**** *creator_brueyspalaprat *book_brueyspalaprat_avocatpatelin *style_prose *genre_comedy *dist1_brueyspalaprat_prose_comedy_avocatpatelin *dist2_brueyspalaprat_prose_comedy *id_MADAMEPATELIN *date_1706 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_madamepatelin Je te chasserai, et tu ne te marieras point avec Agnelet ton fiancé, si tu ne me dis la chose comme elle est. Mais où prend Valère de quoi faire ses présents ? Son père est un riche brutal qui ne lui donne rien. Mais, que ne fait-il demander ma fille en mariage ? J'entends quelqu'un ; retire-toi. Ah ! Te voilà ? Comme te voilà vêtu ! C'est que tu es un gueux, et je viens d'apprendre que ta gueuserie rebute tous les partis qui se présentent pour notre fille. Toi proprement ! Et avec quoi ? Et où allez-vous, s'il vous plaît ? Sans avoir un sol, acheter un habit ! Eh ! Prends-le comme tu pourras, si tu trouves quelqu'un assez sot pour te le donner. Je vais parler à Henriette ; je viens d'apprendre de certaines choses qui ne me plaisent guère. Oui ; mais avec quoi le payer ? Tu as promis à demain matin ; ce Monsieur Guillaume est un arabe qui viendra ici faire le diable à quatre. Il faut, malgré moi, que j'aide à t'en sortir ; mais tu devais rougir de honte de ce que tu m'as proposé de faire, et ce n'est point du tout agir en honnête homme. Allons ; mais je crains que demain matin il n'arrive ici quelque désordre. Ah ! C'est vous, Monsieur Guillaume ? A vous servir. Pardon, Monsieur ; je n'ose parler haut. Parlez plus bas, Monsieur, s'il vous plaît. Encore plus bas, je vous prie. Hélas ! Le pauvre homme ! Il est bien en état d'être vu ! Depuis hier ! Hélas ! Monsieur Guillaume, il y a huit jours qu'il n'a bougé du lit. Lui, chez vous ? Ah Monsieur ! Il faut sans doute que cette nuit vous ayez rêvé cela. Six aunes de drap ! Que vous prenez mal votre temps pour rire ! Hélas ! Le pauvre homme ! Plût au ciel qu'il fût en état de l'avoir fait ! Ah ! Monsieur Guillaume, il eut tout hier un transport au cerveau qui le jeta dans la rêverie où je crois qu'il est encore. Oh ! Pour cela, en l'état qu'il est, il n'est pas possible. Nous l'avons mis là sur un fauteuil auprès de la porte pour faire son lit ; si vous le voyiez, il vous ferait pitié. Ah ! N'ouvrez pas cette porte, vous allez tuer mon mari ; il lui prend de temps en temps des envies de courir. Ah ! Le voilà parti, je vous l'avais bien dit ; aidez-moi à le reprendre. Mon pauvre mari ! Repose-toi là. Haye ! Haye ! La tête. Ah ! Bonjour, monsieur Anodin. Il vous prend pour l'Apothicaire ; allez-vous-en. Eh, ne voyez-vous pas qu'il rêve ? Allez-vous-en. Il rêve, vous dis-je ; allez-vous-en ; sortez, je vous prie. Eh ! Monsieur, laissez en repos ce pauvre homme. Eh ! Monsieur, si vous lui parlez d'affaires, vous l'allez tuer. Bon, le voilà parti, je me retire ; mais demeure encore là un moment, en cas qu'il revient. **** *creator_brueyspalaprat *book_brueyspalaprat_avocatpatelin *style_prose *genre_comedy *dist1_brueyspalaprat_prose_comedy_avocatpatelin *dist2_brueyspalaprat_prose_comedy *id_HENRIETTE *date_1706 *sexe_masculin *age_jeune *statut_exterieur *fonction_autres *role_henriette Laissez-moi, Valère, mon père et ma mère me suivent ; nous allons souper chez ma tante ; ils m'ont dit de m'avancer : retirez-vous. Non, Valère, je tremble. Vous êtes la personne du monde que je crains le plus, et vous savez pourquoi..... Ne me quittez pas, Colette. Si vous m'aimez, Valère, ne songez à moi je vous prie, que lorsque vous serez assuré du consentement de Monsieur votre père. Voici mon père ; Fuyons tous. Monsieur, je suis fâchée... **** *creator_brueyspalaprat *book_brueyspalaprat_avocatpatelin *style_prose *genre_comedy *dist1_brueyspalaprat_prose_comedy_avocatpatelin *dist2_brueyspalaprat_prose_comedy *id_MONSIEURGUILLAUME *date_1706 