut, comme dans notre pièce, donner de l’espace à l’expression du comique. Dans les deux cas les dramaturges gardent donc un intérêt pour les actions complexes, mais avec l’influence des théoriciens, on voit apparaître chez Discret une plus grande concentration dramatique avec le conséquent abandon de pièces « à tiroirs » et à épisodes multiples. Il s’agit donc de disposer les plusieurs fils de l’action complexe en allant vers une progressive unification. Si Les Noces, participent encore pleinement de ce goût pour l’action complexe, l’emploi dans la structure de la chaîne amoureuse permet la mise en œuvre d’une unification appréciable entre l’intrigue principale et les intrigues annexes.
C’est en effet grâce à la chaîne des amants de la pastorale, que l’intrigue amoureuse secondaire dépend de l’issue de l’intrigue principale. Dans Les Noces en effet les espoirs de Floridon de reconquérir son épouse Amarille ne se concrétiseront qu’au moment où le couple Polydas-Lidiane se confirmera dans son union, rendant ainsi inutile les efforts de la rivale Amarille qui acceptera à la fin de la pièce l’amour de son mari Floridon. Cela contribue donc à rechercher une plus grande concentration dramatique même si, comme l’a remarqué Jacques Scherer, la conception de l’unité d’action que l’on retrouve appliquée chez les auteurs préclassiques et théorisée dans la Pratique du Théâtre de D’Aubignac est l’inverse de celle qu’on trouvera appliquée en plein classicisme71. Les deux autres fils, Pysandre-Cleanide et Pancrace-Lidiane, restent parallèles à l’intrigue principal n’ayant avec lui aucun lien structural véritable mais, si l’on fait abstraction du rôle assez réduit de confident-adjuvant pour Pysandre (III, 1) et de confident-opposant pour Pancrace on peut dire que ces deux couples de personnages se limitent à l’expression des scène de genre dont on a parlé.
Note sur la présente édition §
L’édition originale de 1638 de Les nopces de Vaugirard ou les naifvetez champestres §
Description matérielle §
Un volume. [16] -144 p. ; in-8
[I] LES NOPCES / DE / VAVGIRARD, / OU LES / NAIFVETEZ CHAMPESTRES. / PASTORALLE / Dediée à ceux qui veulent rire. / Par L.C.D.72 / [fleuron] / A PARIS. / Chez IEAN GVIGNARD, au premier / Pillier de la grand’ Salle du Palais. / [filet] / M DC XXXVIII / Auec Priuilege du Roy. /
[II p. bl.]
[III-X] EPISTRE / SERVANT / D’ADVERTISSEMENT / à ceux qui veulent / rire.
[XI-XIII] ARGVMENT
[XIV] A.D.D.L.R.D.L.P. [1er poème liminaire] / Aux Lecteurs [2ème poème liminaire]
[XV] Extraict du Privilege du Roy. / Errata.
[XVI] Les Acteurs.
[1-144] [le texte de la pièce]
[1 p. bl.]
[1 p. bl.]
Nous avons établit le texte à partir de l’exemplaire qui se trouve à la Bibliothèque nationale de France (site de la Bibliothèque de l’Arsenal) sous la cote 8-BL-4637.
Recensement des exemplaires §
Il existe à notre connaissance cinq autres exemplaires en France de l’unique édition de 163873 :
- – Bnf (site Tolbiac) Réserve des livres rares, YF-704574
- – Bnf (site Richelieu – arts du spectacle) 8-RF-6030
- – Bnf (site Arsenal ) GD-14915
- – Bnf (site Arsenal ) 8-BL-14637
- – Bibliothèque Sainte-Geneviève Réserve 8 Y 1233 (2) INV 2668 RES
À titre indicatif, nous avons recensé les autres exemplaires à l’étranger75 :
- – Un à l’ University of Chicago Library (États-Unis)
- – Un à la bibliothèque de University of Illinois at Urbana Champaign (États-Unis)
- – Un à la bibliothèque de Universitäts-und Landesbibliothek Sachsen-Anhalt / Zentrale (Allemagne)
Collation des exemplaires consultés [à terminer] §
Variantes entre l’exemplaire de réference 8-BL-14637 et l’exemplaire YF-7045 :
[30] v.435 : « servant » (YF-7045 gallica) → « servante » (8-BL-14637) ; [37] v.540 : « mort » (YF-7045) → « mors » (8-BL-14637) ; [89] v.1203 titre de replique : « PNACARCE. » (8-BL-14637) ; « PANCARCE » (YF-7045 gallica) ; [110] l’exemplaire YF-7045 gallica présente un doublet de la page [110] on a en effet la sequence : [110, 111, 110, 111, 112]
Interventions sur le texte §
Corrections d’usage et corrections systématiques §
- – Distinction entre le graphème j et le graphème i pour noter le son [ʒ]
- – Distinction entre le graphème u et le graphème v pour désambiguïser la graphie des sons [y] et [v]
- – Modernisation du graphème∫en s
- – Remplacement du graphème ß par ss ; par exemple au v.39 : preßé devient pressé.
