**** *creator_florian *book_florian_jumeauxdebergame *style_prose *genre_comedy *dist1_florian_prose_comedy_jumeauxdebergame *dist2_florian_prose_comedy *id_ARLEQUIN *date_1782 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_arlequin Comme il vous plaira; la rue est libre. Vous ne saurez rien ; car je vais rester ici à ne rien faire. Quoi ? Oui. Non. Un moment, mademoiselle Nérine : êtes-vous capable de m'écouter une minute de sang-froid ? Je le vois bien ; mais votre tranquillité me fait peur. Soyez juste, mademoiselle Nérine : vous savez bien que de ma vie je ne vous ai parlé d'amour d'après cela... Si vous m'écoutez toujours comme cela, jamais vous ne m'entendrez. Vous savez bien mademoiselle Nérine, qu'il y six mois que j'entrai au service de vos maîtres. En arrivant dans votre maison, je m'occupai de gagner l'amitié de tout le monde ; vous fûtes avec moi plus potie que personne, je fus plus honnête avec vous. Petit à petit votre politesse est devenue de l'amour ; ce n'est pas ma faute vous ne m'avez pas consulté ; car, si vous l'aviez fait, je vous aurais dit Mademoiselle Nérine, je ne vaux pas la peine d'être aimé de vous ; je suis retenu. Continuons à causer paisiblement. Oui, mademoiselle, j'en aime une autre ; je l'aimais avant de vous connaître : sans cela, peut-être auriez-vous eu la préférence. Vous voyez que je suis toujours poli ; devenez raisonnable, mademoiselle Nérine. Que diable ! Je ne vous ai jamais fait de mal, moi ; pourquoi m'aimez-vous ? Cette femme-là a une manière de s'attendrir à laquelle je ne peux pas m'accoutumer ; je tremble comme la feuille toutes les fois qu'elle me parle de tendresse. Ah ! Que Rosette est différente ! Quand je suis près d'elle, je ne tremble jamais de rien, que de ne pas lui plaire assez. Heureusement je dois l'épouser demain : hé bien, malgré notre mariage, je sens que j'aurai toujours cette frayeur-là. Mais la voici. Je suis comme toi, ma bonne amie. J'ai beau écouter l'horloge à toutes les minutes, elle ne sonne que toutes les heures et quand nous sommes ensemble cette drôlesse-là sonne les heures à toutes les minutes. Que tiens-tu là ? Voyons, montre vite ; je suis pressé. Pour qui cela ? Comment ! Oui, c'est toi. Tu es là. Tu es là. Tu es ici. Tu es partout. Je ne m'étonne plus si je te vois partout. Qu'il est joli ! C'est un peintre qui a fait cela, ma bonne amie ; j'en suis fâché : il est sûrement amoureux de toi, ce peintre-là ; car ii faut regarder quelqu'un pour le peindre. Oh ! C'est bien toi. Plus je l'embrasse, plus j'ai envie de t'embrasser... Mais non, je dois t'épouser demain ; je n'ai jamais volé personne, il ne faut pas commencer par moi. Non, il faut que je m'en aille, car mon maître m'attend pour que je lui rende ses clefs. Nous avons eu une querelle ensemble : il m'a refusé la permission de me marier ; je lui ai dit qu'il n'avait qu'à chercher un autre domestique. Il s'est emporté, et m'a mis à la porte sans vouloir me payer mes gages. Je n'y manquerai pas. Ce qui me fâche le plus de la colère de mon maître, c'est que je comptais lui donner à ma place mon frère jumeau qui est en Italie. Je lui ai écrit, dans cette intention, de venir tout de suite me joindre à Paris. Il arrivera un de ces matins et je ne saurai comment le placer. Oh ! Je suis bien sûr que mon frère te plaira ; il est charmant, toujours gai, toujours de honne humeur ; et puis nous nous ressemblons si parfaitement, qu'il est très difficile de nous distinguer. Tout bien réfléchi, je suis bien aise qu'il ne soit pas encore arrivé ; car tu aurais fort bien pu l'épouser à ma place sans t'en douter. À propos ; sûrement il m'attend : il faut que je m'en aille. Adieu, ma bonne amie. Tache de faire dépêcher ce peintre. Ma bonne amie, n'oubliez