**** *creator_dancourt *book_dancourt_operadevillage *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_operadevillage *dist2_dancourt_prose_comedy *id_THIBAUT *date_1693 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_thibaut Il vient de m'envoyer prier de passer cheux lui, notre Bailli, et ce pourrait bian être pour ça. Oui, mon neveu Colin, ce grand Piarrot-là est bian assotté de notre fille Louison. Louison est une fille sage, neveu : et si je précipite de la marier, ce n'est pas que j'aie appréhension. Je n'ai point remarqué qu'ils la lorgnifiaient, moi, et je ne vois pas. Morgué que tu es défiant, Colin. Tu as peur de ton ombre. Est-ce que tu ne sais pas qu'ils attendont une recrue de filles, pour établir ce buriau de musique qu'ils allont avoir à trois lieues d'ici ? Paix, tais-toi, voilà le factotum. Je vous baisons les mains de bien bon cour, Monsieur Galoche. C'est un petit mièvre qui fait le fantasque, comme vous voyez. On nous le fait espérer, Monsieur Galoche : et vous ne serez pas fâché de voir cette petite sarimonie-là. Oh Dame, nos Opéra ne sont pas daignes des vôtres. À gens de villages, trompettes de bois, Monsieur Galoche, vous vous gobargerez de nous peut-être : mais qu'importe, aux champs, comme aux champs, je sommes à la campagne ; je chanterons, je danserons, avec votre parmission, da, Monsieur Galoche : je ferons tout ce que je pourrons. Enfin, n'an dit que notte Monsieur le Marquis aime la musique et la danse comme un enragé. Je le prétends bien comme ça. Depuis cinquante ans je sommes les Farmiers du Château, de père en fils : c'est à nous de faire les honneurs de la fête. Écoutez, Monsieur Galoche, je ne sais comme cela ira franchement ; et si vous voulez fourrer un tantinet votre nez, vous qui êtes du métier, ça n'en serait peut-être pas plus mal, non. Morgué, je n'en sais rian ; car quoique je soyons tous gens d'esprit, c'est pourtant un jeune gars de Paris qui a manigancé la chose. C'est le factotum d'un Colonel qui passa dernièrement ici, comme vous êtes le factotum de Monsieur de Bouvillon, vous ; et il attend une recrue d'hommes, justement tout comme vous attendez une recrue de filles. Il entend morgué la danse et la musique à merveilles. Ma foi, chacun y a mis du sian, il n'a baillé que le sujet, notre Magister a fait des vars, notre Carillonneur de la musique, notre Ménestrier des ballets, et moi j'y chante ; ça ne sera pas drôle ? Tout ce qui m'en déplaît, c'est que le Carilloneus dit sue les vars ne sont pas bons, le Magister dit que la musique ne vaut pas le diable, et le Ménestrier dit qu'ils avons raison : à ce compte-là, Monsieur Galoche, le jeu ne vaudrait pas la chandelle. Hé, pargué tenez, tenez, vela le factotum du Colonel. Notte Bailli m'attend, je vais voir ce qu'il me veut : de factotum à factotum il n'y a que la main, je vous laisse ensemble. Je vais faire un tour, j'ai une petite affaire ; en attendant que je revienne, contez à ce Monsieur, pour vous divartir, toues les belles choses que j'allons faire. Hé bien, qu'est-ce, Monsieur de la Flèche ? Qu'a-vous donc fait de ce Monsieur avec qui je vous ai embouché ? Hé, morgué, qu'aurait-il fait, dites ? Accoutez, le neveu Colin dit qu'il ne faut point trop s'affier à ces drôles-là. D'enlever ma fille ! Ce n'est que ça ! Par la morguoi je les en dépite. Je les en dépite, encore un coup, ma fille est mariée. Parguene autant vaut, puisqu'elle est promise. Je vians de donner ma parole au Bailli pour son petit fils Piarrot, qui est grand comme une parche. Tatigué que c'est un beau brin d'homme. Vela ma fille, ne lui parlez de rian. Je