**** *creator_lamotte *book_lamotte_scanderberg *style_verse *genre_tragedie lyrique *dist1_lamotte_verse_tragedie lyrique_scanderberg *dist2_lamotte_verse_tragedie lyrique *id_MELPOMENE *date_1735 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_melpomene De l'Antiquité mémorable J'ai chanté les héros fameux : Un temps moins reculé m'offre un sujet heureux, Qui par vos sons touchants, peut devenir aimable Mais, quel bruit !... La Magie à nos yeux se présente. Non, je voudrais en vain répondre à votre attente Dans le projet que j'entreprends. Je veux moins effrayer, qu'intéresser les coeurs. Des noirs enchantements, des prestiges trompeurs, L'art terrible en ce jour ne m'est point nécessaire : La simple vérité, par ses attraits vainqueurs Peut surprendre, saisir, et plaire. Mais, dois-je m'en flatter, si l'amour ne m'éclaire : Que pouvons nous sans son secours ? Amour, c'est à toi seul que nous avons recours. Anime notre lyre ! Retraçons les premiers ans De ce héros célèbre dans l'Histoire, Qui fut depuis la terreur de Sultans : Il te consacra les moments Qu'un esclavage obscur dérobait à la gloire : Qu'importe que le sort ait trahi ses désirs ? Tu règnes par les pleurs, comme par les plaisirs. **** *creator_lamotte *book_lamotte_scanderberg *style_verse *genre_tragedie lyrique *dist1_lamotte_verse_tragedie lyrique_scanderberg *dist2_lamotte_verse_tragedie lyrique *id_POLIMNIE *date_1735 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_polimnie Vous réglez tous mes mouvements, Vous m'inspirez le tendre et le terrible. Je ne saurais être sensible, Qu'en imitant vos sentiments. Attendris nos accents. **** *creator_lamotte *book_lamotte_scanderberg *style_verse *genre_tragedie lyrique *dist1_lamotte_verse_tragedie lyrique_scanderberg *dist2_lamotte_verse_tragedie lyrique *id_LAMAGIE *date_1735 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_lamagie Muses, je viens encor prête à remplis vos voeux, Faire servir mon Art à l'éclat de vos jeux. Eh ! Sans moi, pouvez vous enfanter ces miracles, Qui dans vos lyriques spectacles, Enchantent le coeur et les sens ? J'obscurcis le soleil, je fais trembler le terre ; Je déchaîne les vents, je soulève les mers : J'emprunte du ciel le tonnerre Pour effrayer, pour punir l'Univers : J'évoque du fonds des Enfers Les ombres pâles et plaintives ; Pour leur faire quitter les ténébreuses rives, Je force les prisons, et je brise les fers. J'imite de l'Amour le séduisant langage ; De ce tyran des coeurs j'égale le pouvoir, Et je fais comme lui, succéder à l'espoir Les regrets, les pleurs, et la rage. **** *creator_lamotte *book_lamotte_scanderberg *style_verse *genre_tragedie lyrique *dist1_lamotte_verse_tragedie lyrique_scanderberg *dist2_lamotte_verse_tragedie lyrique *id_LAMOUR *date_1735 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_lamour Muses, je m'intéresse aux succès de vos jeux. Chanter les douceurs que j'inspire, C'est préparer les coeurs à ressentir mes feux ; C'est leur apprendre à devenir heureux, C'est se soumettre à mon empire. Troupe légère à mes ordres soumise, Vous qui suivez toujours mes pas ; Pour seconder notre entreprise, Faites briller tous vos appas. Heureux qui toujours amant Chérit un tendre esclavage ; S'il languit quelque moment, Quel plaisir l'en dédommage ! Jeunes coeurs, d'un feu constant Connaissez tout l'avantage ; Votre hommage Est le gage De bonheur qui vous attend ; Hâtez-en l'heureux instant : Que le prix vous encourage : L'Amour même vous en est garant. Heureux un coeur qui s'engage. Loin de vos coeurs Les tristes plaintes, Les vives craintes Et les langueurs : Que dans ces lieux Tout