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_monsieurguillaume On commence à ne voir guère clair dans la boutique ; exposons ceci un peu plus à la vue des passants... Oh ! Ça, Valère, je t'avais dit de me chercher un berger pour garder le troupeau dont la laine sert à faire mes draps. Non, car il me vole, et je te soupçonne d'y avoir part. Oui, toi. J'ai su que tu es amoureux de je ne sais quelle fille d'ici près, et que tu lui sais des présents, et je sais que cet Agnelet a fiancé une certaine Colette qui sert : tout cela fait que je soupçonne.... Oui, toi, mais non pas moi ; car depuis un mois qu'il a quitté le Fermier avec qui il demeurait, pour entrer à mon service, il me manque six vingt moutons, et il n'est pas possible qu'en si peu de temps il en soit mort, comme il le dit, un si grand nombre de la clavelée. Oui, avec des médecins ; mais les moutons n'en ont pas. D'ailleurs, cet Agnelet fait le nigaud ; mais c'est un fin niais et le plus rusé coquin... Enfin je l'ai pris sur le fait, tuant de nuit un mouton ; je l'ai battu, et l'ai fait ajourner devant Monsieur le Juge ; cependant, avant de pousser plus loin l'affaire, j'ai voulu savoir si tu n'avais point de part au vol qu'il m'a fait. Je vais donc le poursuivre en justice ; mais je veux examiner un peu mieux la chose. Donne-moi mon livre de compte. Approche cette chaise. C'est assez, laisse-moi. Si un Sergent que j'ai envoyé quérir me demande, fais-moi appeler. Je resterai encore un peu ici, en cas que quelque acheteur se présente. Compte du troupeau, et coetera ; six cents bêtes, et coetera. Est-ce le Sergent que j'ai envoyé quérir ? Qu'il attende. Une robe ! Le Procureur donc ?... Serviteur. Je n'ai pas besoin d'avocat. Je suis votre serviteur. Je ne vous connais pas, Monsieur. Ce ne sont pas mes affaires ; je ne dois rien. Me payer ! Attendez, Monsieur, s'il vous plaît : je me remets un peu votre nom. Oui ; je connais depuis longtemps votre famille ; vous demeuriez à un village ici près. Nous nous sommes connus autrefois. Je vous demande excuse. Je suis votre très humble et très obéissant serviteur : asseyez-vous là. Monsieur ? C'est pourtant ce qu'aujourd'hui beaucoup de gens savent sort bien faire. Tout-à-l'heure. Cela est juste. Eh bien, demain matin à cinq heures. Point du tout : je ne suis que trop de loisir ; on ne vend rien. C'est que je travaille beaucoup. Fort beau. Oh ! Monsieur...... Ho, ho ! Monsieur ! Oh ! Point, Monsieur. Je le crois ; c'est couleur de marron. Oui, oui, avec mon teinturier. Ah ! Ah ! Ah ! C'est pure laine d'Angleterre. Chez Monsieur Nicodème ? Je l'ai oui dire à ma mère. 7A dix-huit ans je savais lire et écrire. Comme un autre. Je vous le garderai. Ne laissez pas de racheter votre rente, vous aurez de mon drap. Je me porte bien. Il vous en faudra.... Vous voulez, sans doute, l'habit complet ? Pour tout cela il vous en faudra... Oui... Six aunes... Voulez-vous que je les coupe en attendant ? Elle est fort bonne. Voici un homme très exact. Le jour qu'on fit la Fête du village ? Vous vous en souvenez ? Je vois les choses de loin. Voyons. Un autre en payerait, ma foi, six écus ; mais allons, je vous le baillerai à vous à cinq. Trente écus. Une oie ! Je les aime fort. Si vous ne donnez le temps au tailleur, il vous le gâtera. Faites mieux ; vous avez, dites-vous, l'argent tout prêt ? Je vais vous le faire porter chez vous par un de mes garçons : il me souvient qu'il y en a de coupé justement ce qu'il vous en faut. Attendez ; il faut auparavant que je l'aune en votre présence. Donnez, donnez, je vais vous le faire porter, et vous m'enverrez par le retour... Laissez-moi vous donner un garçon qui me rapportera l'argent. Mais, Monsieur, je vais toujours vous donner un garçon pour me... Serviteur, Monsieur, serviteur.... Il s'en va parbleu