voulons que ce soit son prétendu qui ly dise les premières paroles. Hé bien, Louison, comment te va ? Queu rêve as-tu fait cette nuit, mon enfant ? Cela est admirable : queu prévoyance ! On a beau dire, il y a toujours morgué du vrai dans les songes. Lui dirai-je la chose ? La langue me démange. Non, palsanguenne, il faut la mordre, je sommes convenus du contraire. Rien, Louison, ce n'est qu'une bagatelle. Oh çà, Monsieur de la Flèche, comme vous entendez mieux ça qu'un autre, faites-ly un peu chanter ces petites drôleries. Alle est la parle du pays, voyez-vous, et je serai bien aise qu'alle fasse mieux que pas une. Ça est tout songé. Je prierons ce Monsieur Galoche de s'y trouver, ça sera des marveilles. J'y aurai l'oil ; mais, je vous prie, faites chanter Louison, pour voir comme ça fera, seulement. Hé bien, quoi, mon père ? Morgué, comment feras-tu donc devant les autres ? Il faut s'enhardir, mon enfant. Morgué, je vous en prie, Monsieur de la Flèche. Si alle allait faire la sotte devant Monsieur le Marquis, cela ne vaudrait pas le diable. Je n'y avais pas songé. Hé bian donc, je m'en vais faite rafle dans toutes les boutiques ; mais au moins, ayez soin de ma fille, je vous la baille en garde. Vela tout notre monde, ou peu s'en faut, qui venont sur mes talons. Allons, Monsieur de la Flèche, c'est à ce coup qu'il en faut découdre ; notte Monsieur le Marquis va arriver, j'avons déjà député le neveu Colin au-devant de ly, je voulons, morgué, drès qu'il sera venu, l'y aller faire la révérence en musique. Nos garçons et nos filles avons tretous mis leurs habits des Dimanches : çà essayons un peu nos petites drôleries tout comme si c'était tout de bon. Mais, à propos, morgué, qu'avez-vous fait de ma fille, Monsieur de la Flèche, m'est avis que je vous l'avais baillé en garde ? Ces filles avont toujours queuque chose à se dire ; c'est une sotte engeance, on est bienheureux d'en être défait. Oh ! C'est morgué bian dit : mais pourtant comment ferons-je ? Car j'avons affaire d'elles. Hé bian soit, je commencerons toujours, vela déjà les entrepreneux du divertissement. Oh, çà, Monsieur notre Magister, par où faut-il que je commencions, s'il vous plaît ? Morgué c'est ce qu'il me semble : mais tatigué, qu'est-ce que tout ça veut dire ? Est-ce que je suis un chien, moi, qui vous mets en besogne ? Moi, morgué, qu'ils en fassent à leur tête : je sis le maître, vela qui est bien ; mais qu'est-ce que ça fait ? Je ne sais pas par quel bout m'y prendre. Oh, point, point, vela à propos Monsieur Galoche à qui je vas donner cette commission-là, à moins que vous ne vouliez la prendre. Soyez le bian venu. J'avons besoin de vous, Monsieur Galoche, et vous m'avez promis de mettre un tantinet le nez dans nos affaires : morgué, taillez, rognez comme il vous plaira, je ne sommes pas difficiles ; je trouverons tout bian, faites seulement. Mais à propos, il faudrait que queuqu'un se boutît à la place de Monsieur le Marquis ; car c'est pour ly que la fête se fait. Hé bien : que l'assemblée accoute donc mieux qu'il n'accoutera ly même. Allons, enfant, baillez-nous du meilleur, et que les Ménestriers brimballiont un peu l'ouverture. Qu'est-ce que c'est que le Prologue ? M'est avis que je n'avons point de ça, Monsieur le Magister ? Non, palsangué, et qu'est-ce qu'un prologue ? Vela morgué bian des affaires que j'avons oubliées, Monsieur le Magister. Je vous le disais bian tantôt, Monsieur Galoche, Je n'y charchons point tant de façons, ablativo tout en un tas, j'avons tout mis ensemble. Allons donc, morgué cette ouverture. Que veut celle-ci, par exemple ? Qu'en