s'empresse, Chantez sans cesse Mes traits et mes feux : Suivez le Dieu qui vous inspire, Ne craignez point un doux martyre, Non, non, point de soupirs ; Sous mon empire, Les maux font plaisirs. **** *creator_lamotte *book_lamotte_scanderberg *style_verse *genre_tragedie lyrique *dist1_lamotte_verse_tragedie lyrique_scanderberg *dist2_lamotte_verse_tragedie lyrique *id_AMURAT *date_1735 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_amurat Voyez, charmante Servilie, Quels sont mes premiers soins en entrant dans ces lieux ; J'ai permis qu'un Héros a qui le sang vous lie, Affranchi de nos lois, y parût à vos yeux. J'élève la Princesse à la grandeur suprême ; Tu dois partager son bonheur : Tu dois être flatté d'apprendre d'elle-même Et son triomphe, et mon ardeur. Ma flamme a pris naissance au milieu des alarmes, Dans le sein de la paix elle croît chaque jour, Jamais à mes regards n'ont brillé tant de charmes, Et jamais dans un coeur n'a régné tant d'amour. Que me sert ce tribut que l'Europe et l'Asie Offrent sans cesse à mes plaisirs ; Des plus rares beautés cette troupe choisie, Dont l'orgueil se nourrit de ses moindres désirs, Ne mérite plus mes soupirs, Ni l'honneur de ma jalousie. Je ne veux plus aimer ni voir que Servilie. Mais un si tendre amour éclate-t-il en vain ? Serez-vous insensible à l'ardeur qui m'enflamme ? Ne devrai-je qu'à lui le don de votre main, Et ne puis-je espérer de régner dans votre âme ? Aimez, partagez les désirs D'un coeur fidèle. C'est pour une ardeur mutuelle Qu'amour garde tous ses plaisirs. Aimez, partagez les désirs, D'un coeur fidèle. Quoi ! Je pourrais devoir mon bonheur à l'amour ! Qu'au gré de vos désirs notre hymen se diffère, Tout déprendra de vous, c'est assez que j'espère. Conçois-tu le bonheur qu'on promet à mes feux ? Puisse l'Amour combler aussi tes voeux ! De tous les coeurs il exige l'hommage. Tout heureux que je suis en obtenant sa foi, Je le deviendrai davantage, Si tu peux l'être autant que moi. Venez, accourez tous, vous qui suivez ma loi. Unissez, unissez vos voix. Chantez mes feux, chantez la gloire de mes armes. L'Amour couronne mes exploits, Célébrez à jamais ses charmes. Venez dans mon Palais, adorable Princesse, Que de nouveaux honneurs signalent ma tendresse. Perfides, venez-vous dans ce sacré Palais Vous signaler par des forfaits ? Si vous bravez ma menace, Dans mon sang osez vous plonger. Frappez, consommez votre audace, Forcez le foudre à me venger. Vous frémissez d'un projet odieux. Un si prompt repentir naît de votre impuissance. Tout votre sang versé par mon ordre, à mes yeux, À peine suffirait pour laver votre offense. Rendez grâce à ma clémence ; Ne craignez plus une honteuse mort : Mais immolez-moi ma victime, Méritez votre grâce en servant ma fureur ; Par la mort du Vizir expiez votre crime. Ah ! C'est par toi que je respire, Je te dois la vie, et l'Empire. Avec toi désormais je veux le partager. Que tout fléchisse ici sous ta grandeur nouvelle, Je t'élève au rang du rebelle Dont ton bras vient de me venger. Ne crains plus rien pour elle. Je l'ai contrainte à fuir ce spectacle odieux, Et je te dois encor des jours si précieux. Triomphe, je veux que ta gloire Signale à jamais ce grand jour ; Et j'aime à dérober pour prix de ta victoire, Quelques moments, à mon amour. Voyez, belle Princesse, embellir ces rivages. Par mes soupirs, par mes hommages, Je veux compter tous mes moments. Vous dont le destin m'a fait maître, Paraissez sous les ornements Des peuples qui vous ont vu naître : J'assemble dans ma Cour mille peuples divers ; Connaissez quel Vainqueur vous a rendu les armes. En me soumettant à vos charmes, Je