- – Suppression du tilde ~ (signe diacritique indiquant une nasalisation) et rétablissement des consonnes en conséquence, par exemple, au v.103, amãt devient amant.
- – Rétablissement des accents diacritiques pour désambiguïser les homophones grammaticaux : a et à ; la et là ; ou et où
- – Rétablissement du t euphonique, par exemple, au vers 1030, a il raison devient a-t-il raison
- – Nous avons unifié la forme de certains noms de personnes, en éliminant la variante aléatoire i / y à l’œuvre dans : Pysandre/Pisandre, Lydiane/Lidiane, Polydas/Polidas. Les occurrences ont été alignées sur la variante en yétant donné qu’elle est la plus utilisée dans le texte et que c’est celle qui apparaît à la page [XVI] dans la liste des Acteurs.
Corrections des erreurs de composition typographique (coquilles) §
EPITRE
[VI] l.5 : « quils avaient données » → « qu’ ils avaient données » ; [VII] l.9 : « ny a pas un vers » → « il n’y a pas un vers » ; [IX] l.7 : « telle quelle est » → « telle qu’elle est »
ERRATA
[XV] : « l.2 : « r8 & 19 l. » → « v.18 & 19 l. »
ACTE I [1-23]
[8] v.119 : « tes pas » → « ses pas » ; [10] v.162 : « quelle est » → « qu’elle est » ; [18] v.266 « ces Argus » → « cet Argus » ; [20] avant v.303 : « POLIDAS » → « POLYDAS » ; [20] v.303 : « si j’ay parlay » → « si j’ay parlé » ; [20] v.305 : « ma ravit » → « m’a ravit » ; [22] v.333uy « que tu puisse » → « que tu puisses »
ACTE II [24-51]
[27] v.380 : « d amour » → « d’amour » ; « à des yeux » → « a des yeux » ; [28] v.412 : « pl9 » → « plus » ; v.414 : « bon estime » → « bonne estime » ; [30] après v.440 : titre de replique « POLIDAS » → « POLYDAS » ; [30] v.447 : « la’ spect » → « l’aspect » ; [31] v.456 : « avant manquer » → « ayant manqué » ; [33] v.471 : « trefve » → « tresve » ; [33] v.482 : « cét heure » → « cétte heure » ; [34] v.486 : « nen → n’en » ; [37] v.540 : « plastot » → « plustot » ; « mors → mort » ; [41] après v.581 titre de replique : « AMARILE » → « AMARILLE » ; [42] avant v.595 titre de replique : « AMARILE » → « AMARILLE » ; [42] v.595 : « La Fortune a Lidiane. » → « La Fortune à Lidiane. » ; [45] v.632 : « si Floridon t’atrappe » → « si Floridon j’atrappe » ; [46] v.634 : « Vist e s œurs » → « viste sœurs » ; [46] avant v.635 titre de replique : « AMRRILLE » → « AMARILLE » ; [46] v.633 : « si mes mains il eschappe » → « si des mains il m’eschappe » ; [47] v.649 : « l’autre ce sauve » → « l’autre se sauve » [48] v.669 : « parler a elle. » → « parler à elle. »
ACTE III [52-84]
[52] v.720 : « to9 » → « tous » ; [55] v.756: « qu’a cholere » → « qu’à cholere » ; [56] v.781 : « outrageast » → « outragea » ; [57] v.797 : « qu’en regret » → « qu’un regret » ; [58] v.811 : « m’oblige » → « t’oblige » ; [59] v.817 : « amy faites » → « amy fais » ; [61] v.851 : « je te hayt reprend les » → « je te haÿs reprends les » ; [63] v.867 : « pense-tu » → « penses-tu » ; [64] v.881 : « Si tu debvoient brusler je t’en donneroient mille. » → « Si tu debvois brusler je t’en donnerois mille. » ; [65] v.893 : « Jamais comme j’entend tu » → « Jamais comme j’entends tu » ; [74] V.1018 : « qui l’a contraint » → « qui l’a contrainte » ; [75] v.1030 : « a il raison a-il le cœur » → « a-t-il raison a-t-il le cœur » ; [79] v.1081 : « Venez—ça » → « Venez-ça » ; [80] v.1090 : « ne m’offence pas », → « ne m’offences pas » ; [80] v.1090 : « Vous avez sur le nez » → « Vous m’avez sur le nez » ; [80] v.1091 : « tu n’aye » → « tu n’ayes » ; [80] v.1096 : « ce refere » → « se refere » ; [81] v.1105 : « Ou est » → « Où est » ; [81] v.1109 : « du vaillant » → « le vaillant » ; [84] didascalie : « a la main. » → « à la main. »