dites-vous ? Oh, cela serait trop biau, Monsieur Galoche, vous en seriez jaloux, peut-être. Hé, morgué, il y en aura aussi, baillez-vous de l'air, vous n'étoufferai pas, Monsieur Galoche. Quelle danse ? Palsangoi je fons danser tous les États du Village. Notte Carilloneux danse pour la Justice, notte Ménestrier pour les Dîmes, Monsieur de la Flèche pour la Noblesse, le neveu Colin pour les Bourgeois, ly ; stanpandant ils sont quatre, ça ne fait-il pas le compte, Monsieur Galoche ? Oh ! Il faut que je chante auparavant, s'il vous plaît ; car c'est moi qui fais la harangue. Monseigneur, tout de même Que le Lait ne vaut pas tant que la crème, Tout de même, il nous est avis Que vous êtes la crème des Marquis. Tout le Village, tout le Village Venons vous rendre leur hommage ; Votre présence, Monseigneur, Nous boute à tous la joie au cour. Allons, à vous, Messieurs le jarret souple. Vela du plus fin, Monsieur Galoche ; qu'en dites-vous ? Oh palsanguenne ; allez, si cela ne vous accommode pas, on s'en gobarge. Vous envoyer ma fille ! Oh palsangoi, si vous attendez après cela, vous attendrez longtemps, Monsieur Galoche. Au diable, Monsieur Galoche, au diable. Çà, Claudine. Qu'est-ce qu'il y a ? Hé parle donc, neveu, qu'est-ce que tu veux dire ? Ma fille et ma nièce ? Explique-toi donc ? Que veut dire ceci ? Si je le voulons ? Ma hallebarde ? Hé, morgué, je n'ons pas encore répété. Ils venont trop tôt, qu'ils se donnions patience, j'allions voir comment ça ira. Allons Claudine, courage, et trémoussons-nous bien tretous d'importance. Je vivons sans inquiétude, Je prenons le temps comme il vient, Je ne sons coquettes, ni prudes, Mais, j'aimons bien quand l'amour nous tient. Je nous font une habitude D'être joyeux soir et matin ; Rire et chanter, c'est toute notre étude, Et si j'ons peu d'esprit ; du moins, j'ons bon instinct. Qui s'en lasse est un vilain, Je bois toujours à pleine tasse, Et je n'en répands jamais brin. La bonne chose que le vin ! Morgué, se peut-il qu'on s'en lasse ? Volontiers. Tope. Ça n'est peut-être pas trop biau, mais c'est à ce factotum de Monsieur Galoche qu'il faut s'en prendre. **** *creator_dancourt *book_dancourt_operadevillage *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_operadevillage *dist2_dancourt_prose_comedy *id_LOUISON *date_1693 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_louison Je ne m'en souviens pas tout à fait, mon père, je sais seulement que j'ai rêvé des choses qui m'ont fait beaucoup plaisir. Que dites-vous, mon père ? Mon père. Je ne saurais chanter devant vous, je suis toute honteuse. Hé bien, mon pauvre la Flèche, qu'as-tu à me dire ? Et quoi encore ? Il est arrivé ! Où est-ce qu'il est ? Qu'il m'emmène ! Je ne consentirai point à cela, je crains trop la médisance. Dès qu'une fille s'en va avec un homme, on en dit d'abord mille sottises. Oh dame, il y a de méchantes langues dans notre Village, voyez-vous. Je l'aime bien, mais. S'il m'enlevait, serait-ce pour m'épouser ? Et s'il m'épousait, serait-ce pour toujours, et ne se démarierait-il point. Voici ma cousine, laisse-nous. Laisse-nous, te dis-je, et reviens ici dans un moment, j'aurai quelque chose à te dire. Qu'est-ce qu'il y a ? Il y a bien là de quoi se réjouir, vraiment. J'ai quelque chose dans la tête, qui m'embarrasse, ma cousine. Puisque tu t'en doutes, je veux bien te le dire ; mais, n'en parle à personne, ma cousine. Ce jeune Comte qui passa il y a huit jours par ici. Oui. Lui-même. Justement. Qu'est-ce que la qualité fait, quand on aime bien ? Il est ici depuis une heure, et il veut m'emmener avec lui ; conseille-moi, que