avec mon drap ; mais il n'y a pas loin d'ici à cinq heures du matin ; je dîne demain chez lui, et il me payera, il me payera. Voilà, parbleu, un des plus honnêtes et des plus consciencieux avocats que j'aie vu de ma vie. J'ai quelque regret de lui avoir vendu ce drap un peu trop cher, puisqu'il veut bien me payer trois cents écus sur lesquels je ne comptais point. Car je ne sais d'où diable peut venir cette dette. À la bonne heure...... Oh ça ! Il s'en va nuit, et voilà, je pense, tout ce que je gagnerai d'aujourd'hui..... Holà ! Holà ! Qu'on enferme tout cela dedans....... Mais voici, je crois, ce coquin d'Agnelet qui m'a volé mes moutons. Ah, ah ! voleur ! Je puis bien faire ici de bonnes affaires ! Ce scélérat m'emporte tout le profit. Tu oses encore te présenter devant moi ? Tu fais le benêt. Mais je t'assure que tu ne tueras jamais plus mouton : qu'il t'en souvienne. Les médisants ? Coquin ! Ne t'ai-je pas trouvé de nuit tuant un mouton ? Le tuer pour l'empêcher de mourir ? Qu'ils mourriont ? Le traître ! Des moutons dont la laine me fait des draps d'Angleterre, que je vends cinq écus l'aune. Ôte-toi d'ici, scélérat ! Six vingts moutons en un mois. Nous verrons cela demain devant Monsieur le Juge. Mon plaisir est de te faire pendre, entends-tu ? Il est du devoir d'un homme bien réglé de récapituler le matin ce qu'il s'est proposé de faire dans sa journée. Voyons un peu. Premièrement, je dois recevoir à cinq heures trois cents écus de Monsieur Patelin, pour une dette de feu son père : plus, trente écus pour six aunes de drap qu'il prit hier ici : Item, une Oie à dîner chez lui, apprêtée de la main de sa femme : après cela, comparaître à l'ajournement devant le juge, contre Agnelet, pour les six-vingts moutons qu'il m'a volés. Je pense que voilà tout : mais ouais ! il y a longtemps que l'heure est passée, et je ne vois point venir mon homme. Allons le trouver.... Non, un homme si exact ne manquera pas de parole... Cependant il a mon drap, et je n'ai point de ses nouvelles : que faire ?... Faisons semblant de lui aller rendre visite, et sachons un peu de quoi il est question. Je crois qu'il compte mon argent... Je sens qu'on apprête l'Oie... Frappons. C'est lui-même. L'Apothicaire ! L'émétique.... C'est quelqu'un qui est mal chez lui, et je puis n'avoir pas bien reconnu sa voix à travers la porte : frappons encore plus fort. Oui, c'est moi. Vous êtes sans doute Madame Patelin ? Oh ! Parlez comme il vous plaira ; je viens voir Monsieur Patelin. Et pourquoi bas ? Je viens, vous dis-je, lui rendre visite. Si bas qu'il vous plaira ; mais il faut que je le voie. Comment ? Que lui serait-il arrivé depuis hier ? Du lit ? Il vint pourtant hier chez moi. Lui, chez moi : et il était même fort gaillard et fort dispos. Ah ! Parbleu, ceci n'est pas mauvais : rêvé ! Et mes six aunes de drap qu'il emporta, l'ai-je rêvé ? Oui, six aunes de drap couleur de marron. Et l'oie que nous devons manger à dîner ? Eh ! L'ai-je rêvé aussi ? Pour rire ! Ventrebleu, je ne ris point, et n'en ai nulle envie. Je vous soutiens qu'il emporta hier sous sa robe six aunes de drap. Oh ! Par la tête bleue, vous rêvez vous-même, et je veux absolument lui parler. Bon, bon, pitié ! En quelque état qu'il soit, je prétends le voir, ou.... En effet, voilà un homme en piteux état : il me semble pourtant que c'est le même d'hier, ou peu s'en faut... Voyons de plus près.... Monsieur Patelin, je suis votre serviteur. Monsieur Anodin ? Je n'en ferai rien.... Monsieur, vous vous souvenez bien qu'hier... Bon, il s'en souvient. Je n'ai que faire d'urine. Bon, bon, urétaires, Monsieur ! Je veux être payé. Pa, pa, pa ; voilà me payer en bonne monnaie. Bagatelles...... Voulez-vous me compter de l'argent ? Je veux être payé. Je voudrais qu'elles t'eussent fait rendre mon drap. Je n'en vois