vous soumets tout l'Univers. Ah quelle perfidie ! Le Vizir ! Servilie... Quoi ?... Tous deux interdits, Et leurs regards timides... Vous vous aimez, perfides ! Votre secret échappe, et je vous ai surpris. Tremblez vous recevrez le prix Dune coupable intelligence, Et c'est à mes bienfaits trahis, Que j'égalerai ma vengeance. Qu'on le charge de fers, et que bientôt la mort... Ah ! Crains pour toi le même sort. Tu m'énerves encor en prenant sa défense. Sortez. Régnez, haine, fureur, Régnez, jalouse rage. Perçons, perçons le coeur D'un ingrat qui m'outrage. Périsse qui m'ose offenser, Quelque amitié qui le défende ! Quel sang doit coûter à verser Quand l'Amour jaloux le demande ? Régnez, haine, fureur, Régnez, jalouse rage. Perçons, perçons le choeur D'un ingrat qui m'outrage. Je partage les voeux que ce jour vous inspire, Rendez grâces au ciel, soutien de cet Empire ; Chaque instant marque ses bienfaits. Quand sur mes pas vous voliez à la Gloire, Il semblait guider mes projets ; Et si mon coeur soumis à de puissants attraits Vous a ravi l'éclat de la victoire, Vous en goûtez les fruits en recevant le Paix. Je vais pour l'affermir m'unir à la Princesse. Ses pleurs et ses attraits ont calmé ma fureur ; Doit-elle de nos lois redouter la rigueur ? À cet hymen l'Empire s'intéresse Et ce jour solennel en accroît la splendeur. Heureux ! Dans l'ardeur qui me presse, De pouvoir flatter ma tendresse De l'espoir de votre bonheur. Elle vient ; à l'envi marquez-lui votre zèle. Princesse, leurs transports annoncent mes plaisirs... Tout entier je me livre aux douceurs que j'espère, Vous daignez combler mes désirs, Et je borne mes voeux au bonheur de vous plaire. Rien ne troublera nos soupirs. Déjà pour prévenir mon courroux légitime, De ses propres fureurs, Roxane est la victime. Du Vizir qu'on brise les fers, Vous craignez pour ses jours, et ses jours sont chers. Du bonheur de ma flamme Faites retentir les Airs, Et que l'heureux objet qui règne dans mon âme Anime vos concerts. Des ordres du Prophète interprète fidèle, Qu'un autre soin partage votre zèle. Serrez, les doux lien Qui vont m'unir à Servilie. Témoin de ses serments, soyez garant des miens. Qu'entends-je ! Quelle audace ! Quoi ! Tu m'oses braver ! Tout tremble devant moi. Je ne puis écouter que l'ardeur qui me guide, Princesse, votre aveu décide Assurez votre gloire et ma félicité. Je saurai le calmer, si cet hymen l'offense. Venez, c'est trop de résistance. Vous m'auriez donc flatté d'une vaine espérance ? Le don de votre main suspendait seul les coups Que contre mon rival préparez ma vengeance. Eh bien, il périra ce trop heureux amant, Et vous ordonnez on supplice, Il vient. Tu frémis. Assure mon bonheur ; sa grâce est à ce prix. Je cède à la fureur dont mon âme est saisie, Qu'il meure. Venez donc et jurez... Vous balancez encore ? Cruelle Servilie. Arrête... Es-tu content barbare ! Je ne puis soutenir ce spectacle d'horreur. Loin de moi, va pleurer notre commun malheur, Que s'il se peut la gloire le répare. **** *creator_lamotte *book_lamotte_scanderberg *style_verse *genre_tragedie lyrique *dist1_lamotte_verse_tragedie lyrique_scanderberg *dist2_lamotte_verse_tragedie lyrique *id_ROXANE *date_1735 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_roxane Toi qui pour ce héros fit naître mon ardeur, Amour ! Daigne en ce jour daigne fléchir son coeur. Je vous cherche toujours, je cède à ma faiblesse, D'une vaine fierté je ne suis plus maîtresse, Je viens vous confier mes déplaisirs secrets : Mais jusqu'en ce moment, songez que ma tendresse N'a parlé que par mes bienfaits. Vos jours étaient proscrits et j'ai su les défendre ; De mon amant, pour vous, j'ai fléchi la rigueur ; Et mes soupirs et ma langueur, Si vous aviez voulu m'entendre, Vous ont trop dit le prix qu'en demandait mon coeur. Cessez de prendre pour faiblesse Le plaisir d'une tendre ardeur ; Le péril en ces lieux l'accompagne sans cesse, Et le rend digne d'un grand coeur. Je l'ai trahie, Ingrat, en te sauvant le jour ; Il allait par ta mort prévenir mon amour ; Il allait assurer le repos de mon âme. Que dis-je ; malheureuse, hélas ! Où m'emporte ma barbarie ? Non, Prince, je ne puis vouloir votre trépas, Ma pitié vous sauva la vie ; Dussiez-vous me haïr, je ne m'en repends pas. Ingrat, sois plus sensible et tremble moins pour moi. Que ton rival, instruit du transport qui me guide, Revienne ici venger sa foi ; Qu'il plonge dans mon sein perfide Le fer qu'il a levé sur toi ; Sous le glaive mortel tu me verrais contente, Si de mon coeur mourant, le tien était le prix : Non, cruel, ce n'est point la mort qui m'épouvante, Et je ne crains que tes mépris. Des beautés de ce lieu la troupe ici s'avance. Voyez nos jeux, tout ici vous dispense Des dures lois de cette Cour ; La faveur d'Amurat, mon pouvoir, son absence. Prince, puissent nos jeux vous rendre tout l'amour Que m'inspire votre présence ! Que cette grotte s'embellisse, Que l'onde captive y jaillisse, Qu'elle en forme les ornements ; Pour les rendre encor plus charmants Qu'à nos concerts l'Écho s'unisse. Faisons tout retentir du doux bruit de nos chants. Brillez, charmante Aurore. Riantes fleurs, empressez-vous d'éclore. Claires eaux, que votre murmure Rende encor nos concerts plus doux. Juste Ciel ! Que je crains ses transports jaloux ! Cherchons à prévenir un trop juste courroux. Tout est prêt, le Vizir seconde mon envie ; Tremble Amurat ; la mort va punir ton forfait. Non, que sensible à ma flamme trahie, Je regrette des voeux dont un autre est l'objet, Perfide comme toi, mon coeur te justifie ; Mais, quand tu me ravis ce rang et ce pouvoir Que ton amour destine à Servilie, Mon orgueil, qui s'irrite, arme mon désespoir. Connais-toi mieux, faible Roxane ! Si le Sultan périt, l'Amour seul le condamne ; Cédons à nos destins, immolons Amurat, Du Ciel, qui le permet, suivons l'Arrêt suprême. Heureuse ! Si je puis attendrir un ingrat, Quand j'ose tout tenter pour le venger lui-même. Fureur, Amour, Secondez mon impatience ; Fureur, Amour, Régnez dans mon coeur tour à tour. Qu'importe quels motifs animent ma vengeance, Si les traits qu'elles lance Servent mon espoir en ce jour. Fureur, Amour, Secondez mon impatience ; Fureur, Amour, Régnez dans mon coeur tour à tour. Frappez d'intelligence. Je vais vous délivrer d'un tyran furieux. Princes, je vais venger vos frères. De nos lois les dépositaires Ne sauraient approuver un hymen odieux ; Et déjà le Vizir arme les Janissaires. Ce même jour, Amurat expire dans ces lieux. Quand il implora mon appui, Et que pour sa grandeur j'employai ma puissance, Il me promit la récompense Qu'il va me donner aujourd'hui. C'est à vous que mon coeur en fait le sacrifice, Et c'est vous qui me condamnez ! Attendrai-je, qu'instruit des feux que dans mon âme L'Amour a fait naître pour vous, Il éteigne en mon sang une coupable flamme ? Que vous-même, à mes yeux, expiriez sous ses coups ! Je connais ses fureurs ; et son bras parricide Contre des jours si chers déjà me semble armé. Quelquefois il fait grâce à l'amante perfide, Mais jamais au rival aimé. Non, vous ne mourrez point ; qu'il soit notre victime. Meure avec le cruel, l'objet de ses amours ! Dans l'ardeur qui m'anime, Perdre tout l'Univers, pour conserver vos jours, Ne me paraîtrait pas un crime. Ah ! Si