faut-il que je fasse ? J'aurais pourtant bien du penchant pour cela, ma cousine. Tant pis, c'est que tu ne m'aimes pas autant que je t'aime ; et si tu étais à ma place, ma cousine, je te conseillerais, tout au moins, d'aller lui parler au bout de la grande allée, où il m'attend. Hé bien, ce ne sera pas ma faute ; car, je n'irais, moi, que pour lui parler ; et s'il me faisait quelque violence, on n'est pas responsable de cela, ma cousine. Mon pauvre la Flèche, je suis bien embarrassée ! Non, non, je n'ai rien de caché pour elle, et je lui ai tout dit. Et pourquoi ? Viens avec moi, il ne nous enlèvera pas toutes deux ensemble. Il a raison, viens seulement. Il faut donc que nous demeurions, car nous en sommes. Au moins venez le plus tôt que vous pourrez, mon cousin. **** *creator_dancourt *book_dancourt_operadevillage *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_operadevillage *dist2_dancourt_prose_comedy *id_COLIN *date_1693 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_colin Palsangoi, mon oncle, il n'en faut pas faire à deux fois. Notre nouveau Seigneur arrive aujourd'hui ; Hé morgué, que la petite réjouissance que je l'y voulons bailler, serve aux fiançailles de ma cousine Louison, avec ce grand Nicodème de Piarrot. M'est avis que son père, notre Bailli, se porte un tantinet mieux que de coutume ; et si vous l'y marmuriez queuque chose de ce mariage, je crois, Dieu me pardonne, que ce serait une affaire bientôt bâtie. Morgué, mon oncle, à la bonne heure. Ne barguignez pas à vous en défaire. Ma cousine est diablement fringante, oui ; et quand les oisiaux sont drus une fois, tatigué ils sont bientôt dénichés, voyez-vous. Hé non, d'accord, il n'y a point d'appréhension à avoir : mais il est toujours bon de prendre garde. Il y a ici deux drôles qui n'y restont pas pour enfiler des parles : ils la lorgnons, et ils ne la lorgnons pas pour des preunes. Vous avez donc la barlue, mon oncle. Car je sais fort bian moi, que ce petit Monsieur Bouvillon qui fait tant le grand seigneur, avec son factotum, Monsieur Galoche, en voulont à queuque fille ; et comme ma cousine est la plus gentille du Bourg. Tenez, mon oncle, je me donne au diable, il ne faut point s'affier à ces gens-là. Mais aussi, que faisont-ils ici ? Au lieu d'aller où ils ont affaire, ils demeuront dans notre Village à manger bian de l'argent au cabaret. La peste m'étouffe, il y a là-dessous queuque manigance. Et c'est justement ça qui me chagrine, ils enrôleront peut-être la cousine, et ils l'emmèneront peut-être avec la recrue. Morgué, je ne l'y baise rien, moi, mon oncle ; son menton pointu et sa face ambicoin m'affligent ; serviteur. Oh ! Palsangoi, vous chantez-là bian à votre aise ; mais voici d'autres chansons, mon oncle. Tatigué, vous avez fait de belles affaires. N'étais-je pas assez bon pour aller tout seul au-devant de notte Monsieur le Marquis ? Pourquoi y envoyer ma soeur Martine et la cousine Louison. Hé, morgué oui, votre fille et votre nièce. Oh palsanguenne, allez, alles sont cause d'un biau grabuge. Patience. Je m'en allais tout bellement au-devant de notte Monsieur le Marquis sur notte grand jument qui est pleine : j'ai trouvé envars ici à l'autre bout de la grande allée un jeune Monsieur que je connais de visage, qui enfarmait Martine et Louison dans une petite charrette de cuir, comme dans un coffre. Je leur ai demandé où alles allions : au-devant de Monsieur le Marquis, m'ont-elles fait. C'est moi qui sis le dépité du Village, ç'ai-je fait ; je sommes les dépitées des filles, m'ont-elles fait. J'alliemes comme ça tout en disputant