**** *creator_lafontaine *book_lafontaine_galatee *style_verse *genre_opera *dist1_lafontaine_verse_opera_galatee *dist2_lafontaine_verse_opera *id_GALATEE *date_(non *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_galatee Ce don ne se refuse guère. Je ne l'en croirais pas moins capable de plaire. Il pourrait être si charmant, Qu'on l'écouterait sans colère. Berger, je vous trouve sincère ; Vous pouviez autrement témoigner votre amour Je devais m'en douter ; vous deviez me le taire. Ne bougez, mortel ; c'est aux dieux Que l'on doit réserver le soin de la vengeance. Retirez-vous tous deux ; toi, Clymène, demeure. Acis, on vous pardonne ; allez, et dans ces lieux Ne revenez de plus d'une heure. Ils sont partis ; je ne crains plus leurs yeux. M'ont-ils point vu rougir ? Clymène, cette offense Méritait un courroux plus prompt et plus puissant Ah ! Qu'il est malaisé de cacher ce qu'on pense, Et plus encor ce que l'on sent ! Cruelle loi qui veux que notre gloire Soit de n'aimer jamais, ou n'aimer que des dieux, Est-il juste de te croire Plutôt que ses propres yeux ? Dès qu'un berger m'a su plaire, Il n'est plus berger pour moi ; Tu m'ordonnes de le taire ; Injuste et cruelle loi ! Hélas ! il n'est plus temps, et déjà malgré toi J'ai flatté ce berger dans l'ardeur qui le presse. J'aime la déité de ces rives fleuries : Hélas ! À quoi mes soins se sont-ils engagés ? J'ai beau lui tout offrir, et prés et bergeries ; Ainsi que mes soupirs mes dons sont négligés. Que vous êtes heureux, troupeaux ! Vous ne songez Qu'à satisfaire vos envies. Mais n'aperçois-je pas celle pour qui je meurs ? La voilà, l'inhumaine : autour d'elle Zéphire Soupire ; Son teint de lis et de roses l'attire. Jeune et folâtre dieu, va chercher d'autres fleurs ; Laisse en repos son sein d'albâtre ; En vain tu fais la cour à cet objet charmant Je dois seul en être idolâtre ; Il n'est pas fait pour un volage amant. Hélas ! que me sert-il de l'aimer constamment ? Tâchez de vous guérir ; vos poursuites sont vaines, Je vous donne un sincère avis. Notre amour ne sert pas toujours de récompense Et ce n'est pas toujours un ouvrage du temps. Ne pouvant vous aimer, qu'importe qui j'écoute ? Un berger qui me plaît peut passer pour un dieu. Je ne veux ce coeur, ni le reste. Une déesse ne craint rien. Moi, le bien d'un Cyclope ? Eh bien, je crois Acis moins beau que Polyphème : Cependant il me plaît, je l'aime, c'est assez. L'amour a ses raisons ; mais j'ai beau vous les dire. J'aimerai malgré vous. Ses menaces me font trembler. Acis n'osera plus me voir ni me parler. Ô dieux ! Il l'ose encor : le voici ; c'est lui-même. Malheureux, fuis Polyphème : Fuis vite ; il n'est pas loin ; s'il te voit... Mais, hélas ! Je parle aux vents ; Acis ne m'entend pas. Clymène, cours à lui. Que l'amour a d'alarmes ! Que de soucis rendent amers ses charmes ! Quel dieu jaloux, corrompant ce plaisir, Voulut qu'il fût mêlé de peines, Et de ses plus aimables chaînes Fit un sujet de crainte, ainsi que de désir ? Fuyez, Acis, fuyez ; je frémis quand je pense Au sort dont un tyran menace nos amours. Qui le prendra que celle qui vous aime ? Encor si je pouvais vous suivre chez les morts ! Mais vous irez sans moi trouver la Parque blême Elle rira de mes efforts. Berger, vous prodiguez mon bien Votre vie est à moi. Cherchez quelque retraite Qui de nos feux ne dise rien, Quelque grotte sourde et muette Galatée, Hymen, et l'Amour S'y rendront sur la fin du jour Par la route la plus secrète. Cependant je prierai le Sort Qu'il vous accorde l'ambroisie. Ne la méprisez plus si fort : Elle vous ôtera la crainte de la mort, Sans qu'il vous en coûte la vie. J'ai découvert à mon père nos feux Il y consent ; il veut ce que je veux. Le voilà qui sort de son onde. Peut-être à nos désirs a-t-il déjà pourvu, Et déjà du Sort obtenu Ce qu'il refuse à tout le monde. Mais que ne fait-on point pour les filles des dieux ? Cependant gardez-vous d'approcher ce rivage. Allez ; et vous, Timandre, arrachez-le à ces lieux Si vous m'aimez, s'il m'aime, arrêtez