PAR Monsieur D’OUVILLE.
Chez TOUSSAINT QUINET, au Palais, en la gallerie
des Merciers, sous la montée de la Cour
des Aydes.
M. DC. XLII.Avec Privilege du Roy.
Édition critique établie par Elsa Jollès dans le cadre d'un mémoire de maîtrise sous la direction de Georges Forestier (2000).
Introduction §
L’Esprit Folet d’Antoine Le Métel, sieur d’Ouville, fut représenté pour la première fois à l’hôtel de Bourgogne en 1638 ou en 1639. Cette pièce est une comédie, et qui plus est, une comédie dite « à l’espagnole », parce qu’elle est adaptée d’une comedia de Calderòn de la Barca, La Dama duende.
Angélique, une jeune veuve, est cloîtrée chez elle par ses deux frères qui exigent d’elle une conduite irréprochable. Lors d’une de ses escapades secrètes, elle rencontre l’un de ses frères, Licidas, alors qu’elle est voilée et qu’il ne peut la reconnaître. Pour échapper à sa curiosité, elle demande à un gentilhomme, Florestan, de la protéger. Or ce dernier n’est autre que l’ami de l’autre frère d’Angélique, Lizandre, qui doit le loger chez lui. Florestan se retrouve à son insu dans la même maison que sa protégée, laquelle va tout faire pour communiquer avec celui dont elle est tombée amoureuse, au moyen de panneaux coulissants qui séparent leurs deux chambres. Elle lui fait passer des lettres et des présents sans que le jeune homme ne puisse s’expliquer par quel moyen, bien que son valet superstitieux, Carrille, croit que c’est là l’œuvre d’un « esprit folet ». Si Isabelle, la suivante d’Angélique, puis Angélique elle-même, manquent avouer le subterfuge à Florestan lorsqu’elles se font surprendre aux actes III et IV, elles préservent le mystère jusqu’à l’acte V, lorsqu’elles reçoivent le jeune homme et son valet. La fête nocturne est interrompue par Licidas, qui se croit déshonoré par sa sœur. Finalement, l’issue de la pièce est heureuse : Florestan et Angélique vont se marier, ainsi que Licidas et la sœur de Florestan, dont il a été question du portrait.
Cette pièce est extrêmement originale dans la mesure où elle nous présente une jeune fille plus qu’audacieuse, et un valet bouffon, qui n’aide en rien les amours de son maître. Cela est dû, bien sûr, à la nouveauté de la source d’inspiration, car d’Ouville est l’un des premiers à se tourner vers le vivier des comedias espagnoles, qui développent des thèmes originaux, mais également au savoir-faire de l’auteur français, dont la verve comique a su inspiré Molière.
Qui est d’Ouville ? §
Établir la biographie d’Antoine le Métel, sieur d’Ouville, semble assez problématique, car sa vie est très mystérieuse, à commencer par ses dates : il serait né, selon toute probabilité, à Rouen, entre les années 1587 et 1590. Sa mort est attestée en 1657 dans la Suite des Mémoires de Michel de Marolles, où l’auteur mentionne « feu seigneur d’Ouville ».
Il est le fils d’un procureur de Rouen, et surtout le frère aîné du fameux abbé François le Métel, sieur de Boisrobert, le confident de Richelieu, qui écrivit également des pièces de théâtre et des recueils de contes et de nouvelles. D’Ouville a probablement pâti de la réputation brillante de son frère, en jouant les faire-valoir : c’est ce dernier qui lui a, semble-t-il, obtenu ses titres de noblesse et a protégé sa carrière. Ingénieur hydrographe et géographe du roi, d’Ouville perd un jour sa pension ainsi que le raconte Tallemant des Réaux. Boisrobert va défendre les intérêts de son frère auprès de Monsieur de la Vrillière, le secrétaire d’Etat, qui le tance vertement : « Vous vous passeriez bien de me faire accabler par tout le monde pour vostre frere, pour un homme de nul mérite. » Boisrobert, en contant l’histoire à ses proches, n’a garde d’ajouter : « Je le sçavois bien, il n’avoit que faire de me le dire, je n’allois pas là pour l’apprendre. »
La postérité n’est pas amène non plus, comme en témoignent certains jugements d’érudits tel que celui-ci : « Ses Comédies n’ont eu aucun succès ; ses Contes, quoiqu’écrits avec plus de naturel, ne méritent pas le succès qu’ils ont obtenu. Ils n’ont guère servi qu’à populariser une foule d’anecdotes ordurières et de mauvais quolibets que la morale et le goût devraient vouer à l’oubli1. » Bien pis, une certaine tradition attribue l’œuvre de d’Ouville à son frère, le premier servant de prête-nom au second !
Essayons de nous débarrasser des jugements à l’emporte-pièce et d’une certaine tradition littéraire pour nous en tenir aux témoignages de d’Ouville lui-même. Tout d’abord, si d’Ouville est ingénieur, cela signifie que la littérature n’est pour lui qu’un passe-temps, une activité complémentaire, ce qui est très courant au XVIIe siècle. Mais avec ce que l’on pourrait appeler la « professionnalisation » de la littérature aux siècles suivants, il est normal que cette position aie été mal comprise. En somme, d’Ouville ne serait qu’un amateur, un dilettante pour la postérité.
Un amateur tout de même fort original: au XVIIe siècle, il est célèbre pour sa connaissance exceptionnelle des langues étrangères, ainsi qu’en témoigne Boisrobert dans La Fouyne de Seville : d’Ouville est « l’homme de toute la France qui parloit le mieux Espagnol. »
En effet, et c’est là la spécificité de d’Ouville, il a beaucoup voyagé. C’est ainsi que l’on est sûr qu’il a effectué un séjour de sept ans en Espagne durant sa jeunesse, et que Frederick de Armas situe entre les années 1615 et 16222. Il est donc très au fait de la vie quotidienne espagnole, et surtout de la vie littéraire. Témoin de la prodigieuse vitalité de la Comedia nueva, c’est tout naturellement qu’il adapte, à son retour en France, des pièces de Lope de Vega ou de Calderòn.
C’est ainsi qu’il écrit et fait jouer dix comédies, entre 1638 et 1650. Mais l’Espagne n’est pas son seul centre d’intérêt, puisqu’il fait également un long séjour de quatorze ans à Rome, que seule mentionne l’épître dédicatoire de ses Nouvelles exemplaires et amoureuses.(Il faut d’ailleurs noter qu’il écrivit deux comédies à l’italienne.) Il se fait également le traducteur de nouvelles picaresques, tels en 1644 les Contes aux heures perdues. Il est parallèlement au service de Louis Foucault, Comte du Dognon, entre 1643 et 1650. Puis il se retire au Mans, où il meurt en 1657. L’Esprit folet est sa deuxième pièce, après Les Trahizons d’Arbiran, une tragi-comédie de 1637.
L’intrigue et sa source §
L’Esprit folet est une adaptation assez fidèle d’une comedia de Calderon de la Barca, La Dama duende. La scène se passe à Madrid, le 4 novembre 1629. Analysons brièvement la pièce de Calderon.
Première journée §
À l’occasion du baptême du dauphin, Don Manuel, un gentilhomme de province, se rend à Madrid avec son valet Cosme. Il doit loger chez son ami Don Juan, qui est également son obligé. Il sauve Angela, une jeune femme voilée, d’un importun, Don Luis. Les deux hommes sont en train de se battre, lorsque survient Don Juan, le frère de Don Luis, que Beatriz son amante veut dissuader de prendre part à la querelle. Don Manuel, blessé, et Don Juan se reconnaissent et s’embrassent, tandis que Don Luis se montre galant envers Beatriz qui l’éconduit. Il se plaint de ses malheurs à son confident Rodrigo, et s’inquiète de ce que son frère loge Don Manuel en la même maison que leur sœur. Elle est veuve, et son mari est mort avec des dettes. Bien heureusement, une armoire vitrée cache la porte qui relie les appartements de Don Manuel et d’Angela. Cette dernière, qui n’a pas été reconnue par son frère, est obligée de se changer rapidement, et fait ses doléances à sa suivante Isabelle : sa condition l’empêche de se livrer aux plaisirs mondains, elle est donc obligée de se voiler. Survient Don Luis qui lui raconte son aventure : il a rencontré une mystérieuse jeune femme sur la place du palais, et fut piqué au vif par son entêtement à se cacher de lui. Il lui annonce également la venue de Don Manuel au logis. Dès qu’il est parti, Isabelle révèle à sa maîtresse le secret de l’armoire : elle pourra ainsi prendre des nouvelles du convalescent. Après que Don Manuel et Don Luis ont échangé leurs épées en signe de courtoisie, Cosme se plaint d’être tombé dans une fontaine et amuse la galerie. Seul, il vérifie qu’il a bien tout l’argent qu’il a dérobé à son maître. Puis Angela et Isabelle entrent dans l’appartement de Don Manuel laissé vacant. Elles fouillent les valises du maître et du valet, et Isabelle dérobe l’argent de Cosme en le remplaçant par du charbon. En rentrant, Cosme trouve l’appartement en désordre et son argent métamorphosé. Il prend peur, et soutient aux gentilshommes que c’est l’œuvre d’un esprit follet. Personne ne le croit. Quant à Don Manuel, il trouve la lettre de remerciement que lui a laissée Angela et soupçonne quelque galanterie.