point. Tarare ! Je veux de l'argent. Il ne rêve pas à présent ; il faut que je lui parle. Monsieur Patelin ? Pour Homère ? Calypso ! Quel diable est-ce ceci ? À d'autres ! Oh ça, quand vous aurez assez rêvé, me payerez-vous au moins mes trente écus ? Ouais ! Aurais-je pris quelque autre pour lui ? Attendez ; il aura peut-être quelque intervalle. Il me regarde comme s'il voulait me parler. Oh ! Il me reconnaît : eh bien ? Vous voyez qu'il s'en souvient. Morbleu ! Ce n'est pas là mon compte. Cependant hier..... Ventrebleu ! Celui-là aura eu mon drap. Un Procureur ? Je ne le verrai de ma vie...... Mais c'est une invention, et nul autre que vous n'a eu mon drap ; à telles enseignes..... À la bonne heure.... À telles enseignes, que feu votre père devait au mien trois cents écus. Ventrebleu ! Je ne m'en irai pas d'ici sans mon drap ou sans argent. Oh ! Je n'en puis plus ; mais je veux de l'argent. Tudieu ! Il ne fait pas bon ici...... Morbleu ! Tout le monde me vole ; l'un mon drap, l'autre mes moutons : mais en attendant que je tire raison de celui-ci, allons songer à faire pendre l'autre. Je viens plaider moi-même mon affaire. Ouais ! Quel homme est-ce là ? Je n'ai pas besoin d'avocat... Il a quelque chose de son air. Vous saurez, Monsieur, que ce maraud-là. Eh bien ! Que ce voleur.... Tant y a, vous dis-je, Monsieur, que ce scélérat de Berger m'a volé six-vingts moutons. Parbleu, cet avocat ressemble un peu à celui de mes six aunes de drap. Quelle preuve ? Je lui vendis hier.... Je lui ai baillé en garde six aunes...... Six cents moutons, et je n'en trouve à mon troupeau que quatre cent quatre-vingt. Ma foi, si je ne venais de voir l'autre dans la rêverie, je croirais que voilà mon homme. Je le prouve par mon drap.... Je veux dire par mon livre de compte. Que sont devenues les six aunes.... Les six-vingts moutons qui manquent à mon troupeau ? Têtebleu ! Je crois que c'est lui-même. Je réponds, sauf votre respect, que cela est faux ; qu'il emporta sous... qu'il les a tués pour les vendre ; qu'hier moi-même.... Oh ! C'est lui.... Oui, je lui vendis six... Je le trouvai sur le fait, tuant de nuit un mouton. Parbleu ! Monsieur le Juge, il n'est rien de plus véritable, c'est lui-même : oui, il emporta hier de chez moi six aunes de drap, et ce matin, au lieu de me payer trente écus..... Il est vrai, Monsieur, c'est une autre affaire ; mais nous viendrons après. Je ne me trompe pourtant point ! Vous saurez donc que je m'étais caché dans la bergerie... Oh ! C'est lui, très assurément... Je m'étais donc caché dans la bergerie ; je vis venir ce drôle ; il s'assit là ; il prit un gros mouton... et... et avec de belles paroles, il fit si bien, qu'il m'emporta six aunes..... Non, de drap ; lui, maugrebleu de l'homme ! J'y reviens. Ce drôle donc ayant tiré de sa poche son couteau.... je veux dire mon drap... non, je dis bien, son couteau... Il... il... il le mit comme ceci sous sa robe, et l'emporta chez lui, et ce matin, au lieu de me payer mes trente écus, il me nie drap et argent. Je le sais fort bien, Monsieur ; il m'a volé six-vingts moutons ; et ce matin, au lieu de me payer trente écus pour six aunes de drap de couleur marron, il m'a payé de papillons noirs, la nymphe Calipot, tralala, ma commère quand je danse. Que diable sais-je encore ce qu'il est allé chercher ? Il ment : il s'appelle Agnelet. Moi, tort ! L'un me vole mon drap, l'autre mes moutons ; l'un me paye de chansons, l'autre de bée, et encore morbleu, j'aurai tort ! Oh, ventrebleu ! Il était nuit ; et quand je frappe, je frappe partout. Oh ! Va, va, confitearum, tu me payeras mes six aunes de drap, ou le diable t'emportera. J'en appelle... et pour vous, Monsieur le fourbe, nous nous reverrons. Oui, ce coquin d'Agnelet dit qu'il est mort. Peste soit de moi. Il ne tient qu'à moi ? Serviteur