pas que c'est aujourd'hui la veille de demain. Oh ! Je m'en vais adieu. Ma bonne amie, vous ne savez pas, j'ai une peur terrible de mourir avant d'être à demain. Si je mourais, cela romprait-il notre mariage? Oh ! C'est trop : pourvu que je te voie me regretter, cela me suffit. Me voilà parti, adieu, ma chère Rosette. Adieu, monsieur mon ami. Grâce au ciel, me voilà libre, et je n'aurai plus à obéir qu'à ma chère Rosette. Ah ! Que c'est différent d'avoir un maître ou une maîtresse ! Cela ne devrait pas s'appeler de même. Frappons a la porte. C'est moi. Belle demande ! Le portrait. Comment, quel portrait ! Le tien. Y en a-t-il-deux dans le monde ? Je l'ai dans ma poche ! Et qui l'y y aurait mis. Tu me l'as donné ? À moi ? Écoutez, ma bonne amie, c'est sûrement moi qui ai tort ; car il est impossible que vous n'ayez pas raison : mais on ne s'entend jamais bien à cinq ou six toises l'un de l'autre ; faites-moi le plaisir de descendre, je vous en prie. Que veut-elle dire ? Je sais fort bien que je n'ai pas plus de mémoire qu'un lièvre ; mais je n'oublie jamais ce qu'on me donne. Je veux mon portrait : vous me l'avez promis ; il faut tenir sa parole. Allons, allons, mademoiselle Rosette, finissons cette plaisanterie ; je n'aime point du tout qu on badine sur ces choses-là. Quand on est amoureux tout de bon, ce n'est pas pour rire, mademoiselle. Non, sans doute, vous ne me l'avez pas donné ; vous m'avez dit de le venir reprendre avant la nuit, et je ne vous ai pas revue depuis ce moment. Après ? Comment pourrais-tu le croire ? Tu sais bien que j'en ai tremblé toute ma vie. Ma bonne amie... Il est possible que l'amour, le bonheur de vous épouser demain me troublent la cervelle : si cela est, vous devez avoir pitié du mal que vous m'avez fait. Redites-moi donc, par amitié, par complaisance, dans quel endroit, quand et comment vous avez eu tant de plaisir à me donner ce portrait. Moi, je frappais à votre porte ? Comment ! Vous avez mis de l'argent dans la boîte ? Ni fâché, ni bien aise ; cela ne fait rien à la ressemblance. Ensuite ? Et tout cela est vrai ? Et où l'ai-je mise cette boîte ? Oh ! Non, ma bonne amie : oh ! Mon Dieu, non. Je t'aime trop pour ne pas te croire plus que je ne me crois moi-même. C'est singulier, voilà tout. Si fait, si fait, ma bonne amie, je m'en ressouviens à présent, je m'en ressouviens à merveille. Je vous remercie de votre complaisance, et (il soupire) du portrait que vous m'avez donné je ne le perdrai pas, c'est bien sûr. Non sans doute ; et je vous réponds de ne pas me faire attendre. Il est clair que le diable se mêle de mes affaires, et que c'est lui qui m'a escamoté mon portrait. Or, comme il pourrait fort bien m'escamoter aussi Rosette, je m'en vais me coucher à sa porte, et attendre le bienheureux jour de demain. Je ne bouge pas d'ici. Je ne ferme pas l'oeil de toute la nuit : je m'en vais garder ma maitresse comme j'aurais dû garder son portrait, et nous verrons qui sera le plus fin du diable ou de l'amour. J'entends parler de Rosette. Que dit-il donc de mariage ? J'accorde aussi ma guitare, moi. Comment ! Elle lui parle ! Son portrait ! J'ai bien envie de frotter les oreilles à ce chanteur-là. Ah ! La perfide ! J'étoufferai, je crois s'il dit encore un couplet. Ce drôle-là me fera mourir de chagrin, mais je ne mourrai pas sans m'être vengé. Voici ma musique à moi. Je voudrais bien savoir comment elle pourra s'excuser de tout ce que je viens d'entendre. Oui, oui, je suis blessé, et cruellement blessé. La voilà donc cette Rosette dont j'étais si sûr la veille de son mariage, elle trahit son mari... Allez, je vous connais à présent, et je ne vous aime plus. Oh ! Je sais bien que j'en mourrai d'avoir prononcé ce mot-là, mais je vous le dirai cent