1710.
Par Messieurs LE S** et de la F**
ACTEURS. §
- LA COMÉDIE FRANÇAISE.
- LA COMÉDIE ITALIENNE.
- L’OPÉRA, Arlequin.
- LA FOIRE, Pierrot.
- MEZZETIN, Suivant de la Foire.
- POLICHINELLE, Suivant de la Foire.
- UN GILLE, Suivant de la Foire.
- UN AUTEUR TRAGIQUE, suivant de la Comédie Française.
- UN ACTEUR habillé à la Romaine, suivant de la Comédie Française.
- UN CRISPIN, suivant de la Comédie Française.
- UN PANTALON, suivant de la Comédie Italienne.
- UN SCAPIN, suivant de la Comédie Italienne.
SCÈNE PREMIÈRE. §
LA FOIRE, seule.
Holà, Danseurs, Chanteurs de Vaudevilles.
Quoi, personne n’accourt à ma voix ! N’entendez-vous pas votre, maîtresse qui vous appelle ? Songez-vous ; que c’est aujourd’hui le premier jour de mes spectacles d’été ? Holà donc, Mezzetin, Olivette, Docteur , Polichinelle.
SCÈNE II. La Foire, Mezzetin. §
MEZZETIN, riant.
Ha, ha, ha, ha, ha !
LA FOIRE.
Quel sujet avez-vous de rire ?
MEZZETIN, riant encore.
Ha, ha, ha, ha, ha !
LA FOIRE.
Pourquoi donc ces ris immodérés ?
MEZZETIN.
La Comédie Française et la Comédie Italienne...
Ha, ha, ha, ha, ha !
LA FOIRE.
Encore ? Hé bien, la Comédie Française et la Comédie Italienne ?...
MEZZETIN.
Ces cieux Dames sont dans le préau. Elles veulent honorer de leur présence l’ouverture de notre théâtre. Elles viennent voir si la Foire sera bonne.
LA FOIRE.
C’est la Française apparemment ?
MEZZETIN.
Vous l’avez dit.
LA FOIRE.
Oh ! C’est l’esprit Italien !
MEZZETIN.
Mais les voici.
LA FOIRE.
Qu’on ait soin de les bien placer. Ce sont mes supérieures, que ces Dames-là. Je ne suis que leur très humble servante. Je ne puis leur marquer trop de respect.
SCÈNE III. La foire, Mazzerin, La Comédie Française La Comédie Italienne, Monsieur Charitides, auteur tragique. §
LA COMÉDIE FRANÇAISE.
LA COMÉDIE ITALIENNE, quittant le bras de la Comédie Française.
Oh ! Tâchez de vous soutenir toute seule... J’aI assez de peine à me soutenir moi-même.
LA COMÉDIE FRANÇAISE, à l’Auteur.
Aidez-moi donc, vous, Monsieur Charitides.
MONSIEUR CHARITIDES, la repoussant.
Je suis votre valet. Quand vous vous portiez bien, vous ne me regardiez pas : à présent que vous êtes malade, vous implorez mon secours : Serviteur.
LA FOIRE, à la Comédie Française.
Madame,je suis ravie d’avoir l’honneur de vous voir. Permettez-moi de vous embrasser.
LA COMÉDIE FRANÇAISE, la repoussant.
Je me trouve mal.
LA COMÉDIE ITALIENNE.
Et moi, tout de même.
LA FOIRE.
Des fauteuils à ces Dames. Hé vite des fauteuils. Je crois qu’elles vont tomber en faiblesse.
LA COMÉDIE FRANÇAISE.
Je n’en puis plus.
LA COMÉDIE ITALIENNE.
Je me meurs. Je crois que je serai obligée d’aller prendre l’air natal, ou de faite ici corps-neuf.
LA COMÉDIE FRANÇAISE, le regardant de travers.
Retire-toi, profane.
Au Public, en déclamant.LA FOIRE.
Ah ! Je vois la cause de votre défaillance ! Vous êtes fâchée de voir ici bonne compagnie, n’est-ce pas ?
Voilà l’enclouûre. Hé, ventrebleu ! Madame, que ne faites-vous comme nous ? Mettez-vous en quatre pour plaire au public.
LA FOIRE.
Il a raison. Il semble que vous preniez plaisir à vous laisser-mourir de faim. Donnez des nouveautés.
LA COMÉDIE FRANÇAISE.
La bonne drogue, que des nouveautés ! Ne fais-je pas mieux ? Je donne tous les chef-d’oeuvres de mon Théâtre,
MEZZETIN.
Bon, l’on sait ces pièces par coeur.
LA COMÉDIE FRANÇAISE.
Non, non , le public est bizarre.
LA COMÉDIE ITALIENNE.
Effectivement, on ne sait comment ; faire pour le contenter. Il est saoul des vieilles pièces, les nouvelles le rassasient dès la première représentation.
LA FOIRE.
Il est vrai que vos nouveautés passent comme des ombres.
LA COMÉDIE FRANÇAISE, levant les yeux au Ciel.
Que Paris est aujourd’hui de mauvais goût !
LA FOIRE.
LA COMÉDIE ITALIENNE.
Sans doute. Il entend, chez nous des choses dignes de son attention : mais vos fariboles, vos fariboles...
LA FOIRE.
SCÈNE IV. La Comédie Française, La Comédie Italienne, La Foire, Un Gille. §
LE GILLE, à la Foire.
Monsieur votre cousin , Madame.