la grandeur peut me plaire, Je n'en veux que pour t'élever. Par le trépas qu'a juré ma vengeance, Je vais te préparer des destins éclatants. Allons dans tes États chercher des combattants, Arme-toi ; ta valeur de permet l'espérance De renverser le trône des Sultans. Quoi ! Prince, auriez-vous donc cessé de le haïr ? La frayeur d'une mort cruelle N'arrête point ici les grands projets : À force de la voir de près, Nous perdons notre horreur pour elle. Qu'il meurt le cruel ! Cette seule espérance Peut consoler mon coeur du refus de sa foi. Je saurai mourir après toi. Ah ! Quelle fureur vous entraîne ! Partagez en ce jour mon amour et ma haine. Je n'écoute en ce jour que l'amour et la haine. Je viens d'entendre Et tes serments et tes soupirs ; Tu feignais de braver les amoureux désirs Cruel ! Ton coeur n'est que trop tendre. Ingrat ! Je t'aime trop pour te la pardonner. Tu trahis donc mon espérance ? Hélas ! Je t'ai cru généreux ; Et j'attendais de ta reconnaissance Un destin plus heureux. Mais, ne crois pas éviter ma colère, Crains tout d'un coeur jaloux, Qu'un cruel mépris désespère Une frayeur si tendre est un nouvel outrage. Souffrez autant que moi. Ah ! Quel désespoir quel rage ! Non, il n'est rien qui me fléchisse. Ingrat ! Il n'a pu t'émouvoir ; Espères-tu qu'il m'attendrisse ? Vous périrez tous deux. Quelle rage ! Quel désespoir ! Sultan, connais l'objet dont ton coeur est charmé, Ce Prince est ton rival ; ce rival est aimé. **** *creator_lamotte *book_lamotte_scanderberg *style_verse *genre_tragedie lyrique *dist1_lamotte_verse_tragedie lyrique_scanderberg *dist2_lamotte_verse_tragedie lyrique *id_SCANDERBERG *date_1735 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_scanderberg Enfin, Osman, le jour qui commence à nous luire, Sera-t-il le dernier de ma captivité ? Ô nuit ! Hâte-toi donc de triompher du jour ! J'entends la gloire qui m'appelle ; Ah ! qu'elle a de brillants appas ! La victoire vole autour d'elle ; Je vois la renommée attachée à ses pas ; Pour mériter leur faveur immortelle, J'irai braver mille trépas. J'entends la gloire qui m'appelle ; Ah ! qu'elle a de brillants appas ! Ah ! Connais, cher Osman, le Prince d'Albanie. Je rougis d'un repos dont ma gloire est ternie ; En vain, par ses bienfaits réparant mes malheurs, Amurat attend-il que la reconnaissance Me fasse oublier ses fureurs : Mon trône renversé me demande vengeance ; L'Amour même en mon coeur ranime le courroux. À des yeux plus puissants mon âme est asservie : Cette illustre Princesse à qui le sang me lie, Dispose de mon coeur et doit armer mon bras. De l'heureux Amurat j'accompagnais les pas, Lorsque de la Princesse il attaqua le père ; Je la vis, je l'aimai, je sus même lui plaire : Aujourd'hui qu'Amurat désole ses États, Je cours la secourir ou chercher le trépas. Ah ! Je jouis déjà de ces heureux instants Dont le fidèle Osman vient de flatter ma flamme ; Qu'avec plaisir je les attends ! Le calme renaît dans mon âme. Que ce jour est charmant et que ces lieux sont beaux ! L'espoir qui m'a flatté les embellit encore. Le chant des amoureux Oiseaux, La fraîcheur des Zéphirs, les fleurs qu'ils font éclore, Le murmure flatteur de ces riantes eaux, Tout semble ici rendre hommage à l'Aurore. Que ce jour est charmant et que ces lieux sont beaux ! L'espoir qui m'a flatté les embellit encore. L'Amour sur nous doit-il obtenir la victoire ? De plus dignes objets demandent tous nos voeux ; Et mes malheurs et votre gloire Doivent nous garantir du pouvoir de ses feux. Du jaloux Amurat vous trahissez la flamme... Non, je ne hais que moi d'avoir trop su vous plaire. Pour prix du jour que je vous