Deuxième journée §
Angela s’est confiée a Beatriz, elle est heureuse de la réponse que Don Manuel a faite à sa lettre. Don Juan arrive, et Beatriz lui raconte qu’elle s’est querellée avec son père qui a vu un homme à son balcon, lequel n’est autre que Don Juan. Ce dernier sorti, Don Luis arrive, Beatriz veut se retirer. Malgré ses protestations d’amour, il importune la jeune femme, qui sort. Rodrigo écoute donc à nouveau les plaintes de Don Luis, jaloux à la fois de son frère et de Don Manuel. Celui-ci arrive et apprend que Don Luis est dédaigné, peut-être de l’inconnue, ainsi qu’il se l’imagine. Pour sa part, il s’avoue heureux de sa bonne fortune, même s’il ne comprend pas comment les lettres de l’inconnue lui parviennent. Pendant ce temps, Isabelle n’est pas très rassurée dans l’appartement de Manuel. Elle doit lui déposer une corbeille en cadeau. Lorsque Cosme survient, elle lui fait peur par taquinerie, mais Don Manuel l’attrape. Elle se dégage en lui laissant une lettre de sa maîtresse. Finalement, Angela, Isabelle et Beatriz rient du bon tour qu’elles leur ont joué. Mais Don Luis les espionne, et croit par un quiproquo que Don Juan va passer dans l’appartement de Beatriz. Ce dernier survient pour annoncer l’absence de Don Manuel jusqu’au lendemain. Beatriz et lui s’entretiennent tendrement de leur amour réciproque. Angela vient ravir dans l’appartement de Don Manuel le portrait d’une dame qu’elle a trouvé dans les affaires du jeune homme. Lorsque surviennent Cosme et Don Manuel à l’improviste, ce dernier s’émerveille de la beauté de la jeune fille et la saisit. Angela ne parvient à s’échapper qu’en employant la ruse. Les deux hommes ne peuvent s’expliquer sa mystérieuse disparition.
Troisième journée §
Dans l’obscurité, Isabelle conduit Don Manuel au rendez-vous que lui a donné Angela. Il se retrouve entouré de toutes les jeunes femmes, et fait la cour à Angela, qui dissimule son identité par un subterfuge : Beatriz joue les fausses étourdies en faisant passer Angela pour une grande dame. Lorsque Don Juan survient à l’improviste, Don Manuel sort, accompagné d’Isabelle. Les deux jeunes femmes décident de se cacher dans un cabinet. Quant à Don Manuel, il est reconduit à son insu dans son appartement, et retrouve Cosme à sa grande surprise. Isabelle enlève le valet à cause d’un quiproquo, tandis que Don Manuel se cache dans l’alcôve. Stupéfaites quand Isabelle ramène Cosme, elles sont très désappointées lorsque Don Luis survient et découvre Beatriz. La colère de ce dernier est à son comble quand il se rend compte que les deux appartements communiquent effectivement, et qu’il trouve Cosme chez sa sœur. Furieux, il provoque Don Manuel en duel. Ce dernier le désarme en faisant montre de sa générosité, ce qui laisse Don Luis perplexe. Pendant ce temps, Don Juan a surpris Angela qui s’enfuyait, et la mène dans l’appartement de Don Manuel. La jeune femme se voit obligée de dire tout son subterfuge, et d’avouer à son amant qu’elle est la sœur de ses hôtes. Don Manuel ment pour la défendre, en prétendant qu’il ne la connaît pas. Don Luis lui accorde alors la main d’Angela. Quant à Don Juan, il a découvert son amante qui s’était dissimulée. L’issue est donc heureuse, et l’auteur s’excuse par la bouche de Cosme de ses extravagances.
S’il semble évident que d’Ouville fut l’adaptateur fidèle de Calderòn, il nous faut noter quelques différences essentielles. Tout d’abord, d’Ouville est le premier auteur à substituer aux noms espagnols des noms français ou d’origine grecque en usage : Angela devient Angélique, Don Manuel devient Florestan. Ensuite, il ancre son intrique dans des réalités bien parisiennes : il est fait mention de l’hôtel de Bourgogne, du Cours-la-Reine, du cimetière joignant Saint Innocent, tandis que chez Calderòn, l’intrigue se déroule à Madrid, à l’occasion des fêtes pour le baptême de l’infant Baltazar. La rencontre entre Angela et Don Luis a lieu sur la Plaza del Palacio. De même, d’Ouville évoque des réalités contemporaines françaises, comme l’épuration récente du théâtre, l’éloge de la comédie, ou les distractions d’une Parisienne.
L’intrigue de la pièce française est fidèlement calquée sur la pièce espagnole, c’est pourquoi nous n’en redonnerons pas de résumé. Cependant, d’Ouville a fait l’effort de se mettre au goût français en simplifiant et en concentrant l’action pour plus de cohérence : l’intrigue secondaire, qui concernait l’idylle de Beatriz et Don Juan, et la jalousie de Don Luis, disparaît. Lucinde, dans la pièce française, n’a donc pas la même importance que Beatriz, de même que Lizandre, puisqu’ils ne sont liés par aucune intrigue amoureuse d’aucune sorte. Ceci a notamment pour conséquence de simplifier le dénouement de L’Esprit folet : toute la troisième journée de La Dama duende représente l’acte V de la pièce de d’Ouville. Ce dernier a concentré l’action riche en péripéties et en quiproquos, et supprimé le fait que le rendez-vous de Manuel et Angela soit interrompu par les entrées successives de Don Juan et Don Luis et compliqué d’un quiproquo (la servante prend le valet pour le maître). Lucinde n’est pas obligée de se cacher comme Beatriz, et dans la pièce française, le rendez-vous est uniquement interrompu par Licidas qui découvre Florestan et Carrille dans leur fuite. Licidas tente de provoquer Florestan en duel, mais y renonce lorsqu’il se rend compte que le jeune homme est également dupe d’une farce que seule sa sœur peut expliquer. L’action de cette pièce n’est donc pas très compliquée : elle consiste en de nombreuses péripéties qui s’organisent selon un crescendo. Florestan et Angélique ne se rencontre véritablement que deux fois : au début et à la fin. Entre-temps, leurs rapports auront changé : Florestan se porte d’abord au secours d’une inconnue, dont il tombe progressivement amoureux. Angélique éprouve très vite des sentiments amoureux à l’égard du jeune homme, et doit donc le séduire. L’action progresse de façon à rapprocher les deux jeunes gens : à l’acte II, Angélique et sa suivante pénètrent dans la chambre de Florestan lorsqu’il est absent. C’est la première rencontre galante. Elle est indirecte, car Angélique ne se familiarise qu’avec les objets qui lui appartiennent (sa valise). Puis à l’acte III, c’est Isabelle qui rencontre Florestan. Là encore la rencontre est indirecte, puisqu’Isabelle est l’émissaire de sa maîtresse. La progression est nette à l’acte suivant, étant donné qu’Angélique se déplace en personne, et rencontre involontairement Florestan, lequel est séduit par sa beauté. Enfin, nous pouvons considérer qu’Angélique a gagné la partie à l’acte V : C’est Florestan qui décide de son plein gré de se déplacer et d’aller chez elle. La rencontre amoureuse se fait dans les conditions qu’avait souhaitées Angélique.
L’unité de lieu n’est guère respectée dans les deux pièces, ce qui est normal puisque les ais coulissants entre les appartements de Florestan et d’Angélique forment le cœur de l’intrigue : c’est ainsi qu’on passe de la rue à la chambre d’Angélique puis à celle de Florestan. On peut noter plusieurs liaisons à vue : I, 5 ; II, 5 ; III, 1, 2, 4, 6 ; IV, 2, 5 ; V, 4, 6. En revanche, l’unité de temps est mieux respectée dans la pièce française que dans la pièce espagnole : l’intrigue se déroule dans la nuit qui suit le jour où elle a commencé. Ceci correspond en fait à l’exigence classique – naissante – de concentration dramatique, par souci de plaire au goût français.
En outre, les personnages de d’Ouville se démarquent de ceux de Calderòn. Florestan est un jeune provincial qui est ébloui de découvrir en Louis XIII un urbaniste avisé. Il est l’ami de deux gentilshommes qui appartiennent à la bonne société fréquentant l’hôtel de Bourgogne ou le Cours-la-Reine. Les valises de Don Manuel étaient très représentatives d’un homme qui a fait la campagne du Piémont, a commandé un régiment et va être gouverneur de province : elles contiennent le nécessaire d’un homme d’action. Il doit avant tout remettre des dossiers au roi. À l’inverse, les valises de Florestan sont celles d’un jeune oisif, d’un provincial qui monte à Paris. Il est avant tout un élégant, qui possède le nécessaire comme le superflu : rubans, bas de soie, poudre pour les cheveux, bracelets. Voilà l’attirail du courtisan.
Carrille est, quant à lui, un valet plus actif que Cosme. Il tient tête à son maître, et peut faire montre de beaucoup d’esprit, notamment lorsqu’il se tire d’un mensonge face à Licidas (II, 3), alors que Cosme s’en tire plus platement :
Je ly bien le moûlé, mais non pas l’escriture.
Tous ses défauts (saleté, goinfrerie…) sont mis en relief par l’inventaire de sa valise sur lequel d’Ouville insiste à plaisir. Si ses terreurs superstitieuses sont plus cocasses que celles de Cosme, parce qu’il énumère bien plus de croyances absurdes, il est en même temps plus audacieux : il ose s’approcher de Lucinde et Isabelle pour les conjurer (V, II), contrairement au valet espagnol.