fois pour mourir plus vite ; je ne vous aime plus, je ne vous aime plus, je ne vous aime plus. Ah ! Ce n'est qu'a ceux que l'on estime encore que l'on fait des reproches, et je n'ai rien à vous reprocher. Adieu. Vous parlerez tant qu'il vous plaira, rien ne peut vous justifier. Qui est-ce donc que j'entends ? Tâchons de nous éclaircir. Quoi ! C'est mon frère de Bergame. Mon cher ami, je suis fort aise de te revoir, quoique vous ne vous conduisiez pas en trop bon frère. Il l'a été cependant ; car vous lui avez donné votre portrait. Allons, mademoiselle Nérine ; il dépend de vous seule que nous soyons tous les quatre heureux. Mes amis, nous voilà tous contents ; aimons-nous bien, mais si vous m'en croyez, n'habitons pas dans la même maison il pourrait arriver des méprises de plus grande conséquence que celle d'aujourd'hui. Souviens-toi bien de l'imposture Qui pensa faire mon malheur : En amour la moindre piqûre Blesse profondément le coeur. Si jamais un amant fidèle, Brûlant d'un feu toujours nouveau, Te jure une ardeur éternelle, Prends-y garde, c'est mon jumeau. **** *creator_florian *book_florian_jumeauxdebergame *style_prose *genre_comedy *dist1_florian_prose_comedy_jumeauxdebergame *dist2_florian_prose_comedy *id_ARLEQUINCADET *date_1782 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_arlequincadet Toujours joyeux, toujours content, Je sais braver la misère ; Pour la rendre plus légère, Je la supporte en chantant. Souvent la vie est importune : J'ai mon fardeau, chacun le sien : Ma gaité, voilà ma fortune; Ma liberté, voilà mon bien. D'un an de peine et de chagrin Un court plaisir me dédommage ; Quand je suis au bout du voyage, Je ne songe plus au chemin. Du sort je crains peu l'inconstance ; Tantôt du mal, tantôt du bien ; Travail, repos, plaisir, souffrance ; Je ne refuse jamais rien. J'ai beau chanter, je ne peux pas oublier que je meurs de faim. Mais il faut que mon frère soit fou ; il m'écrit à Bergame de venir le joindre à Paris, et il oublie de me donner son adresse. J'ai déjà demandé à plus de cent personnes où demeure monsieur Arlequin, domestique ; ils me répondent tous par des éctats de rire. On aime beaucoup à rire dans ce pays-ci. Oh ! Je rirai aussi, moi, mais quand j'aurai diné. On a beau dire que l'on s'accoutume à tout, voilà plus de trois jours que j'ai faim, et je ne peux pas m'y accoutumer. Allons, du courage ; peut-être ferai-je fortune ici ; je montrerai l'italien, je sais jouer de la guitare, voilà de quoi se pousser dans le monde. D'ailleurs, j'ai ouï dire qu'en France on préfère toujours quelqu'un de médiocre, quand il est étranger, à un homme de mérite qui n'est que du pays ; je suis étranger; je ferai fortune. En attendant, je voudrais bien trouver mon frère. Il me vient une idée ; je vais frapper à toutes les portes que je verrai ; je finirai sûrement par trouver mon frère. Voyons, commençons par celle-ci. On m'avait bien dit que les demoiselles de Paris étaient fort prévenantes mais, par ma foi, je n'aurais jamais cru que ce fût à ce point-là. Elle est jolie mademoiselle Rosette ! Mais cette boite me semble bien lourde. Des louis d'or ! Elle est charmante, mademoiselle Rosette ! La fortune ne m'a pas fait attendre longtemps dans ce pays-ci. À peine débarqué, je trouve une jolie fille et de l'argent. Un, deux, trois, cinq. Plus j'y pense, plus je la trouve aimable ; dix, neuf, sept. Oh ! Mon coeur est pour jamais à mademoiselle Rosette. Oui, charmante Rosette, de toute mon âme je vous épouserai demain ; je vous aimerai, qui plus est ; vous avez des manières si séduisantes que jamais... Bon ! Tenez ! L'on sait déjà mon mariage. Oui, mademoiselle est-ce une raison pour me prendre mon bien ? Hé bien, elle emporte la boîte. Oh, eh, mademoiselle, oh, eh, rendez