dois, Faut-il vous exposer à toute la colère... Le devoir m'avertit de quitter ce séjour. Ah ! Princesse ! Quel sera ton destin ? Que devient mon espoir ? Aux portes du sérail Amurat vient se rendre, Amurat en ce lieu m'ordonne de l'attendre ; Quel trouble affreux saisit mon coeur ! Fatal triomphe, odieuse Victoire, Chant importuns, d'allégresse et de gloire, Que vous me présagez d'horreur ! Qu'êtes-vous devenu, cher objet que j'adore ? Votre père gémit sous les lois du vainqueur ; Et pour comble de maux, j'ignore Si vous vivez, si vous m'aimez encore. Hélas ! Je veux en vain douter de mon malheur ! Fatal triomphe, odieuse Victoire, Chant importuns d'allégresse et de gloire, Que vous me présagez d'horreurs ! Que vois-je ! Quel objet ! Est-ce vous, ma Princesse ? Est-ce vous ma Princesse ? Vous gémissez ici sous une dure chaîne. Ô Ciel ! C'en est donc fait ; je vous perds à jamais. Nous n'en serons que plus à plaindre. Le cruel Amurat punira vos mépris. Le bonheur de vous plaire est trop cher à ce prix. J'ose encore espérer un destin plus heureux. Nous pouvons du Sultan prévenir la vengeance, Différez seulement un hymen odieux ; Et par l'appas trompeur d'une vaine espérance, Ménageons le moment d'échapper de ces lieux. Quel coeur à tant d'appas ne rendrait pas les armes ? Le Vizir sert votre vengeance ! Vous voulez qu'Amurat périsse ! Lui dont l'amour vous fit des jours si fortunés ! Ô Ciel ! Que dites-vous ? Ce ne sont point mes jours que vous voulez sauver ; Le choix d'une rivale arme votre colère. Non ! Plutôt d'Amurat j'entreprends la défense. Ma haine est généreuse, et ne sait point trahir. Il commande aux sujets dont je suis né le maître. J'ai vu dans son palais mes frères égorgés ; Mais s'il faut me venger en traître, Ils ne seront jamais vengé. Quittez, quittez vous-même un dessein si barbare ; Craignez que le Sultan jaloux, Instruit de vos projets, ne prévienne les coups Que votre haine lui prépare. Rien ne vous sauverait d'un trop juste courroux ; Les traits que vous lancez, retomberaient sur vous. Tremblez, du moins, si vous m'aimez ; En vain contre Amurat mille bras sont armés... C'est par moi qu'il faudra que leur fureur commence. Ah ! Quelle fureur vous entraîne ! N'écoutez en ce jour ni l'amour ni la haine. N'écoutez en ce jour ni l'amour ni la haine. Contre une trahison si noire C'est à moi d'opposer un secours généreux. Si Roxane obtient la victoire, Elle immole Amurat et l'objet de mes feux. Qu'importe que j'écoute ou l'Amour; ou la Gloire, C'est assez de savoir que je les sers tous les deux. Rebelle ! c'est à toi de trembler pour ta vie. Il a perdu le jour, vous voyez son vainqueur. Ma récompense est assez belle ; Vos jours ne sont plus en danger. Mais la Princesse ? Ô Ciel ! Cette nuit-même, Osman répond de notre fuite. Quand par les regards les plus doux D'un rival odieux je flatte l'espérance, Mon amour en secret s'offense, De les voir s'adresser à quelque autre que vous. Ô Ciel ! Ce coeur ne pouvait se donner, Il n'était plus en ma puissance Pardonnez à notre constance. Je me livre à votre courroux : Épuisez sur moi seul cette fureur extrême. Épargnez ce que j'aime. Laissez vous attendrir ? Ah ! Quel supplice ! Quel effroi ! Au nom de tout l'amour que vous m'avez fait voir... Au nom de tout l'amour que vous m'avez fait voir... Que je sois le seul qui périsse. Redoutez moins un impuissant courroux, Maître de son secret, je suspendrai ses coups ; Et je puis défier le courroux qui m'enflamme. Non, que plutôt mille fois je périsse. Si je vous perds, en périrai-je moins ? Que sur moi le tyran épuise se furie ; Vous plaindrez mon destin, il 'ne jouira pas : Vos