ensemble : mais ce Monsieur n'aime pas la compagnie ; car il m'a sanglé cinq ou six coups de fouet sur les épaules, et il m'a prié brusquement de me retirer. Je n'en ai voulu rian faire ; bref, tantia que pour le faite court, je sommes arrivés au détour, où j'avons trouvé nez à nez le carrosse de Monsieur le Marquis. Son premier laquais le cousin la Brie, est venu à mon secours avec ses camarades, le Monsieur a tiré l'épée, Monsieur le Marquis est descendu et moi, je les ai laissés tous là, qui se battont comme des enragés. Ne voulez-vous pas les venir séparer ? Attendez. Vela ma soeur Martine. **** *creator_dancourt *book_dancourt_operadevillage *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_operadevillage *dist2_dancourt_prose_comedy *id_MARTINE *date_1693 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_martine Ah, ma cousine, je t'apporte une bonne nouvelle ! Réjouis-toi, tu vas être mariée. Assurément, il y a de quoi se réjouir : que peut-on souhaiter de mieux à notre âge ! À qui en as-tu donc ? Te voilà bien rêveuse ? Ne serais-tu pas amoureuse de quelque Monsieur ? Hem ? Tu ne dis mot : j'ai deviné, n'est-ce pas ? Et qui est-ce encore ? Qui logeait chez nous quand tu y vins. Qui fut si ravi de te voir ? Et dont le valet de chambre est encore chez nous à attendre son équipage ? Ce Monsieur le Comte ne t'épousera point, ma cousine, il est de qualité. Garde-toi bien d'y consentir. Je ne te conseille pas de le faire. Il t'emmènerait. Voilà son valet de chambre. Garde-t-en bien, ma cousine. S'il va t'enlever ? Que fait-on. Ce sont de terribles gens que ces jeunes Officiers, il ne faut s'y fier que de la bonne sorte. Je ne veux point épouser un valet de chambre. Comment donc, le cousin de votre maître ? Hé bien ? Mais mon frère Colin est allé au-devant de Monsieur le Marquis, s'il nous trouve en chemin. Ne vous alarmez point, mon oncle, ce Monsieur qui enlevait ma cousine, ne l'enlevait que pour l'épouser : c'est un des meilleurs amis de notte Monsieur le Marquis, et son neveu, je pense. Ils viennent tous d'entrer au Château, où ils disent que vous alliez les trouver, pour leur donner ce petit divertissement que vous avez préparé. **** *creator_dancourt *book_dancourt_operadevillage *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_operadevillage *dist2_dancourt_prose_comedy *id_LAFLECHE *date_1693 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_lafleche Où allez-vous donc, Monsieur Thibaut ? Je connais cet homme-là, si je ne me trompe. Justement. Monsieur Ga. Loche. Palsambleu, qu'y faites-vous vous-même ? Un Prévôt d'opéra sur la route de Piémont ! Venez-vous voir une bataille, Monsieur Galoche ? Et vous ferez bien de n'en jamais voir. Quelque coup de mousquet ou dans les reins, ou dans les jambes, gâterait furieusement votre fortune : dans la tête encore, ce ne serait qu'une bagatelle, et vous n'y perdriez pas grand'chose. Hé vous êtes fait à la raillerie, il y a longtemps que vous l'entendez ; c'est ce qui vous a le plus fait connaître. J'attends l'équipage de mon maître. Il a pris les devants, le bagage vient derrière, et je suis par conséquent dans le milieu. Palsambleu, je vous trouve admirable. S'il y avait à soupçonner quelque chose ? Vous vous mêlez de plus d'un métier, Monsieur Galoche. Enfin Monsieur Bouvillon est ici, à ce que j'ai ouï dire ; c'est un chercheur d'aventures, et vous ne lui êtes pas inutile. Nous savons un peu vos allures, vous êtes bon prince, Monsieur Galoche, et je veux bien vous l'avouer, puisque aussi bien vous vous en doutez : c'est à la petite fille en question que nous en