donc. Belle proposition ! Je n'aime ni l'un ni l'autre. Je l'ai battu ; s'il est mort, c'est sa faute. Oui, et gueuse comme lui. Et que m'importe ? Je n'y consens point. En prison, maugrebleu !.... Laissez-moi au moins allez dire chez moi qu'on ne m'attende point. Que de Patelineurs ! Oui. Je n'en veux rien faire. Les fers aux pieds ! Tubieu, comme vous y allez ! Donner la question ! Pendre ? Miséricorde ! Juste ciel ! Que me faut-il faire ? Oui, j'ai fait aujourd'hui de belles affaires ! Ne vous coûte guère. Va-t'en au diable. Et moi aussi. Les moutons qu'il m'a volés. Ah, traître ! Tu n'es pas mort ? Il saut que je t'étrangle ; il ne m'en coûtera pas davantage. Allons, puisqu'il n'est pas mort, rendez-moi ce contrat que je le déchire. Dix mille écus ! Il faut bien par force que je laisse la chose comme elle est ; mais vous me payerez les trois cents écus de votre père ? Son billet !.... Et mes six aunes de drap ? De noces ! Au moins je tâterai de l'oie. À dîner ! Oh ! Ce scélérat payera pour tous et sera pendu. Me voilà bien payé de mon drap et de mes moutons. **** *creator_brueyspalaprat *book_brueyspalaprat_avocatpatelin *style_prose *genre_comedy *dist1_brueyspalaprat_prose_comedy_avocatpatelin *dist2_brueyspalaprat_prose_comedy *id_VALERE *date_1706 *sexe_masculin *age_jeune *statut_exterieur *fonction_autres *role_valere Est-ce, mon père, que vous n'êtes pas content d'Agnelet ? Moi ? Qui diantre nous a découverts ?... Je vous assure, mon père, qu'Agnelet nous sert très fidèlement. Les maladies font quelquefois de grands ravages. Ah, mon père ! J'ai trop de respect pour vos moutons. Tu me priverais du plaisir de la voir. Belle Henriette, souffrez, je vous prie... Craignez-vous une personne qui vous adore ? Quoiqu'il arrive, je te garantirai de tout. Mon père, je vous proteste.... Mon père, il est temps de l'avouer, tout ceci ne s'est fait que par mon ordre. **** *creator_brueyspalaprat *book_brueyspalaprat_avocatpatelin *style_prose *genre_comedy *dist1_brueyspalaprat_prose_comedy_avocatpatelin *dist2_brueyspalaprat_prose_comedy *id_COLETTE *date_1706 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_colette Peste ! Madame, il faut vous le dire. Valère, le fils unique de Monsieur Guillaume, ce riche Marchand Drapier qui demeure là, est amoureux de Mademoiselle Henriette, et il lui fait des présents de temps en temps. Oh ! Madame, quand les pères ne donnent rien aux enfants, les enfants les volent ; cela est dans l'ordre, et Valère fait comme les autres ; c'est la règle. Il l'aurait fait aussi ; mais il craint que son père n'y veuille pas consentir, à cause, ne vous déplaise, que notre Monsieur va toujours mal vêtu. Cela fait mal juger de ses affaires. C'est cet invalide qui me tire par le bras. C'est à quoi Agnelet et moi nous avons fait dessein de nous employer. Tu as besoin d'un avocat subtil et rusé, qui invente quelque fourberie pour te tirer d'affaire, et il n'y a dans tout le village que Monsieur Patelin qui en soit capable. Il ne s'en souviendra peut-être pas ; au moins ne lui dis pas que tu sers Monsieur Guillaume ; il ne voudrait peut-être pas plaider contre lui. Voilà ton avocat. Adieu. Eh ! Laissez-le aller, Monsieur ; il s'agit de bien autre chose ! Les coups qu'il fait semblant d'avoir à la tête, nous ont fait aviser d'un moyen sûr pour faire consentir Monsieur Guillaume au mariage de son fils avec votre fille : ne serez-vous pas bien payé ? Agnelet a dit aux juges qu'il s'allait faire trépaner ; il est mort dans l'opération, et c'est monsieur Guillaume qui l'a tué. Secondez-nous bien seulement..... Je vais demander justice à monsieur le Juge. Hi, hi, hi ! Il était mon fiancé, é, é, é. Je ne le pleurerais pas tant, s'il avait été mon mari, i, i, i. Laissez-le aller ; mon oncle est d'intelligence avec nous, et