mépris, ses remords, vengeront mon trépas. Vous allez trahir qui vous adore. Ô ciel ! Non, je ne puis survivre à son destin fatal. Assouvis-toi, cruel ! Du sang de ton rival. **** *creator_lamotte *book_lamotte_scanderberg *style_verse *genre_tragedie lyrique *dist1_lamotte_verse_tragedie lyrique_scanderberg *dist2_lamotte_verse_tragedie lyrique *id_SERVILIE *date_1735 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_servilie Où suis-je ! justes Cieux ! Ah ! Cher Prince, est-ce vous ? Par l'ordre d'Amurat on m'amène en ces lieux, Et c'est avec vous qu'on m'y laisse ! Ah ! Cher prince est-ce vous ? Non, le Sultan, touché de mes faibles attraits, Veut de ces lieux me rendre Souveraine, Et mon père, à ce prix, vient d'obtenir la Paix. Le croyez-vous, qu'on puisse me contraindre À vous manquer jamais de foi ? Non, je ne suivrai point une barbare loi : Si vous m'aimez, que puis-je craindre ? La mort même, la mort n'éteindra pas ma flamme. À ce prix, il m'est doux de régner dans votre âme. On va nous ravir pour toujours Le doux plaisir de nous le dire. Qu'il m'en coûtera cher ! Mais il faut me contraindre. Ménagez bien tous les instants ; Si j'aime assez pour vouloir feindre, Je sens que j'aime trop pour le pouvoir longtemps. L'intérêt de mon père a réglé mon destin. Vous ordonnez, Seigneur ; que pourrais-je opposer ? Mais, malgré cette ardeur que vous faites paraître, Dans un hymen si prompt je vois l'ordre d'un Maître Que l'orgueil de mon sang ne peut me déguiser. Soyez plus généreux, respectez ma naissance : Souffrez que ma reconnaissance Fasse enfin dans mon coeur naître un juste retour. Hélas ! Tout gêne ici ma haine et ma tendresse, Contre un Vainqueur cruel je n'ose murmurer ; Je dévore mes pleurs, et du trait qui me blesse À peine j'ose soupirer. Mes yeux même, mes yeux, craignent de rencontrer Ce que je voudrais voir sans cesse. C'est ici qu'Amurat, pour fléchir ma rigueur, Doit emprunter l'éclat d'une fête nouvelle ; Il va bientôt m'offrir la suprême grandeur, Ah ! Quelle contrainte mortelle. Que dis-je ! En recevant un tel excès d'honneur, Je me trouve presque infidèle. Mais ton daner m'impose une loi si cruelle, Cher Prince ! Ton salut dépend de son errreur. Je renferme au fond de mon âme Tout l'amour qui m'a su toucher, Et je sens augmenter ma flamme De mes efforts pour la cacher. Ah ! Venez dissiper le trouble qui m'agite : Le sort est-il toujours conjuré contre nous ? Daignez encor vous faire violence, Ménagez le sultan jaloux, Cachons lui notre intelligence, Qu'Amour exauce nos soupirs Qu'il rende vos alarmes vaines, Et qu'il comble tous nos désirs. Je ne puis dans nos tendres chaînes Être heureux que par vos plaisirs, Ni malheureux que par vos peines. Faites grâce à l'objet dont vos yeux sont charmés. Épargnez ce que vous aimez. Quoi ! Nos pleurs seront sans pouvoir ? Quel trouble affreux s'empare de mon âme ! Ah ! Que c'est un cruel tourment De trembler pour ce que l'on aime ! Un coeur est trop heureux de n'avoir, en aimant, Rien à craindre que pour lui-même. D'avoir sauvé vos jours, est-ce la récompense ? Quel temps pour un hymen ! Le Prophète irrité... N'attirez point sur vous le céleste courroux. Laissez en paix un coeur qui ne peut être à vous. Je croyais sur moi-même avoir plus de puissance. Juste Ciel ! Que t'ai-je fait, cruel, et par quelle injustice Veux-tu que de ta mort, mes yeux soient le témoins ? Arrêtez... Quel effroi ! Je promets... Ne me reproche rien, je fais ce que je dois. Je ne balance plus, Je meurs. Je te venge de mes rigueurs, À ses yeux je me justifie. Je perds pour toi l'amant pour qui je perds la vie. Hélas ! Il te fut cher, j'ai