au moins les louis d'or. Elle ne m'écoute pas : courons après, et tâchons de rattraper mon argent. C'est un singulier pays que celui-ci ! On vous donne d'une main, et l'on vous reprend de l'autre. Je n'ai jamais pu rejoindre cette voleuse : elle ne sait pas sûrement le cruel embarras où elle me met. Que deviendrai-je ? Il fait nuit, et je n'ai pas le sou. Si mademoiselle Rosette n'a pitié de moi, il faudra coucher dans la rue. J'ai envie d'essayer une petite sérénade, cela engagera peut-être mademoiselle Rosette à m'ouvrir sa porte. En conscience, elle peut bien me donner à souper la veille de notre mariage. Voyons. Avec tout cela, cette voleuse m'a paru gentille ; sa colère m'aurait gagné le coenr, si elle ne m'avait pas pris mes louis d'or. Oh ! Rosette vaut mieux, elle donne au lieu de prendre. Allons, chantons-lui quelque joli couplet quand on veut plaire, et qu'on n'a pas beaucoup d'amour, il faut tâcher d'avoir un peu d'esprit. Daigne écouter l'amant fidèle et tendre Qui vient encor te parler de ses feux ; Lorsqu'il ne peut ni te voir ni t'entendre, En te chantant, il est moins malheureux. Oui, c'est moi. Oh ! Je ne te rendrai jamais celui que m'a fait ton portrait. À chaque instant je veux revoir ce gage Qui me promet d'éternelles amours; J'ai beau sentir dans mon coeur ton image, Mes yeux jaloux la désirent toujours. Que dis-tu ? Tu demandes encore un couplet ? Pourquoi veux-tu que ma bouche répète Le doux serment dont mon coeur est lié ? Regarde-toi, ma charmante Rosette, Et tu verras s'il peut être oublié. Me voici ; puis-je te parler ? Pourquoi cela, ma chère Rosette. Tu es trop bonne d'être en colère : ce qui m'est arrivé n'est rien : ils étaient cinq ou six contre moi ; sans cela je les aurais frottés d'importance. Je suis ici. C'est moi que tu entends. Oui, c'est moi. Le diable m'emporte si je sais un mot de ce que vous me voulez ! Au nom du ciel, mademoiselle Rosette, ne vous en allez pas ; et vous, esprit, diable, lutin invisible, ne me serrez pas si fort, car j'étrangle. Ah ! Mon cher frère, c'est toi ! Mademoiselle Nérine sait bien ce qu'il est devenu. Écoutez, mademoiselle, j'ignore si mon frère a des torts avec vous ; mais il est sûr que je ne suis ici que d'aujourd'hui. Comme j'arrivais, mademoiselle Rosette est venue très poliment me donner son portrait et de l'argent ; l'instant d'après, vous êtes venue m'arracher l'un et l'autre, et vous avez disparu comme un éclair, en me reprochant que j'étais insensible à votre amour, tandis que j'aurais donné tous les trésors du monde pour avoir le plaisir de vous voir un moment de plus. D'après ce qu'il vous dit, mademoiselle, il me semble que vous pourriez troquer ce portrait-là contre l'original du mien. Voyez mon étourderie ! Avec vous, j'ai commencé par la fin. D'ailleurs, vous connaissez mon frère ; c'est tout comme si vous me connaissiez : vous voyez que je lui ressemble trait pour trait. La seule différence qu'il y ait entre nous deux, c'est que je suis le cadet et si vous aviez la bonté de m'aimer, je me croirais l'aîné de la famille. He bien ? La foi que vous m'avez promise, Ne la dois-je qu'à votre erreur ? Trop souvent c'est une méprise, Lorsque l'on croit être au bonheur. Dissipez ma frayeur extrême En me promettant de nouveau Que vous m'aimerez pour moi-même, Et non pas comme son jumeau. **** *creator_florian *book_florian_jumeauxdebergame *style_prose *genre_comedy *dist1_florian_prose_comedy_jumeauxdebergame *dist2_florian_prose_comedy *id_ROSETTE *date_1782 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_rosette Bonjour, mon ami, je t'attendais avec impatience. Jamais je ne me suis tant ennuyée qu'aujourd'hui ; c'est sans doute parce que je dois t'épouser demain, et que la