ACTE IV [85-113]
[88] didascalie : « Ils viennenttnds [...] des lanternej » → » ils viennent [...] lanternes » ; [89] v.1203 titre de replique : « PNACARCE. » → « PANCRACE. » ; [90] didascalie : « emmeine Diane » → « emmeine Lidiane » ; [91] v. 1228 : « despourveue » → « despourvue » ; [91] v.1232 : « eclypses ses lumieres » → « eclypsent ses lumieres » ; [91] v.1242 : « Non, souds » → « Non, sourds » ; [91] v.1245 : « c’est esteint » → « s’est esteint » ; [92] v.1256 : « pus-je endurer » → « puis-je endurer » ; [94] v.1288 : « Le jour qui peu a peu » → « peu à peu » ; [95] v.1309 : « ce porte » → « se porte » ; [96] v.1325 : « habandonnee » → « abandonnee » ; [97] v.1335 : « on les tiens » → « on les tient » ; [97] v.1337 « cbouche » → « bouche » ; [98] v.1358 : « Bon Dieux ce ! a » → « Bon Dieux cela » ; [98] v.1361 : « Ou estes vous [...] Ariadne » → « Où estes vous [...] Arianne » ; [99] v.1370 : « il ne ce peut pas » → « il ne se peut pas » ; [100] v.1399 : « quesque » → « quelque » ; [102] v.1428 : « dy moy » → « dys moy » ; [103] v.1434 : « cestoit » → « c’estoit » ; [105] v.1464 : « ne te courrouce » → « ne te courrouces » ; v.1466 : « en doubte-tu » → « en doubtes-tu » ; v.1473 : « que tu me baise » → « que tu me baises » ; [107] v.1498 : « Chaots » → « Chaos » ; [108] v.1515 : « Pollydas » → « Polydas » ; [109] v.1544 : « cousté de larmes » → « cousté des larmes » ; [110] v.1546 : « las » → « Las » ; [110] v.1548 : « Polydas ce malheureux profane, » → « Polydas, ce malheureux profane » ; [113] v.1594 : « ne leur a ton » → « ne leur a-t-on » ;
ACTE V [114-144]
[121] v.1693 : « b ! asmable » → « blasmable » ; [123] v.1723 : « crime apparant » → « crime appariant » ; [123] v.1723 : « crime apparant » → « crime appariant » ; [123] v.1726 : « Le ciel command » → « Le ciel commande » ; [124] v.1735 : « je jugerois » ; [124] v.1739 : « qui aye mis » → « qui ayt mis » ; [129] v.1822 : « Et si j’ay parlay » → « Et si j’ay parlé » ; [132] v.1864 : « Reprend un peu tes sens » → « Reprends un peu tes sens » ; [134] liste de personnages : « FORIDON » → « FLORIDON » ; [135] v.1896 : « Se seroit » → « Ce seroit » ; [135] v.1910 : « attend moy » → « attends moy » ; [136] v.1922 : « que tu meure » → « que tu meures » ; [138] v.1943 : « vous veille consoler » → « vous veuille consoler » ; [141] v.1985 : « Que Polydas aussi aye » → « Que Polydas aussi ayt » ; [141] v.1991 : « ont ce matin » → « sont ce matin » ; [142] v.2007 : « allez embrassez » → « allez embrasser » [143]
Ponctuation §
Le rôle de la ponctuation, dans la déclamation théâtrale du XVIIe siècle, ne se limite pas à noter les rapports syntaxiques entre les divers éléments de la phrase mais détermine aussi le débit et l’intonation de la voix du comédien.76 Ainsi le lecteur ne sera pas étonné de voir dans certains passages du texte une ponctuaction qui ne correspond pas aux exigences modernes.