voulons. S'il vous arrive de l'approcher, ni de dire un mot du secret que je vous confie, je ne vous menace point, Dieu m'en garde, je sais tout le respect que mérite Monsieur Galoche : mais voilà un justaucorps que mon maître vous donna l'année passée, je suis encore en droit de le nettoyer, prenez-y garde. Bon, parce qu'il vous fait souper avec lui quelquefois, vous croyez qu'il est de vos amis ; cous connaissez bien peu les gens de qualité, vous les réjouissez, ils vous souffrent dans leurs débauches ; ils vous noieraient le lendemain, pour satisfaire leur moindre caprice. Ah, morbleu ! Oui, le crédit de Monsieur Bouvillon ! Dites-lui que mon maître aime la petite fille, il ne la regardera qu'avec respect, sur ma parole. Il sait ce qu'il en coûte pour se mal adresser, et chat échaudé, craint l'eau froide. Vous n'avez qu'à faire la moindre démarche, je devine où cela aboutira. Ce maroufle-là ne laisse pas de me chagriner, il est stylé à attraper des petites filles. Baste, mon maître vient d'arriver, toute la question est d'emmener la petite fille : mais pour le faire à moins de risque, il faut jeter sur nos rivaux les soupçons de l'enlèvement. Le neveu Colin est déjà prévenu contre eux, donnons au père la même défiance. Le voici de retour fort à propos. Ah vraiment, ce que j'en ai fait ? Si vous saviez ce qu'il a voulu faire de moi, vous seriez dans une belle colère. Il m'a voulu corrompre, et me mettre d'une partie qu'ils ont projetée. Il a bien raison. Ils ont dessein, Monsieur Bouvillon et lui, d'enlever votre fille, et il me sollicitait de leur prêter main forte. Prenez-y garde, vous dis-je. Votre fille est mariée ? Ne nous voilà pas mal, surcroît d'embarras ; le grand Pierrot. Je suis discret, ne vous mettez pas en peine ? Assurément. Oh, pour cela, je vous en réponds : songez seulement à la répétition que vous devez faire. Oui ; mais si vous m'en croyez, allez vous-même prendre un peu garde que la musique ne s'enivre : elle est sujette à cela ordinairement. Cela est fort bien. J'ai quelque chose à vous dire. J'ai à vous parler, vous dis-je. Laissez-moi la faire chanter en particulier, je l'enhardirai sur ma parole. Ne vous mettez pas en peine. Vous n'avez point encore acheté de petits rubans pour vos danseurs, comme je vous avais dit. Allez donc vite dévaliser tous vos petits Merciers ; c'est le bel air de la danse que les rubans : et tel que vous voyez Monsieur Galoche, il en dévalise tous les ans toutes les garde-robes de sa connaissance, aussi est-il bien aimé de tous les valets de chambre. Elle est en bonnes mains, je vous en réponds. J'ai bien des nouvelles à vous apprendre. Mon Maître est arrivé depuis une heure. Je n'ai pas voulu qu'il parût dans le Village. Je lui ai dit de demeurer au bout de a grande allée du Château, à côté du petit bois : voyez si vous voulez lui venir parler, et consentir qu'il vous emmène avec lui dans sa chaise de poste ? Cela est horrible ; mais cependant, si vous aimiez véritablement mon Maître. Quoi, mais ? Hé vraiment oui. Est-ce qu'on enlève pour autre chose ? Et quand il le voudrait, le pourrait-il ? C'est un garçon qui n'a ni père ni mère, et qui est en âge d'épouser vingt femmes. Mais quelle réponse faire à mon maître ? Si je ne la lui porte, il viendra la chercher lui-même. Hé bien, avez-vous pris vos décisions ? Est-ce la cousine qui vous gêne ? Je vais vous en défaire, vous n'avez qu'à dire. Et vous avez tout gâté. Mais enfin, viendrez-vous parler à mon Maître ? Hé bien, en cas qu'il vous enlève, je consens à vous épouser, moi. Qu'est-ce à dire un valet de chambre ? Vous épouserez le cousin