veille d'un beau jour est bien longue. J'espère que notre mariage ne réglera pas cette horloge. C'est pour toi ; car c'est moi. Mon ami, depuis longtemps je t'ai donné mon coeur ; aujourd'hui voilà mon portrait, et demain je serai ta femme. Rends-moi ce portrait, mon ami ; le peintre m'a demandé d'y retoucher encore ; c'est l'affaire d'un moment si tu veux venir avec moi, tu l'emporteras tout de suite. Sois tranquille, je suis riche, et demain ma fortune et mamain seront à toi. Va finir tes affaires, et reviens chercher ce portrait avant la nuit. Nous aurons soin de lui, ne t'en inquiète pas. Oh ! Que non, mon ami : celui qu'on aime n'a point de jumeau. Mais tu oublies que ton maître t'attend. Oui, oui ; adieu. Sois tranquille, et va-t'en. Si cela t'arrive, je te promets de mourir aussi. Es-tu content ? Mais veux-tu bien partir ? Comme il m'aime ! Comme je suis heureuse ! Allons vite faire achever ce portrait et puisqu'il perd à cause de moi tout ce que lui doit son maitre, je mettrai dans la boite tout l'argent dont je peux disposer. Le plaisir le plus vif de l'amour, c'est de donner à celui qu'on aime. Ne frappe pas si fort ; tiens, voilà mon portrait, il est achevé. Je n'ai pas le temps de causer avec toi ; la nuit vient, il faut que je rentre dans ma maison. Je t'attendrai demain à huit heures ; notre mariage sera pour neuf. Adieu, mon ami d'ici là, pense toujours à Rosette. Qui est là ? Que veux-tu ? Quel portrait ? Tu l'as dans ta poche. C'est toi ; je te l'ai donné, il n'y a pas un quart d'heure. Sans doute. À toi-même, l'as-tu déjà oublié ? Très volontiers; ce ne sera pas pour longtemps, car voilà la nuit. Hé bien ! Me voilà que me veux-tu ? Mais elle est acquittée ma parole ; et tu sais bien... Quoi sérieusement, tu veux me soutenir que je ne t'ai pas donné mon portrait ? Arlequin. Avez-vous envie du me fâcher ? Hé bien, mon ami, finissons : songe à ce que tu m'as dit si souvent, que jamais il n'y aurait de querelle dans notre ménage voudrais-tu manquer à ta promesse dès la veille ? Je ne l'ai pas mérité ; j'ai fait pour toi tout ce que j'ai pu faire / tu désirais mon portrait, je te l'ai donné avec autant de plaisir que tu m'en as marqué en le recevant. Tu l'as, garde le : n'en parlons plus, et je te souhaite le bonsoir. Hé bien ? Ici, il n'y a pas un quart d'henre : je revenais de chez le peintre ; je t'ai trouvé frappant à ma porte ; je t'ai... Sans doute. Je t'ai donné la boîte où était le portrait ; et comme tu m'avais dit que ton maître te refusait ce qu'il te doit, j'ai mis dans la boite le peu d'argent que je possédais. Oui, mon ami, en serais-tu fâché ? Ensuite ? Voilà tout. Comment, si cela est vrai ! Je l'ai laissée dans vos mains. Auriez-vous le projet de rompre avec moi en me niant tout ce que je viens de dire ? Quoi vous ne vous souvenez pas... En vérité, mon ami, je crois que ta tète est un peu troublée : mais cela ne peut me déplaire, et je souhaite de ne te voir jamais plus sage. Adieu mon ami, il fait nuit tout-à-fait je me retire. À demain ; tu ne l'oublieras pas, j'espère ? Est-ce toi, mon ami ? Je t'écoute avec un plaisir... Je ne dis rien, mon cher ami, j'écoute. Ô ciel ! Courons à son secours. Mon cher ami, où es-tu ? N'es-tu pas blessé ? Parle vite. Je te supplie de me répondre. Que peux-tu donc me reprocher ? Mais que parles-tu de perfidie ? Arlequin, mon cher Arlequin, écoute-moi. Je suis au désespoir. Mais où es-tu donc ? Est-ce toi ? Eh quoi ! Tu me trahissais. Quelle ressemblance mais mon coeur n'en est pas la dupe. Mon ami, devenez mon frère, L'amitié vaut bien les amours ; Et si votre soeur vous est chère, Je vous reconnaîtrai toujours. Je devais me laisser surprendre, L'amour n'a-t-il pas un bandeau ? Si mon coeur a pu se méprendre, Ce