C’est son caractère très fort qui donne en partie à la pièce sa tonalité comique. Dans la Dama duende, on trouve beaucoup plus d’images emphatiques et lyriques. Songeons par exemple au compliment de Manuel pour Angela à la scène 1 de la troisième journée :
Que quien sabe al aurora, bien sabe que su cuidadoEn las sombras sepultado de la noche oscura y frìa,Ha de tener ; y asì hacìa gusto el pesar que pasabaPues cuanto màs se alargaba tanto màs llamaba al dìa.Si bien no era menester p asar noche tan oscura,Si el sol de vuestra hermosura me habèia de amanecer ;Que para resplendecer vos, soberrano arrebol,La sombra ni el tornasol de la noche no os habìaDe estorbar ; que sois el dìa que amanece sin el sol.Huye la noche señora, y pasa a la dulce salvaDe los pàjaros del alba que ilumina, mas no dora ;Después del alba la aurora, de rayos y luz escasaDora, mas no abrasa. pasa La aurora, y tras su arrebolPasa el sol ; y sòlo el sol dora, ilumina y abrasa.El alba, para brillar, quiso a la noche seguir ;La aurora, para lucir, al alba quiso imitar ;El sol, deidad singular, a la aurora desafìa,Vos al sol ; luego la frìa noche no era menester,Si podéis amanecer sol del sol después del dìa.
Ce compliment est long, c’est un véritable déploiement de poésie cosmique, d’images baroques mêlant mouvement et lumière. Soleil, aube et aurore s’entremêlent en un mouvement étourdissant. Le compliment de Florestan à Angélique (V, 2) est autre :
Deesse que j’adoreOn souffre bien la nuit quand on attend l’Aurore,Elle m’eust semblé longue en osant espererQu’un si brillant Soleil me devoit esclairer,Mais si vos divins yeux excitent dans un AmeSi tost qu’on les regarde une si belle flameQui peut en son abord chasser l’obscurité,Que n’ay-je veu plus tost cette rare beauté,Ce miracle d’Amour, dont le merite extreme,Me fait perdre les sens, et m’oublier moi-même.
Le compliment est ici précieux, mais il ne s’agit que d’une aimable poésie de salon, quelques pointes aux images déjà connues. À l’inverse, les scènes les plus savoureuses de la pièce française, telles que l’inventaire des deux valises, ou la dispute « théologique » du maître et du valet ne se trouvent pas exploitées pour leur potentialité comique dans le modèle espagnol. La pièce de d’Ouville est plus franchement bouffonne. Cependant, la tonalité de la pièce est nettement duale, et varie très clairement avec les personnages. Les gentilshommes sont remplis de leur sens de l’honneur et du devoir, c’est pourquoi la pièce prend une coloration héroïque lors du duel, de l’échange des épées, voire tragi-comique lorsque Licidas veut tuer sa sœur. Lorsque il fait irruption à l’acte V, les jeunes femmes sont catastrophées : c’est la fin de la fête. Le ton de Florestan, autre vaillant cavalier, est un peu plus léger car il est amoureux et veut percer le mystère de son inconnue. Dans ses lettres ou dans ses conversations avec Angélique, il n’hésite pas à employer le vocabulaire et les gestes de la chevalerie.
Cette tonalité se veut donc très romanesque, surtout lors des scènes des jeunes filles. Ce sont elles qui sont à l’origine de l’intrigue, et elles mènent une véritable entreprise galante. Il s’agit pour Angélique de charmer Florestan, au sens propre comme au sens figuré. À cette tonalité romanesque s’oppose la tonalité comique voire bouffonne, qui est l’apanage exclusif du valet Carrille. Il est très présent sur scène, et assure donc une comédie joyeuse d’un bout à l’autre par ses craintes irrationnelles. C’est ce mélange unique et harmonieux de romanesque héroïque et galant et de comique presque farcesque qui confère à L’Esprit folet son originalité.
Les caractères §
Florestan est le type du caballero, le « cavalier » au sens de « chevalier » ; il est d’ailleurs très souvent nommé ainsi. Il en possède toutes les vertus et tous les attributs, dont le plus évident est son épée : après avoir sauvé Lizandre qui est son obligé, il protège Angélique des entreprises de Licidas (I, 1). Il n’hésite pas à se battre en duel avec lui, puis à procéder à l’échange des épées lorsque les deux hommes ont reconnu leur bravoure respective (II, 2). Enfin c’est son courage qui le dessert aux yeux du même Licidas, puis qu’il a l’épée à la main, ce qui semble prouver sa culpabilité (V,5). Florestan répond fièrement :
Ne sçachant où j’estois en cette extremitéEst-il homme de cœur qui l’eust euë au costéSe voyant poursuivi ?
Cette bravoure ne va pas sans un certain manque de finesse : stupéfait devant les ruses d’Angélique, il tire son épée pour l’obliger à se démasquer (IV, 3), ce qui montre ses limites. Sa bravoure l’entraîne à faire davantage usage de sa force physique. La jeune fille sait d’ailleurs fort bien se jouer de lui en se montrant plus astucieuse. En outre, il la met en danger en refusant de mentir devant Licidas (V,5) : en lui avouant qu’il ne connaît pas Angélique, il révèle au frère de cette dernière qu’elle a agi de son propre chef. D’autre part, la bravoure de l’Hidalgo est ici nettement parodique : c’est le modèle de Don Quichotte qui est évoqué (I, 4), alors qu’il voudrait être Amadis.
Cependant, Florestan est également l’idéal du galant homme : c’est un personnage raffiné, qui sait apprécier la beauté du nouvel urbanisme parisien (I, 1) mais aussi employer métaphores et images précieuses pour séduire celle qu’il nomme sa Dame (III, 1). Sa tournure est « curieuse », c’est-à-dire élégante, comme en témoigne l’énumération des richesses de sa valise (II, 5).
Enfin, l’originalité du caractère de Florestan réside essentiellement dans son bon sens : il comprend instinctivement la supercherie, bien qu’il ne puisse clairement se l’expliquer (II, 8). Cet homme pragmatique ressemble à s’y méprendre à un libertin, lorsqu’il explique à son valet, dans la même scène, qu’il ne croit à aucune des superstitions en vogue. Cependant, il avoue croire à Dieu et diables, ce qui nous permet de comprendre que la scène servait avant tout à ridiculiser le crédule Carrille.
Le valet Carrille est assurément un type nouveau sur la scène française. D’Ouville en est conscient, puisqu’il écrit dans son épître dédicatoire : « Ce foible Esprit qui fait le bouffon de la pièce (et qui à bon droit en peut estre nommé le Heros, puisque c’est luy qui fait la plus grande partie du sujet) ». C’est là le point important : Carrille est l’un des moteurs essentiels de l’action, il n’est plus le simple serviteur de son maître, il est d’ailleurs autant présent sur scène que Florestan ( 21 scènes sur 37). Par ses craintes superstitieuses, c’est lui qui confère à l’intrigue son caractère surnaturel, alors qu’elle n’est qu’une aimable farce. Comme les valets italiens, Carrille a de l’esprit : il ironise sur ses malheurs (IV, 1), et sait avoir du répondant face à Licidas qui le met face à ses mensonges (III,1), lorsqu’il lui rétorque :
Je ly bien le moûlé, mais non pas l’écriture.
Carrille est un peu l’héritier d’Arlequin, il remplit à merveille son rôle de bouffon, comme en témoigne sa dernière réplique, qui est aussi la réplique finale (V, 7):
Je vay donc de bon cœur faire une capriole
Carrille sait faire rire. Mais sa grande originalité, c’est de faire rire à ses dépens : il est, de façon caricaturale, l’homme du vulgum pecus, l’exact opposé de l’hidalgo. C’est le valet des comedias que l’on nomme le gracioso. Ses préoccupations sont tout à fait grossières : il est gourmand, ivrogne, voleur, menteur, borné, misogyne, et rustre. Loin de s’extasier, à l’instar de Florestan, sur la beauté de Paris, il affirme la supériorité de son village (II, 3), ce qui marque pour l’époque son absence de raffinement. Sa valise parle pour lui : ce bric-à-brac utilitaire est celui d’un paysan sale et rustre. Fatalement, c’est celui d’un homme pauvre, comme le remarque Isabelle (II, 5). Cette valise est bien entendu risible, et son ridicule est mis en valeur par l’examen antérieur de la valise très raffinée de Florestan. En outre, la principale caractéristique de Carrille est celle d’être un lâche, en toutes situations. À l’acte I, il craint de se trouver mêlé à un duel. Aveuglé dès le départ par sa superstition, il refuse de raisonner et se voit donc toujours la victime des ruses d’Angélique et Isabelle. Il enrichit l’intrigue de ses croyances absurdes : coq d’Inde noir, esprit follet ou diable, c’est ce que pourrait bien être Angélique. Cependant, le spectateur connaît l’astuce dès le premier acte ; les peurs de Carrille ne peuvent donc être que comiques. Son absence de courage est éminemment dramatique parce qu’elle est physique. Sa peur est tellement grande qu’il va jusqu’à « s’oublier », en une sorte de grotesque apothéose de sa peur. Mais la superstition du valet en vient presque à surpasser sa lâcheté, lorsqu’il effectue un jubilatoire rite de conjuration (V, 2). Nous pouvons finalement penser que Carrille est le double négatif de son maître, en toutes circonstances. Lorsque Florestan tremble d’amour, Carrille tremble de peur (IV, 3). Plus que jamais maîtres et valets se retrouvent opposés et complémentaires, c’est-à-dire indispensables l’un à l’autre. Cependant, il est difficile de ne pas accorder la préférence au valet :il est le véritable personnage original, face à un gentilhomme qui ne débite que des platitudes galantes ou chevaleresques. Il faut ainsi noter que la tonalité comique l’emporte largement sur la tonalité romanesque et galante . C’est bien Carrille qui donne son titre à la pièce.
Angélique est également un personnage très intéressant. C’est incontestablement elle qui mène l’action, ce qui est tout nouveau car imité de la Comedia. Depuis Plaute et Térence, les jeunes filles étaient toujours l’objet du désir des jeunes hommes, et elles étaient soit absentes, soit muettes. Dans la comédie espagnole, tout se renverse : ce sont elles qui sont passionnées et qui font tout pour conquérir le jeune homme dont elles sont éprises.