Nous avons rectifié la ponctuation en corrigeant les coquilles et lorsque cela s’est averé nécessaire pour faciliter la compréhension du texte :
- – [15] titre replique entre les vv. 220-221 : « PANCRACE, » → « PANCRACE. »
- – [16] v.239 : « esteindre la flame : » → « esteindre la flame »
- – [17] v.240 : « dans mes os » → « dans mes os : »
- – [21] v.314 : « pardonne donc » → « pardonne donc. »
- – [22] v.324 : « Ne crains pas mon espoir » → « Ne crains pas, mon espoir »
- – [27] v.397 : « Nos cœurs changez en un sera » → « Nos cœurs changez en un, sera »
- – [33] v.482 : « Inhumaine » → « Inhumaine ! »
- – [36] v.524 : « ô secours ? » → « ô secours ! »
- – [43] v.606 : « Cleanide est il vray, » → « Cleanide est il vray ? »
- – [47] v.644 : « Est-ce faict est-ce faict » → « Est-ce faict ? est-ce faict ? »
- – [46] v.640 : « Allons veoir nos trouppeaux » → « Allons veoir nos trouppeaux, »
- – [48] v.664 : « Pasteurs vous avez tort » → « Pasteurs vous avez tort, »
- – [61] v.851 : « je te hayt » → « je te haÿs »
- – [63] v.868 : « qu’il cherisse ta flame, » → « qu’il cherisse ta flame ? »
- – [67] v.925 : « aux filles : » → « aux filles »
- – [67] v.928 : « nulle d’esprit parfaite, » → « nulle, d’esprit parfaite, »
- – [73] v.1010 : « Hazard j’ay prou » → « Hazard, j’ay prou »
- – [74] v.1015 : « qui est là bas » → « qui est là bas ? »
- – [75] v.1030 : « a-t-il raison a-t-il le cœur Loyal, » → « a-t-il raison ? a-t-il le cœur Loyal ? »
- – [78] v.1069 : « A ce jeune insensé que tout » → « A ce jeune insensé, que tout »
- – [79] v.1084 : « [...] à moy que l’on parle ? Ouy » → « [...] Ouy. »
- – [83] v.1131 : « Compagnon de Silene engence » → « Compagnon de Silene, engence »
- – [84] v.1136 : « Que sont-ils devenus, » → « Que sont-ils devenus ? »
- – [92] v.1257 : « puis qu’il est impossible : » → « puis qu’il est impossible »
- – [92] v.1258 : « ny d’un demon » → « ny d’un demon : »
- – [92] v.1259 : « quelque pallemon : » → « quelque pallemon »
- – [93] v.1272 : « pouvoir leur cœur inexorable, » → « pouvoir, leur cœur inexorable »
- – [93] v.1282 : « sanglant mon homicide main, » → « sanglant, mon homicide main »
- – [95] v.1305 : « divinitez supremes » → « divinitez supremes ? »
- – [95] v.1309 : « C’est c’est » → « C’est, c’est »
- – [96] v.1333 : « crois-tu cela une chimere vaine, » → « crois-tu cela ? une chimere vaine, »
- – [105] v.1474 : « Non non » → « Non, non »
- – [121] v.1686 : « tant de grands, heros » → « tant de grands heros »
- – [121] v.1687 : « Ont commis, tels » → « Ont commis tels »
- – [121] v.1695 : « Monsieur pardonnez, moy » → « Monsieur pardonnez moy, »
- – [125] v.1747 : « par quelque puissant Dieu. » → « par quelque puissant Dieu, »
- – [126] v.1763 : « où est, ce Polydas, » → « où est ce Polydas, »
LES
NOPCES
DE
VAvGIRARD77,
OU LES
NAIFVETEZ CHAMPESTRES.
PASTORALLE
Dediée à ceux qui veulent rire. §
EPISTRE SERVANT D’ADVERTISSEMENT à ceux qui veulent rire. §
[p. III a ij]MESSIEvRS,
Je ne suis point de ces sçavans personnages dont les siecles ont si curieusement* conservé les precieuses reliques pour nous donner lumiere des sciences qui les ont faict estimer vrais Orateurs, & parfaictement bons Poëtes : mon sçavoir est aussi peu cogneu que ma personne, [p. IV] mais mon humeur indifferente ne se soucie de la probation* des doctes, ny du mépris des ignorans : mes escrits en petit nombre, & en peu de volumes n’ont d’authorité que les divers sentimens de ceux qui prennent la peine de les lire. Vous ne verrez point d’Apologiste79 qui me dise confidemment à l’oreille que j’ay parfaictement bien reüssy, que j’ay grandement obligé* le public luy donnant des œuvres si plaines de moralitez, & de subtiles pointes, que j’attribuë des richesses aux rithmes capables de me faire passer pour divin, que j’attraperay la gloire où tous les autres veulent atteindre, & qu’en fin il seroit aussi difficile de trouver mon second, comme de rencontrer deux Rois de France en l’Europe. Tous ces discours de vanité, & de flatterie n’auroient autre remerciment de moy, que celuy que l’on peut faire à des gens [p. V a iiij] que l’on recognoist se moquer honnestement d’un amy, je leur donnerois l’epithete d’esprits foibles plustot que celle d’esprits forts, comme n’ayans pas assez de force pour me persuader une mécognoissance de moy-mesme : les deffaux de mes ouvrages