de mon maître. Hé, vraiment oui, si Clitandre épouse votre cousine, vous deviendrez la cousine de Clitandre. Et si je vous épouse, ne serai-je pas aussi leur cousin, moi ? Il n'y a rien de plus clair, nous serons tous cousins et cousines. Il ne vous trouvera point, ne craignez rien, les Acteurs du divertissement vont venir répéter ici. On vous fera répéter en particulier, ne vous mettez pas en peine. Je crois que voici votre père, je vais l'amuser un moment, et j'irai tout aussitôt vous rejoindre. Je suis à vous dans un moment, ma cousine, allez vite. Parbleu ne me voilà pas mal en cousine et en femme ; ne nous hâtons pourtant pas pour le mariage, et allons doucement pour l'enlèvement. Ces sortes d'affaires sont un peu trop délicates pour nous autres ; et pendant qu'on fait le procès du maître, le valet de chambre est pendu par provision. Ne nous embarquons point mal à propos ; attendons sans faire semblant de rien, le dénouement de l'aventure. Ce sera fort bien fait, vous avez raison. Oui, je la faisais chanter comme vous m'en avez prié ; mais sa cousine Martine est venue qui l'a emmenée : elles sont allées quelque part ensemble, apparemment. Oh, assurément ! Et on ne peut trop récompenser ceux qui nous aident à nous en défaire même. Quelques chanteuses subalternes feront leurs rôles. Les chanteuses d'importance ne se trouvent pas aux répétitions, si régulièrement que les autres. Monsieur le Magister se porte bien. Tout votre Opéra est ivre, Monsieur Thibaut, je vous avais bien dit d'y prendre garde. Monsieur Thibaut a raison, Messieurs ; c'est lui au nom de qui tout se fait, et c'est à ses ordres que vous devez vous soumettre. Allons, voyez, Monsieur Thibaut, à mettre les choses par ordre : vous n'avez qu'à parler, vous êtes le maître. Tant pis, vraiment : s'il est ainsi, votre divertissement ira à tous les diables. Moi ? Non. Je vous ai donné le sujet, cela suffit. Je n'entends rien au reste. C'est votre métier, Monsieur Galoche. Hé bien : Monsieur le Marquis, ce sera l'assemblée. Et je vais cependant changer d'habit, moi, pour notre entrée. Nous approchons du dénouement. C'est justement l'affaire, tenons ferme. Comment cela aura-t-il fini ? Je n'ai point trop mal fait de demeurer. Ma foi, vivat, monsieur Thibaut. **** *creator_dancourt *book_dancourt_operadevillage *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_operadevillage *dist2_dancourt_prose_comedy *id_GALOCHE *date_1693 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_galoche Serviteur à Monsieur Thibaut, et à Monsieur Colin. Monsieur Colin me paraît de mauvaise humeur aujourd'hui. Hé bien, Monsieur Thibaut, c'est donc aujourd'hui que votre Monsieur le Marquis vient prendre possession de sa nouvelle Seigneurie ? Non vraiment. C'est une des raisons qui nous ont fait demeurer ici, Monsieur Bouvillon et moi, et nous nous promettons beaucoup d'une petite espèce de fête qu'on dit que vous lui préparez. Votre fille, l'aimable Louison, sera sans doute, une des Actrices du divertissement ? Assurément. Vous avez donc disposé toutes choses ? Qu'est-ce que votre divertissement ? Et qui est-il, ce jeune gars ? C'est donc lui qui a réglé toutes vos affaires ? Assurément. Voilà un visage qui ne m'est pas inconnu. C'est lui-même. Monsieur de la F. Flèche. Hé ! Que faites-vous en ce pays, Monsieur de la Flèche ? Il n'y a, ma foi, rien qui ne se pût faire, Je n'en ai jamais vu, premièrement. Monsieur de la Flèche est toujours railleur. Mais sérieusement que faites-vous ici ? Avouez-moi de bonne foi la chose, la petite fille de Monsieur Thibaut a bonne part au séjour que