Angélique est veuve : cette condition pourrait être celle du seul affranchissement que connaissent traditionnellement les femmes, comme Célimène dans Le Misanthrope de Molière, mais ce n’est pas le cas, comme elle le dit elle-même :
Estant vefve j’ay creu me voir en liberté,Mais on me traitte avec bien plus d’austéritéJe n’avois qu’un mary, maintenant j’ay deux freres,Qui plus qu’il ne m’estoit, cent fois me sont severes
Cependant, elle réussit à faire de la maison dans laquelle elle est enfermée, c’est-à-dire de sa prison, le lieu de sa toute puissance et de sa liberté, en se jouant de ses frères et de Florestan lui-même. Le lieu de l’enfermement est détourné de sa fonction première, et comme perverti par l’utilisation des deux ais coulissants. Angélique est une audacieuse, une révoltée contre sa condition : elle va à tous les plaisirs mondains à l’insu de Licidas et Lizandre. Puis lorsqu’elle se trouve attirée par Florestan et qu’Isabelle lui propose un subterfuge pour le rencontrer, elle n’hésite pas une seule seconde (I, 7) :
Allons donc promptement,Et sans plus consulter executer la chose,J’approuve cet advis que ton esprit propose
Il faut tout de même noter qu’Angélique ne va pas jusqu’à dépasser les limites de la bienséance, ainsi qu’elle l’explique à Lucinde (II, 1) : son amour « est bien dans l’innocence ». Cependant, son audace est telle qu’elle frôle la mort (V, 7), car Licidas s’estime offensé par sa conduite impudique : une jeune fille ne se « produit » pas elle-même. Son esprit d’initiative et son indépendance lui font prendre des risques.
En outre, Angélique n’est pas un personnage de jeune première traditionnelle, car elle n’est pas véritablement précieuse. Elle est tout à fait interloquée par la lettre métaphorique et hyperbolique de Florestan, qui se veut galante (III, 1). De même, elle refuse ses compliments un peu trop rhétoriques (V, 2) :
Mais je ne celle point Florestan, que je haisDe pareils complimens quand ils vont dans l’excez.
Les attentions d’Angélique à l’égard de Florestan appartiennent à l’arsenal de la préciosité (lettres de forme poétique, présents délicats…), mais la jeune fille en elle-même est bien plus romanesque que précieuse :elle n’attend pas qu’on lui fasse une cour raffinée, elle va au-devant de ce qu’elle souhaite.
Isabelle est un personnage de servante plus traditionnel : elle est là avant tout pour aider sa maîtresse dans ses entreprises. Elle la suit lors de ses escapades, et est sa confidente attitrée (I, 5). Ingénieuse, c’est elle qui est à l’origine de la ruse des ais coulissants. Avec malice, elle substitue à l’argent de Carrille du charbon (II, 5),puis lui donne, comme dans la farce, quelques coups de bâton (III, 5). Elle se joue même avec plaisir de ses peurs (V, 2). Angélique reconnaît son adresse (III, 6) :
Isabelle il est vray, tu vaux ton pesant d’or.
Pleine de bon sens et consciente des bienséances, elle calme les révoltes de la jeune maîtresse dont elle est proche (I, 5), mais sait également se montrer un peu impertinente à son égard, car elle a le sens de la répartie (II, 5). Sa morale est quelque peu douteuse : une jeune fille peut se livrer à ses plaisirs, à condition que personne ne le sache.
Licidas joue un double rôle de fâcheux dans l’intrigue : il est à la fois le prétendant éconduit par Angélique (I, 2), et le frère sévère qui représente une sorte d’autorité paternelle : avec aménité, il conseille à sa sœur de ne plus pleurer son mari (I,6), mais en même temps il ne peut supporter qu’elle se distraie innocemment avec sa cousine (V, 5). Lorsqu’il découvre la supercherie, il est prêt à la tuer (V, 7). Licidas semble en fait un personnage de tragi-comédie ; il est toujours prompt à tirer l’épée (ses duels réels ou esquissés avec Florestan encadrent l’action). Il est gentilhomme, il a donc un sens élevé de l’honneur : c’est à son initiative que Florestan et lui échangent leurs épées (II, 2). Cependant, son naturel susceptible prend toujours le dessus. Ainsi que l’affirme Angélique (I, 5) : « il est prompt ». Il ne sait pas se comporter en galant homme avec la belle inconnue, parce qu’il est vexé qu’elle ne veuille pas lui montrer son visage. De même, il s’impatiente vite face à Carrille (I, 3) et se bat sans états d’âme. Il peut ainsi proclamer :
De satisfaction je n’en fis en ma vie
Lizandre est l’obligé de Florestan, ce pour quoi il se montre à son abord très amical. C’est un personnage de moindre importance que Licidas, car il est plus pondéré. Lorsque la ruse d’Angélique est découverte, et alors que Licidas semble prêt à tuer sa sœur, Lizandre veut d’abord entendre ses explications (V, 7) :
Mais sans nous abuserDy-le tout franchement et sans rien déguiser.
Ariste est le modèle du serviteur discret et courageux quand il s’agit de prendre le parti de son maître (I, 3). Sa bravoure, qui est un pastiche d’une réplique fameuse de Don Diègue dans Le Cid, met surtout en valeur la couardise de Carrille.
Les thèmes principaux §
En adaptant une comédie espagnole, d’Ouville introduit non seulement un type d’intrigue et de personnages bien défini, mais également certains thèmes nouveaux.
Il faut tout d’abord remarquer que l’intrigue de cette pièce consiste en une grande mascarade : une jeune fille se dissimule pour communiquer avec l’élu de son cœur, sans que ce dernier sache comment elle y parvient, et sans que ses frères en soient informés. C’est pourquoi nous pourrions parler ici d’un véritable jeu d’ombre et lumière. Les personnages se répartissent selon plusieurs catégories :
-certains sont des êtres qui ne dissimulent rien, ils n’ont aucun secret, ils sont donc en pleine lumière. C’est le cas de Florestan, de Licidas et de Lizandre. Les actes de ces gentilshommes se font au grand jour, ils ont même besoin de cette lumière pour s’affirmer. Ceux que l’on désigne souvent dans la pièce sous le nom de « cavaliers » se définissent avant tout par leur bravoure. Ils doivent nécessairement la faire paraître, c’est pourquoi ils agissent suivant des cérémonies très codifiées, comme les duels ou les échanges d’épées. Ce n’est pas par hasard que le valet de Licidas pastiche un vers du Cid lors du duel de l’acte I : à l’instar des héros cornéliens analysés par Jean Starobinski, ces gentilshommes choisissent l’attitude la plus glorieuse, car ils doivent se montrer, par leurs exploits, identiques à ce qu’ils se sont proclamés3. De fait, cette propension à se montrer tels qu’ils se réclament les rend incapables de mensonge et de dissimulation : Florestan nie connaître Angélique pour rester un homme loyal aux yeux de Licidas, l’homme qui lui a fait présent de son épée (V, 5). Mais si ces hommes sont des braves, ce sont aussi des courtisans qui se doivent de montrer une certaine activité mondaine : Florestan décide de se rendre à la cour, parce qu’il désire « un peu paroistre » en ce lieu.
Certaines au contraire ne sont qu’ombre, dissimulation, comme Angélique et sa suivante Isabelle. Elles sont toutes deux responsables de l’intrigue, et la mènent en agissant dans l’ombre. Angélique est une veuve : elle porte la couleur du deuil et doit agir en conséquence. Lorsque Licidas l’interroge sur ses occupations, elle évoque son chagrin qui est son ordinaire de veuve. La jeune femme se doit de mener une vie austère. Dans le cas contraire, elle serait victime des médisances, comme l’affirme Isabelle (I, 5) :
Toutes vos actions aux faux bruits sont sujettes
C’est pourquoi la jeune femme est obligée de se voiler lorsqu’elle sort pour participer aux plaisirs mondains, et échapper à la surveillance de ses frères. Donc dès le début, Angélique et sa suivante sont des êtres de l’ombre. Puis elle décide de faire parvenir des lettres et des présents dans la chambre de Florestan sans qu’il puisse deviner d’où ils proviennent. Durant toute la pièce, la lumière est l’ennemie des deux jeunes femmes : lorsqu’Isabelle décide de jouer un bon tour à Carrille (III, 5), elle se défie de lui parce qu’il apporte de la lumière, et mouche sa chandelle. Quand Angélique décide, à l’acte IV, de récupérer le portrait que Florestan garde dans ses affaires, elle est trahie par la lanterne sourde qui la démasque aux yeux de Florestan et de Carrille. La jeune fille, contrairement aux gentilshommes, est toujours celle qui ne revendique pas ses actes en son nom propre. Pourtant, et c’est cela qui fait la grande originalité de la pièce, l’audace d’Angélique est très grande. Comme nous l’avons dit, pour la première fois sur la scène française, c’est la jeune fille qui exprime son désir. Si elle est obligée de le cacher à ses frères, elle se montre franche envers ses compagnes et Florestan, quant à ses sentiments. Les lettres sont le lieu de la lumière (II, 8) :
Je vous descouvre icy les secrets de mon cœur
C’est également la grande franchise qu’elle met dans l’aveu de ses sentiments qui la rend presque incapable de préciosité : elle est trop amoureuse pour feindre la retenue ; ses aveux sont tout à fait explicites (V, 2), et pourraient la perdre. Finalement, le statut d’Angélique est plus ambigu qu’il n’y paraît ; elle est à la fois ombre et lumière : si elle se dissimule, c’est pour mieux avouer ses sentiments à Florestan. Le voile dont elle s’entoure lui permet de grandes audaces.