son courage. Je vous confie Acis, conservez-moi ce gage ; Je n'ai rien de plus précieux. Quoi ! Mon berger mourra ! Destin, pour toute grâce, Je te demande qu'il ne passe Qu'après mille soleils le fleuve sans retour. Je te demande, au moins, que dans le noir séjour Tu me permettes de le suivre. Ne me condamne point au supplice de vivre Après avoir perdu l'objet de mon amour. Allons. Puisqu'il n'espère Contre Pluton nulle faveur, Faisons qu'il cache son ardeur ; Empêchons-le au moins de paraître, Si l'Amour laisse entrer la peur Dans les coeurs dont il est le maître. **** *creator_lafontaine *book_lafontaine_galatee *style_verse *genre_opera *dist1_lafontaine_verse_opera_galatee *dist2_lafontaine_verse_opera *id_ACIS *date_(non *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_acis Soleil, hâte tes pas ; amène ma déesse. Ô qu'heureux sont les amants Qui te reprochent sans cesse La vitesse des moments ! J'entends la voix de l'amant de Clymène. Cher Timandre, à qui seul j'ai découvert ma peine, N'as-tu point rencontré celle dont les beautés Ont même sur Vénus la victoire emportée ? C'est Galatée elle-même Que je viens chercher en ces lieux. Tu t'es trompé, Timandre, et crois trop à tes yeux Quand on dit la beauté suprême, On dit la Nymphe... La voici, cette Nymphe ; elle vient, laissez-nous, Bergers : ce n'est qu'au seul Timandre Que mes secrets se font entendre. Déesse des appas, si quelqu'un des mortels Mettait son coeur au pied de vos autels, Que feriez-vous ? S'il était fait par un amant ? Si c'était un berger qui vous dît son tourment ? Déesse des appas, écoutez les soucis d'Acis Je vous aime ; et non pas comme les immortelles, Par crainte, par devoir, sans transports, sans désir, Sans plaisir ; Mais comme il faut aimer les belles ; Il faut auprès de la beauté Oublier la divinité. Et ne l'ayant pas fait, je dois perdre le jour. J'y cours, et je vous vais venger de cette offense, Indigne que je suis de mourir à vos yeux. Je suis mortel, il est vrai ; mais aussi Je puis par mon trépas faire honneur à vos charmes. Les dieux n'en usent pas ainsi : Leur ardeur est légère ; ils aiment sans alarmes ; Et vous méritez un amant Qui s'abandonne à son tourment. Est-il d'autre danger pour moi que votre absence ? Laissez là le soin de mes jours. Zéphyrs, portez aux dieux ces paroles charmantes. Citoyens de l'Olympe, avez-vous des amantes, En avez-vous qui d'un mot seulement Puissent de Jupiter faire ainsi la fortune ? Allez, votre ambroisie est chose trop commune ; Je ne la daignerais souhaiter un moment. Après cette gloire suprême, Si je ne meurs de plaisir et d'amour, Je mérite que Polyphème À son rival ôte le jour Aux yeux de sa maîtresse même. **** *creator_lafontaine *book_lafontaine_galatee *style_verse *genre_opera *dist1_lafontaine_verse_opera_galatee *dist2_lafontaine_verse_opera *id_NEREE *date_(non *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_neree Ma fille, votre amant doit perdre la lumière. Le Sort m'a répondu : " Vous me pressez en vain ; Si j'écoutais quelque prière, Je cesserais d'être Destin. Je viens d'abandonner la trame d'un monarque Aux ciseaux de la Parque. Afin de la fléchir, il offrait des trésors Mais l'or n'a point de cours au royaume des morts ; Caron passe à présent ce prince dans sa barque. Et vous me voulez obliger À rendre immortel un berger ! " Allons trouver Acis. **** *creator_lafontaine *book_lafontaine_galatee *style_verse *genre_opera *dist1_lafontaine_verse_opera_galatee *dist2_lafontaine_verse_opera *id_POLYPHEME *date_(non *sexe_masculin *age_sans-age *statut_exterieur *fonction_autres *role_polypheme Que vous êtes heureux, troupeaux ! vous ne songez Qu'à satisfaire vos envies. Si l'amour vous contraint d'oublier les prairies, Vos feux sont bientôt soulagés ; Et j'ai pour tout plaisir mes tristes rêveries Vain et cruel recours des amants affligés. Que vous êtes heureux, troupeaux ! vous ne songez Qu'à satisfaire vos envies. Venez-vous augmenter mes peines ? Cruelle, ai-je à souffrir quelque nouveau mépris ? Quoi ! C'est le fruit de ma souffrance ! C'est le fruit de mes soins si longs et si constants ! Vous écoutez les voeux d'un insolent, sans doute ; Un berger vous parlait tout à l'heure en ce lieu. Acis un dieu ! Je tiens ce dieu bien téméraire. Qu'il évite ma colère ! Polyphème est son prince ; et j'ai dans ces hameaux Cent bergers comme lui qui gardent mes troupeaux. Ils font de votre nom résonner ces coteaux. Si rien de moi vous pouvait plaire, Ma voix se mêlerait avec leurs chalumeaux. L'autre jour je surpris au nid une fauvette, Un rossignol, et deux autres oiseaux : Je les instruis pour vous ; ils suivent ma musette, Et chantent sans faillir déjà deux airs nouveaux. Peut-être aimez-vous mieux de cruels animaux Si ce don vous plaît davantage, J'apprivoise deux jeunes ours : Je n'en puis faire autant de votre humeur sauvage ; Mes dons vous irritent toujours. J'ai des forêts, j'ai des campagnes, Des parcs où vous et vos compagnes Pourrez chasser : tous ces biens sont à vous. Recevez-les, beauté céleste, Avec un autre don que je préfère à tous C'est mon coeur percé de vos coups. Ah ! cruelle ! c'est trop : gardez que le courroux Ne me porte à la fin à quelque violence. Qu'Acis craigne du moins, lui de qui l'insolence Ose me disputer ce qui fait tout mon bien. Un Cyclope possède Ce que l'Olympe a de plus beau. Il est vrai que Vénus vous cède ; Mais je vaux bien Vulcain ; je me suis vu dans l'eau. Je vaux peut-être mieux que votre Acis lui-même : Du moins par mes transports j'ai ses feux surpassés. L'amour est sans raison ; mais j'ai beau me le dire. J'aimerai malgré moi. Heureux ceux que ce dieu blesse des mêmes coups ! Heureux les coeurs unis sous un commun martyre ! Tous leurs tourments leur semblent doux. Ma présence vous irrite ; Je le vois bien, cruelle. Adieu. Qu'Acis évite Mon courroux : S'il approche jamais de vous, S'il vous parle, s'il vous regarde, S'il ose seulement prononcer votre nom Voyez cet abîme profond, C'est ce que ma fureur lui garde. **** *creator_lafontaine *book_lafontaine_galatee *style_verse *genre_opera *dist1_lafontaine_verse_opera_galatee *dist2_lafontaine_verse_opera *id_CLYMENE *date_(non *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_clymene Toujours les bergers Nous nomment cruelles, Et toujours leurs belles Les nomment légers. On leur est sévère ; On fait prudemment Cruelle bergère Craint volage amant. Vous craignez de parler, et vous êtes déesse ! Quand on est de ce rang, l'on doit encourager Son berger. Pour moi, je dis au mien sans cesse Qu'il m'a touché le coeur aussi bien que les yeux. Je n'en dirais pas tant au plus puissant des dieux. Le silence en amour est une erreur extrême Souffrez, mais déclarez vos maux ; Car qui les sait mieux que vous-même ? Que sert d'en parler aux Échos ? Il faut les dire à ce qu'on aime. **** *creator_lafontaine *book_lafontaine_galatee *style_verse *genre_opera *dist1_lafontaine_verse_opera_galatee *dist2_lafontaine_verse_opera *id_TIMANDRE *date_(non *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_timandre Brillantes fleurs, naissez, Herbe tendre, croissez Le long de ces rivages ; Venez, petits oiseaux, Accorder vos ramages Au doux bruit de leurs eaux. Clymène sur ces bords Vient chercher les trésors De la saison nouvelle ; Messagers du matin, Si vous voyez la belle, Chantez sur son chemin. Et vous, charmantes fleurs, Douces filles des pleurs De la naissante Aurore, Méritez que la main De celle que j'adore Vous moissonne en chemin. Mais j'aperçois Acis : il aime Galatée. Son ardeur pourrait bien être enfin écoutée. Il est beau, c'est assez ; et les filles des dieux Ne consultent que leurs yeux. Acis ! Je viens de la quitter ; elle aide Galatée À se parer des trésors de ces prés. On dit la bergère que j'aime. Nous en croirons les yeux de tout autre que vous. Le mien n'a point d'égal ; et cependant, Clymène, Qu'avez-vous fait encor pour soulager mes maux ? Que sert de dire à tous propos : " Je suis contente de sa peine " ? Payez-la donc, ingrate, insensible, inhumaine !