ne trouveront ny de loüanges, ny d’excuses dans les plumes d’autruy. Vous n’y trouverez point dans l’Advertissement au Lecteur ce que les Autheurs du temps ont coustume d’y mettre : Qu’ils sçavent faire une piece en quinze jours, qu’ils n’avoient que quinze ans lors qu’ils l’ont faite, que leurs amis les ont forcez à la faire mettre soubs la presse, & soubs l’asseurance qu’on leur a donnee, qu’elle seroit bien receuë ; que c’est un premier essay, & qu’on doit esperer que quelque jour ils feront mieux : les autres diront que leur absence a causé le desordre, [p. VI] & les fautes qui se rencontrent dans leurs livres, qu’ils ont este imprimez à leur insceu80 sur des copies mal polies qui leur avoient esté dérobées, ou qu’ils avoient données à l’un de leurs amis, mais qu’à la seconde edition ils seront vestus des robbes de la merveille, & qu’on ne les recognoistra plus. Toutes ces raisons si anciennes, & tant de fois repetées pour faire trouver bonne une mauvaise chose, ne peuvent estre appellées autrement que les honnestes excuses de l’ignorance, le manteau de l’incapacité, la couverture de l’imperfection, le voile [p. VII] des petites imaginations, la sterilité des bonnes parolles, le bandeau des Rimeurs, & la folie des Poëtes; & pour moy, afin qu’ils sçachent mon sentiment je conseillerois volontiers à ces esprits de donner plus de temps à la composition de leurs ouvrages, & de ne les entreprendre si jeunes81, veu que leurs poinctes, qui, pour proprement parler, ne sont que metaphores hyperboliques forment des espines si piquantes, que leur honneur s’y escorche le plus souvent : il n’y a pas un pied de vers qui n’en preste deux aux Lecteurs pour marcher sur la teste de leur vanité, il n’y a pas un vers qui n’en fournisse quatre pour ronger ce qu’il y a de mal digeré dans leur travail ; de sorte que comme la chauve-souris à cause de sa difformité n’ose paroistre devant le jour, ces ouvrages devroient demeurer enfermez, ou n’estre mis en lumiere que par le feu; car pour moy je ne sçaurois flatter, je dis librement mes pensées ; on ne sçauroit donner trop de soin à un ouvrage qui paroist en public. Voicy (Messieurs) une Pastoralle que j’ay faicte, où j’ay fait parler les personnages selon que la naïfveté* des champs les a representez à mon imagination : j’ay beaucoup de fois repassé par dessus, j’y ay corrigé quantité de choses, j’ay faict mon possible pour la polir, & empescher qu’il n’y eust point de fautes remarquables, & si je puis vous asseurer qu’elle n’est pas trop bien, que les [p. IX] oreilles delicates n’y trouveront point leur satisfaction, que les chercheurs de poinctes en trouveront plus chez les vitriers82 que dans mon livre, & que les belles pensées, & les bons mots y sont clairs semez*, & neantmoins pour m’instruire sur les divers jugemens sans chercher la protection des grands, ainsi que beaucoup font, & qui s’imaginent que le nom de ceux à qui leurs livres sont dediez excusent leurs fautes, & deffendent leurs œuvres de la médisance83. Je vous faits present (Messieurs) de cette Pastoralle, recevez la telle qu’elle est, acheptez la, ne l’acheptez pas, lisez la, ne la lisez pas, riez en, n’en riez pas : Il y a long-temps que je faits profession de ne me soucier des loüanges du monde, & que j’ay perdu [p. X] la volonté de paroistre habile homme, puisque j’ay recogneu avoir esté né pour ne l’estre pas. Tout le contentement que j’espere donnant cette Pastoralle au public, est de vous faire voir par le compliment ordinaire que je suis veritablement
MESSIEURS,
Vostre tres-humbe, &
Obeïssant serviteur
L. C. D.
ARGUMENT. §
[p. XI ij]Amarille est jointe par mariage à Floridon qu’elle n’ayme point sous promesse faite de l’advis de ses parens, & pour la contenter que Floridon ne cueillera le fruict de son amour, que six mois apres le jour de leurs nopces, pendant lequel temps Polydas fils d’une des Illustres maisons de Paris déguisé en Berger, & qui cherissoit grandement Amarille, promettoit de l’enlever secrettement, mais estant mandé* à la nopce avec une jeune Bergere nommée Lidiane, qui estoit venuë avec sa mere demeurer à Vaugirard à cause des guerres qui estoient dans la Province de leur naissance84. Polydas devient amoureux de Lidiane, oublie la promesse qu’il avoit faicte à Amarille, & continuë ses amours avec elle, nonobstant les jalousies d’Amarille.