L’attitude de la mystérieuse jeune femme fait nécessairement des gentilshommes des spectateurs avides de connaître sa véritable identité. Ces derniers ne dissimulent rien, et ne peuvent donc comprendre la dissimulation. Licidas le premier aperçoit la jeune femme voilée ; le mystère dont elle s’entoure lui inspire le désir de la contempler, désir d’autant plus vif qu’Angélique se dérobe :
Car la peur qu’elle avoit d’entrer en mon pouvoirM’augmentoit cent fois plus le desir de la voir.
Ensuite c’est au tour de Florestan de céder à sa curiosité : l’intrigue se noue selon l’envie de Florestan de surprendre la jeune femme dans un premier temps (actes IV et V), puis d’aller la voir. Contrairement à son valet paralysé par la peur, Florestan n’a de cesse de savoir la vérité (III, 6) :
Je l’espieray si bien que je la surprendray.
D’ailleurs souvent sa curiosité lui fait entrevoir la vérité, et il manque même découvrir tout le subterfuge (IV, 4). Toutes les actions de Florestan tendent donc à dissiper l’aveuglement dans lequel le maintient Angélique. Son insistance à démasquer le subterfuge est extrême ; on pourrait presque comparer son attitude à celle d’un chasseur qui guette patiemment sa proie. De scène en scène, sa curiosité est aiguisée. Et lorsqu’il entrevoit la lumière de la vérité, tel le prisonnier de la caverne de Platon, il en est ébloui (IV, 3) :
L’esclat de ses yeux brille avec tant de lumiereQu’il esbloüit mes yeux, et sille ma paupiere.
C’est déjà là la lumière de l’amour.
Ces jeux d’ombre et de lumière entre des jeunes gens bien nés qui se cherchent et se cachent est compliquée par la superstition d’un valet qui donne à la pièce sa tonalité comique. Aussi peut-on parler de surnaturel et superstition dans L’Esprit folet. Notons dans un premier temps l’importance du champ sémantique des croyances surnaturelles. Pour désigner des manifestations qu’il ne comprend pas, Carrille emploie les termes : « esprit folet », « diable », « familiers », « sorcier », « larves au teint blesme », « nigromantiens », « farfadet », « fée », « moine bouru », « ame en peine », « succube », « lutin », « demon », « loups-garoux », « Lucifer », « sathans ». Calderon raillait la crédulité superstitieuse de ses contemporains et en faisait un objet théâtral ; d’Ouville à son tour traite de manifestations surnaturelles que craignent les Français de l’époque dans leur grande majorité. Carrille ne fait que refléter les réactions de la masse. Non seulement il est très craintif, mais en outre il n’oppose que des pratiques superstitieuses à ses craintes irréfléchies : il promet à Dieu trente livres d’encens, il conjure les deux jeunes femmes qu’il prend pour le diable… Cependant, le public ne peut se mettre du côté de Carrille car il est au courant dès le début que les craintes du valet ne sont pas fondées. C’est justement ce qui rend Carrille ridicule, et qui fait de cette surenchère de phénomènes surnaturels une mécanique essentiellement comique. Les craintes du valet sont d’autant plus drôles qu’elles s’opposent au courage intrépide de Florestan. Celui-ci, lorsqu’il n’est pas dédaigneux devant la crédulité de Carrille, fait également mention de manifestations fantastiques ; il évoque les « titans », les « monstres », les « geans », il parle également d’une « hydre ». nous pouvons tout de suite remarquer qu’il s’agit plutôt ici de monstres mythologiques. Si Florestan les évoque, c’est parce qu’il a conscience, en parfait « cavalier », du combat à mener et de l’exploit à accomplir. Il ne s’agit pas ici de craindre des contes à dormir debout.
De fait, si d’Ouville utilise, comme son prédécesseur, la crédulité d’un valet comme ressort comique, il ne craint pas de rendre la pièce plus noire que son modèle quant au traitement du surnaturel. D’Ouville surenchérit à plaisir dans la terreur. Lorsque Florestan se voit blesser lors du duel, il a la prémonition de nouveaux malheurs (I, 4) :
En entrant dans Paris, Dieux ! quel mauvais augure,Qu’il me couste du sang.
De plus, l’auteur cherche à frapper le spectateur en évoquant souvent la figure du diable. Le terme de « diable » est employé dix-sept fois par Carrille, c’est-à-dire presque autant que celui d’ « esprit ». Encore ce terme n’est-il pas employé sans ses nombreux attributs d’ »enfer », « sathans », « Lucifer », « ongles croches ». Finalement, tout se passe comme si d’Ouville voulait tirer des effets de comique mais aussi de sensationnel de cet emploi des superstitions.
D’Ouville serait-il un esprit fort, un libertin ? Cela ne serait pas impossible, à en juger par les réactions de l’homme sensé, Florestan, face à son valet trop crédule. Il ne croit à aucune des superstitions de la masse (II, 8). Ce personnage n’est pas sans annoncer le Don Juan de Molière, comme nous le verrons par la suite. Dans tous les cas, force est de constater que d’Ouville possède un certain courage à choisir un sujet brûlant, celui de la superstition, qui est nécessairement lié à celui de la religion en général, comme en témoignent les démêlés de Molière avec les dévots pour des pièces telles que Don Juan ou Tartuffe.
La dramaturgie §
L’utilisation de l’espace est au cœur de l’intrigue de L’Esprit folet, puisqu’il s’agit, pour Angélique, de pénétrer dans la chambre de Florestan et d’en sortir sans qu’il sache comment. Leurs deux chambres communiquent par des ais coulissants, aussi tout un jeu de scène consistera à passer de l’une à l’autre le plus rapidement possible. L’unité de lieu n’est donc pas respectée, mais cette exigence classique n’est pas encore prédominante dans la première moitié du XVIIe siècle. C’est l’unité au sens large qui prédomine, c’est-à-dire l’unité de ville (Paris). Les décorateurs utilisent un décor multiple, ou décor à compartiments : la scène est divisée en plusieurs compartiments qui s’organisent autour de la rue, comme on peut le supposer ici. Des tapisseries se levaient ou s’abaissaient suivant l’endroit où devait se dérouler l’action. Dans L’Esprit folet, le premier acte représente essentiellement la rue, puis, aux actes suivants, il s’agit de l’intérieur de la maison d’Angélique et de ses deux frères. On peut noter de nombreuses liaisons à vue : I, 5 ; II, 5 ; III, 2, 4, 6 ; IV, 2, 5 ; V, 2, 4. La difficulté consiste à savoir s’il faut considérer les chambres de Florestan et d’Angélique comme un lieu unique. La réponse est variable : à l’acte II, scène 5, et à l’acte III, scène 1, on voit Isabelle passer et repasser d’une chambre à l’autre. L’action réside dans le fait qu’elle doit déposer ou reprendre une lettre tandis qu’Angélique parle toujours dans sa chambre. En ce cas, le lieu de l’action est celui des deux chambres conjointes, le spectateur voit comme au travers. En revanche, toutes les liaisons à vue nous indique qu’il faut parfois considérer ces deux pièces comme distinctes, lorsqu’elle renferment Florestan et Carrille d’une part, Angélique, Isabelle et Lucinde de l’autre. Bien au contraire, cette séparation est nécessaire entre celles qui jouent et ceux qui sont joués.
S’il ne nous a pas été possible de connaître le décor exact de la pièce, qui figure dans le Mémoire de Mahelot sans aucune autre forme d’indication, il nous est cependant possible de le reconstituer grâce à l’inventaire du décor de La Dame invisible, ou l’esprit follet de Hauteroche, adaptation de la pièce de d’Ouville, qui y est pour sa part figuré. On sait que l’acte I doit représenter une rue, l’acte II, « deux chambres séparées par un pivot et deux portes. » Au nombre des accessoires, on peut compter des malles de vêtements, une bourse, des lettres, du papier, une lanterne sourde, entre autres.
L’unité de temps est bien plus respectée, puisqu’elle n’excède pas vingt-quatre heures. La pièce commence un après-midi, lorsque Licidas poursuit Angélique au sorit d’une représentation théâtrale. Puis Florestan, reconnu par son ami Lizandre, s’installe chez eux non sans que Carrille ne cherche la maison pendant deux heures (II, 3) :
J’ay esté deux heures planté comme une grüe
Puis les gentilshommes partent se promener en carrosse au Cours-la-Reine pendant une heure, avant de souper, et de partir au bal de la Cour. Lorsque Florestan rentre, il trouve un billet lui donnant rendez-vous à minuit. C’est donc dans la nuit que se dénoue l’intrigue à l’acte V. Il est, dans un premier temps, intéressant de constater que cette journée est bien représentative de l’emploi du temps de gentilshommes oisifs qui se livrent à leurs plaisirs : théâtre, promenade, bal… Ensuite, nous pouvons constater que l’utilisation qui est faite du temps dans cette pièce est tout à fait dramatique : l’intrigue se déroule lorsque Florestan est censé être absent. Angélique se calque sur les plaisirs du jeune homme pour pouvoir le mystifier à son aise. À l’acte II, la lettre est déposée lors de sa promenade en carrosse, à l’acte III, Isabelle vient vient porter le panier quand ils soupent, puis Angélique vient chercher le portrait, à l’acte IV, alors qu’il n’est pas censé être encore rentré du bal. Florestan pourrait fort bien n’être qu’un personnage de moindre importance puisque l’intrigue a nécessairement besoin de son absence pour avancer. Ce sont ses apparitions inopinées qui lui permettent de participer à l’action.