désuni vos coeurs : Contre votre repos j'armai la jalousie. Oubliez tous deux vos fureurs : Que ma mort vous réconcilie. **** *creator_lamotte *book_lamotte_scanderberg *style_verse *genre_tragedie lyrique *dist1_lamotte_verse_tragedie lyrique_scanderberg *dist2_lamotte_verse_tragedie lyrique *id_OSMAN *date_1735 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_osman Princes, à vos desseins tout conspire ; J'ai su hâter l'instant de votre liberté. Ce peuple, que l'erreur enchaîne, Croit qu'aujourd'hui ses lois descendirent des Cieux. Les fêtes que ce jour ramène, Le tumulte et la pompe occupent tous les yeux : Cette nuit même ici venez vous rendre, Maître de ces Jardins, puis tout entreprendre ; Vous pourrez fuir de ce séjour. Vous pouviez borner votre gloire A voir ici l'Amour combler tous vos désirs ; Mais votre coeur dédaigne une douce victoire, Qui ne coûte que des soupirs. L'Amour ! Eh ! Quel objet a su toucher votre âme ? Pourriez-vous partager le flamme Que Roxane ressent pour vous ? Quoi ! La Princesse de Servie ? Jusqu'à la nuit vous devez encor feindre Je vous réponds de tout, songez à vous contraindre. Quittez, quittez ces jeux, mille chants d'allégresse Retentissent dans ce séjour, Et du Sultan vainqueur annoncent le retour. Déjà, pour lui marquer son zèle, Le peuple loin des murs l'est allé recevoir. Je vous laisse, et je vole où mon devoir m'appelle. **** *creator_lamotte *book_lamotte_scanderberg *style_verse *genre_tragedie lyrique *dist1_lamotte_verse_tragedie lyrique_scanderberg *dist2_lamotte_verse_tragedie lyrique *id_LEMUPHTI *date_1735 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_lemuphti Peuples ! Sultan ! Écoutez-moi. Rappelez-vous cette nui redoutable Où des cieux descendit la loi Qui rend des Ottomans le Trône inébranlable. Déjà l'obscurité cède au feu des éclaires, De Dieu e la Paix, de la Guerre Parle au peuple choisi pour régir l'Univers. Qu'annonce le bruit du tonnerre ? Veut-il dans son courroux, veut-il punir la Terre ? Peuples, ne craignez rien, goûtez un sort plus doux : Par un gage sacré me Ciel s'unit à vous. Qu'à ses bienfaits votre hommage réponde : Célébrez cette nuit, en prodiges féconde. Jusque-là ta fierté s'oublie ! Un Sultan par l'hymen ose engager la foi ! Ce serait te trahir, que de l'unir à toi. Préviens la foudre qui menace. L'Univers t'est soumis, mais tu es à la loi. **** *creator_lamotte *book_lamotte_scanderberg *style_verse *genre_tragedie lyrique *dist1_lamotte_verse_tragedie lyrique_scanderberg *dist2_lamotte_verse_tragedie lyrique *id_UNEGRECQUE *date_1735 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_unegrecque Après tant d'alarmes Succède un beau jour, Tout vous rend les armes, Cédez à l'Amour. Recevez l'Empire Des mains du vainqueur ; Le vainqueur soupire, Recevez son coeur ; Tout conspire À combler votre bonheur. **** *creator_lamotte *book_lamotte_scanderberg *style_verse *genre_tragedie lyrique *dist1_lamotte_verse_tragedie lyrique_scanderberg *dist2_lamotte_verse_tragedie lyrique *id_UNEASIATIQUE *date_1735 *sexe_feminin *age_mur *statut_maitre *fonction_mere *role_uneasiatique Ici la beauté, Esclave et sans armes, Dompte la fierté. Ici la beauté Venge par ses charmes, Sa captivité. Ici quelquefois Le pouvoir suprême Cède à d'autres lois. Ici quelquefois De nos maîtres même Nos yeux sont les Rois. **** *creator_lamotte *book_lamotte_scanderberg *style_verse *genre_tragedie lyrique *dist1_lamotte_verse_tragedie lyrique_scanderberg *dist2_lamotte_verse_tragedie lyrique *id_LEVIZIR *date_1735 *sexe_masculin *age_mur *statut_maitre *fonction_pere *role_levizir Immolons Amurat, immolons Servilie.