LA FOIRE.
Mon cousin !
LE GILLE.
Oui, votre cousin. C’est un grand Monsieur de bonne mine, qui chante à tort et à travers tout ce qui lui vient dans l’esprit.
LA FOIRE.
Ah ! C’est l’opéra : c’est ce fou-là.
LA COMÉDIE FRANÇAISE.
L’Opéra ? Le traître ? C’est l’auteur de nos malheurs.
LA COMÉDIE ITALIENNE.
À ce nom, je sens redoubler ma colère.
LA COMÉDIE FRANÇAISE.
C’est lui, maudite Foire, qui t’a retiré du néant où je t’avais fait rentrer.
LA COMÉDIE ITALIENNE.
Le voici. Je sois tentée de le mettre en pièces.
LA FOIRE.
Mettre en pièces l’Opéra ! Oh ! Laisse ce soin-là à ses poètes et à ses musiciens.
SCÈNE V. La Comédie Française, la Comédie Italienne, la Foire, L’Opéra. §
L’OPÉRA, vient en dansant, et en chantant.
Eh ! Bonjour, Mesdames. Vous ici ! Je croyais qu’il n’était permis qu’à moi de faufiler avec la Foire.
LA COMÉDIE FRANÇAISE, le prenant a la gorge.
Il faut que je t’étrangle, Malheureux.
L’OPÉRA, se débarrassant d’elles.
Point d’emportement, Mesdames. Croyez-moi, vivons dans la concorde.
LES DEUX COMÉDIES, ensemble.
LA COMÉDIE FRANÇAISE.
Vous avez beau faire, Monsieur l’Opéra, je perdrai mon ennemie.
L’OPÉRA.
J’y mettrai bon ordre.
LA COMÉDIE ITALIENNE, à la Foire.
Nous vous détruirons.
LA FOIRE, se moquant de ses menaces.
Prrr.
LA COMÉDIE FRANÇAISE, lui mettant le poing sous le nez.
Oui, nous vous abîmerons.
LA FOIRE, la repoussant.
Il ne faut pas pour cela me mettre le poing sous le nez. Vos airs ne me conviennent point du tout.
LA COMÉDIE FRANÇAISE, fièrement.
Je puis les avoir avec une petite créature comme vous.
LA FOIRE, en fureur d’une voix aigre.
Petite Créature ! Vous n’êtes qu’une insolente.
LA COMÉDIE FRANÇAISE.
Juste Ciel !
LA COMÉDIE ITALIENNE.
Vous perdez le respect, ma mie.
LA FOIRE.
Le respect ! Je veux que cinq cents diables m’emportent, si je ne vous applique à toutes deux mon respect sur le visage.
LA COMÉDIE FRANÇAISE, outrée.
Ah ! C’est trop en souffrir !...
L’OPÉRA, riant.
Ha, ha, ha, ha, ha!
LA COMÉDIE ITALIENNE, en s’en allant,
Oui, rira bien qui rira le dernier. Vederète, vederète, Razza maledetta.
SCÈNE VI. La Foire, L’Opéra, Mezzetin. §
LA FOIRE.
L’OPÉRA, riant.
L’OPÉRA.
LA FOIRE et MEZETTIN.
L’OPÉRA.
LA FOIRE et MEZETTIN.
L’OPÉRA.
LA FOIRE et MEZETTIN.
L’OPÉRA.
LA FOIRE et MEZETTIN.
L’OPÉRA.
Hoçà, Cousine. J’ai une prière à vous faire : Avancez-moi, de grâce, un quartier de ma pension.
LA FOIRE.
En vérité, mou Cousin, vous êtes bien intéressé. Vous ne manquez pas d’argent.
L’OPÉRA.
Pardonnez-moi. Je dépense, et je dois beaucoup.
LA FOIRE.
Je vous l’enverrai demain.
L’OPÉRA.
Cela suffit. Adieu, petite Mère.
SCÈNE VII. La Foire, Mezzetin. §
LA FOIRE.
Allons, Mezzetin. Avertissez tous vos camarades : Il est temps de commencer.
SCÈNE VIII. La Foire, Mezzetin, Polichinelle, un Gille. §
POLICHINELLE, l’épée à la main.
Au feu ! Au feu !
LA FOIRE.
Qu’y a-t-il donc ?
POLICHINELLE.
MEZZETIN, allant chercher son épée.
Défendons-nous. Les voici.
SCENE IX. La Foire, Mezzetin, Polichinelle, un Gille, les Comédies Françaises et Italiennes avec leur suite. §
LES DEUX COMÉDIES, ensemble.
LA COMÉDIE FRANÇAISE.
LES DEUX COMÉDIES, ensemble.
LES DEUX COMÉDIES.
LA COMÉDIE FRANÇAISE.
Quel bruit se fait entendre ? Nos ennemis auraient-ils repris courage ?
LA COMÉDIE ITALIENNE.
Ils reviennent à la charge, qans doute.
SCÈNE X. Les deux Comédies, et leurs Suivants, la Foire, Suite de la Foire, L’Opéra. §
LA FOIRE.
SCÈNE XI ET DERNIÈRE. La Foire, Suivants de la Foire. §
LA FOIRE.
CHOEUR des Suivants de la Foire.
LA FOIRE.
Amis, chantons : Vive la Foire.
LE CHOEUR.
LA FOIRE.
Vive la Foire et l’Opéra.
TOUS, ensemble,.
Vive la Foire et l’Opéra.