Étrange intrigue que celle où la présence du jeune premier est le principal obstacle au but poursuivi par la jeune première ! Nous pouvons noter que la nature des conflits censés faire avancer l’intrigue est d’une certaine complexité parce qu’elle est duale : il existe un conflit traditionnel, extérieur aux deux jeunes gens, représenté par Licidas. Ainsi que nous l’avons dit, Licidas occupe un double rôle : il est à la fois l’amoureux éconduit à l’acte I, et le frère revêtu d’une forme d’autorité paternelle à l’acte V. Ces deux interventions encadrent l’action. À l’acte I, Angélique le fuit, et c’est ainsi qu’elle rencontre Florestan. À l’acte V, il vient écourter le tendre entretien des amants. À chaque fois, il provoque Florestan en duel, et met sa sœur en danger physique (il manque la tuer au dernier acte), c’est pourquoi ces obstacles peuvent sembler du ressort de la tragi-comédie. Cependant, il n’est guère question de Licidas aux actes II, III, IV, il faut donc nécessairement que les conflits soient d’un autre ordre. Tout d’abord, notons que les deux amants ne se voient presque pas lors de ces actes. En outre, lorsqu’ils se rencontrent (IV, 3), Angélique cherche à fuir Florestan. Les deux amants ne poursuivent pas le même but qu’à l’acte I, Florestan étant résolu à sauver Angélique, où qu’à l’acte V, lorsqu’ils s’entretiennent enfin galamment. Aux actes II, III, IV, Angélique tente de communiquer avec Florestan de façon indirecte : elle veut d’abord savoir si le jeune homme logé chez elle est bien celui qui l’a sauvé de son frère (II, 5). Tout est bon pour lui adresser des lettres, des présents sans qu’il puisse la voir. Le but non avoué d’Angélique est de suffisamment piquer la curiosité du jeune homme pour qu’il fasse la démarche de l’aller trouver, car la bienséance interdit à la jeune fille de se trouver face à Florestan dans la chambre de ce dernier. Florestan, quant à lui, n’a de cesse de surprendre le prétendu « esprit folet », et de comprendre comment l’on peut pénétrer dans sa chambre à son insu. Fatalement, la rencontre de Florestan et Isabelle à l’acte III, puis de Florestan et Angélique à l’acte IV sont des affrontements : à chaque fois le jeune homme tente de retenir la jeune fille qui ne songe qu’à s’enfuir, car les deux jeunes gens ne partagent pas les mêmes buts. Tout cela est hautement dramatique, et fait la joie du public qui se demande lequel des deux héros aura raison de l’autre.
La dramaturgie est également riche de jeux liés à la dissimulation d’identité ; on peut distinguer deux méprises différentes. À l’acte I, Angélique, voilée, est poursuivie par son frère, lequel ne l’a pas reconnue. C’est cette première méprise qui va entraîner les autres, et qui dure tout au long du premier acte. Lorsque Licidas vient faire le récit de ses aventures à sa sœur (I, 6), celle-ci manie adroitement l’ironie, adressant ainsi un discret clin d’œil au public :
Ne vous laissez jamais tromper à l’apparence,Le vice prend souvent le masque d’innocence.
Aux actes suivants, un nouveau jeu sur l’identité se met en place : Angélique pénètre dans la chambre de Florestan sans que le gentilhomme et son valet ne comprenne comment, ce qui fait croire très rapidement à Carrille que cette intervention est surnaturelle, dès la scène VI de l’acte III :
Que veut dire cela ? Qui m’a fait ce mesnage,Qui nous a mis ainsi nos hardes au pillage ?En fait-on un encan ? Dieux je tremble de peur,Seroit-ce quelque diable, ou bien quelque enchanteur ?
Le public sait bien évidemment que les craintes de Carrille sont injustifiées. C’est sa peur qui le paralyse et permet aux jeunes filles de passer pour ce qu’elles ne sont pas : à l’acte III, scène 4, Isabelle a très peur car elle avance à tâtons dans la chambre de Florestan. Mais lorsqu’elle se rend compte, à la scène suivante, que Carrille la prend pour un esprit, elle n’hésite pas à jouer de sa prétendue supériorité surnaturelle pour éteindre sa chandelle et lui donner un coup de poing. De la même façon, Lucinde et Isabelle ne se piquent de jouer les esprits que lorsque Carrille montre sa crédulité en tentant de les conjurer (V, 2). Puis c’est la peur panique de Carrille qui lui fait prendre, à l’acte V, un frère indigné pour le « vray diable ». Finalement, la pièce française comporte beaucoup moins de jeux sur l’identité proprement dramatiques (quiproquos…) que la pièce espagnole. Carrille déploie, tout au long de la pièce, une véritable « rhétorique de la superstition » qui est bien plus oratoire que dramatique. L’essence surnaturelle du stratagème n’est au départ qu’un fantasme de Carrille ; Angélique n’a pas l’intention de passer pour un fantôme, elle s’étonne de la lettre de Florestan qui la considère comme telle (III, 1), et si elle tente d’impressionner Florestan en lui faisant croire qu’elle a des pouvoirs surnaturels (IV, 3), c’est avant tout pour gagner du temps. D’ailleurs le jeune homme ne se laisse jamais vraiment prendre, il est juste perplexe devant une astuce qu’il devine contingente, sans réussir toutefois à l’identifier. Tout serait beaucoup plus simple si Florestan n’ignorait pas un fait essentiel : ses hôtes ont une sœur qui vit avec eux, recluse, et qu’il a sauvé à l’acte I, par le plus grand des hasards. Le véritable mystère presque surnaturel est là, comme le souligne Angélique (II, 7) :
Ce cas est bien estrange, et s’il ne m’est visibleA peine le croiré-je, il est presque impossible,(Et l’esprit le mieux fait s’y trouveroit surpris)Qu’un estranger rencontre arrivant à ParisUne femme en passant qui d’abord le convieDe luy vouloir sauver et l’honneur et la vie,Se voir en mesme temps par son frere blessé,Arriver l’autre frere et s’en voir caressé,Luy donner son logis, les accorder ensemble,C’est un fait qui n’est pas croyable ce me semble.
Succès et influence de la pièce §
La postérité a oublié Antoine Le Métel d’Ouville, ou l’a considéré comme un auteur tout à fait mineur. Une chose est certaine : ses pièces ont eu du succès, et particulièrement L’Esprit folet. Nous avons recensé au moins cinq éditions différentes de cette pièce à la Bibliothèque Nationale, dont trois du vivant de l’auteur. En outre, L’Esprit folet a influencé ses contemporains ainsi que ses successeurs.
L’intrigue de cette pièce fournit le sujet de différentes comédies qui s’en inspirent d’assez près. En 1682, Crosnier publie Les Frayeurs de Crispin, qui conte les mésaventures d’un valet craintif, puis Hauteroche fait représenter en 1684 La Dame invisible, qui fut un grand succès, puisque la pièce demeura de 1684 à 1809 au répertoire de la Comédie française. Cette pièce inspira à son tour Charles Collet, qui écrivit en 1770 L’Esprit follet ou la dame invisible. Comme en témoignent les titres, ces pièces s’inspirent bel et bien de l’adaptation de La Dama duende. Les modifications sont moindres, telles celles de la comédie de Hauteroche : elles concernent les noms des personnages (Florestan devient Pontignan, lequel n’est plus originaire du Languedoc mais de Limoges), le fait que la jeune première ait un espion à sa solde et qu’elle cherche à rompre la promesse de mariage du jeune homme. Somme toute, les changements sont mineurs, ce qui traduit la force du modèle initial.
Bien plus qu’un simple canevas d’intrigue, la comédie de d’Ouville lança durablement en France la vogue des comédies à l’espagnole. C’est l’une des premières fois où une jeune fille mène l’action de façon si audacieuse, ce qui n’était pas le cas dans les précédentes comédies à l’italienne. De rusé, le valet devint bouffon, tandis que son maître donnait à son rang la fierté hispanique. Mais la comédie à l’espagnole ne procède pas uniquement d’un exotisme dépaysant, elle est porteuse de toute une esthétique baroque : la vie est un songe, le monde est une vaste scène, ce qui implique que tous les personnages portent des masques. D’Ouville lança donc un type de comédies auxquelles Scarron donna par la suite ses lettres de noblesse, avec notamment L’Héritier ridicule en 1649. Corneille écrivit également une comédie à l’espagnole en 1642, Le Menteur. Il est intéressant de noter que c’est un écrivain mineur comme d’Ouville qui influença un auteur majeur, ce qui n’est pas si courant, l’originalité étant, selon nos critères modernes, l’apanage des plus grands.
Enfin, on perçoit de nettes réminiscences de L’Esprit folet dans le Don Juan de Molière. Si les intrigues et le propos de ces deux pièces sont radicalement différents, l’affrontement de Don Juan et Sganarelle fait écho à celui de Florestan et Carrille, de façon certes plus grave, car Don Juan est un véritable impie, tandis que Florestan ne fait montre que d’un certain bon sens. L’influence de d’Ouville se fait sentir très fortement dans certains passages comiques bien précis, comme celui des croyances de Don Juan (III, 1) qui rappelle la scène 8 de l’acte II de L’Esprit folet, vers 759 et suivants :
SGANARELLE.- Je veux savoir un peu vos pensées à fond. Est-il possible que vous ne croyiez pas du tout au Ciel ?
DON JUAN.- Laissons cela.
SGANARELLE.- C’est-à-dire que non. Et à l’Enfer ?
DON JUAN.- Eh !
SGANARELLE.- Tout de même. Et au diable, s’il vous plaît ?
DON JUAN.- Oui, oui.
SGANARELLE.- Aussi peu. Ne croyez vous point l’autre vie ?
DON JUAN.- Ah ! ah ! ah !
SGANARELLE.- Voilà un homme que j’aurai bien de la peine à convertir. Et dites-moi un peu, le Moine bourru, qu’en croyez-vous ? eh !
DON JUAN.- La peste soit du fat !