vous faites dans ce Village ? Votre maître y a passé, et je soupçonne. Vous m'offensez, Monsieur de la Flèche. Monsieur, Monsieur de la Flèche, il me fera raison de la manière. S'il ne me veut pas faire justice, Monsieur Bouvillon n'est pas sans crédit. Cela suffit, Monsieur de la Flèche, faites de votre côté tous vos efforts, sûr que nous n'épargnerons rien du nôtre. Volontiers. Mais Monsieur de la Flèche s'acquitterait bien mieux que moi. Voyons d'abord votre Prologue. Vous n'avez point de Prologue ? C'est l'essentiel d'un divertissement, qui suit immédiatement l'ouverture, et qui sert de base à plusieurs actes qui sont mêlés d'intermèdes, ou d'espèces de fêtes qui conviennent au sujet. Il faudrait là un chour qui répétât les quatre derniers vers, cela ferait des merveilles. Mais, il nous faut quelque entrée après ce récit. Hé bien, quelle danse avez-vous ? Voyons. Cela doit être fort joli, voyons. Assurément, voilà du plus fin, et nous avons intérêt qu'on ne fasse point de jolies choses si proche d'une Ville où nous avons dessein de nous établir. Je vais rendre compte à mon associé de ce que j'ai vu. Vous avez là encore une symphonie des plus complète ; et à moins que vous ne nous envoyiez votre petite fille Louison nous faire quelques civilités là-dessus, je ne prévois pas que nous laissions passer votre divertissement. Je vais donc avertir mon associé. **** *creator_dancourt *book_dancourt_operadevillage *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_operadevillage *dist2_dancourt_prose_comedy *id_LEMAGISTER *date_1693 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_lemagister Faut commencer par le commencement, Monsieur Thibaut, et nous finirons par la fin. Je réglerai cela, laissez-nous faire. **** *creator_dancourt *book_dancourt_operadevillage *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_operadevillage *dist2_dancourt_prose_comedy *id_LECARILLONNEUR *date_1693 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_lecarillonneur Vous réglerez ça ! De quel droit, s'il vous plaît ? C'est à moi de régler ; car j'ai fait la musique, moi, et la musique. Qu'il ne se mêle que de celui-là, personne n'aura rien à ly dire. **** *creator_dancourt *book_dancourt_operadevillage *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_operadevillage *dist2_dancourt_prose_comedy *id_LEMENESTRIER *date_1693 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_lemenestrier Monsieur le Carillonneur, je ne serai donc qu'un sot, moi qui ai fait la danse ? Est-ce que la danse est une carogne, à votre avis ? **** *creator_dancourt *book_dancourt_operadevillage *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_operadevillage *dist2_dancourt_prose_comedy *id_CLAUDINE *date_1693 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_claudine Tant que l'y aura des filles, l'y aura des garçons. Vive aussi les filles, vive aussi les garçons. Vive aussi les filles, vive les garçons. **** *creator_dancourt *book_dancourt_operadevillage *style_prose *genre_comedy *dist1_dancourt_prose_comedy_operadevillage *dist2_dancourt_prose_comedy *id_PIERROT *date_1693 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_pierrot La bonne chose que le vin ! Morgué, se peut-il qu'on s'en lasse ? Avec un verre à la main On a toujours bonne grâce. La bonne chose que le vin ! Morgué, se peut-il qu'on s'en lasse ? À la santé de Catin, Elle en deviendra plus grasse. Allons. Masse. Tant que l'y aura des vignes et des vignerons, L'y aura de la vandange et des biberons. Morgué, vive les vignes et les vignerons, Morgué, vive les vignes et les vignerons,