Pendant que Polydas, Lidiane, Pysandre, Cleanide, & Amarille Bergers, & Bergeres passent le temps à mille gentillesses, & tromperies amoureuses : Luciane mere de Lidiane ayant veu au travers d’une vitre Polydas qui baisoit sa fille. Cette action luy donne subject de l’enfermer, Polydas desesperé de ne plus voir sa maistresse, prend resolution de l’enlever, & pour cet effect* luy ayant faict sçavoir par un mot de lettre que Pysandre luy porte (sans sçavoir ce qui estoit [p. XII] dedans) qu’elle se tint preste* pour la nuict suivante de son dessein, il met la nuict le feu dans une grange, pendant que les villageois sont empeschez à l’éteindre, il l’enleve, & la meine au bord de l’eau, où s’estant trouvé un basteau, Lidiane sautant dedans, pendant que Polydas le veut lascher, la corde rompt, le basteau enmeine* Lidiane, & laisse Polydas à la rive dans des fascheries étranges : elle cependant que l’eau entrainoit85 tousjours voyant une Isle proche d’elle, s’eslance du basteau sur le sable, mais le pied luy glissant elle tombe en la riviere où à l’instant enveloppée des ondes à la veuë de son Berger, elle eust esté noyée si deux pescheurs qui de grand matin avoient tendus leurs filets, ne l’eussent repeschée.
Polydas qui croit qu’elle est morte se precipite dans la grotte des Demons, Amarille qui se doute qu’elle est trompée, voyant que Polydas estoit precipité, s’y jette pareillement, laissans tous leurs parents dans une confusion épouventable, & en fin Lidiane repeschée, & ramenée par les Pescheurs au lieu où elle pensoit retrouver Polydas, est à l’instant prise par les Deputez de Vaugirard qui faisoient la recherche d’eux, par le soupçon qu’ils avoient que Polydas avoit efté le boutte-feu*, elle est ménée devant les Juges qui luy font son procez, & quelques prieres, [p. XIII iij] & supplications que leur puissent faire les habitans du village, elle est par eux condamnée à estre precipitée dans la mesme grotte des Demons, où estoient Polydas, & Amarille ; mais comme on vient pour executer cette sentence, l’ombre* de Castrape Magicien, qui avoit basty cette grotte, sort tenant Polydas d’une main, & Amarille de l’autre sains & sauves, arreste l’execution de cette condamnation, & faisant le recit de toutes leurs advantures, ordonne des mariages du bon homme Pancrace avec la vieille Luciane, dont les crotesques86 amours sont naïfuement traictées, redonne Amarille à son Floridon Polydas à sa Lidiane, & Pyfandre à Cleanide, & par ces mariages inesperez calment les differents de tout le village, & leur cause une réjoüissance publique.
A. D. D. L. R. D. L. P.87 §
[p. XIV]Aux Lecteurs.
Extraict du Privilege du Roy. §
Par grace & Privilege du Roy, il est permis à Jean Guignard, Marchand Libraire, d’imprimer ou faire imprimer, vendre & debiter un livre intitulé, Les Nopces de Vaugirard : avec deffences à tous [p. XV] Libraires, Imprimeurs, & autres de quelque qualité ou condition qu’ils soient, de faire imprimer, vendre ny distribuer ledit livre, durant le temps & espace de six ans, comme plus amplement est porté par ledict Privilege. Donnè à Paris le vingt-deuxiesme May mil six cens trente-huict, & de nostre regne le vingt-huictiesme.
Errata §
Page 13, vers 4 lisez baise pour baiser p. 40. v.7. 1. sans vous veoir p.49.v.13. l. d’Orphee. p.53 v.18 & 19 l. affection au premier, & affliction au second. p.57.v.8. l. qu’un pour qu’en. p.58.v.10. l. faicts pour faictes. p.63.v.9. l. me parleront. p.101.v.15 l. seile pour sicle. p.107.v.10. l. qu’un pour qu’en.
Les Acteurs90. §
[p. XVI]- PANCRACE, vieil Berger, pere d’Amarille.
- FLORIDON, mary d’Amarille.
- POLYDAS, Berger.
- PYSANDRE, Berger.
- LIDIANE, Bergere.
- CLEANIDE, Bergere.
- AMARILLE, Bergere.
- LUCIANE, vieille, mere de Lidiane.
- LES DEUX PESCHEURS.
- LE JUGE.
- LE PROCUREUR FISCAL.
- LE GREFFIER DE VAUGIRARD.
- LES DEPUTEZ DE VAUGIRARD. Un en trouppe.
- L’OMBRE DU GRAND CASTRAPPE Magicien.
ACTE PREMIER. §
SCENE PREMIERE.91 §
PANCRACE.