Agnelet a ajusté dans le lit une certaine tête qui le fera fuir bien vite. Il s'est allé cacher dans le grenier à foin d'un de nos voisins, d'où il ne sortira que quand le mariage sera tout-à-fait conclu. Ha, ha, ha ! Hélas, Monsieur ! Je ne suis ni intéressée ni vindicative ; et s'il y avait quelque expédient honnête...... Vous savez combien j'aime ma maîtresse votre fille, qui est filleule de Monsieur. Valère, Monsieur, le fils unique de ce Monsieur Guillaume, en est amoureux ; son père refuse d'y consentir ; vous êtes si habile l'un et l'autre ; voyez s'il n'y aurait pas là quelque expédient, afin que tout le monde fût content. Que cela est bien imaginé ! Que me donnerez-vous à la place de mon fiancé ? **** *creator_brueyspalaprat *book_brueyspalaprat_avocatpatelin *style_prose *genre_comedy *dist1_brueyspalaprat_prose_comedy_avocatpatelin *dist2_brueyspalaprat_prose_comedy *id_AGNELET *date_1706 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_agnelet Bon vêpre, Monsieur, et bonne nuit. Ce ne vous déplaise, mon bon maître, qu'un Monsieur m'a baillé certain papier qui parle, dit-on, de moutons, du juge et d'ajournerie. Eh ! Mon doux maître, ne croyez pas les médisants. Par cette âme ! C'était pour l'empêcher de mourir. Oui, de la gravelée, à cause, ne vous déplaise, que quand ils mourriont de vilain mal, il faut les jeter, et on les tue avant qu'ils mourriont. Ils gâterions les autres par ma foi. Eh ! Mon doux maître, contentez-vous de m'avoir assommé comme vous voyez, et accordons - nous ensemble, si c'est votre bon plaisir. Le ciel vous donne joie..... Il faut donc que j'aille trouver un avocat pour défendre mon bon droit. Voulez-vous, Monsieur, que j'éteigne la lumière ? J'ai déjà imaginé un moyen honnête qui réussira, si Dieu plaît, quand je serai hors de procès. J'en fîmes l'expérience il y a quelque temps, feu mon frère et moi ; mais je ne sais comment faire, car j'oubliai de le payer. Je ne lui parlerai que de mon maître, sans le nommer, et il croira que je sers toujours ce fermier avec qui je demeurais quand je te fiançai. Oui, Monsieur, oui. C'était mon frère. Ce ne fut pas moi. Je fus pourtant plus malade que mon frère ; enfin je viens vous prier de plaider pour moi, contre mon maître. Il ne demeure pas loin d'ici ; et je vous payerai bien. Vous saurez donc que mon bon maître me paye petitement mes gages, et que pour m'indédommager sans lui faire tort, je fais quelque petit négoce avec un boucher, homme de bien. Sauf votre grâce, j'empêche les moutons de mourir de la clavelée. Ne vous déplaise, je les tue quand ils ont envie de mourir. C'est ce que dit mon doux maître, à cause que l'autre nuit... quand j'eus enfermé le troupeau... il vit que je pris... un... un... Dirai-je tout ? L'autre jour donc, il vit que je pris un gros mouton qui se portait bien ; ma foi, sans y penser, ne sachant que faire... je lui mis tout doucement mon couteau auprès de la gorge, tant y a que je ne sais comme cela se fit, mais il en mourut d'abord. Mon maître était caché dans la bergerie ; il me dit que j'en avais fait autant de six-vingt moutons qui lui manquaient.... Or, vous savez que c'est un homme qui dit toujours la vérité ; il me battit comme vous voyez, et je vais me faire trépaner ; or, je vous prie, comme vous êtes mon avocat, de faire en sorte qu'il ait tort et que j'aie raison, afin qu'il ne m'en coûte rien. Prenons celle là, je vous prie. Ma foi, oui. Aussi ferai-je. Tant mieux. C'est ce que je demande. Prenons l'autre, s'il vous plaît. Il est vrai. J'ai bonne souvenance. Cela n'est pas bien difficile. Aussi serez-vous par cette âme. Servitu... Monsieur Patelin. Que les gens de bien ont de peine à vivre ! C'est mon bon maître. Bée... Bée... Bée..... Bée.... bée... Bée. Bée. Bée. Miséricorde ! Ma foi, non. Une tête de veau, Monsieur.