Il est intéressant de noter que la scène de d’Ouville est beaucoup plus drôle et plus enlevée que celle de Molière, probablement parce qu’elle ne sert pas les mêmes motifs : ici nous rions de la superstition du valet, là nous nous effrayons d’un impie qui ne croit ni à dieu, ni à diable. Outre cette scène, nombreuses sont les réminiscences de Molière dans Don Juan que nous avons signalées en notes de bas de page au cours de la pièce.
Notes sur la présente édition §
L’édition originale de l’Esprit folet porte le titre suivant :
L’ESPRIT / FOLET / COMEDIE. / PAR Monsieur D’OUVILLE. / A PARIS. / Chez TOUSSAINT QUINET, au Palais, en la gallerie /des Merciers, sous la montée de la Cour / des Aydes./ M. DC. XLII. / Avec Privilege du Roy.
(in-4°, 143p.) B.N. M-16837.
Deux autres éditions ont paru du vivant de d’Ouville. Ce sont :
L’ESPRIT / FOLET / COMEDIE / PAR Monsieur D’OUVILLE / A PARIS / Chez TOUSSAINCT QUINET, au / Palais, en la gallerie des Merciers, sous la montée de / la Cour des Aydes. / M.DC.XLIII. / Avec Privilege du Roy.
Cette édition nous a permis de corriger en grande partie les vers faux de la première édition, mais a la particularité de présenter une ponctuation particulièrement fautive.
L’ESPRIT / FOLET / COMEDIE / PAR Monsieur D’OUVILLE / sur l’imprimé / A PARIS. / Chez TOUSSAINT QUINET, au / Palais, sous la montée de / la cour des Aydes. / M.DC.XLVII.
Cette édition permet de corriger les derniers vers faux, tout en présentant une orthographe souvent différente (ainsi, au v.66 avancer à la place de advancer.)
Comme les variantes sont inexistantes (d’Ouville n’a apporté aucune modification à son texte), nous avons pris comme texte de base celui de l’édition originale de 1642, en signalant les variantes et les corrections intéressantes des éditions postérieures.
En règle générale, nous avons conservé l’orthographe et la ponctuation de l’édition originale, à quelques réserves près :
– Nous avons, conformément à l’usage moderne, distingué le u et le v, le i et le j.
– Nous avons résolu la ligature & en et.
– Nous avons supprimé le tilde (ainsi v.23 hoñeur est devenu honneur).
– Enfin, diverses corrections sur des fautes d’orthographe et de ponctuation, manifestement dues à des coquilles, ont été apportées :
v. 25 beaucop, 79 la deffendu, 223 damoiselle, comment., 236 vers, 332 la fait, 390 luy., 394 vie., 546 aperçoit., 572 portrait ?, 574 beau., 630 où, 668 sans-dessus dessous, 724 esprit., 799 surpris., 832 titons, 833 dents., 928 escrit,, 946 la veuë, 972 menace ;, 1075 toute pleine, 1132 qu’on,1197 Dame ?, 1198 exiter, ame,, 1227 cy devant,1274 fantaisie, 1283 hazard,, 1331 ou, 1341 que ce, 1342 amiable, 1393 femme est- il, 1424 occasion, 1440 pensois, 1479 qu’avons-no9, 1487 cerveau,, 1488 flambeau, 1504 enchantement,, 1509 songegeai-je, 1518 ont attend, 1520 esclairer, 1614 quelheur, 1697 Cousin, 1768 signalez, 1885 effrontee ?.
L’ESPRIT FOLET
COMEDIE. §
A MADAME 4
DE ********* §
Madame,
Si mon esprit estoit capable de mettre au jour des choses plus sérieuses, je ne vous dédierois point un ESPRIT FOLET, mais des ouvrages aussi excellens que le vostre est capable d’en produire. Tout ainsi que ce foible Esprit qui fait le bouffon de la piece (et qui à bon droit en peut estre nommé le Heros, puisque c’est luy qui fait la plus grande partie du sujet) croit estre enchanté par les choses estonnantes qui se presentent à ses yeux, il n’y a personne qui ne croye l’estre en contemplant les merveilles de vostre visage, que je nomme à bon droit l’Abregé des merveilles de ce siècle.Quoy que vostre modestie m’aye defendu de mettre vostre nom au frontispice de ce Livre, ce titre que je vous donn vous doit faire assez cognoistre de ceux qui ont eu l’honneur de vous avoir veuë, je parle mesme de celle de vostre sexe ; parmy lesquelles, quoy que le monstre d’envie regne tres absolument, il faut pour ce coup qu’il meure, puis que pas une ne vous peut disputer cette qualité, sans perdre avec la veuë la raison et le jugement. Par mon autre piece, qui est toute preste d’esclorre, et qui ne paroistra point en public que sous vostre nom, si vous me le permettez, comme je vous en conjure, on verra que si je fais passer cet ESPRIT FOLET sous vostre protection, ce n’est à autre dessein que pour vous prier d’agreer les sumissions d’une personne autant indigne de vous les rendre, que ce Livre l’est de porter en teste vostre nom, que je revere de sorte, que la principale de mes ambitions est de meriter par mes services la qualité,
MADAME, de
Vostre tres-humble et tres-obeïssant serviteur,
D’OUVILLE.
A MONSIEUR D’OUVILLE,
SUR SA COMEDIE DE
L’ESPRIT FOLET.
SONNET. §
GUILLEMOT5
PRIVILEGE DU ROY §
LOUIS par la grace de Dieu Roy de France et de Navarre, A nos amez et feaux Conseillers les Gens tenans nos Cours de Parlemens, Maistres des Requestes ordinaires de nostre Hostel, Baillifs, Seneschaux, Prevosts, leurs Lieutenans, et à tous autres de nos Justiciers et officiers qu’il appartiendra, Salut. Nostre cher et bien amé TOUSSAINT QUINET, Marchand Libraire de nostre bonne ville de Paris, Nous a fait remonstrer qu’il desiroit faire imprimer une Comedie intitulée L’esprit Folet. Ce qu’il ne peut faire sans avoir sur ce nos Lettres, humblement nous requerant icelles : A CES CAUSES, desirant traitter favorablement le dit Exposant, nous luy avons permis et permettons par ces presentes, de faire imprimer, vendre et debiter en tous lieux de nostre obeissance ladite Comedie en telles marges et tels caracteres, et autant de fois que bon luy semblera durant l’espace de cinq ans entiers et accomplis, à compter du jour qu’elle sera achevée d’imprimer pour la premiere fois. Et faisons tres-expresses deffences à toutes personnes, de quelque qualité et condition qu’elles soient, de l’imprimer, faire imprimer, vendre ne debiter durant ledit temps en aucun lieu de nostre obeissance sans le consentement de l’Exposant, sous pretexte d’augmentation, correction, changement de titre, fausse marque, ou autre, en quelque sorte et maniere que ce soit,à peine de trois millivresd’amende, payables sans deport, nonobstant depositions ou appellations quelconques par chacun des contrevenans, applicables un tiers à Nous, un tiers à l’Hostel-Dieu de nostre bonne ville de Paris, et l’autre tiers au dit Exposant, confiscation des exemplaires contrefaits, et de tous despens, dommages et interests : A condition qu’il sera mis deux exemplaires en blanc de ladite Comedie en nostre Bibliotheque, et un en celle de nostre cher et feal le sieur Seguier, Chevalier, Chancelier de France, avant que de les exposer en vente, à peine de nullité des presentes, du contenu desquelles nous vous mandons que vous fassiez joüir et user pleinement et paisiblement ledit Exposant, et tous ceux qui auront droict de luy, sans qu’il leur soit donné aucun trouble ny empeschement. Voulons aussi qu’en mettant au commencement ou à la fin de ladite Comedie un extraict des presentes elles soient tenuës pour deuëment signifiées, et que foy y soit ajoutées, et aux coppies d’icelles collationnées par l’un de nos amez et feaux Conseillers et Secretaires comme à l’original. Mandons au premier nostre huissier ou Sergent sur ce requis, de faire pour l’execution des presentes tous exploicts necessaires sans demander autre permission : Car tel est nostre plaisir. Nonobstant Clameur de Haro, Chartre Normande, et autres lettres à ce contraires. Donné à Paris le vingt-troisiesme jour de Decembre l’an de grace 1641. Et de nostre resgne le trentiesme. Signé, Par le Poy en son Conseil, DE MONCEAUX.
Achevé d’imprimer pour la premiere fois le dernier jour de janvier 1642.
Les exemplaires ont esté fournis.
ACTEURS §
- FLORESTAN, Gentil-homme de Languedoc.
- CARRILLE, serviteur bouffon de Florestan.
- ANGELIQUE, Damoiselle Parisienne Amoureuse de Florestan.
- ISABELLE, suivante d’Angelique.
- LICIDAS,
- LIZANDRE6, Gentils-hommes Parisiens, freres d’Angelique.
- ARISTE7, serviteur de Licidas.
- LUCINDE, Damoiselle Parisienne, cousine d’Angelique.
ACTE I §
Scene première §
Florestan
carrille
florestan
Scene II §
Angelique
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Scene III §
Licidas
Carrille (lui monstrant une lettre.)
Licidas (le repoussant rudement.)
Florestan
Licidas
Florestan
Licidas
C’est trop s’en faireCarrille
Scene IV §
Lizandre
Licidas
Mon frere en voulant m’Florestan
Licidas
Lizandre
Florestan
Lizandre
Licidas
Florestan
Lizandre
Florestan
Licidas
Florestan
Lizandre
Florestan
Licidas
Florestan
Lizandre
Florestan (bas)
[p. 11]Licidas (bas)
carrille (bas)
Scene V §
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
Scene VI §
Licidas
Angelique
Licidas
Isabelle (bas)
Angelique(bas)
Angelique
Licidas
Angelique
Licidas
Angelique (bas)
Licidas
Licidas
Angelique
Licidas
Angelique
Licidas (la soustenant)
Angelique (bas)
Licidas
Angelique
Licidas
Angelique
Licidas
Angelique
Licidas
[p. 23]Angelique
Licidas
Angelique
Licidas
Scene VII §
Isabelle
Angélique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
[p. 28]Angelique
Fin du premier Acte.