SCENE DEUXIESME. §
FLORIDON.
SCENE TROISIESME. §
POLYDAS.
SCENE QVATRIESME. §
PANCRACE.
POLYDAS.
PANCRACE.
POLYDAS.
PANCRACE.
POLYDAS.
PANCRACE.
POLYDAS.
LIDIANE.
POLYDAS.
LIDIANE.
POLYDAS.
LIDIANE.
PANCRACE.
POLYDAS remenant Lidiane à sa place.
LIDIANE.
PANCRACE.
FLORIDON
AMARILLE.
PYSANDRE à CLEANIDE.
CLEANIDE.
POLYDAS à Lidiane.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
LIDIANE.
POLYDAS.
SCENE CINQVIESME. §
AMARILLE.
POLYDAS.118
AMARILLE.
POLYDAS.
AMARILLE.
POLYDAS.
N’as tu point peur que dedans unAMARILLE.
POLYDAS.
POLYDAS.
AMARILLE.
POLYDAS.
AMARILLE.
POLYDAS.
AMARILLE.
POLYDAS.
AMARILLE.
POLYDAS.
AMARILLE.
POLYDAS.
AMARILLE.
POLYDAS.
AMARILLE.
POLYDAS.
AMARILLE.
POLYDAS seul.
ACTE II. §
SCENE PREMIERE. §
LIDIANE.
POLYDAS.
LIDIANE
POLYDAS.
LIDIANE.
POLYDAS.
LIDIANE.
POLYDAS.
LIDIANE.
POLYDAS.
LIDIANE,
POLYDAS.
LIDIANE.
POLYDAS.
LIDIANE.
POLYDAS.
LIDIANE.
POLYDAS.
LIDIANE.
POLYDAS.
LIDIANE.
POLYDAS.
LIDIANE.
LIDIANE.
POLYDAS.
SCENE DEVXIESME. §
PYSANDRE.
Echo, viste
tost
haste
tien
garde
ouy
meure.
par tout
menace.
bien.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
CLEANIDE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
PYSANDRE.
LIDIANE.
CLEANIDE.
POLYDAS.
CLEANIDE.
POLYDAS.
PYSANDRE.
POLYDAS.
PYSANDRE.
POLYDAS,
LIDIANE.
POLYDAS.
LIDIANE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
Dançons,LIDIANE.
POLYDAS.
Il fait bien chaudAMARILLE.
POLYDAS.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
AMARILLE.
PYSANDRE.
LIDIANE.
POLYDAS.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
La Fortune à Amarille.
POLYDAS.
PYSANDRE.
AMARILLE.
La Fortune à Lidiane.
CLEANIDE.
LIDIANE.
POLYDAS.
CLEANIDE.
La Fortune à Cleanide.
AMARILLE.
CLEANIDE.
PYSANDRE,
LIDIANE.
La Fortune à Polydas.
POLYDAS.
CLEANIDE.
AMARILLE.
La Fortune à Pysandre.
POLYDAS.
AMARILLE.
POLYDAS.
FLORIDON.
PYSANDRE.
FLORIDON.
POLYDAS.
FLORIDON.
AMARILLE.
LIDIANE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
POLYDAS.
CLEANIDE.
AMARILLE.
POLYDAS.
AMARILLE.
FLORIDON.
POLYDAS.
FLORIDON.
voire.
ouy
sauve.
Icy
cherche
adieu
veille
bon-soir
passe
coucou
donne
& tant
elle
SCENE TROISIESME. §
PANCRACE.
LUCIANE
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
ACTE III. §
SCENE PREMIERE. §
POLYDAS.
PYSANDRE.
POLYDAS.
PYSANDRE.
POLYDAS.
PYSANDRE.
POLYDAS.
PYSANDRE.
POLYDAS.
PYSANDRE.
POLYDAS.
PYSANDRE.
POLYDAS,
PYSANDRE.
POLYDAS.
PYSANDRE.
POLYDAS.
PYSANDRE.
POLYDAS.
PYSANDRE.
POLYDAS.
POLYDAS.
PYSANDRE.
POLYDAS.
SCENE DEUXIESME. §
[p. 59 Hij]AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
FLORIDON.
AMARILLE.
SCENE TROISIESME. §
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
PANCRACE.
LUCIANE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
C’est Pysandre,LUCIANE.
PANCRACE.
SCENE QUATRIESME. §
[p. 73 K]PYSANDRE.
LIDIANE à la fenestre.
PYSANDRE.
LIDIANE.
PYSANDRE.
LIDIANE.
PYSANDRE.
LIDIANE.
LIDIANE.
PYSANDRE.
LIDIANE lit la lettre tout bas puis dit,
PYSANDRE.