n'était que pour ton jumeau. **** *creator_florian *book_florian_jumeauxdebergame *style_prose *genre_comedy *dist1_florian_prose_comedy_jumeauxdebergame *dist2_florian_prose_comedy *id_NERINE *date_1782 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_nerine Je te suivrai partout. Je saurai ce que tu fais, et où tu vas. Mais, dis-moi, je t'en supplie. Tu es bien sûre que je t'aime. Et toi, m'aimes-tu? Et tu penses, perfide...? Oui, oui ; parle, parle je t'écoute ; je suis curieuse de savoir comment tu pourras t'excuser de cette indifférence, de cette froideur qui fait le malheur de ma vie ; comment tu pourras me persuader. Mais parle donc, je t'écoute tranquillement. Allons, explique-toi, justifie-toi ; parle-moi donc. Tu ne m'en as jamais parlé, scélérat ! Tu ne m'en as jamais parlé ? Te souvient-il des premiers temps que tu étais dans la maison ? Comme tu volais au-devant de ce qui pouvait me plaire ! Comme tu t'empressais de faire tout l'ouvrage que je devais partager ! Tu ne m'abordais jamais qu'avec cet air doux et tendre que tu prends si bien quand tu veux, monstre ; et tu n'appelles pas cela de l'amour ! Dis plutôt que j'ai cessé de te plaire ; dis-moi qu'une autre, plus heureuse, m'a enlevé ton coeur. Mais ne te flatte pas que l'on m'ôtera impunément mon bien : non traître ; non, perfide ; je me vengerai, sois-en sûr ; je punirai ton mépris et puisque l'amour le plus tendre n'a fait de toi qu'un ingrat, je mériterai ton indifférence en m'occupant de te haïr comme je m'occupais de t'aimer. Mais parle donc, défends-toi ; profite de ce moment de calme. Après, après, après. Comment ! Que veux-tu dire ? Et tu crois: Hé bien, puisque tu le veux, puisque tu le désires, tu peux compter sur la haine la plus implacable. Dès aujourd'hui, je te défends de me parler, de me regarder, de jamais te trouver dans les lieux où je serai. Perfide ! Je te prouverai que tu ne méritais pas une femme comme moi. Et ne t'imagine pas que tu pourras rire avec ta nouvelle maîtresse et te moquer de mes chagrins : non, non ; je saurai me venger. Je découvrirai ma rivale, je vous poursuivrai tous les deux, j'allumerai ta jalousie et la sienne, je vous brouillerai, je vous rendrai malheureux l'un par l'autre, je ferai de votre ménage un enfer ; et ton tourment sera la seule occupation et le seul plaisir de ma vie. Adieu. Enfin, je te connais, monstre ! Je connais ma rivale. C'est donc Rosette que tu me préfères ? C'est Rosette que tu épouses demain ? Ton bien, ton bien, scélérat !... Je ne sais qui me tient que je ne t'arrache les yeux. Perfide ton bien était le coeur de Nérine, qui t'adorait, qui n'aimait que toi, dont la félicité dépendait de toi seul ! Ingrat ! Tu te méprises, tu comptes pour rien mon amour, mes larmes, mon désespoir ! Rien ne m'arrête plus ; il est temps de venger mes injures. Il est temps d'étouffer le sentiment qui m'a retenue jusqu'ici. Tu te repentiras de m'avoir trahie, tu gémiras de m'avoir perdue ; je veux te voi à mes genoux me demander pardon, pleurer, mourir de douleur, et je n'en serai que plus inflexible. J'entends la voix de mon traître assurons-nous de sa perfidie. J'ai peine à contenir ma fureur. Oh! je te tiens; tu ne m échapperas pas. Tu croyais donc me tromper, scélérat ! Point de grâce, perfide ! Comment ! Ils sont deux ! Tant mieux. Vous m'avez appris qu'il faut se connaître avant de s'aimer. Hé bien, je vois qu'il faut d'abord lui rendre son portrait, et puis nous verrons s'il faudra vous donner le mien. Éloignez de vaines alarmes, L'hymen unira nos deux coeurs : D'un rival vous avez les charmes, Mais vous n'avez pas ses rigueurs. Pour fixer mon âme incertaine, L'amour me prête son flambeau ; À l'aimer je perdis ma peine, Vous ne serez pas son jumeau.