ACTE II §
Scene première §
Lizandre
Florestan
Lizandre
Florestan
Lizandre
Scene II §
Licidas (mettant son espée aux pieds de Florestan)
Florestan
Puis-je sansLicidas
Lizandre
Scene III §
Carrille (avec deux valises sur les espaules)
Licidas
Florestan
Lizandre
Florestan
Carrille
Licidas
Carrille
Florestan (bas)
Carrille
Lizandre (luy baillant une clef)
Florestan
Lizandre
[p. 35]Florestan
Lizandre
Florestan
Carrille
Scene IV §
Carrille (seul)
Scene V §
Isabelle (dans sa chambre)
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle (ressortant)
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
Isabelle
Angelique
[p. 44]Isabelle
Angelique
Scene VI §
Carrille (seul)
Scene VII §
Licidas
Carrille
Florestan
Carrille
Lizandre
Carrille
Carrille
Lizandre
Carrille
Florestan
Licidas
Carrille
Licidas
Florestan
Carrille
Lizandre
Licidas (en s’en allant)
Scene VIII §
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Lettre73
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
[p. 55]Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille, (à par soy en ramassant les hardes.)
Ariste
Florestan
Carrille
Fin du second Acte.
ACTE III §
Scene première §
Lucinde
Lucinde
Angelique
Isabelle
Angelique
Lucinde
Lucinde
Angelique
Isabelle
Lucinde
Angelique
Lettre83
Angelique
Lucinde
Angelique
Lucinde
Angelique
Lucinde
Angelique
Lucinde
Angelique
Lucinde
Angelique
Lucinde
Angelique
Lucinde
Angelique
Lucinde
Angelique
[p. 68]Lucinde
Angelique
Lucinde
Lucinde
Isabelle
Angelique
Lucinde
Scene II §
Lizandre
Florestan
Lizandre
Florestan
Laissez-m’en leLicidas
Scene III §
Florestan
Carille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
[p. 72]Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille (en s’en allant)
Scene IV §
Isabelle
Scene V §
Carrille, (seul avec de la chandelle.)
Isabelle (bas)
Carrille
[p. 75]Isabelle (bas qui va derriere luy.)
Carrille
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Ah ! cétFlorestan
Carrille
Isabelle (bas)
Florestan
Carrille
Isabelle (bas)
Florestan
Isabelle (bas)
Florestan
Carrille, (r’entre avec de la chandelle.)
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Florestan
Carrille
Florestan
Lettre110
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille (en habillant son maistre.)
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Scene VI §
Isabelle
Angelique
[p. 84]Isabelle
Lucinde
Angelique
Lucinde
Angelique
[p. 85]Lucinde
Angelique (à Isabelle.)
Fin du troisiesme Acte.
ACTE IV §
Scene première §
Angelique
Lucinde
Scene II §
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Angelique
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Scene III §
[Angélique]
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
[p. 92]Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Florestan
[p. 93]Angelique (surprise, bas.)
Carrille
Florestan
angelique (bas.)
Il faut dissimuler.Carrille
Florestan
Carrille
Angelique
Carrille
Florestan
Angelique (à genoux.)
Angelique
Florestan
Carrille
Florestan
Angelique
Scene IV §
Florestan
Carrille
Florestan
Je perds icy leCarrille
Florestan
Carrille
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Carrille
Carrille
Florestan
Lettre
Carrille
Lettre
Carrille
Carrille
Carrille
Carrille
Carrille
Lettre
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Carrille
Scene V §
Lucinde
Angelique
Lucinde
Angelique
Lucinde
« L’estrange stratageme. »Angelique
Lucinde
Angelique
ACTE V §
Scene première §
Isabelle
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Scene II §
Carrille
Florestan
Carrille
Angelique (à Florestan.)
Florestan
Angelique
Florestan
Angelique
Carrille
Isabelle (à Lucinde.)
Lucinde (appellant Carrille.)
Carrille
Isabelle
Carrille
Lucinde
Isabelle
Carrille
Isabelle
Carrille
Isabelle
Carrille
Isabelle
Carrille
Isabelle
Carrille
Isabelle
Carrille
Lucinde
Carrille
Florestan
Angelique
Florestan
Angelique
Florestan
Angelique
Florestan
Angelique
Florestan
Angelique
Florestan
Angelique
Lucinde
Scene III §
Angelique
Licidas (derriere le theatre.)
Angelique (bas à Lucinde.)
Lucinde
Angelique (bas à Lucinde.)
Carrille
Licidas (dedans.)
Angelique
Isabelle
Florestan
Carrille
Florestan, (s’en allant.)
Carrille, (s’en allant.)
Licidas entre.
Angelique
Licidas
Angelique
Licidas
Angelique
Licidas
Angelique
Licidas
Carrille (dedans.)
Licidas
[p. 125]Lucinde
Licidas
Angelique
Licidas
Angelique
Licidas
Angelique
Angelique
Lucinde
Scene IV §
Florestan
Carrille
Florestan
[p. 127]Carrille
Florestan
Carrille
Licidas (derriere le theatre à Isabelle.)
Isabelle (derriere le theatre.)
Licidas
Carrille
Licidas (derriere.)
Isabelle
Carrille
Licidas (derriere.)
Carrille
Florestan
Scene V §
Licidas
Florestan
Licidas
Florestan
Licidas
Florestan
Licidas
[p. 131]Florestan
Licidas
Florestan
Licidas
Florestan
Licidas
Florestan
[p. 133]Licidas
Florestan (bas.)
Carrille (sortant d’où il estoit caché.)
Scene VI §
Angelique
Isabelle
Angelique
Lucinde
Angelique
Angelique
Lucinde
Scene VII et derniere §
Lizandre
Angelique
[p. 136]Licidas
Lizandre
Angelique
Licidas
Florestan
[p. 139]Licidas
Florestan
Licidas
Lizandre
Licidas
Florestan (à Angelique.)
Angelique (à Florestan.)
Lizandre
Florestan (à Licidas.)
Carrille sort.
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Florestan
Carrille
Fin de la Comedie de L’Esprit Folet.
Lexique §
Bibliographie §
L’oubli dans lequel est tombé d’Ouville ainsi que ses pièces explique clairement l’absence de grandes études menées à leur sujet. Dans l’état actuel des recherches, l’essentiel des informations nous a été fourni par les articles de différentes revues.
Sur la comédie en France au milieu du XVIIe siècle §
LANCASTER Henry Carrington, A History of French Dramatic Literature in the Seventeenth Century, Part II, The Period of Corneille (1632-1651), Baltimore, The John Hopkins Press, 1932-1936.SCHERER Jacques, La Dramaturgie classique, Paris, A.G. Nizet, 1950.GUICHEMERRE Roger, La Comédie avant Molière (1640-1660), Paris, A. Colin, 1972.FORESTIER Georges, Esthétique de l’identité dans le théâtre français : 1550-1680, le déguisement et ses avatars, Genève, Droz, 1988.
Sur la vie d’Antoine le Métel, sieur d’Ouville §
WILSON COKE James, « Antoine Le Métel, sieur d’Ouville, his life and his theater », Dissertation Abstracts, n° 19, 1969, p. 2344DE ARMAS Frederick, « Antoine Le Métel, sieur d’Ouville, the « lost » years », Romance Notes, n° 14, 1973, p. 72-73.
Sur les rapports entre Comedia et Comédie à l’espagnole §
CIORANESCU Alexandre, Le Masque et le visage, du baroque espagnol au classicisme français, Genève, Droz, 1983.HELARD-COSNIER Colette, « « La scène est à Paris »… de Calderon à Antoine Le Métel d’Ouville », in Deux siècles de relations hispano-françaises, de Commynes à Madame d’Aulnoy, 1987, p. 151-161.GUICHEMERRE Roger, « La francisation de la Comedia espagnole chez d’Ouville et Scarron », in L’Age d’or de l’influence espagnole, colloque publié par Charles Mazouer, Mont-de-Marsan, Éditions inter-universitaires, 1991, p. 255-268.
Sur la représentation et le décor §
DEIERKAUF-HOLSBOER Sophie Wilma, Le Théâtre de l’hôtel de Bourgogne, Paris, Nizet, 1968-1970.LANCASTER Henry Carrington, Le Mémoire de Mahelot, Laurent et autres décorateurs de l’hôtel de Bourgogne et de la comédie française au XVIIe siècle, Paris, 1920.
Sur l’influence de d’Ouville §
BOURQUI Claude, Les Sources de Molière, Paris, Sédès, 1999.GUICHEMERRE Roger, « Une source peu connue de Molière : le théâtre de Le Métel d’Ouville », Revue d’histoire littéraire de la France, 1965, p. 92-102.
Sur la langue §
FURETIERE, Dictionnaire universel, La Haye, Arnout, 1690, 3 vol.ACADEMIE FRANCAISE, Dictionnaire de l’Académie françoise, Paris, Coignard, 1694, 2 vol.RICHELET Pierre, Dictionnaire françois…, Genève, J.-H. Widerhold, 1680, 2 vol.HAASE Albert, Syntaxe du XVIIe siècle, Munchen, Huber Ulg, 1964.SANCIER-CHATEAU Anne, Introduction à la langue du XVIIe siècle, Paris, Nathan, 1993.