LIDIANE
SCENE CINQUIESME. §
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
POLYDAS.
PYSANDRE.
POLYDAS.
PANCRACE.
POLYDAS.
LUCIANE.
POLYDAS.
LUCIANE.
PANCRACE.
POLYDAS.
POLYDAS.
POLYDAS.
PANCRACE.
POLYDAS.
PANCRACE.
POLYDAS.
PANCRACE.
POLYDAS.
LUCIANE.
POLYDAS.
PANCRACE.
POLYDAS.
PANCRACE.
POLYDAS.
PANCRACE.
LUCIANE.
POLYDAS.
PANCRACE.
POLYDAS.
PANCRACE.
POLYDAS.
PYSANDRE.
LUCIANE.
POLYDAS.
LUCIANE.
PANCRACE.
POLYDAS.
PYSANDRE.
SCENE SIXIESME. §
PANCRACE seul une halebarde à la main.
ACTE IV. §
[p. 85 Liij]SCENE PREMIERE. §
POLYDAS tenant un flambeau allumé.
SCENE DEUXSIEME. §
[p. 88]LUCIANE à la fenestre.
PANCRACE nud en chemife avec une lanterne.
PYSANDRE.
PANCRACE.
PYSANDRE.
LUCIANE.
PANCRACE.
SCENE TROISIESME. §
POLYDAS.
LIDIANE.
POLYDAS.
LIDIANE.
POLYDAS.
SCENE QUATRIESME. §
[p. 95]LUCIANE.
SCENE CINQVIESME. §
AMARILLE.
AMARILLE lit le tombeau de Polydas.
SCENE SIXIESME. §
[p. 102]PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
Cela c’estCLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
SCENE SEPTIESME. §
FLORIDON.
PANCRACE.
FLORIDON.
PANCRACE.
FLORIDON.
PANCRACE.
FLORIDON.
PANCRACE.
FLORIDON.
PANCRACE.
FLORIDON.
PANCRACE.
FLORIDON.
PANCRACE.
FLORIDON.
PANCRACE.
FLORIDON.
PANCRACE.
FLORIDON.
PANCRACE.
FLORIDON
PANCRACE.
ACTE V §
SCENE PREMIERE. §
LIDIANE.
Premier pescheur.
Second pescheur.
Premier pescheur.
LIDIANE
Second pescheur.
Que tout vous soit prospere.LIDIANE.
Second pescheur.
Premier pescheur.
Second pescheur.
LIDIANE. seule.
FLORIDON parlant à sa trouppe de deputez.
LIDIANE.
FLORIDON.
LIDIANE.
FLORIDON.
LIDIANE.
FLORIDON.
LIDIANE.
FLORIDON.
SCENE DEUXIESME. §
LE JUGE.
LE PROCUREUR.
LE JUGE.
LE PROCUREUR.
LE JUGE.
LE PROCUREUR.
LE JUGE.
LE JUGE.
LE PROCUREUR.
LE JUGE.
LE PROCUREUR.
LE JUGE.
LE PROCUREUR.
LE JUGE.
LE PROCUREUR.
LE JUGE.
LE PROCUREUR.
LE JUGE.
LE PROCUREUR.
LE JUGE.
LE PROCUREUR.
LE JUGE.
FLORIDON & les deputez amenant Lidiane.
LE JUGE.
LIDIANE à genoux.
LE JUGE.
LIDIANE.
LE PROCUREUR.
LE JUGE.
LIDIANE.
LE JUGE.
LIDIANE.
FLORIDON.
Messieurs elle deguiseLE JUGE.
LE GREFFIER.
LE JUGE prononce le Jugement contre Lidiane.
LIDIANE.
LE JUGE.
LE PROCUREUR.
SCENE TROISIESME. §
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
LUCIANE.
PYSANDRE.
LUCIANE.
PYSANDRE.
LUCIANE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
SCENE DERNIERE. §
LE JUGE.
LIDIANE ayant leu le tombeau de Polydas.
LE JUGE.
LUCIANE.
PANCRACE.
LUCIANE.
FLORIDON.
LUCIANE.
LIDIANE.
LUCIANE.
PANCRACE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
FLORIDON.
LUCIANE.
LE JUGE.
LUCIANE.
LE JUGE.
LUCIANE.
LIDIANE.
PANCRACE.
LE JUGE.
L’ombre* de Caftrape, sortant de la grotte, tenant Polydas d’une main,
& Amarille de l’autre.
LE JUGE.
PANCRACE.
LUCIANE.
PANCRACE.
POLYDAS.
LIDIANE.
PYSANDRE.
CLEANIDE.
FLORIDON.
AMARILLE.
POLYDAS.
LE JUGE.
PANCRACE.
FIN.